TABERNACLE

Ce terme, qui primitivement signifie tente (lat tabernaculutn),
est le nom réservé au sanctuaire du désert.

Les passages du Pentateuque relatifs au tabernacle sont Ex 25 Ex
26 Ex 27 Ex 30 Ex 31:1-11 Ex 35:4,35 Ex 36 Ex 37 Ex 38 Ex 40,No
3:21,38 4:1,33 7:1-8:4, provenant tous de la législation
sacerdotale, cf en outre Ex 33:7-11, fragment d'une autre source
Il est appelé généralement tente d'assignation parce qu'il est le
lieu assigné à la rencontre de Dieu et de son peuple, ou bien tente
(quelquefois demeure) du Témoignage, parce qu'il
renferme le Témoignage, nom donné dans le Code sacerdotal aux deux
tables de la loi contenues dans l'arche de l'alliance, ou bien
demeure de l'Éternel, nom qui désigne tantôt l'ensemble du
sanctuaire (par ex Le 17:4,No 16:9, où nos traductions disent
«tabernacle» au lieu de «demeure»), tantôt la tente proprement
dite (Ex 26:1-6 35:11 etc.)

Le sanctuaire dans son ensemble comprenait:

une tente,

un parvis entourant la tente

D'après Ex 25 ss tout le détail et toutes les mesures de la
construction avaient été indiqués par l'Éternel à Moïse sur le Sinaï
d'après un modèle qu'il avait fait passer devant ses yeux. Le
tabernacle était donc exactement conforme à ce que Dieu voulait comme
lieu de rencontre entre lui et son peuple; tout était calculé pour en
faire une demeure digne de lui.

La tente (la Demeure au sens étroit) était en réalité plus qu'une
simple tente; c'était un édifice fait en partie de planches, un
temple portatif, comme on l'a appelé.

Dimensions à l'intérieur: 30 coudées de long, 10 de large, 10 de
haut, soit, si nous comptons, pour faciliter les calculs, la coudée à
un demi-mètre, quoiqu'elle fût en réalité un peu plus courte (45-49
cm;voir Poids et mesures) longueur 15 m, largeur et hauteur 5 m.

Trois côtés étaient entourés de planches recouvertes d'or à
l'intérieur et à l'extérieur latéralement, c'est-à-dire (puisque le
tabernacle était orienté vers l'E) du côte S et du côté N, on
comptait 20 planches de bois d'acacia avant toutes 10 coudées de haut
et une et demie (=75 cm.) de large, et le côté O en comprenait 6 de
mêmes dimensions, plus deux autres pour les angles N. et S; celles-ci
avaient en tout cas la même hauteur, mais les interprètes ne sont pas
d'accord sur la largeur, qui n'est pas expressément indiquée.

Il y a ici en effet une difficulté qui n'a pas encore été résolue
d'une façon pleinement satisfaisante Les 6 premières planches
indiquées faisant ensemble 9 coudées, il ne restait qu'une coudée à
fournir pour fermer l'espace entre les deux parois latérales; mais si
les planches des angles avaient également une coudée et demie, cela
faisait ensemble trois coudées, donc deux coudées de plus qu'il
n'était nécessaire pour fermer l'espace vide. Une partie de ces deux
coudées servait naturellement à couvrir le rebord de la dernière
planche latérale N. et S., mais il aurait fallu que toutes les
planches fussent épaisses chacune d'une coudée pour que celles de
l'angle ne fissent pas saillie sur les deux parois N. et S. Une
pareille épaisseur est inadmissible, car les planches auraient été
des poutres et non plus des planches. On l'a admis cependant, mais à
tort, car la tente n'aurait plus guère été transportable.

D'autres ont admis que les planches des angles n'avaient pas la
même largeur que les autres, tout juste la largeur voulue pour
recouvrir l'espace vide et l'épaisseur des planches latérales, qui
n'est indiquée nulle part. Mais on s'attendrait à ce que le texte
mentionnât cette différence de largeur, et il ne la mentionne pas. En
revanche il a une phrase énigmatique (Ex 26:24) qui dit, d'après
le texte samaritain, que les planches des angles doivent être doubles
dans le bas et doubles dans le haut jusqu'au premier anneau (le texte
massorétique dit: doubles dans le bas et pleines dans le
haut, ce qu'on n'arrive pas à se représenter d'une façon quelque peu
claire).

