PRÊTRES ET LÉVITES
Les noms de prêtre et de lévite sont constamment rapprochés l'un de
l'autre dans l'A.T.; ils désignent des membres de l'ancienne tribu de
Lévi, chargés des fonctions sacerdotales à des titres divers
(voir Sacrificateur). Mais ils n'ont pas toujours exactement le même sens.
Le sacerdoce en Israël a toute une histoire; pour en suivre les
différentes phases, il importe de distinguer soigneusement entre les
rédactions successives de la loi (voir Sources...) et d'en compléter
les données par les renseignements que fournissent les livres
historiques et les prophètes. La loi proprement sacerdotale (Ex
25 à 40, Lév., la plus grande partie de Nomb.) et les Chroniques,
qui la supposent et la développent sur certains points, viennent en
tout dernier lieu.
I
A l'origine il n'y avait pas de caste de prêtres. Le droit de se
présenter devant l'Éternel et de lui offrir des sacrifices
appartenait à tout chef de famille. Les patriarches invoquent
l'Éternel auprès des autels qu'ils ont construits (Ge 12:7 13:18
26:25 35:7 etc.), et déjà avant eux il est parlé des offrandes de
Caïn et d'Abel (Ge 4:3 et suivant), de Noé (Ge
8:20-22). Job présente lui-même des holocaustes en faveur de ses
fils (Job 1:5). A l'époque des Juges, Gédéon (Jug
6:18,24,26),. Manoah (Jug 13:19) apportent des offrandes qui
sont agréées. Quand l'Éphraïmite Mica crée dans sa maison un
sanctuaire avec des représentations matérielles de la divinité, il
commence par charger un de ses fils des fonctions
sacerdotales (Jug 17:5). Quand, après la bataille de
Micmas (1Sa 14), le peuple sacrifie sur l'autel improvisé de
Saül, ce sont tous les hommes présents qui apportent à l'autel le
sang de la victime qu'ils ont égorgée (verset 34 et suivant).
Plus tard encore, David préside aux sacrifices qui accompagnèrent
l'entrée de l'arche à Jérusalem (2Sa 6:17); et Salomon, lors de
la dédicace du temple (1Ro 8:14,66), prononce lui-même, comme
s'il était prêtre, la prière de consécration et bénit le peuple
devant l'autel.
1.
Cependant il y eut dès les temps anciens des hommes qui étaient
spécialement au service de la divinité, sachant la consulter et
enseigner à d'autres sa volonté, gardiens des sanctuaires importants,
présentant à l'autel selon les rites voulus les sacrifices des hommes
du peuple moins instruits qu'eux-mêmes. Tel était Moïse, qui fut le
vrai prêtre du peuple pendant les années du désert. Tel était le
lévite de Juda que Mica installa à la place de son fils dans le
sanctuaire de sa maison (Jug 17:7-13).
Tels étaient les prêtres de Silo, le sanctuaire le plus
considérable d'Israël à la fin de l'époque des Juges. Ces prêtres de
vocation étaient appelés les lévites, sans doute parce que la plupart
d'entre eux étaient descendants de l'ancienne tribu de Lévi (voir ce
mot, et Tribus d'Israël), qui fut en grande partie détruite, avec
celle de Siméon, dans les premiers temps de la conquête de Canaan
(Ge 49:5,7, allusion probable à l'histoire racontée Ge 34).
Moïse était de la tribu de Lévi (Ex 2:1); les prêtres de Silo,
Héli et ses deux fils Hophni et Phinées, étaient très probablement
des descendants directs de sa famille; le nom de Phinées se retrouve
à l'époque de l'exode, et il y a tout lieu d'admettre que l'arche est
restée, pendant l'époque des Juges jusqu'à la prise de Silo par les
Philistins, sous la garde des successeurs du premier prêtre d'Israël.
Le lévite de Mica est rattaché (Jug 17:7) à la famille de Juda
(il habitait à Bethléhem); mais, volé par les Danites, il est devenu
l'ancêtre des prêtres de Dan, et son nom exact est, d'après 18:30,
Jonathan, fils de Guersom, fils de Moïse, non pas de Manassé (voir ce
mot, parag. 3), comme dit une correction encore visible du texte. Il
était donc lui aussi de l'ancienne tribu de Lévi. Cependant tous les
prêtres de vocation n'étaient pas des lévites au sens ethnique.
Samuel, consacré par sa mère au service du sanctuaire de
Silo (1Sa 1:28 2:18,21), prêtre et voyant (=prophète; cf.
1Sa 9), était de la tribu d'Éphraïm. Les Chroniques (1Ch
6:18 et suivant) le rattachent sans doute généalogiquement à la
tribu de Lévi, mais c'est, comme pour d'autres, une adaptation aux
conceptions postérieures. David établit comme prêtres, à côté de
Tsadok et d'Abiathar, ses fils et un nommé Ira de Jaïr, qui ne sont
pas, en tout cas les premiers, lévites au sens ethnique (2Sa 8:18
20:26). Au lieu de «prêtres», il est dit dans 1Ch 18:17: «les
premiers auprès du roi», et nos traductions françaises emploient dans
2Sa une expression analogue, mais c'est là aussi une adaptation aux
idées postexiliques. Tsadok lui-même, qui devint le chef de la lignée
sacerdotale de Jérusalem, n'était pas de la même famille que les
prêtres de Silo. (voir 1Sa 2:27,36) Il était certainement prêtre
de vocation, car, même au temps de David, il est souvent mentionné
avant Abiathar, le descendant d'Héli; et peut-être se rattachait-il à
une autre branche de la tribu de Lévi (le passage cité de 1Sa 2
ne s'y oppose pas absolument), mais cela n'est affirmé nulle part
dans les sources anciennes. Nous rappelons que les jeunes gens qui
assistèrent Moïse lors du sacrifice de l'alliance (Ex 24:5) sont
appelés simplement «enfants d'Israël», et que Josué qui était un
Éphraïmite devint le gardien du tabernacle élevé par Moïse après
l'histoire du veau d'or (Ex 33:11).
2.
Aussi, bon nombre d'interprètes sont-ils disposés à penser que le nom
de lévite appliqué aux prêtres ne signifiait pas à l'origine «fils de
Lévi» mais uniquement «prêtre de vocation», et ils invoquent à ce
propos le fait que dans les inscriptions du S. de l'Arabie les termes
de laviou et laviat, parents de l'hébreu lévi, signifient
prêtre et prêtresse. Les prêtres de vocation auraient été d'origines
diverses, mais, unis par l'identité de leur profession, ils auraient
fini par former une caste spéciale qui se ferma à l'entrée de
nouveaux venus, et cette caste spéciale aurait été envisagée comme
une tribu d'Israël, provenant elle aussi d'un ancêtre commun, fils du
patriarche Jacob, ancêtre supposé auquel on aurait donné le nom de la
caste.
