THÉOLOGIEN

(grec théologos). Appellation absente des versions modernes de la
Bible. Elle se trouvait dans le titre de l' Apo: «Apocalypse de [s.]
Jean le théologien», tel que le conservaient la plupart des révisions
d'Ost. au cours du XIX e siècle. Ce titre provenait du Texte reçu
(voir Texte du N.T.), texte grec du N.T. établi par les humanistes du
XVI e siècle; ils l'avaient adopté d'après quelques manuscrits. On en
connaît en effet aujourd'hui une douzaine qui possèdent le titre de
l'Apoc, avec la désignation de son auteur comme «théologien»; mais
c'est une bien faible proportion sur les 230 manuscrits grecs de ce
livre, complets ou fragmentaires, aujourd'hui connus, et cette
douzaine de manuscrits appartiennent à une époque tardive, entre le
X° et le XV° siècle. C'est pourquoi nos versions modernes ne l'ont
pas conservé.

En quel sens les copistes du Moyen âge avaient-ils appelé
théologien l'auteur de l'Apocalypse? Le grec théologos (de Théos
=Dieu, et legeïn =parler) s'était appliqué d'abord
aux écrivains, poètes ou philosophes, qui traitaient de Dieu et des
choses divines, théogonies, cosmogonies (Aristote); mais ce terme
peut aussi désigner ceux qui parlent au nom de Dieu, inspirés ou
devins (Plutarque): c'est ainsi que Lucien, dans son Alexandre, à
propos du même personnage, emploie comme équivalents les termes de
théologien (ch. 19) et de prophète (ch. 22). Le Voyant apocalypticien
était bien un prophète (voir Apocalypse).

Un troisième sens, chez les auteurs ecclésiastiques, est celui
qui fait du théologos un tenant de la conception du Logos
(=Parole) qui est Théos (=Dieu); c'est en ce sens que le terme
fut appliqué à Grégoire de Nazianze. Il a pu l'être aussi pour la
même raison à Jean le Voyant parce qu'on l'identifiait avec l'apôtre
auteur du 4° évang, où apparaît le Logos (voir ce mot); mais en ce
cas il serait étrange que les manuscrits en question n'eussent pas
adopté ce titre pour l'évangile qui parle du Logos, l'ayant adopté
pour l'Apocalypse qui n'en parle pas.

Par ailleurs un assez grand nombre d'inscriptions d'Asie Mineure
font connaître des «théologiens», et même des «théologiennes», dans
les cultes païens de Pergame, Ephèse, Smyrne, Héraclée, etc.,
desservants, représentants et panégyristes des mystères divins,
quelquefois aussi chanteurs d'hymnes (comp, les cantiques de l' Apo:
Ap 5:9 14:3); ces analogies, originaires du milieu même où
l'Apocalypse est née, sont toutes en faveur du sens «porte-parole de
Dieu» appliqué à son auteur (cf. Deissmann, NES, p. 57s; VGT, p. 287).