SÉAR-JASUB

(hébreu Cheâr Yâchoub)

Nom d'un jeune garçon, fils d'Ésaïe. Séar-Jasub (Esa 7:3) et
son frère nouveau-né Maher-Salal-Has-Baz devaient devenir par les
noms qui leur ont été donnés «des signes et des présages» (Esa
8:18) pour le roi Achaz, en même temps qu'un avertissement pour la
population de Jérusalem. En effet, Séar-Jasub signifie: un reste se
convertira;
nom symbolique où l'entourage d'Ésaïe devait apprendre
tout ensemble le châtiment mérité par l'incrédulité hypocrite du
roi (Esa 7:12) et la promesse de salut pour les éléments fidèles
du peuple (Esa 10:20 et suivants). Maher-Salal-Has-Baz signifie:
pille vite, hâte le butin. Ce nom fait prévoir que le roi
d'Assyrie, imprudemment appelé au secours par Achaz, pillera Damas et
rançonnera Samarie. Tout cela se produira dans un bref délai (Esa
7:3,9 8:1-4,17 10:20,23).

Avec Esa 7:17,25 la scène change brusquement. Dans le
discours précédent (Esa 7:4,9), Ésaïe avait dit: «Fiez-vous à
Jéhovah, et les coalisés que vous redoutez échoueront.» Maintenant,
Ésaïe dit: «Puisque vous méprisez Jéhovah et que vous recourez aux
Assyriens, voici ce qui vous attend: l'Assyrien, après avoir défait
les coalisés, envahira Juda et mettra à sac le royaume d'Achaz»
(Jéhovah fera venir sur toi...: Esa 7:17). Ce nouveau sujet ne
se rattache pas aux signes représentés par les fils d'Ésaïe mais à un
autre signe qui est une réplique à la désobéissance d'Achaz, le signe
d 'Emmanuel, le Fils venu de Dieu et dont l'action dominant tous
les temps, après que l'Assyrie aura été châtiée, amènera par la
connaissance de l'Éternel une ère universelle de justice et de paix.

On le voit, les deux sujets sont très différents et postulent
deux sourates distinctes. Malheureusement, dans les textes tels
qu'ils nous sont parvenus, la prédiction relative aux fils d'Ésaïe et
qui a trait à des événements limités et prochains, se trouve
confondue avec la prédiction relative au Fils de naissance
surnaturelle, Emmanuel, dont l'action est destinée à s'étendre sur
tous les siècles (Esa 7:10-14,17-25 8:6-10,19-22 9:1-6 10:20-23
Esa 11 Esa 12). La confusion qui règne dans ce morceau, ch. 7-12, où
ont été insérées, outre les signes dont nous venons de parler, une
sourate d'un genre très spécial proférant des menaces contre le
royaume d'Israël (Esa 9:7-10:4, oracle auquel il faut ajouter
Esa 5:24 et suivant) et une sourate annonçant le châtiment de
l'Assyrie (Esa 10:5,19-24,32, sourate postérieure au temps
d'Achaz puisqu'elle mentionne la chute de Samarie), ne permet pas de
donner ici une répartition rigoureuse des textes.

Remarquons seulement que, malgré leur dispersion, les passages
relatifs à la prédiction sur Emmanuel présentent entre eux une suite
parfaitement cohérente. Son mouvement général indique aux chap. 7 et
8 qu'Emmanuel viendra, au chap. 9 ce qu'il sera, au chap. 11 ce qu'il
fera, enfin au chap. 12 quelle sera la reconnaissance du peuple (voir
Prophète, X). Ce dernier chap., qui n'est pas du style d'Ésaïe mais
qui est tout à fait à sa place comme conclusion de l'oracle sur
Emmanuel, a été sans doute écrit par un disciple du prophète.
L'exemple que nous fournit Esa 7-12 suffit à montrer que si la tâche
de la critique biblique est délicate et doit être accomplie avec
prudence, elle n'en est pas moins urgente si l'on veut arriver à
connaître dans leur ordre historique comme dans leur logique les
discours qui résument l'activité des prophètes (voir, pour le
désordre où ces discours nous ont été transmis, l'article Jérémie).