Cette manière de voir se heurte à l'existence d'une ancienne
tribu de Lévi, sans aucune attache avec le sacerdoce, qui nous paraît
garantie par Ge 34 et 49:5, 7. Il est plus simple d'admettre que
cette tribu, presque complètement anéantie au début de la conquête,
n'a pas pu s'assurer un territoire dans le pays de Canaan, et que ses
membres, pour pourvoir à leur subsistance, ont été obligés de se
livrer à des occupations diverses. Bon nombre d'entre eux, imitant
l'exemple de Moïse, le plus illustre représentant de la tribu, et
pour plusieurs leur ancêtre direct, se sont voués au sacerdoce et
sont devenus prêtres de vocation. Sans doute ils n'avaient pas un
droit exclusif sur cette profession, et d'autres qu'eux ont pu
embrasser la même carrière. Mais, comme ils étaient probablement les
plus nombreux et que les prêtres du sanctuaire le plus important à
l'époque des Juges étaient de l'ancienne tribu de Lévi, le nom de
lévite a été appliqué avec le temps à tous les prêtres de profession,
et la tribu de Lévi a fini par ressusciter comme caste sacerdotale;
c'était un fait accompli au temps de Jéroboam II (784-744): voir
De 33:8,11, probablement écrit à cette époque. Comp. Ex
32:25,29, qui justifie d'avance ce privilège par la conduite des
Lévites au temps de Moïse. Ce qui a favorisé cette reconstruction de
la tribu, c'est le fait que le sacerdoce était héréditaire dans
certaines familles; c'était le cas pour les anciens prêtres de Silo;
ce fut aussi le cas pour les prêtres de Dan et pour la famille de
Tsadok à Jérusalem. Nous ne sommes pas informés pour les autres
sanctuaires, mais nous sommes en droit de supposer qu'il en était à
peu près partout de même et que les «hommes nouveaux» (nous parlons
des prêtres de vocation et non pas des simples sacrifiants) étaient
plutôt rares. Le processus relativement rapide de la formation d'une
caste sacerdotale explique, sans que l'on ait besoin de descendre
jusqu'au temps du Deutéronome (621), le jugement fâcheux porté sur
Jéroboam I er (932-911), parce qu'il établit comme prêtres devant les
veaux d'or de Dan et de Béthel des hommes pris parmi tout le peuple
et n'appartenant pas «aux fils de Lévi» (1Ro 12:31). A l'époque
de Jéroboam I er, c'était encore un procédé légitime, mais il a dû se
heurter déjà alors à l'opposition des familles où le sacerdoce était
héréditaire, et le rédacteur deutéronomiste du livre des Rois, qui le
condamne, ne parle pas exclusivement au nom des conceptions de son
temps. Jéroboam I er n'est pas demeuré dans la ligne qui commençait
déjà à se tracer, comme il n'est pas demeuré dans la tendance
fondamentale de la religion mosaïque, en plaçant à Dan et à Béthel de
jeunes taureaux en bois recouverts d'or comme représentation
matérielle de la divinité.
3.
Les prêtres de vocation, les prêtres-lévites comme les appelle le
Deutéronome, plutôt rares à l'origine, ont augmenté en nombre au
cours des siècles, mais ce n'est qu'après l'exil qu'ils devinrent une
partie importante de la population. Même dans les sanctuaires
principaux, comme Silo, Nob, Jérusalem, le personnel était plutôt
restreint. A Silo il y avait Héli, ses deux fils, le serviteur des
prêtres et Samuel qui remplissait lui aussi des fonctions
secondaires, en tout 5 personnes; à Nob, il est vrai, le personnel
était beaucoup plus considérable: 85 personnes, d'après 1Sa
22:18, sans compter Abiathar qui s'enfuit auprès de David; mais on
peut se demander si, dans le chiffre de 85, ne sont pas compris,
quoique le texte ne s'y prête guère, tous les membres de la famille
sacerdotale: hommes, femmes et enfants, auxquels il faut ajouter sans
doute les aides pour le service du sanctuaire. Nous ne savons pas le
nombre des prêtres et de leurs aides, soit pour le sanctuaire de
David à Sion, soit pour le temple de Salomon; les listes que nous
possédons ne nous permettent pas de fixer très haut celui des
prêtres; celui des aides ne devait pas être grand non plus dans la
tente de David; il l'était davantage dans le temple de Salomon.
D'après Jos 9, les Gabaonites ont été condamnés à devenir
esclaves du temple. Il y a lieu de penser que nous avons là un
souvenir de l'existence d'anciens Cananéens consacrés comme esclaves
aux fonctions subalternes du sanctuaire royal. Puis nous apprenons
que, parmi les Juifs revenus de l'exil, il y avait des néthiniens
(voir ce mot) et des serviteurs (esclaves) de Salomon, qui
appartenaient d'une façon ou d'une autre au personnel sacerdotal. Le
nom même de serviteurs de Salomon nous permet de supposer que ce
personnel subalterne, qui a pu s'augmenter avec les années, a été
institué au moment de la construction du temple. Il fallait en effet
des aides, et peut-être des aides en assez grand nombre, aux prêtres
peu nombreux qui fonctionnaient dans le sanctuaire royal.
Les lévites, au sens restreint du mot (=serviteurs des prêtres),
tels que les connaissent le Code sacerdotal et les Chroniques,
n'existaient pas encore dans l'ancien Israël. Ils figurent, il est
vrai, dans trois passages (1Sa 6:15,2Sa 15:24,1Ro 8:4), mais
dans les trois passages on doit penser à une interpolation, car ils
n'apparaissent nulle part ailleurs. Si les «lévites» avaient alors
joué le rôle qu'ils ont eu plus tard, ils occuperaient dans
l'histoire une tout autre place. On s'en convainc sans peine en
comparant 2Sa 6 (transport de l'arche à Jérusalem) avec le
passage correspondant des Chroniques (ch. 15 et 16). Dans 2Sa 6,
les lévites ne sont pas mentionnés du tout; dans 1Ch 15 et
1Ch 16, ils prennent la plus grande place (comp, également, lors
du couronnement de Joas, 2Ro 12 et 2Ch 23). Les Chroniques
ont raconté ces événements comme ils auraient dû se passer d'après
les conceptions de leur temps, et non pas comme ils se sont passés en
réalité. Il faut faire abstraction de leurs données pour
l'organisation sacerdotale antérieure à l'exil.
4.
Les fonctions des prêtres sont indiquées De 33:10: «Ils
enseignent tes ordonnances à Jacob et ta loi à Israël, ils mettent
l'encens sous tes narines et l'holocauste sur ton autel» (Sg.).
