PURETÉ

Pour la Bible, Dieu seul possède la pureté parfaite, qui est une des
formes de sa sainteté (voir ce mot). Son peuple, afin de devenir
digne de lui, doit se purifier. C'est là le sens spirituel, à
l'origine essentiellement cultuel et cérémoniel, des nombreux rites
de purification, par l'eau, le feu, les abstentions, les sacrifices
(voir Pur et impur).

Les prophètes font apparaître au premier plan de la conscience la
notion de pureté morale. Ce qui éloigne l'homme de son Dieu, ce n'est
pas tant ses limitations humaines que l'état mauvais de son coeur,
moteur de toutes ses actions. Les sacrifices ne servent à rien; ce
que Dieu veut, c'est un coeur purifié. (cf. Esa 1:16) Mais
l'homme peut-il se transformer ainsi? «L'homme peut-il être juste
devant Dieu, l'homme sera-t-il pur en face de son Créateur?» (Job
4:17). Quand «les étoiles ne sont pas pures devant Lui» (Job
25:5), comment l'homme pourrait-il se purifier? Il lui faut demander
le secours de Dieu: «O Dieu, crée en moi un coeur pur» (Ps
51:12). Dieu répond et purifie les coeurs qui se livrent à son
action: «Venez...Quand vos péchés seraient comme le cramoisi, ils
deviendront blancs comme la neige...» (Esa 1:18); «Je répandrai
sur vous des eaux pures et vous serez purifiés...Je vous donnerai un
coeur nouveau» (Eze 36:25 et suivant).

Dans le N.T., si l'idée de pureté rituelle apparaît encore, comme
appartenant aux pratiques du judaïsme (Mr 1:44,Lu 2:22,Jn
11:55,Ac 21:24-26), c'est la notion toute spirituelle de la pureté
du coeur que Jésus enseigne comme il l'incarne: «Heureux ceux qui ont
le coeur pur...» (Mt 5:8, cf. 1Ti 3:9,Jas 1:27), et qu'il
oppose souvent au formalisme matérialiste des pharisiens (Mt
15:11 23:25 et suivant, etc.). Aussi l'apôtre Paul, le grand
champion du spiritualisme, osera-t-il déclarer: «Tout est pur pour
ceux qui sont purs» (Tit 1:15, cf. Ro 14:20); ce qui ne
l'empêche pas d'exhorter les fidèles à se purifier du vieux
levain (1Co 5:8).

Au sens le plus profond de la pureté, préservation à l'égard du
péché (presque l'équivalent de sainteté), il faut en venir à la
grande déclaration rédemptrice: «Le sang de Jésus-Christ nous purifie
de tout péché» (1Jn 1:7). A côté du grec katharos employé
ici (cf. le nom de la secte des Cathares =les Purs), l'adjectif
agnos et ses dérivés expriment la pureté de pensées, de paroles,
de conduite, en un sens général (2Co 6:6,Php 4:8,1Ti 5:22,Jas
3:17 4:8,1Pi 1:22), qui s'élève jusqu'à identifier le croyant et son
Dieu: «...il se purifie comme Dieu même est pur» (1Jn 3:3).
C'est aussi le mot par excellence pour désigner l'innocence à l'égard
de la débauche et de toutes les impuretés de la chair, qui étaient
l'un des pires dangers pour les nouveaux convertis de saint Paul dans
la société dissolue de la Grèce, de l'Asie Mineure ou de Rome (cf.
1Th 4:3 et suivants, 1Co 6:17 et suivants, Ga 5:19,Ro
6:19,Eph 5:3,Col 3:3, cf. 2Pi 2:10, etc.); aussi l'apôtre
donne-t-il parfois à ce terme de pureté la signification particulière
de moralité personnelle et de chasteté que le chrétien doit posséder
à travers l'indiscipline des moeurs de son siècle (1Ti 4:12
5:2,Tit 2:3, cf. 1Pi 3:2). Un autre mot grec, eïlikrinès,
quelquefois traduit par pur (Phi 1:10,2Co 2:17), exprime plus
exactement la sincérité, exempte de tout mélange étranger (1Co
5:8,2Co 1:12). L'adjectif adolos (litt., sans ruse), appliqué au
lait (1Pi 2:2), signifie: non falsifié.

