SEUIL

Le bas de la porte d'entrée des maisons et des temples, généralement
en pierre, est un endroit où l'on s'arrête souvent, au moment
d'entrer ou de sortir (Eze 9:3 10:4-18). Le prophète Ézéchiel
évoque dans ses visions: un prince prosterné sur le seuil du portique
du Temple (Eze 46:2); un fleuve dont la source jaillit sous ce
seuil en sortant du Temple vers la mer Morte (Eze 47:1). Dans
Ps 118:26, où les prêtres chantent la bienvenue aux visiteurs du
Temple, nos traductions rétablissent avec raison le terme
sous-entendu dans le texte hébreu: «Nous vous bénissons [du seuil] de
la maison de l'Éternel.»

La superstition du seuil est une vieille idée populaire,
particulièrement en Orient. Les esprits (ordinairement ceux des
ancêtres) sont censés demeurer le plus près possible des maisons,
préposés à leur garde sous le seuil même que piétinent les allées et
venues des entrants et des sortants. Ainsi s'expliquent plusieurs
pratiques magiques. C'est pour consacrer ce seuil et se concilier la
faveur des esprits que les Cananéens y enterraient des enfants
sacrifiés (voir Maison). La coutume conservée, mais sans doute
épurée, par le rituel de Ex 28:33 et suivant, prescrivant au
grand-prêtre de porter des clochettes sur son costume d'officiant,
pouvait avoir pour but, à l'origine, d'avertir les démons
bienfaisants autant que d'écarter les malfaisants, au moment d'entrer
dans un sanctuaire.

De là, enfin, la précaution d'enjamber le seuil ou de sauter
par-dessus au lieu d'y poser le pied: geste expliqué dans 1Sa
5:5 par un motif plus particulier, à propos des prêtres philistins
d'un sanctuaire de Dagon, mais dont l'origine remonte certainement
beaucoup plus haut. Il se peut aussi que la menace du prophète
Sophonie (1:9) porte sur cette superstition du seuil (il faudrait
alors suivre la trad. Sg.: «Je châtierai tous ceux qui sautent
par-dessus le seuil»); voir Bertholet. Hist. Civ. Isr., pp. 341,
383. La vénération du seuil se perpétue aujourd'hui dans les pays
musulmans, en Afrique du Nord comme en Orient: à l'entrée des
mosquées se trouve une petite barrière de bois haute d'une trentaine
de centimètres, en avant de laquelle les fidèles enlèvent leurs
babouches pour pénétrer pieds nus dans le sanctuaire et ne se
rechausser qu'après être ressortis au delà de la planche du seuil;
ils doivent donc positivement l'enjamber.