Remarquer que, dans ce passage, l'enseignement de la loi est mis en
premier lieu, car c'est bien par là qu'a commencé l'office des
prêtres de vocation. Comme le droit d'offrir des sacrifices
appartenait à l'origine à tout le monde, on n'a ressenti le besoin
d'une personne spéciale pour s'approcher de Dieu que lorsqu'il
s'agissait de connaître sa volonté souvent imprévisible et d'éviter
ainsi les manifestations de sa colère ou d'obtenir son secours dans
des circonstances difficiles. Les prêtres ont commencé par être des
devins, des hommes sachant consulter la divinité et capables, en
vertu de leur art, de donner aux non-initiés la réponse à la question
qui était posée (voir Divination). A ce propos, on a relevé qu'en
arabe le mot kahin, qui correspond à l'hébreu kohen (prêtre),
signifie devin. Dans l'Israël que nous connaissons, les prêtres n'ont
jamais été de purs devins. Il n'en reste pas moins que la
connaissance de la volonté de l'Éternel, avec le devoir de
l'enseigner au peuple, était au début la première de leurs
obligations et en est demeurée une partie importante jusqu'à
l'avènement des docteurs de la loi. Cela apparaît clairement déjà
dans l'activité de Moïse; nous avons dit qu'il a été le vrai prêtre
d'Israël dans le désert (Aaron ne joue un grand rôle que dans le Code
sacerdotal), et il offre en cette qualité le sacrifice de
l'alliance (Ex 24:4,8); mais son activité principale a été
d'enseigner au peuple les lois et les ordonnances de l'Éternel (voir
Ex 18 qui, d'après De 1:9 et suivants, doit être placé
chronologiquement non pas avant, mais après le don de la loi raconté
chap. 20-24). Moïse communique au peuple les instructions qu'il a
reçues et auxquelles doivent se conformer les juges choisis par lui,
mais il y a sans cesse de nouveaux cas pour lesquels la jurisprudence
n'est pas établie, et Moïse est alors chaque fois obligé de consulter
à nouveau l'Éternel. Ce rôle de Moïse a été, après lui, continué par
les prêtres. (cf. De 17:8-13) A mesure que la loi se développait
et que les règles de droit étaient fixées sur de nombreux points,
l'enseignement des prêtres consistait à rappeler au peuple les
commandements de l'Éternel et à préciser toujours mieux la conduite à
tenir dans le domaine du culte ou de la morale.
Voir Mal 2:4,7, qui rappelle ce que devait être le prêtre
idéal; Jer 18:18, qui suppose que la loi est l'affaire des
prêtres; et les reproches qu' Osée adresse aux prêtres qui ne donnent
pas au peuple la vraie connaissance de la volonté de l'Éternel
(4:4,10, cf. Mic 3:11,Jer 5:31). Dans les temps anciens la
consultation de l'Éternel se faisait par le moyen des sorts sacrés,
dont les noms urim et thummim sont interprétés de façon différente
(voir Éphod). Le seul passage qui nous permette de nous rendre compte
de la manière dont on procédait est 1Sa 14:41ss dans les LXX:
«Saül dit alors: Éternel, Dieu d'Israël, pourquoi n'as-tu pas répondu
aujourd'hui à ton serviteur? Si c'est en moi ou en mon fils Jonathan
que se trouve le péché, ô Éternel, Dieu d'Israël, fais sortir urim;
mais si le péché se trouve en ton peuple d'Israël, fais sortir
thummim.» Ce fut urim qui sortit, et le sort fut ensuite jeté pour
savoir qui, de Saül ou de Jonathan, était coupable, et Jonathan fut
désigné. Il résulte de là que la question supposait généralement deux
réponses possibles, l'une représentée par urim, l'autre par thummim.
L'art consistait à poser la question et à fixer quel sort était
sorti. Nous ignorons les détails de l'opération. (Voir autres cas
analogues, 1Sa 23:10,12 30:8,2Sa 2:1 5:19,22 21:1) La
consultation était plus compliquée quand il s'agissait de fixer un
article de jurisprudence, mais la manière de procéder devait être à
peu près la même. Peut-être seulement fallait-il avoir recours à des
consultations préalables avant la consultation définitive. Le
savoir-faire du prêtre était alors d'une grande importance. Les
récits de consultation par les sorts sacrés, fréquents à l'époque de
David, font défaut dans les siècles suivants, quoique l'urim et le
thummim soient mentionnés De 33:8. Ils existaient encore après
l'exil (Esd 2:63,Ne 7:65), et le grand-prêtre les portait sur sa
poitrine (Ex 28:30). Mais il semble qu'on ne connaissait plus
très bien alors la manière de s'en servir (Esd 2:63). Les
prêtres avaient sans doute d'autres moyens de connaître la volonté
divine, et les prophètes ne tardèrent pas à prendre à côté d'eux une
place toujours plus grande dans la consultation de l'Éternel.
Le second office des prêtres était le service de l'autel. Quand
les sanctuaires se développèrent, c'est à eux seuls que revint le
droit d'y présenter les sacrifices et les offrandes du peuple. Les
chefs de famille perdirent peu à peu leur ancien privilège et il
s'établit une distinction très nette entre laïques et caste
sacerdotale (De 33:10).
5.
Les revenus des prêtres, avant l'exil, n'étaient pas très
considérables, sauf peut-être dans les tout grands sanctuaires. Le
Deutéronome mentionne à plusieurs reprises les lévites (=prêtres de
vocation) à côté de l'orphelin, de la veuve et de l'étranger, et
recommande les uns et les autres à la bienveillante attention des
membres du peuple plus aisés (De 14:27-29 26:11 10:9 12:12 18:1).
Les revenus assurés aux prêtres sont, d'après De 18:3-5, une part
des victimes offertes en sacrifices d'actions de grâces, savoir la
jambe, la mâchoire et l'estomac, les prémices du blé, du moût, de
l'huile et de la tonte du menu bétail. (cf. Ex 22:29 23:10
34:26) Il faut ajouter, d'après De 14:28 et suivant, une
part de la dîme de la troisième année réservée aux pauvres, et
peut-être, d'après Ex 22:29 et suivant 34:20, le rachat des
premiers-nés de l'homme. Les premiers-nés du bétail pur étaient
offerts en sacrifice; ceux des animaux impurs, rachetés par
l'offrande d'un agneau (Ex 34:19 et suivant). D'autres sources
de revenus s'ajoutèrent sans doute, avec le temps, à celles qui
figurent dans l'Exode et le Deutéronome. Mais nous ne connaissons que
celle qui est mentionnée 2Ro 12:16, l'argent de l' âchâm
(=plus tard sacrifice de culpabilité) et du khattâth (=plus tard
sacrifice pour le péché). C'étaient des amendes dont le produit était
réservé aux prêtres.
2Ro 12 parle en outre (verset 4) de contributions
volontaires pour le sanctuaire; mais cet argent, que les prêtres
gardaient volontiers pour eux-mêmes, était destiné avant tout aux
réparations du temple, et le roi Joas veilla à ce qu'il ne fût plus
détourne de son emploi légitime.
6.
