RECUEILLEMENT

«Le recueillement, dit G. Frommel, est un acte austère qui met
singulièrement à l'épreuve la virilité de notre vouloir, et qui
consiste à revenir sur soi seul, à se prendre, à se saisir soi-même,
non pas par l'imagination et tel que l'on voudrait, ou que l'on se
figure être, mais tel que l'on est au sens le plus inexorablement
réel et concret du mot; un acte qui écarte la pensée, qui absorbe la
pensée, ou dans lequel toute pensée s'absorbe, et par la vertu
duquel, nous rassemblant, nous ramassant, nous concentrant sur
nous-mêmes, nous nous apercevons à la clarté d'une infaillible
lumière, celle que l'impératif de conscience--pareil au phare
éclairant les flots ténébreux d'une mer nocturne--projette sur le
fond obscur et mouvant de notre être intérieur.»

Cette définition si profonde que G. Frommel nous donne dans son
étude sur la prière, il nous la faut compléter par une remarque
importante. Il nous est très difficile, sauf dans les cas où quelque
remords précis assiège notre conscience, de nous juger ainsi,
abstraitement, sans le secours d'une inspiration concrète. Cette
inspiration, nous la trouvons dans la méditation (voir ce mot) de
l'Écriture sainte. La méditation, quand elle est ce qu'elle doit
être, nous apporte la révélation d'un état d'âme en comparaison
duquel notre propre état nous apparaît douloureusement médiocre. Le
plus souvent, c'est seulement par contraste que nous pouvons
comprendre ce qui nous manque et juger de notre misère.

Le recueillement se présente dès lors comme un effet de la
méditation. Elle met devant nous, en Jésus ou en ses disciples, une
vision de foi et d'amour. La clarté de cette vision nous oblige à ce
retour sur nous-mêmes que décrit si intensément G. Frommel; nous nous
jugeons, plus exactement nous sommes jugés, et c'est tout
spontanément que jaillit la prière d'humiliation et de consécration
nouvelle à l'idéal retrouvé. G. B.