Si on admet le texte samaritain, le plus simple est de penser,
comme déjà l'historien Josèphe, que les planches de l'angle étaient
en forme d'équerre, qu'une partie de l'équerre achevait de couvrir
l'espace vide (pour chaque planche 1/2 coudée) puis couvrait
l'épaisseur de la planche latérale (1/4 de coudée?) et que la
deuxième partie de l'équerre (3/4 de coudée?) s'appliquait sur la
paroi latérale, ce qui assurait la liaison étroite entre les parois
latérales et la paroi du fond et donnait à l'édifice plus de
solidité. L'anneau dont il est question (Ex 26:24) serait le
premier anneau de la paroi latérale (voir plus loin).

Mais pour que les planches se tinssent solidement debout, il
fallait qu'elles fussent fixées au sol; elles étaient pourvues pour
cela de deux tenons, non pas parallèles comme disent certaines
traductions, mais rejoints l'un à l'autre (nous ne savons pas
comment) et rattachés à la planche (nous ne savons pas non plus
comment), s'ils ne faisaient pas corps avec elle. Ces tenons
entraient dans deux socles d'argent, assez grands pour être en bonne
partie enfoncés dans le sol, et assez lourds (ils pesaient chacun un
talent d'argent =43-44 kg.) pour ne pas sortir de leur place.

D'autre part, pour que les planches fussent sans déjoints et
eussent une surface unie et bien plane, elles étaient chacune
pourvues d'anneaux d'or, dans lesquels on passait cinq barres
transversales de bois d'acacia recouvert d'or. La barre du milieu
allait d'une extrémité de la paroi à l'autre: les quatre autres
(appelons-les des demi-barres) n'allaient que jusqu'au milieu de la
paroi en la dépassant un peu; il y avait donc trois rangées
d'anneaux, une continue au centre, les deux autres disposées de telle
façon que les demi-barres du bas et du haut ne se rencontraient pas
au milieu de la paroi, mais pouvaient se dépasser de quelques
centimètres pour assurer la solidité de l'ensemble. Le texte ne donne
pas la longueur des barres et ne dit pas si elles étaient posées à
l'intérieur ou à l'extérieur de la paroi; le plus probable est
qu'elles étaient à l'extérieur et que c'est jusqu'aux premiers
anneaux, en partant de l'Ouest, que devait aller la partie de la
planche de l'angle en forme d'équerre (voir ci-dessus).

Comme il convient à une tente, la couverture de la «Demeure»
était faite de tapis. Il y avait quatre tapis superposés.

Le premier tapis, celui qu'on voyait de l'intérieur de la tente,
était le plus précieux. Il se composait de dix bandes parallèles de
fin lin retors, de pourpre violette, de pourpre écarlate et de
cramoisi, le tout tissé avec art et formant des figures de chérubins,
symboles de la présence divine. Chaque bande avait 28 coudées de long
(=14 m.) et 4 coudées de large (=2 m.). Cinq bandes étaient cousues
ensemble, de sorte que la couverture avait deux parties; les deux
parties étaient pourvues, sur les côtés où elles devaient se
rencontrer, de 50 lacets (ganses) bleus (Vers. Syn.: noeuds; Bbl.
Cent.: brides), dans lesquels on passait des agrafes d'or pour les
réunir. Quand tout était réuni, le tapis était long de 40 coudées et
large de 28. Posé sur les parois de l'édifice en planches, à partir
du côté E. laissé ouvert, il n'atteignait nulle part le sol; c'est
évident pour les parois latérales, puisqu'elles avaient chacune 10
coudées de haut et que l'espace vide était également de 10 coudées:
soit ensemble 30 coudées (et non pas 28); pour le côté O. (fond du
tabernacle) il faut tenir compte de l'épaisseur des planches, de
sorte que les 40 coudées de longueur ne suffisaient pas pour
recouvrir les 30 coudées (à l'intérieur) de la Demeure et les 10
coudées de la paroi: ici aussi il y avait un espace entre le sol et
le bord du tapis. Évidemment on voulait éviter tout ce qui aurait pu
souiller cette précieuse couverture. Nous notons que la réunion des
deux parties du tapis au moyen d'agrafes se faisait à 20 coudées de
distance à partir de l'entrée de la tente.