Dans les sanctuaires royaux, comme Jérusalem, Béthel, Dan, les
prêtres dépendaient de l'autorité du souverain. David installa pour
le service de la tente de Sion Tsadok, un nouveau venu, à côté
d'Abiathar, le descendant des prêtres de Silo et son fidèle compagnon
pendant de nombreuses années; Salomon, en revanche, déposséda
Abiathar de la position qu'il occupait à Jérusalem, parce qu'il avait
pris contre lui le parti d'Adonija (1Ro 2:26 et suivant). Ceci
ne signifie pas du reste qu'Abiathar perdit tout caractère
sacerdotal. Relégué à Anathoth, où il possédait des terres, il put
continuer à y exercer la prêtrise, Jérémie, qui appartenait à la
famille des prêtres d'Anathoth (Jer 1:1), était peut-être un de
ses descendants. Mais il n'eut pas dans ce petit bourg de la campagne
la même position qu'à Jérusalem. La qualité de prêtre royal resta
uniquement la possession de Tsadok et de ses descendants. C'est ce
qui valut aux Tsadokites une importance toujours plus grande au
milieu de leurs confrères et, en fin de compte, leur assura après
l'exil la suprématie absolue dans l'exercice du sacerdoce (voir plus
loin). Comme autres exemples, à côté de 2Ro 12, de l'autorité
exercée par le roi sur le temple, son personnel et le culte en
général, voir 2Ro 16, établissement d'un nouvel autel des
holocaustes sur l'ordre d'Achaz; 2Ro 18:4, réforme d'Ézéchias;
2Ro 21:2,9, contre-réforme de Manassé; 2Ro 22 et 2Ro
23, réforme de Josias. Pour le royaume du Nord, cf. Am
7:10-13. Les prêtres étaient comptés dans la catégorie des
fonctionnaires royaux (2Sa 8:15,18 20:23,26), et le roi les
chargeait souvent de missions spéciales (2Ro 19:2,Jer 21:1
37:3). Ils occupaient par là même une grande place dans
l'organisation sociale du peuple. Quelques-uns furent des hommes
remarquables, comme Jéhojada au temps d'Athalie et du roi
Joas (2Ro 11) et Hilkija au temps de Josias (2Ro 22).
7.
Il va de soi que dans les grands sanctuaires, où il y avait un nombre
plus ou moins considérable de prêtres, existaient entre eux des
différences de rang; ainsi, dans le temple de Jérusalem. Mais ce
n'est guère qu'à l'époque de Jérémie que nous avons quelques
renseignements précis à ce sujet. Celui qui occupe le premier rang
est quelquefois appelé prêtre-chef (2Ro 25:18), comme dans la
terminologie postexilique grand-prêtre (2Ro 22:4,8 23:4, cf.
2Ro 12:10); il y a à côté de lui un «second prêtre» (Jer
52:24,2Ro 25:18), un surintendant du temple (Jer 20:1 29:25
et suivant), trois gardiens du seuil (2Ro 25:18,Jer 52:24,35:4).
2Ro 19:2 et Jer 19:1 mentionnent les anciens des prêtres.
Tout cela suppose une organisation déjà assez développée, mais encore
bien différente de celle que nous constaterons après l'exil.
II
La réforme de Josias a été le point de départ d'une profonde
transformation dans le domaine du sacerdoce en Israël. La
concentration du culte à Jérusalem, réclamée par le Deutéronome,
entraînait la suppression de tous les sanctuaires locaux et privait
les prêtres de la campagne des ressources dont ils avaient vécu
jusqu'alors. Le Deutéronome avait prévu cette conséquence: pour parer
à la situation malheureuse des prêtres dépossédés, il leur avait
accordé le droit de venir à Jérusalem, de fonctionner dans le temple
et de recevoir pour leur nourriture une portion égale à celle des
prêtres qui y avaient toujours été établis (De 18:6,8).
Mais la mesure était plus belle que pratiquement réalisable. Les
anciens prêtres du temple ne pouvaient pas admettre que tant de gens
vinssent prendre leurs fonctions et eussent part à leurs revenus. On
voulut bien les autoriser à manger des pains sans levain,
c'est-à-dire à recevoir une portion des offrandes non sanglantes,
mais on leur refusa la faculté de monter à l'autel et d'y offrir des
sacrifices (2Ro 23:9). C'est dire qu'ils n'avaient qu'un
médiocre intérêt à venir au temple et que la plupart d'entre eux
préférèrent vivre de leur patrimoine (De 18:8). Du reste, après
la mort de Josias et peut-être déjà avant, les hauts-lieux
(sanctuaires locaux) ne tardèrent pas à reparaître et les prêtres de
la campagne purent reprendre, en partie du moins, leurs anciennes
fonctions.
Mais la loi deutéronomique subsistait toujours; elle avait été
acceptée solennellement (2Ro 23:1-4), et elle fixait pour
l'avenir l'ordre de choses normal. Que serait-il arrivé sans la
destruction de l'existence nationale du peuple en 586 et la captivité
de Babylone? Il serait oiseux de le chercher. Ce qui est certain, en
revanche, c'est que l'exil a assuré le triomphe des principes qui
étaient formulés dans le Deutéronome et qui étaient à la base de la
réforme de Josias. Dans son tableau de l'avenir (Eze 40-48), le
prophète Ézéchiel aborde en Eze 44 la question du personnel
sacerdotal. Il commence par condamner l'ancienne coutume d'employer
des étrangers, incirconcis de coeur et incirconcis de chair, pour les
fonctions subalternes du sanctuaire. Ce personnel inférieur doit
complètement disparaître. Ezéchiel le remplace par les prêtres qui
officiaient autrefois dans les sanctuaires locaux, ouverts aux
influences idolâtriques. Pour la punition de leurs péchés, ces
prêtres ne serviront plus dans le seul sanctuaire légitime que comme
serviteurs: «Ils auront la garde des portes de la maison, ils
égorgeront pour le peuple des victimes destinées aux holocaustes et
autres sacrifices, et ils se tiendront devant lui pour être à son
service.» Le sacerdoce proprement dit, le droit de s'approcher de
l'Éternel pour le servir et pour lui offrir la graisse et le sang,
est réservé aux fils de Tsadok, aux descendants des prêtres du temple
de Jérusalem. Nous notons qu'Ézéchiel emploie encore le terme général
de lévites pour désigner les anciens prêtres de la campagne et les
anciens prêtres de Jérusalem, mais la distinction entre les uns et
les autres est très claire. Pour les premiers, il dit simplement
lévites, pour les seconds prêtres-lévites, comme dans le Deutéronome.
Plus tard la terminologie deviendra plus ferme. On réservera le nom
de lévites au personnel inférieur, et pour le personnel supérieur on
dira prêtres tout court. Pendant un temps on a admis que la
prescription d'Ézéchiel était passée dans la pratique, grâce à
l'autorité de sa parole, immédiatement après l'exil. Ézéchiel serait
l'auteur responsable de la distinction entre prêtres et lévites. Il a
certainement contribué à la faire prévaloir, mais les choses ne se
sont pas produites aussi simplement. D'autres éléments, de nature
historique, sont intervenus. Lors du premier retour de l'exil (Esd
2,Ne 7), les prêtres se trouvent très nombreux relativement aux
autres familles du peuple: ils sont divisés en quatre grandes
familles et comptent ensemble 4.289 personnes. C'est beaucoup pour
les seuls Tsadokites. Il faut donc tenir compte de l'indication de
Esd 2:61,63, d'après laquelle tous ceux qui purent justifier par
leur généalogie qu'ils étaient de race sacerdotale furent reconnus
comme prêtres; aucune distinction n'est faite entre prêtres de la
campagne et prêtres du temple. Cependant le texte mentionne d'autre
part 74 lévites (Esd 2:40), c'est-à-dire des prêtres d'ordre
inférieur, puis à côté d'eux les chantres, les portiers, les
néthiniens, les fils des serviteurs de Salomon, tous descendants des
anciens esclaves du temple, peut-être aussi d'autres sanctuaires.