--Pour les nuances entre ces divers termes,voir Trench,
Syn. N.T., parag. 85, 88. Voir aussi Simplicité. Il faut relever
encore les qualificatifs des épîtres chrétiennes qui transposent dans
le domaine strictement moral et spirituel la constante préoccupation
rituelle du pratiquant juif, de ne présenter au Seigneur que des
sacrifices sans défaut (Le 22:20,25,No 19:3,De 15:21 17:1), que
des desservants sans tare physique (Le 21:17 et suivants), un
culte pur parce que «sans tache», «sans souillure».

L'A.T, connaît aussi la tache de l'impureté du coeur.
(Job 11:15 31:7,Ps 51:4 8,12 etc.)

Mais le N.T. possède plusieurs synonymes, rendus dans nos
versions par l'expression «sans tache» ou par d'autres équivalentes,
pour désigner la pureté, l'immunité du fidèle dans la contagion du
monde. L'épithète la plus employée est amômos, litt,
irréprochable, mot grec classique déjà choisi par les LXX puis par
les apôtres pour correspondre à l'hébreu moûm, précisément le nom
de la tache qui souille, qui rend impur. Au sein de la génération
dépravée et perverse, les enfants de Dieu doivent être
«irrépréhensibles» (amôma), et (ajoute saint Paul, accumulant les
termes absolus) «sans reproche (amemptoï), sans tache
(akéraïoï)... » (Php 2:15); c'est Dieu qui pourra les «faire
paraître irrépréhensibles devant lui», au jour suprême (Eph
1:4,Col 1:22,Jude 24), rachetés «sans tache» (Ap 14:5), comme
aussi sa propre Église «sans tache ni ride» (Eph 5:27). Leur
purification est l'oeuvre de celui qui «s'est offert sans tache à
Dieu» (Heb 9:14), «l'Agneau sans défaut et sans tache» (1Pi
1:19). Dans ce dernier passage, allusion évidente aux sacrifices du
système lévitique, le second terme est aspilos, désignation
grecque la plus exacte de ce qui est exempt de tache.

On retrouve ce mot dans l'exhortation de saint Jacques
(Jas 1:27) à «se préserver de la souillure du monde», et--encore
avec le terme «sans reproche»--dans celles de saint Paul et de saint
Pierre à se trouver «sans tache» à la venue du Seigneur (1Ti
6:14,2Pi 3:14). Une autre épithète apparaît encore, avec un sens
voisin, dans (Jas 1:27), à propos de «la religion pure et sans
tache»: amiantos, dont la nuance est celle d'inattaquable à
l'impureté.

L'épître aux Hébreux l'applique au mariage, qui est «sans
souillure» (Heb 13:4), et au Christ notre grand-prêtre, «qu'il
nous fallait saint, innocent, exempt de souillure, séparé des
pécheurs...» (Heb 7:26). Il apparaît enfin dans la triade
caractéristique à propos de l'héritage réservé aux chrétiens:
aphtartos =incorruptible, amiantos = incontaminable,
amarantos =inflétrissable, «qui ne se peut corrompre ni souiller
ni flétrir» (1Pi 1:4). On a opposé cette destinée céleste
immaculée à la «robe céleste» des mystères de Mithra, inondée du sang
du taureau sacrifié, dans laquelle l'initié remontait de la fosse
comme s'il sortait du tombeau.

La grande richesse de vocabulaire du N.T., comme la délicatesse
de ses nuances dans la puissance évocatrice de la pureté qui n'est
qu'en Jésus-Christ dressaient un magnifique idéal devant un monde
païen corrompu, et manifestaient chez les simples fidèles de la
première génération chrétienne un développement miraculeux de leur
sensibilité morale et religieuse, par la grâce de leur Sauveur. R. H.
et Jn L.