Le second tapis était fait d'un tissu de poils de chèvre, par
analogie avec la couverture des tentes ordinaires. Il se composait de
11 bandes longues de 30 coudées et larges de 4: six bandes étaient
cousues ensemble et les cinq autres également, deux parties de
largeur inégale, réunies par 50 lacets (ganses), dans lesquels on
passait cette fois-ci des agrafes d'airain. On rempliait à l'Est de
deux coudées la première des six bandes de la première partie, qui
formait ainsi comme un rebord, à l'entrée de la tente, sans doute
pour que la couverture se déchirât moins facilement et offrît moins
de prise au vent. Il en résulte que le raccord entre les deux parties
se faisait à 22 coudées à partir de l'entrée, donc deux coudées plus
loin que le raccord des deux parties de la première couverture. Sur
les bords latéraux, le deuxième tapis dépassait le premier d'une
coudée et le protégeait ainsi complètement, sans aller jusqu'au sol,
si l'on tient compte de l'épaisseur des planches; sur le côté O. il
le dépassait de deux coudées et atteignait en tout cas le sol.

Le troisième tapis était fait de peaux de bélier teintes en
rouge.

Le quatrième était de peaux de dauphin (sens le plus probable)
teintes en bleu. Les dimensions de ces deux tapis ne sont pas
indiquées: le plus naturel est de penser qu'ils allaient jusqu'au sol
pour les trois côtés à couvrir. Ils devaient évidemment protéger la
tente contre les intempéries.

L'entrée de la tente se trouvait du côté E., qui n'était fermé ni
par des planches, ni par les couvertures énumérées ci-dessus.
Cependant il ne pouvait pas rester ouvert. On y pourvut par un grand
voile tissé de fils de fin lin retors, de pourpre violette, de
pourpre écarlate et de cramoisi, tissé avec art, mais sans chérubins;
le voile était fixé par des crochets et des tringles d'or à cinq
colonnes de bois d'acacia recouvertes d'or (Ex 26:37), reposant
sur cinq socles d'airain. D'après Ex 37:28, les chapiteaux des
colonnes seuls étaient recouverts d'or.

Un autre voile de même tissu, mais avec chérubins, fixé par des
crochets d'or à quatre colonnes de bois d'acacia recouvert d'or,
reposant sur quatre socles d'argent, séparait à l'intérieur le lieu
saint du lieu très saint. Ce voile était à 20 coudées de l'entrée, se
trouvait donc immédiatement au-dessous des agrafes qui unissaient les
deux parties de la première couverture. Le lieu saint avait ainsi 20
coudées de long, sur 10 de large et 10 de haut; le lieu très saint
était un cube de 10 coudées (5 m.) dans tous les sens, symbole de la
perfection.

Dans le lieu très saint était placée l'arche de l'alliance, faite
de bois d'acacia recouvert d'or à l'intérieur et à l'extérieur,
longue de 2 coudées 1/2, large et haute de 1 coudée 1/2. Elle avait,
en haut sans doute, une bordure d'or, et aux quatre coins, vers le
milieu ou le bas, quatre anneaux d'or, deux d'un côté, deux de
l'autre, dans lesquels on passait des barres de bois d'acacia
recouvertes d'or pour la transporter; ces barres ne devaient jamais
être enlevées. A l'intérieur étaient déposées (d'après Ex 25:15)
les deux tables du Témoignage (Décalogue). L'arche servait de support
au propitiatoire de même longueur et de même largeur, tout entier
d'or, qui en formait le couvercle. Aux extrémités du propitiatoire
étaient placés deux chérubins d'or battu, qui se faisaient face l'un
à l'autre, donc regardaient tous les deux vers le propitiatoire,
qu'ils recouvraient de leurs ailes étendues.

