BAUMES ET PLANTES BALSAMIQUES

On appelle baumes un ensemble de substances, liquides ou concrètes,
sécrétées par certaines plantes et contenant à l'état de liberté de
l'acide benzoïque ou de l'acide cinnamique ou les deux. Ils ont en
général une odeur agréable. Les résines s'en distinguent en ce
qu'elles ne contiennent aucun acide. Les gommes-résines contiennent
des huiles volatiles, et sont de saveur forte et d'odeur acre.

1.

ncâth. Le premier des trois genres d'aromates que transportait
la caravane ismaélite (Ge 37:25); il se trouve aussi parmi les
produits renommés du pays que Jacob envoie à Joseph (Ge 43:11).
Divers auteurs, d'après l'étym. qui semble indiquer quelque chose
d'écrasé ou pulvérisé, supposent qu'il s'agit du styrax, ou baume
storax, obtenu par incision du styrax officinalis L.
(aliboufier), fam. des Sty-racacées: arbre des bords de la
Méditerranée orient., particulièrement de la Grèce, et dont l'odeur
est agréable et la saveur aromatique amère. Mais on y voit plus
souvent la gomme adragante (Bbl. Cent.) ou astragale (Cramp.), gomme
qui découle en rubans blanchâtres des tiges de plusieurs genres
d'astragalus, en particulier de l' a. tragachanta Desl, fam.
des Légumineuses: arbrisseaux et sous-arbriss. originaires de Perse,
Arménie et Asie Mineure, épineux ou inermes, à feuilles
imparipennées, à fleurs blanches en grappes axillaires.

2.

tsrî, tsori. Le deuxième genre d'aromates transportés par les
Ismaélites (Ge 37:25) est aussi envoyé par Jacob à
Joseph (Ge 43:11). Les Israélites en exportaient à Tyr (Eze
27:17). On suppose ordinairement qu'il s'agit de la résine de mastic
du pistacia lentiscus L., fam. des Anacardiacées. Le lentisque
est un petit arbre très rameux, à feuilles paripennées ayant de huit
à dix folioles, à fleurs petites, purpurines, en grappes axillaires.
De petites portions de mastic s'écoulent naturellement de l'arbre,
mais pour en obtenir davantage on pratique sur le tronc des incisions
longitudinales d'où la résine s'écoule en abondance, pour se figer
sur des dalles disposées autour du pied. Le mastic est en petits
grains jaunâtres ou verdâtres, ou en larmes d'un goût aromatique et
d'une odeur agréable. Il se transforme en une masse pâteuse par la
mastication. Les Orientaux le mâchent pour se purifier l'haleine et
fortifier les gencives. Il avait la réputation de calmer les douleurs
et cicatriser les plaies: le baume de Galaad, renommé pour les
blessures, est mentionné au figuré par Jérémie (Jer 8:22 46:11
51:8); il est encore cité proverbialement dans le langage moderne.

3.

lot (Ge 37:25 43:11). Cette plante, citée dans
les deux mêmes textes que le ncôth, est identifiée avec le
ladanum, résine visqueuse, d'odeur agréable, sécrétée par les poils
multicellulaires, glanduleux, qui revêtent les feuilles et les jeunes
pousses du cistus ladaniferus L., fam. des Cistacées. Les cistes
sont des arbrisseaux souvent visqueux, à fleurs ordinairement grandes
et belles, blanches, rosés, pourpres ou jaunes. On récolte le ladanum
en frottant les cistes pendant les jours les plus chauds avec des
lanières de cuir, qui se chargent de résine et qu'on racle ensuite
pour la faire tomber dans des vases où elle s'agglutine sous forme de
pains. Le ladanum était autrefois renommé pour ses propriétés
curatives.

4.

nâtâf. C'est le premier des trois produits nommés dans
Ex 30:34. La racine du mot hébreu indique une substance
recueillie en gouttes, mais l'identification en est douteuse. On a
pensé au styrax (voir ci-dessus, 1); mais il peut n'être pas trop
téméraire de conjecturer qu'il s'agit du baume de La Mecque, ou de
Judée, ou du Caire, produit du balsamodendron opobalsamum Kunth,
fam. des Burséracées (=commiphora opobalsamum des botanistes
récents).

5.

môr, grec smyrna. On est d'accord pour y voir la
myrrhe. Comme «myrrhe vierge» (Ex 30:28), c-à-d. fluide (soit
celle qui découle naturellement de l'arbuste, soit celle qui a subi
une préparation de choix), elle entrait dans la composition de
l'huile de l'onction sainte; parfum de luxe (Ps 45:8,Pr 7:17,Ca
3:6 5:1,5,Est 2:12), elle sert de terme de comparaison aux chants de
la Sulamite (Ca 1:13 4:14 5:13); elle embaume les montagnes où
on la récolte (Ca 4:6). Elle fait partie des trésors apportés
par les mages à Bethléhem (Mt 2:11); Nicodème en embaume le
corps de Jésus (Jn 19:39). La myrrhe est une gomme-résine qui
suinte naturellement des branches d'un arbrisseau de la fam. des
Burséracées, le balsamodendron myrrha ou commiphora
abyssinica,
plante de l'Arabie mérid. et de l'Abyssinie septentr.
Liquide épais, d'odeur forte et agréable, devenant brun foncé en se
desséchant; se trouve dans le commerce en larmes irrégulières et
arrondies ou en petites masses agglutinées mélangées d'impuretés. Le
vin mêlé de myrrhe qui fut offert au Crucifié (Mr 15:23) était
certainement le narcotique que les Romains présentaient toujours, par
humanité, aux suppliciés sur la croix: ils l'appelaient sopor ;
Mt 27:34, qui parle d'un mélange de fiel, désigne probablement
la même potion somnifère, mais en rappelant le terme de Ps
69:22. Jésus refusa l'adoucissement du breuvage soporifique, parce
qu'il voulait affronter la mort en pleine possession de soi et
«donner sa vie de lui-même» (Jn 10:18).

6.

bedôlakh. Substance mentionnée dans Ge 2:12 comme
se trouvant avec l'or et l'onyx au pays de Havila, et dans No
11:7 comme ressemblant à la manne. Il est difficile de préciser
s'il s'agit dans les deux cas d'une sorte de perle, ou d'une
gomme-résine odorante et jaunâtre, le bdellion, produite par le
balsamodendron mukul, fam. des Burséracées, du N.-O, de l'Inde et
du Béloutchistan, dont Dioscoride décrit trois sortes et à laquelle
Pline consacre tout un chapitre. Peut-être le premier de ces deux
textes parle-t-il de la perle, et le deuxième du bdellion. La Vers.
Syn. ne conserve ce dernier mot que dans No 11:7; dans Ge
2:12 elle le remplace par un équivalent: ambre.

Ch.-Ed. M.