Lors du second retour d'exilés sous la conduite d'Esdras (en 458),
les lévites au sens restreint du mot furent également peu nombreux:
38 et, avec eux, 220 Néthiniens. Encore Esdras dut-il insister pour
les décider à l'accompagner. Le nombre des prêtres, deux familles,
n'est pas indiqué. On doit reconnaître qu'au retour de l'exil la
distinction entre prêtres et lévites n'est encore qu'ébauchée et que
la prescription de Eze 44 est passée sous silence. En fait, la
distinction a sans doute commencé avant Ézéchiel lui-même.
Après la concentration du culte à Jérusalem lors de la réforme de
Josias, il est probable que les prêtres de la campagne ne suivirent
pas tous la même voie; les uns, constatant que la faculté qui leur
était laissée par le Deutéronome de continuer leurs fonctions au
temple de Jérusalem était plus illusoire que réelle, retournèrent
dans leurs biens et maintinrent leurs droits au sacerdoce, tout en
renonçant momentanément à les exercer; les autres, moins aisés,
pressés par la nécessité, se contentèrent de fonctions subalternes au
temple de Jérusalem et devinrent ainsi le noyau initial de la classe
des lévites. Après l'exil, ceux qui avaient maintenu leurs
prétentions furent reconnus comme prêtres au même titre que les
Tsadokites. Les autres restèrent prêtres subalternes, mais le petit
nombre de ceux qui revinrent montre que beaucoup d'entre eux
préférèrent rester à Babylone plutôt que d'occuper à Jérusalem une
position inférieure. A côté d'eux, les chantres, les portiers, les
néthiniens et autres serviteurs du temple continuèrent à subsister
pendant un temps. Ils sont encore mentionnés Ne 11:15,24, mais
nous ne savons pas à quelle date exacte appartiennent les
renseignements de Ne 11. Quoi qu'il en soit, les fonctionnaires
sacrés, sans droit de prêtrise, finirent par se rapprocher et se
confondre dans la grande classe des lévites. Le Code sacerdotal ne
connaît plus que les lévites à côté des prêtres, et nous constatons
que, dans les Chroniques, les chantres et les portiers, dont le Code
sacerdotal ne parle pas, sont positivement désignés comme des
lévites. Les néthiniens et les serviteurs de Salomon ont complètement
disparu. Nous devons donc nous représenter la constitution d'une
classe de lévites à côté des prêtres comme ayant été le résultat d'un
assez long développement. La pensée d'Ézéchiel a fini par se
réaliser, mais un peu autrement qu'il ne le prévoyait.
III
1.
Dans le Code sacerdotal postexilique nous trouvons à la fois
l'aboutissement de tout le développement antérieur et la fixation
théorique de la valeur et de l'organisation du sacerdoce. Après avoir
présenté le sanctuaire comme une création de l'Éternel lui-même, qui
fixe avant toutes choses le lieu de rencontre entre lui et son
peuple, le Code sacerdotal passe immédiatement à l'institution du
sacerdoce. Le sanctuaire ne serait qu'un privilège inutile, s'il n'y
avait pas là des prêtres destinés à servir d'intermédiaires
nécessaires entre Dieu et les hommes. Le fidèle ne peut pas
s'approcher directement du Dieu saint; il faut des hommes consacrés
qui prennent sa place près de l'autel et lui assurent, par
l'accomplissement des saints offices, les grâces qu'il est venu
chercher. Le sacerdoce est une seconde grâce de Dieu à son peuple. On
n'a certainement pas ressenti les choses ainsi dans l'ancien Israël,
où les prêtres-lévites étaient recommandés à la bienveillance des
fidèles, et nous pouvons nous demander dans quelle mesure les Juifs
après l'exil envisageaient leurs prêtres comme un don de Dieu. Mais
cette conception rentre dans la logique de tout le système
théocratique: l'Éternel est le seul maître de son peuple, il est le
créateur de l'alliance et il donne lui-même aux fidèles les moyens de
continuer à en faire partie.
2.
Pour tout ce qui concerne le personnel du sanctuaire, le Code
sacerdotal part du point où on en était arrivé après l'exil, mais il
transporte au temps de Moïse la distinction entre prêtres et lévites,
et il n'emploie naturellement pas la terminologie d'Ézéchiel: lévites
=anciens prêtres des sanctuaires locaux; prêtres =fils de Tsadok.
Au lieu de fils de Tsadok, il dit: Aaron et ses fils, conformément à
une tradition qui faisait d'Aaron et non pas de Moïse le prêtre
principal au temps du désert. Cette tradition est en tout cas
antérieure à l'exil (cf. Ex 4:14: Aaron le lévite; Ex 32:1
et suivants: histoire du veau d'or, etc.). Les prêtres et les lévites
ont une même origine et forment ensemble la tribu sacerdotale de
Lévi. Mais le Code demeure, dans une certaine mesure, fidèle à la
vérité historique, en présentant les prêtres comme ayant été les
premiers et les lévites comme étant venus ensuite. Il n'enseigne pas
en effet que la tribu de Lévi a commencé par être vouée dans son
ensemble au service du sanctuaire, et que l'organisation hiérarchique
de la tribu a déterminé les fonctions de ses différents membres:
chefs =prêtres, premier des chefs =grand-prêtre, le reste =
fonctionnaires subalternes. Bien plutôt la famille d'Aaron a été
désignée pour la sacrificature avant qu'il fût question de la tribu
dans son ensemble pour le service du sanctuaire (cf. Ex 28:1 29,Le
8 et 9, consécration d'Aaron et de ses fils). Les Aaronides ne
tiennent donc pas leurs droits des liens du sang qui peuvent les
rattacher aux autres membres de la tribu sacerdotale, ils les
tiennent directement de Dieu; les simples lévites ne les ont pas
reçus et ne peuvent y prétendre sans encourir la colère divine (voir
histoire de Coré et de ses complices, No 16). Les lévites ont
été donnés à Aaron pour être à son service; (cf. No 3:5-9 où
sont énumérées quelques-unes de leurs fonctions) leur consécration
est racontée No 8:5,22, longtemps après celle d'Aaron et de ses
fils. Ils remplacent, dans la théorie du Code sacerdotal, les
premiers-nés d'Israël, qui, en bonne règle, devraient servir
l'Éternel dans le sanctuaire, parce que l'Éternel se les est acquis
en faisant mourir les premiers-nés des Égyptiens pour délivrer son
peuple (Ex 13:13-16,No 3:11-13 8:17,19). Le compte est fait très
exactement No 3:17,51. Les premiers-nés étaient au nombre de
22.273; les lévites n'étaient que 22.000. Les 273 premiers-nés de
plus durent être rachetés au prix de cinq sicles chacun, sicle du
sanctuaire. Nous relevons en passant que les gros chiffres sont
familiers à la littérature postexilique et que le rachat des
premiers-nés au désert n'empêcha pas dans la suite le rachat de
chaque premier-né, qui était une redevance en faveur des
prêtres (No 18:15,18). Les lévites, choisis pour remplacer les
premiers-nés, furent consacrés à l'Éternel comme une offrande du
peuple, et ils furent même agités symboliquement de côté et d'autre,
comme les offrandes ordinaires: geste de les jeter dans le feu de
l'autel. (voir No 8:11,21) Ils appartenaient donc bien au
sanctuaire et, à ce titre, pouvaient être présentés comme la tribu
sacerdotale à l'exclusion de toute autre (No 17, verge d'Aaron),
mais ils n'étaient pas eux-mêmes prêtres et n'avaient aucun droit à
le devenir.