Dans le lieu saint était placée, du côté de la paroi N., la table
des pains de proposition, de bois d'acacia recouvert d'or, longue de
deux coudées, large d'une coudée, haute d'une coudée et demie, avec
une bordure (guirlande) d'or dans le haut et un châssis d'or de 4
doigts, sans doute à mi-hauteur; près du châssis se trouvait à chaque
pied un anneau d'or pour le transport de la table au moyen de deux
barres d'acacia recouvertes d'or; sur la table étaient différents
ustensiles d'or: des plats pour recevoir les pains de proposition,
offrande perpétuelle renouvelée chaque semaine, des godets contenant
de l'encens (Le 24:7), des cruches et des coupes pour les
libations de vin. Du côté de la paroi S.: le chandelier, tout entier
d'or battu, avec un pied, une tige centrale et six branches partant
de la tige, trois d'un côté, trois de l'autre; la tige et les
branches portaient des ornements divers et arrivaient à la même
hauteur; elles étaient surmontées de sept lampes d'or, dont les
mèches devaient être tournées vers le sanctuaire pour l'éclairer; le
chandelier était accompagné de mouchettes et de cendriers également
en or. Le tout pesait un talent d'or, soit 49,11 kg. (d'une valeur de
168.750 fr.); d'après les passages les plus récents de la législation
sacerdotale, l'autel des parfums se trouvait sur le devant du voile,
en face de l'arche située de l'autre côté, au centre du lieu très
saint; l'autel des parfums, haut de deux coudées (1 m.), large et
long d'une coudée, était en bois d'acacia recouvert d'or avec une
corne à chacun des quatre coins, attenante au bois, une guirlande
d'or vers le haut et quatre anneaux d'or pour le porter avec les
mêmes barres que celles de l'arche et de la table; il était vide au
milieu et on le remplissait évidemment de pierres et de terre pour
pouvoir y brûler des parfums.

Autour de la tente proprement dite était le parvis, en forme de
rectangle ayant 100 coudées (50 m.) de long et 50 coudées (25 m.) de
large. Il était entouré de toiles de fin lin retors rattachées, au
moyen de crochets et de tringles d'argent, à des piliers de bois avec
socles d'airain, espacés de 5 coudées; il y avait donc 20 piliers sur
les longs côtés et 10 sur le côté O.; à l'Est un espace de 20 coudées
était réservé pour l'entrée; les 15 coudées à droite et à gauche de
l'entrée étaient fermées par des toiles et des piliers (3 de chaque
côté) comme le reste du parvis. L'entrée elle-même était fermée par
un voile tissé, comme celui qui fermait le tabernacle, de fils de fin
lin retors, de pourpre violette, de pourpre écarlate et de cramoisi,
et assujetti à 4 piliers semblables aux autres. A noter que d'après
Ex 38:17,19 les chapiteaux des piliers des parvis étaient
recouverts d'argent, ce que ne dit pas Ex 27:9,18. La hauteur de
toute cette barrière de toile était de 5 coudées seulement, de sorte
qu'elle n'empêchait pas de voir de loin le sanctuaire lui-même. On a
contesté à tort le nombre des piliers. Il y en avait bien 60 en tout;
on les comptait en partant de l'angle S.-E.: 20 piliers pour la
rangée S.; à l'angle S.-O, était le premier pilier de la rangée O.
(10 piliers); à l'angle N.-O., le premier pilier de la rangée N. (20
piliers); à l'angle N.-E., le premier pilier de la rangée E.;
celle-ci se divisait en trois sections: la 1 re section (15 coudées)
allait du 1er pilier au pilier 4, qui était le 1 er pilier de la
porte, la 2 e section (20 coudées) allait du pilier 4 au pilier 8 qui
était le 1er pilier de la 3 e section: celle-ci (15 coudées) allait
du pilier 8 au 1er pilier de la rangée S. La porte (l'entrée) était
ainsi au milieu de la rangée E. et faisait face à l'entrée de la
«Demeure».

Dans le parvis, outre la tente d'assignation qui devait se
trouver vers l'Ouest à 50 coudées de l'entrée, de sorte que sur les
trois côtés S., O. et N. un même espace de 20 coudées la séparait de
la barrière du parvis, étaient encore placés:

L'autel des holocaustes, de bois d'acacia
recouvert d'airain, haut de trois coudées (1 m. 1/2), long et large
de 5 coudées (2 m. 1/2), avec des cornes aux quatre coins, puis une
grille ou treillis d'airain allant du bas jusqu'à mi-hauteur et, sur
les quatre angles, quatre anneaux d'airain, adaptés au haut du
treillis, pour le porter au moyen de deux barres d'acacia recouvertes
d'airain; nous ne connaissons pas exactement la forme du treillis,
sans doute destine à laisser écouler le sang répandu sur l'autel.
L'autel était creux (Ex 27:6 38:31) et devait être rempli de
pierres ou de terre pour qu'on pût y brûler les offrandes
présentées à l'Éternel. Il était accompagné de divers ustensiles
nécessaires au prêtre officiant et à ses aides: cendriers, pelles,
bassins, fourchettes et brasiers, le tout en airain. Comme il était
un peu haut, il devait sur le devant être pourvu d'un tremplin, qui
n'est mentionné nulle part. L'autel des holocaustes était placé dans
la partie E. du parvis (carré de 50 coudées =25 m. de côté), en face
de l'entrée de la Demeure, à une distance qui n'est pas spécifiée.

