SILOÉ

(hébr., Chiloakh; LXX, Josèphe et N.T., Siloarn; Vulgate,
Siloé). Nom appliqué, dans Esa 8:6, probablement à un canal;
dans Jn 9:7-11 et déjà sans doute Ne 3:15, à un étang;
Lu 13:4 parle de la «tour qui se trouve à Siloé». L'étymologie
fait remonter ce mot à châlakh =envoyer; (cf. Jn 9:7) le
sens d'écoulement, conduite d'eau, est très plausible. Cet endroit se
trouve au Sud de Jérusalem, au confluent des trois vallées du Cédron
à l'Est, de Ben-Hinnom à l'Ouest, et du Tyropoeon qui traverse
Jérusalem du N. au Sud Au fond de la vallée du Cédron, à 350 m. de ce
confluent et à l'altitude de 636 m. jaillit la source du
Guihon (1Ro 13:3 et suivants, aujourd'hui source de la Vierge),
à laquelle, de tout temps, les occupants de la colline de Sion sont
descendus puiser, soit par un sentier, soit par un puits dont on a
retrouvé des traces. Pour amener les eaux de la source dans
l'enceinte de la ville, qui descendait jusqu'à la vallée, on creusa,
très tôt déjà, une canalisation qui conduisait le flot à l'issue de
la vallée du Tyropoeon, au pied S.-O, de la colline de Sion, dans
l'étang aménagé à l'intérieur des murs, celui sans doute que Ne
2:14 appelle l'étang du Roi, à proximité du jardin du Roi (2Ro
25:4). C'est cette canalisation qui reçut le nom de Siloé. Josèphe
donne ce nom tantôt à la source elle-même tantôt à tout le quartier.

Cette canalisation, entreprise à plusieurs endroits, à ciel
ouvert et en dehors des murs, pouvait tomber facilement aux mains de
l'assiégeant, au grand préjudice des habitants de la cité; et ce
pourrait être cette menace qui engagea Ézéchias (cf. 2Ro 20:20,2Ch
32:30, Sir 48:17) à amener les eaux de Guihon à Siloé au moyen
d'un canal souterrain qui existe encore et dont on a relevé très
exactement tout le cours. Il mesure 512 m. 50 (1.200 «coudées») de la
source à l'étang (distance en ligne droite: 324 m.); cette longueur
est due aux sinuosités très accentuées du tracé, qui a la forme d'un
S. Ce travail des plus intéressants fut entrepris aux deux extrémités
en même temps, et, malgré les déviations fréquentes, les ouvriers des
deux équipes se rencontrèrent dans la montagne, à 230 m. de la source
et 275 m. de l'étang. On relève dans le souterrain, qui a de 0,60 à
0,80 de large et de 0,46 à 3 m. de hauteur, de nombreux points
d'attaque du rocher, à droite et à gauche, surtout dans la région de
la rencontre des équipes; ce dernier point est marqué très nettement
par les coups de pic en sens inverses.

Le grand intérêt de cet événement réside dans l'inscription
(aujourd'hui à Constantinople) découverte en 1880 sur la paroi du
canal, à 5 ou 6 m. de l'orifice inférieur, et qui en décrit
sommairement le dernier épisode. Elle ne donne malheureusement ni nom
ni date: seul le rapprochement avec les indications des livres des
Rois et des Chroniques a fait attribuer le percement du tunnel à
Ézéchias, avec raison selon toute vraisemblance. L'inscription est
due probablement à l'entrepreneur qui a voulu fixer le souvenir de
cette rencontre si étonnante de ses ouvriers au sein de la terre. Les
caractères sont ceux de l'alphabet vieil hébreu, ressemblant beaucoup
à ceux de l'inscription de Mésa de Moab. Son importance ne saurait
être exagérée puisque c'est la seule écriture de quelque étendue que
nous possédions de la Jérusalem proprement israélite.

Quant à l'étang lui-même, le premier réservoir a été sans doute
le point le plus bas de la dépression (Birket el-Hamra actuel):
le mur qui fermait la vallée du Tyropoeon formait un barrage tout
naturel; c'était là, sans doute, l'étang «entre les deux
murs» (Esa 22:11), c'est-à-dire entre deux murailles parallèles
formant double clôture à la vallée du Tyropoeon, ou bien tout
simplement l'étang qui se trouve à l'endroit où se rapprochent le
plus le mur d'enceinte oriental de la colline occidentale et le mur
occidental de la colline de l'Est ou de Sion. Plus tard, après le
percement du canal, on aménagea plus en retrait de la muraille
extérieure un nouveau réservoir, qui est le bassin actuel de Siloé
(fig. 246); c'est celui dont parlent Jn 9:7,11 et Josèphe. La
«tour» de Siloé (Lu 13:4) faisait très probablement partie de la
vieille enceinte de Jérusalem, déjà en ruine au temps de Jésus, ce
qui explique l'accident auquel celui-ci fait allusion (voir Tour).

Le nom de Siloé se retrouve dans celui du village de Silouân,
dont les masures s'accrochent aux flancs de la montagne du
«Scandale», ou Baten el-Haouâ, qui fait face à la colline de Sion
(fig. 245), à l'est. E. G.