3.
A la tête des prêtres est placé le grand-prêtre ou souverain
sacrificateur: dans la terminologie du Code sacerdotal, Aaron, puis
son fils aîné, à l'exclusion de ses autres fils, qui ne sont que
prêtres. Nous avons vu que, déjà avant l'exil, le collège sacerdotal
de Jérusalem avait à sa tête un prêtre-chef, appelé à l'occasion
grand-prêtre, qui était le représentant attitré de ses frères. Nous
ignorons du reste l'étendue de son autorité; elle était en tout cas
limitée par la présence de la royauté, qui exerçait la suprématie
dans le domaine religieux comme dans le domaine politique. Tout autre
était, après l'exil, la place que le grand-prêtre occupait au sein de
la communauté, dépouillée de son indépendance nationale et n'ayant
plus que dans sa religion la raison d'être de son existence. Ce qui
distingue en effet le grand-prêtre du Code sacerdotal, c'est que non
seulement il est le prêtre par excellence, concentrant en sa personne
l'essence du sacerdoce, seul capable de pénétrer dans le lieu très
saint, portant seul l'urim et le thummim, revêtu d'une sainteté
particulière, mais qu'il est le vrai chef de la communauté. En fait,
il n'y a pas de place à côté de lui pour un souverain politique.
D'après No 27:1, Josué qui doit diriger le peuple après Moïse ne
sera en fin de compte que l'exécuteur des volontés d'Éléazar, le
successeur d'Aaron, chargé de consulter pour lui l'Éternel. Une faute
du grand-prêtre rend tout le peuple coupable (Le 4:3), tandis
que la faute d'un chef politique n'a de conséquence que pour
lui-même (Le 4:22,26). Le grand-prêtre porte (voir plus loin),
comme représentant du peuple, les noms des 12 tribus sur ses épaules
et sur sa poitrine, il est revêtu des insignes royaux (tiare et
pourpre), il est oint comme l'était le roi, sa mort entraîne
l'amnistie des meurtriers qui vivent dans les villes de
refuge (No 35:28); bref, i! apparaît comme un véritable
souverain, sans cependant être revêtu de l'autorité politique
complète qui, après l'exil, n'appartenait pas aux Juifs eux-mêmes,
mais au représentant du souverain étranger. Chose curieuse, Ézéchiel
ne le mentionne pas dans son tableau de l'avenir; il le remplace par
le «prince», qui est le chef de la communauté, mais n'a guère d'autre
fonction que de veiller à la présentation des sacrifices les jours de
fête et de fournir les victimes destinées à l'autel (45:10-46:15).
Cette énigmatique figure n'a pas trouvé place dans la réalité
historique.
4.
L'idée de sainteté qui domine la loi sacerdotale s'attache d'une
façon toute particulière aux hommes mis à part pour le service du
sanctuaire. Elle s'exprime tout d'abord dans leurs vêtements (voir ce
mot). Avant l'exil il n'est question que de l'éphod de lin (éphod-bad),
dont nous ne connaissons pas exactement la forme. On
a pensé à un court vêtement enveloppant le corps des hanches
jusqu'aux genoux, comme celui que portaient les prêtres égyptiens.
L'éphod de lin est mentionné 1Sa 2:18 22:18,2Sa 6:14. C'était le
seul vêtement de David, quand il fit monter l'arche à Jérusalem. En
dehors du service les prêtres portaient en outre une longue robe. Le
Code sacerdotal, pour les temps postérieurs, est plus complet et plus
explicite.
D'après Ex 28:40,43 39:27,29, les prêtres portaient, dans
l'exercice de leurs fonctions:
1° des caleçons de fin lin allant des reins
jusqu'aux cuisses;
2° une tunique (robe) de fin lin avec manches, sans
couture, ayant en haut une ouverture pour passer la tête et
descendant des épaules jusqu'aux pieds;
3° une ceinture de fin lin retors, tissée ou brodée
avec fils de pourpre violette, de pourpre écarlate et de cramoisi;
4° une mitre également de fin lin et de forme
conique. Donc le tout, sauf la ceinture, était blanc, symbole de la
pureté. La ceinture était longue, elle s'enroulait plusieurs fois
autour de la taille, et les bouts retombaient jusqu'aux pieds, sur la
tunique; ils étaient rejetés sur l'épaule gauche pendant le service.
Les prêtres ne portaient leurs vêtements sacerdotaux que dans le
temple; avant de sortir, ils les déposaient dans une chambre
spéciale. Des chaussures ne sont jamais mentionnées, car les prêtres
fonctionnaient pieds nus. Comme encore aujourd'hui dans les pays
musulmans, on craignait que les chaussures, ayant été en contact avec
les impuretés de la rue, ne souillassent le sanctuaire. Le
grand-prêtre avait les mêmes vêtements que les simples prêtres, mais
portait en outre trois pièces de plus grand apparat: la robe, l'éphod
d'or, le pectoral, avec une tiare plus luxueuse que la mitre (Ex
28:2,39 39:1-26,30), La robe était de pourpre violette, sans manche,
avec une ouverture en haut pour passer la tête et garnie en bas de
grenades de pourpre violette, de pourpre écarlate et de cramoisi,
alternant avec des clochettes d'or. Les grenades (glands en forme de
fleurs de grenade) et les clochettes n'étaient pas un pur ornement.
Les premières étaient des emblèmes de la plénitude de vie,
partage de celui qui peut s'approcher de Dieu. Les clochettes (voir
ce mot) devaient en quelque sorte signaler, non pas au peuple, mais à
Dieu la présence de l'officiant, afin qu'il ne fût pas, comme un
intrus, anéanti par la sainteté divine (28:35). Dans les religions
païennes, où elles étaient également en usage, elles devaient sans
doute éloigner les démons qui gardaient le seuil du sanctuaire. La
robe ne descendait probablement que jusqu'aux genoux et laissait voir
le bas de la tunique (Josèphe, Ant., III, 8:4). De couleur
pourpre, elle indiquait la haute position du grand-prêtre. L'éphod,
qui se plaçait sur la robe, était de fils d'or, de pourpre violette,
de pourpre écarlate, de cramoisi et de fin lin retors. La description
donnée dans Ex 28 et 39 n'est pas d'une très grande clarté, et
on a quelque peine à s'en représenter la forme. Il se composait
probablement d'un corselet assez serré, avec deux larges épaulettes
venant du dos sur le devant, où elles étaient unies à la partie
antérieure au moyen d'anneaux et de cordons (deux anneaux de part et
d'autre et deux cordons). Chaque épaulette portait une pierre d'onyx
dans une monture d'or, sur laquelle était gravé le nom de six des
tribus d'Israël; six sur la pierre de droite, six sur la pierre de
gauche. A l'éphod était joint le pectoral (qu'on a aussi appelé
rational), carré double (=poche) de même étoffe que l'éphod, de 25
cm. environ de côté; il était rattaché en haut aux épaulettes par
deux chaînettes d'or assujetties à des anneaux, en bas à l'éphod,
au-dessus de la ceinture par des cordonnets de pourpre violette
également assujettis à des anneaux d'or. Ainsi le pectoral ne pouvait
pas bouger. Sur la face antérieure étaient placés quatre rangs de
trois pierres précieuses enchâssées dans de l'or, portant les noms
des douze tribus d'Israël, en commémoration constante devant
l'Éternel (28:29). La poche renfermait les sorts sacrés, l'urim et le
thummim, qui étaient devenus l'apanage du grand-prêtre, mais qui
étaient plus une relique du passé qu'un moyen employé effectivement
pour consulter l'Éternel. Ils étaient cependant la raison d'être de
l'éphod d'or et du pectoral. Cette partie du vêtement du grand-prêtre
le désignait comme le seul et véritable héritier de la fonction
primordiale des anciens prêtres, qui était de rechercher la volonté
de l'Éternel. Voir Éphod.