Une cuve d'airain avec sa base d'airain, entre
l'autel des holocaustes et l'entrée de la Demeure, mais probablement
pas en droite ligne; elle était remplie d'eau pour les ablutions des
prêtres avant leur entrée dans le lieu saint. La forme n'en est pas
indiquée; elle appartient, comme l'autel d'or, aux passages les plus
récents de la législation sacerdotale.

A tous les éléments qui figurent ci-dessus dans la description de
la Demeure et du parvis, il convient d'ajouter la mention de pieux
(ou chevilles) d'airain, pour la Demeure et pour le parvis, et de
cordes (Ex 27:19 38:29 35:18), dont l'usage n'est pas précisé.
Mais comme, malgré tout, l'ensemble de la construction inspire
quelques doutes sur sa solidité, on peut supposer que ces pieux
(chevilles) et ces cordes servaient à mieux fixer les parois et le
voile d'entrée du sanctuaire, puis la barrière de toile qui entourait
le parvis.

Dans les campements du désert, le tabernacle d'assignation
occupait le centre; à l'entour immédiat campaient les lévites, le
côté de l'Orient étant réservé aux prêtres; plus loin campaient sur
les quatre côtés les différentes tribus; voir No 2 et 3.

Pour la manière de transporter le tabernacle, voir No 4.

Signification symbolique du tabernacle.

La pensée centrale est évidente. Le tabernacle, dont l'établissement
figure en tête de la loi (Ex 25 SS), était la demeure visible de
l'Éternel au milieu de son peuple; il garantissait par sa présence la
protection et les bénédictions du Dieu de l'alliance; il était le
lieu des révélations et le lieu où il fallait adorer l'Éternel.
C'était le sanctuaire unique d'Israël.

La division en trois parties, distinctes les unes des autres:
parvis, lieu saint, lieu très saint, exprimait les différents degrés
de la sainteté de l'ensemble et des conditions imposées à ceux qui y
pénétraient; le parvis était ouvert aux membres du peuple, qui était
un peuple saint, consacré à l'Éternel (Ex 19:6); mais les
fidèles n'y entraient que pour amener les victimes ou apporter les
offrandes qui étaient brûlées sur l'autel des holocaustes; c'était le
lieu réservé aux fonctions des lévites, serviteurs des prêtres; le
lieu saint n'était accessible qu'aux prêtres, intermédiaires obligés
entre Dieu et le peuple, revêtus par le sacerdoce d'une sainteté
spéciale qui leur permettait d'entrer dans la première partie de la
tente sans être consumés par le feu; le lieu très saint était la
demeure même de l'Éternel, invisiblement présent dans toute la
grandeur de son être et sa suprême sainteté; il était absolument
fermé à tout contact profane; même les prêtres n'osaient pas y
pénétrer; seul le grand-prêtre y entrait un jour par année, le grand
jour des Expiations, et encore devait-il préalablement se munir d'un
brasier ardent et faire brûler de l'encens pour que la fumée le
dérobât en quelque sorte au regard de Dieu, ou que lui-même ne vît
pas les symboles sacrés de la présence divine. Le lieu très saint
était complètement obscur tandis que le lieu saint était éclairé par
le chandelier à sept branches.

