RAHAB (femme)

(Jos 2:6,Mt 1:5,Heb 11:31,Jas 2:25)

Femme de Jérico qui logea les espions israélites envoyés par
Josué pour explorer le pays de Canaan. Dénoncés au roi, celui-ci
envoya à Rahab l'ordre de les livrer. Rahab, au contraire, les cacha,
répondit que ses hôtes avaient repris leur chemin, et quand les
émissaires royaux furent repartis, indiqua aux espions le moyen de
s'évader sûrement. Pour ce service, Rahab eut la vie sauve lorsque
les Israélites brûlèrent la ville. Tenue à bon droit pour une
bienfaitrice du peuple élu, Rahab a exalté l'imagination de bien des
écrivains juifs et chrétiens. D'après la tradition, elle aurait
épousé un prince de la famille de Juda, Salmon (cf. Ru 4:21: et
Mt 1:5), et compterait ainsi parmi les ancêtres de Jésus-Christ.

De cette héroïne seraient issus huit prophètes. Ce serait grâce à
une lumière d'en haut qu'elle aurait abandonné sa condition première
et trahi son peuple en faveur d'Israël. L'épître aux Hébreux la nomme
parmi les témoins de la foi (Heb 11:31), et l'épître de Jacques
la loue pour avoir été justifiée par ses oeuvres (Jas 2:25).
Les Pères voient en elle le type des nations païennes qui se sont
converties au christianisme: primitioe gentium. Clément de Rome,
et après lui Justin, Origène, Jérôme, etc., ont fait un usage
allégorique de l'action de Rahab. Qu'est-ce donc que le cordon
écarlate qu'elle suspendit à sa fenêtre pour que sa maison fût
reconnue et épargnée par les vainqueurs? Il représente «la]
rédemption qui aura lieu par le sang de Jésus-Christ pour tous les
croyants qui mettront en Dieu leur confiance» (Clément).

On comprend que, de bonne heure, le qualificatif de «prostituée»,
appliqué à cette femme, ait répugné à ses biographes, qui, tant juifs
que chrétiens, s'efforcèrent de remplacer le mot malsonnant par celui
de «hôtelière». On alla jusqu'à faire mentir l'étymologie (cf.
Schleusner, Lexicon in Septuag., 1830, IV, 429). Malheureusement
sur ce point le sens du mot est clair: zônâh en hébr., pornê
en grec, n'ont pas d'autre sens que meretrix en latin, et c'est
bien de meretrix que la Vulg, traite Rahab.

Cela dit, il se pourrait bien qu'en voulant se montrer
intransigeant, on s'éloignât ici de la vérité. Si Josèphe, le
premier, ne connaissant Rahab que par nos textes bibliques, la traite
d'hôtelière, c'est qu'il savait que, dans l'Orient antique, les
tenancières d'auberges aux abords des portes des villes avaient à
l'occasion, pour achalander leurs maisons, d'autres ressources que
l'hospitalité. Peut-être doit-on à cette particularité le
rapprochement, dans le code de Hammourapi, des règlements qui
concernent les maisons où on loge et où on donne à boire, et de ceux
qui concernent les hiérodules. Quand l'Apocalypse (Ap 14:8 18:3)
parle du «vin de l'impudicité» que i Babylone faisait boire à ceux
qui, de partout, venaient séjourner dans ses murs, attirés par son
commerce et par son luxe, n'y aurait-il pas aussi, dans sa façon de
s'exprimer, une allusion à l'immoralité de l'industrie hôtelière?
Ajoutons que l'assimilation d'une Rahab femme de Salmon avec la Rahab
de Jos 2 n'a aucun fondement dans l'A.T. et repose uniquement
sur la tradition rabbinique.