La tiare (voir ce mot), plus haute et plus compliquée que la
mitre des simples prêtres, portait en outre sur le devant une lame
d'or où étaient gravés les mots: Sainteté à l'Éternel. A ce propos,
Ex 28:38 dit: «Elle sera sur le front d'Aaron (=du
grand-prêtre); et Aaron sera chargé des iniquités d'Israël en faisant
toutes leurs saintes offrandes; elle sera constamment sur son front
devant l'Éternel, pour qu'il leur soit favorable.» Revêtu de tous ses
ornements, te grand-prêtre avait un air très majestueux; il était le
symbole vivant de la dignité du sacerdoce.
Les simples lévites ne semblent pas avoir eu de vêtement spécial.
Il n'en est mentionné nulle part, en tout cas, dans le Code
sacerdotal.
5.
La sainteté inhérente aux représentants du sacerdoce s'exprime en
second lieu dans les lois de pureté qui les concernent (Le 21).
Tout d'abord, les prêtres ne devaient avoir aucun défaut corporel
quelconque. Il fallait être physiquement intact pour s'approcher de
l'autel. Celui qui ne l'était pas avait droit aux revenus des
prêtres, comme membre de la famille d'Aaron, mais ne pouvait pas
fonctionner dans le sanctuaire: c'eût été le profaner. Puis les
prêtres ne devaient point se rendre impurs par un mort, sauf pour
leurs plus proches parents (père, mère, fils, frère, soeur encore
vierge), ni se faire, en signe de deuil, une place chauve sur la
tête, se raser les coins de la barbe ou se faire des incisions dans
la chair; ils auraient par là profané le nom de leur Dieu. En outre,
il leur était interdit d'épouser des prostituées ou des femmes
répudiées; ils ne devaient prendre pour femmes que des filles vierges
ou des veuves, et encore Eze 44:22 ajoute-t-il que la veuve ne
pouvait être que celle d'un prêtre. Le grand-prêtre était astreint à
une pureté encore plus grande; il ne devait se souiller pour aucun
mort, pas même pour son père ou pour sa mère; il ne devait, en signe
de deuil, ni se découvrir la tête, ni déchirer ses vêtements; il ne
pouvait épouser qu'une fille vierge.
Naturellement aucun prêtre en état d'impureté, par suite de
l'attouchement d'un cadavre, d'un reptile, d'une personne ou d'une
chose souillée, ou pour toute autre cause, ne pouvait s'approcher de
l'autel, ni même manger des choses saintes; avant d'en manger, il
devait se laver le corps et attendre la fin de la journée. Il était
impur jusqu'au soir (Le 22:1-9). Même en état de pureté, le
prêtre ne pouvait s'approcher de l'autel (des holocaustes) ou entrer
dans le sanctuaire qu'après s'être lavé les mains et les
pieds (Ex 30:17,21). Pendant qu'il était en fonctions, il ne
devait boire ni vin, ni boisson enivrante, afin qu'il pût distinguer
ce qui était saint de ce qui était profane (Le 10:8-10).
6.
La sainteté des prêtres est en troisième lieu affirmée par le mode de
leur consécration (Ex 29,Le 8). Elle comprenait un bain de
purification, le revêtement des habits sacerdotaux et, pour le
grand-prêtre en tout cas, l'onction d'huile sainte, puis une série de
sacrifices: d'un taureau comme sacrifice expiatoire, d'un bélier
comme holocauste d'agréable odeur à l'Éternel, d'un second bélier
comme sacrifice de consécration; avec le sang de ce dernier, on
touchait l'oreille droite du nouveau prêtre (pour indiquer qu'il
devait être attentif à la voix de son Dieu), le pouce de la main
droite (=le prêtre doit s'acquitter fidèlement de toutes les
fonctions du culte) et l'orteil du pied droit (=il doit marcher
saintement devant Dieu). En outre, on aspergeait ses vêtements avec
l'huile d'onction et le sang qui était sur l'autel (Le 8:30). Il
était ainsi sanctifié et rendu apte à remplir les fonctions du
sacerdoce. Un dernier acte avait une signification symbolique; les
offrandes et une partie de la dernière victime étaient placées dans
les mains du consacré, agitées de côté et d'autre devant l'Éternel,
puis reprises et placées sur l'autel pour être consumées par le feu
avec l'holocauste: indication du droit qui était donné au nouveau
prêtre de présenter les sacrifices sur l'autel et de se nourrir des
offrandes et d'une partie des victimes (Ex 29:27 et suivant).
Une question controversée est celle de l'onction (voir ce mot).
D'après certains passages, elle était partie intégrante de la
consécration de tous les prêtres (Ex 28:41 30:30 40:15,Le 7:35
10:7); d'après d'autres, elle était réservée au grand-prêtre seul
(Aaron sans ses fils; Ex 29 7 20 29,Le 8:12, cf. Le
4:3,5,16). Ces divergences dans des chapitres qui appartiennent
tous au Code sacerdotal montrent que la loi a subi avec le temps des
transformations. Les uns admettent qu'à l'origine le texte attribuait
l'onction à tous les prêtres, mais que plus tard elle fut destinée au
seul grand-prêtre; d'autres pensent qu'elle fut d'abord réservée au
roi (1Sa 24:7 26:9), puis par la suite au grand-prêtre seul, et
finalement étendue à tous les prêtres. La pratique postérieure est
plutôt favorable à la première opinion; car l'onction n'est plus
alors mentionnée pour de simples prêtres, et, dans les derniers temps
de l'existence du peuple, les grands-prêtres eux-mêmes n'étaient pas
toujours oints; la Mischna mentionne, à côté de ceux qui l'étaient,
d'autres qui ne l'étaient pas (Horajoth, 3:4).
7.
Les fonctions des prêtres ont subi, à mesure que se développait
l'organisation cultuelle de la communauté, une modification sensible.
Nous avons vu qu'à l'origine la première tâche des prêtres de
vocation était de consulter l'Éternel. De 33:10 met encore
l'enseignement de la loi avant la présentation des sacrifices. Après
l'exil, l'urim et le thummim sont, il est vrai, également mentionnés
mais ils ne semblent plus avoir joué aucun rôle important. Le seul
passage du Code sacerdotal qui parle de l'enseignement de la loi par
les prêtres est Le 10:10 et suivant, et il ne s'agit ici que de
précisions à donner sur des points de détail: distinction de ce qui
est pur ou impur, et sans doute autres questions de même nature.