Ces différents degrés de sainteté, qui rendaient sensible le
caractère redoutable de la présence directe de Dieu, commandaient la
richesse plus ou moins grande des matériaux employés pour la
construction des trois parties du sanctuaire. Dans le lieu très saint
tout était en or ou recouvert d'or, sauf les socles des colonnes qui
étaient en argent; le voile qui le séparait du lieu saint et le tapis
formant plafond étaient d'un travail particulièrement précieux; dans
le lieu saint il en était à peu près de même, mais déjà ici il y
avait une différence en moins: le voile qui fermait l'entrée de la
tente n'avait pas de chérubins, et les socles des colonnes qui le
soutenaient étaient d'airain; il appartenait déjà en partie au
parvis, où le métal employé était l'airain, sauf pour les crochets et
les tringles qui soutenaient les voiles du pourtour et les
revêtements des chapiteaux des piliers, pour lesquels on avait eu de
nouveau recours à l'argent; les voiles étaient de fin lin retors sans
autre couleur que le blanc, sauf pour le voile d'entrée qui était de
même tissu que le voile d'entrée de la tente.

Le chiffre 10, qui exprime une totalité, était à la base de
toutes les mesures; il était seul employé pour le lieu très saint et
en symbolisait la perfection; pour les autres parties du sanctuaire
(lieu saint et parvis), la moindre sainteté était rendue sensible par
des multiples de 10 (20, 100, 50, 60) ou des sous-multiples (5). Mais
le symbolisme des nombres (voir ce mot.) doit-il être poussé plus
loin?

Le chiffre sacré 7 apparaît seulement dans les sept lampes du
chandelier d'or (voir le chandelier de Za 4, spécialement v.
10b); le chiffre 3, seulement dans la division tripartite du
sanctuaire, qui est donnée d'autre part par les degrés de sainteté.
Le chiffre 4 indique le nombre des colonnes qui portent le voile du
lieu très saint et celui des piliers qui portent le voile de l'entrée
du parvis; le multiple 4x7 (=28), la largeur de la première
couverture du sanctuaire; mais faut-il attacher à ces chiffres une
valeur symbolique? C'est douteux, car ils étaient nécessités par
l'ensemble de la construction.

On a trouvé une signification symbolique dans les différentes
couleurs (voir ce mot) des tapis et des voiles; le blanc est
évidemment l'emblème de la pureté, (cf. Esa 1:18) mais pour les
autres couleurs l'A.T, ne nous donne lui-même aucune indication, pas
plus que les peuples voisins d'Israël, pas même la Babylonie où les
couleurs des différents étages des ziggourats (tours) ne sont pas
encore vraiment expliquées. Il n'y a donc pas lieu d'y voir autre
chose qu'un moyen de rendre plus belles et plus précieuses les
étoffes employées. Les autres détails de la construction ne se
prêtent pas davantage à une signification symbolique, qui serait
justifiée par les données positives de l'A.T. A ce propos nous
relevons que le bois d'acacia était le seul qui pouvait être employé
dans la péninsule de Sinaï, l'acacia y étant le seul grand arbre d'où
l'on pût tirer des planches et des colonnes de grandeur suffisante.

Cependant l'ingéniosité des interprètes s'est donné libre
carrière dans l'interprétation symbolique du sanctuaire et de ses
divers éléments.

Déjà l'historien Josèphe et le philosophe Philon (1er siècle de
notre ère) ont vu dans le tabernacle une image du monde:

le lieu très saint =le ciel;
le lieu saint =la terre;
le parvis =la mer;
les 4 espèces de fils employés pour les tapis =les 4 éléments;
la table avec les 12 pains de proposition =l'année avec ses douze mois;
le chandelier aux 7 lampes =les 7 planètes, etc.

Après avoir subsisté pendant tout le Moyen âge, avec des
variantes diverses, cette interprétation a été renouvelée de nos
jours, spécialement par Bahr (Symbolik des Mosahchen Kultus,
1837, 1874).

D'autres ont vu dans le tabernacle une représentation externe et
interne de l'être humain:

lieu très saint, 1° la tête, 2° l'esprit;
lieu saint, 1° le tronc, 2° l'âme;
parvis, 1° les membres, 2° le corps en opposition à l'âme;
les planches et les colonnes représenteraient les os du squelette;
les couvertures, la peau.

C'est décidément trop d'imagination. A plus forte raison quand on
veut retrouver dans le tabernacle une prophétie détaillée de la
nouvelle alliance. L'auteur de l'épître aux Hébreux a été beaucoup
plus sage, en se bornant à relever que le tabernacle était l'ombre
des choses à venir, une figure des temps nouveaux dans lesquels le
Christ ouvrirait aux hommes l'accès direct au trône de la grâce de
Dieu (Heb 9:1,14).

Historicité.

De nombreux interprètes ont insisté sur l'impossibilité de construire
dans le désert un tabernacle aussi riche; nous ne nous y arrêtons
pas, mais nous constatons que, comme bien des prescriptions de la loi
sacerdotale, le tabernacle d' Ex 25 est un mélange de théorie
et de réalité.

Théorie, la place donnée au tabernacle au milieu du camp du
désert, pour symboliser la présence de l'Eternel au milieu de son
peuple; la splendeur de l'intérieur de la tente, où ne sont employés
que les métaux précieux et des étoffes artistement travaillées, pour
en faire une demeure digne de Dieu; la disposition tripartite de
l'ensemble qui, comme celle du temple de Jérusalem, doit exprimer,
avec ses différents degrés de sainteté, l'impossibilité pour l'homme
pécheur de s'approcher directement de la divinité; la distinction
entre prêtres et lévites, qui n'a existé en réalité qu'après l'exil
(voir Prêtres et lévites).

Réalité est l'existence même d'un tabernacle au temps du désert.
Elle est garantie par le passage Ex 33:7,11, qui appartient à
une des anciennes sources du Pentateuque. Ex 33 ne donne aucune
description de la tente, mais il résulte du verset 6 qu'elle devait
être faite de matériaux plus précieux que les tentes ordinaires, et
du verset 11 qu'elle devait se diviser en deux parties, comme du
reste bon nombre de sanctuaires païens, une partie postérieure qui
était spécialement la Demeure de Dieu et où était certainement
déposée l'arche (quoique celle-ci ne soit pas mentionnée Ex 33),
et une partie antérieure, sorte de vestibule où se tenait
continuellement Josué, le jeune serviteur de Moise, chargé de la
garde du sanctuaire. L'idée de la sainteté divine qui interdisait les
contacts profanes était exprimée par le fait que le tabernacle était
placé hors du camp. Quand Moïse y entrait pour consulter l'Éternel,
la nuée descendait et s'arrêtait à l'entrée de la tente; le peuple
resté dans le camp se levait, et chacun se prosternait à l'entrée de
sa propre demeure. Ici aussi la tradition a sans doute quelque peu
coloré la réalité, mais il n'y a aucune raison valable de mettre en
doute l'existence de l'arche et de la tente qui l'abritait, pas plus
que de nier l'activité médiatrice et sacerdotale de Moïse. La tente
d'assignation est encore mentionnée dans No 12:4,10 et De
31:14 et suivant par la même source que Ex 33:7,11, mais nous
ne savons ce qu'elle est devenue au moment de l'entrée en Canaan.
Elle n'a cependant pas cessé d'exister, car 2Sa 7:6 déclare
positivement que, depuis le jour où il a fait sortir son peuple
d'Egypte, l'Eternel a toujours habité dans une tente, et c'est en
vertu de cette antique tradition que David, avant de penser à
construire un temple, avait élevé sur la colline de Sion une tente
pour abriter l'arche de l'Éternel transportée dans la nouvelle
capitale (2Sa 6).

Toutefois, si nous sommes assez bien informés des destinées de
l'arche d'abord à Guilgal, puis en tout cas à Silo, chez les
Philistins, à Beth-Sémès, à Kirjath-Jéarim et enfin à Jérusalem, nous
ne pouvons pas suivre de la même façon les destinées du tabernacle
pendant la période des Juges. Il se trouvait peut-être à Silo, mais à
Silo il y avait un temple (voir Sanctuaire), et on ne se représente
pas très bien comment tabernacle et temple pouvaient se concilier.
Plus tard les Chroniques le placent à Gabaon (2Ch 1:5-9, cf.
1Ch 16:39 21:29 et suivant), mais ce renseignement manque
dans le parallèle 1Ro 3:4, et il est assez probable que le
Chroniqueur cherche à expliquer par là l'importance du haut-lieu de
Gabaon; en tout cas il pense au tabernacle de Ex 25 ss. Après la
construction du temple, il n'est naturellement plus question du
tabernacle.

Il n'a repris vie que dans la théorie du Code sacerdotal, qui
transporte au temps du désert les conceptions et les institutions
postexiliques, et décrit le tabernacle à l'image du temple de
Jérusalem, devenu seul sanctuaire d'Israël comme l'était la tente
d'assignation à l'époque de Moïse.

--Voir Temple. L. A.