L'enseignement de la loi était devenu l'affaire des scribes. Il en
résulte que dans la communauté postexilique les prêtres sont avant
tout sacrificateurs, comme les appelaient nos anciennes versions
(voir L. Gautier, Études, pp. 247-276). No 16:5 résume en
effet leur tâche, en disant qu'ils sont seuls saints et que seuls ils
osent s'approcher de l'Éternel. En fait, le peuple étant un peuple de
prêtres (Ex 19:6), chacun aurait dû avoir le droit de
s'approcher de l'Éternel, mais ce que le peuple était en théorie, il
ne l'était pas en réalité. Il avait besoin de médiateurs qui fussent
vraiment saints par leur vocation et qui présentassent pour lui à
l'Éternel les sacrifices qu'il ne pouvait offrir lui-même. Puis, à
côté des sacrifices des particuliers, il y avait les sacrifices de la
communauté (tamid, sacrifices des jours de fête), qui prirent
dans le culte du temple une place toujours plus grande, et il fallait
pour cela des organes spéciaux qui fussent «dignes et capables»
d'exercer un tel ministère. Les prêtres étaient ainsi avant tout les
intermédiaires nécessaires entre Dieu et le peuple. Ils devaient,
d'un côté, empêcher les fidèles de s'approcher du sanctuaire et le
préserver de toute profanation, donc défendre la sainteté de Dieu;
d'autre part, prendre en main la cause du peuple et le rapprocher de
Dieu, en présentant ses offrandes sur l'autel et en lui acquérant par
l'aspersion du sang l'expiation de ses péchés. La bénédiction qu'ils
prononçaient sur les enfants d'Israël, dans les grandes cérémonies,
était comme la réponse de Dieu aux sacrifices et aux prières qui lui
avaient été présentés: «Que l'Éternel te bénisse et te garde! Que
l'Éternel fasse luire sa face sur toi et te soit propice! Que
l'Éternel tourne sa face vers toi et te donne la paix!» (No
6:24,26). C'est ainsi, ajoute le verset 27, qu'ils «mettront mon nom
sur les enfants d'Israël et je les bénirai».
8.
Si de cette caractéristique générale nous passons aux fonctions
spéciales et à l'organisation de toute la tribu lévitique, nous
aurons ici à ajouter aux renseignements du Code sacerdotal ceux que
donnent les Chroniques. Dans le premier, en effet, nous ne trouvons
pas encore l'organisation des prêtres en 24 classes. Elle n'est
indiquée que dans 1Ch 24, où elle est attribuée à David, comme
tout ce qui, dans le domaine du sacerdoce, dépasse les ordonnances de
la loi. C'est un anachronisme évident, car au moment du retour de
l'exil Esd 2:36,39 ne mentionne encore que quatre familles de
prêtres; mais il n'y a pas lieu de mettre en doute l'exactitude des
renseignements pour les temps postérieurs (III° siècle av. notre
ère). A l'époque de Néhémie, on comptait déjà 22 classes, si les
listes que nous trouvons dans Ne 10:2-8 12:1-9,12-21 sont
exactes dans leur ensemble, malgré les nombreuses fautes de copistes
que l'on peut signaler dans le détail. Il est possible que les 24
classes définitives aient subi certains changements après l'époque
des Chroniques, en particulier dans l'ordre où elles sont placées,
mais les changements n'ont pas dû être très considérables. En tout
cas, la 8 e classe de 1Ch 24:10, celle d'Abia, portait encore le
même nom au début de notre ère (Lu 1:5). Dans chaque classe il y
avait évidemment des différences de rang, suivant l'importance des
fonctions qui incombaient aux divers membres de la classe; chacune
avait un chef (1Ch 24:4) et, d'après les renseignements
postcanoniques, elle comprenait plusieurs sections ayant également
chacune un chef. Puis les différentes classes n'étaient pas toutes
placées sur le même rang. La première était celle à laquelle
appartenait le grand-prêtre au temps des Hasmonéens, celle de
Jéhojarib qui occupe en conséquence la tête de la liste dans 1Ch
24, où l'ordre primitif a sans doute été modifié. (cf. Ne
12:7-19) Il y avait à Jérusalem autour du grand-prêtre toute une
aristocratie sacerdotale, tandis que les prêtres de la campagne
n'avaient le plus souvent qu'une position fort modeste. Chaque classe
fonctionnait pendant une semaine; le changement de classe avait lieu
le jour du sabbat, et on tirait alors au sort les fonctions que
devaient remplir les différents membres. Les simples prêtres étaient
chargés des sacrifices, du service des ustensiles dans le temple,
etc., en un mot de tout le rituel ordinaire. L'administration
générale était entre les mains de fonctionnaires spéciaux, et ceux-ci
étaient nombreux, car le temple était le centre de la vie religieuse
des Juifs et le mouvement des affaires y était considérable. Nous
mentionnons spécialement: le segan ou commandant du
temple (Ac 4:1 5:24), chargé de la haute surveillance de tout ce
qui s'y passait et le premier en dignité après le grand-prêtre; les
chefs des gardes, officiers secondaires de la police du
temple (Lu 22:4-52), et les trésoriers (Jos., Ant., XV,
11:4; XVIII, 4:3), qui formaient toute une hiérarchie. Le
grand-prêtre était le chef suprême dans le domaine de
l'administration, comme dans celui du culte. Il pouvait naturellement
accomplir tous les offices des simples prêtres, mais il avait de plus
qu'eux le droit d'entrer dans le lieu très saint, quoique seulement
une fois par année, au grand jour des Expiations (Le 16). Il
offrait ou faisait offrir pour lui chaque jour un sacrifice non
sanglant (Le 6:12,16); c'était l'offrande qui faisait partie du
tamid ou sacrifice journalier. D'après Josèphe, le grand-prêtre
ne fonctionnait que les jours de fête ou de sabbat.
L'organisation des lévites est plus compliquée et moins
facilement saisissable que celle des prêtres. Le Code sacerdotal ne
connaît encore que leur division en trois grandes familles d'après
les trois fils de Lévi: Guerson, Kéhath et Mérari, et il ne leur
attribue en réalité d'autres fonctions que le transport du tabernacle
et de son mobilier pendant le séjour au désert (No 4), quoiqu'il
dise d'une manière générale qu'ils ont été donnés aux prêtres pour
tout le service du sanctuaire (No 18:2,6). Les Chroniques sont
plus explicites. Tout en maintenant la division en Guersonites,
Kéhathites et Mérarites, elles distinguent d'autre part trois grandes
classes de fonctionnaires subalternes: les lévites proprement dits,
les chantres et les portiers, mais les chantres et les portiers sont
également de la tribu de Lévi et ont des représentants dans chacune
des trois familles. Les fonctions des lévites proprement dits sont
indiquées (1Ch 23:28,32 9:28-32); elles consistent dans le
service de la maison de l'Éternel: soin des parvis, purification des
choses saintes, préparation des offrandes et des victimes, etc. Le
texte ne dit pas expressément qu'ils étaient divisés en 24 classes,
mais c'est probablement le sens de 1Ch 24:20,31, passage obscur
où l'on peut supposer de nombreuses fautes de copistes. Dans les
temps postérieurs, à chaque classe de prêtres correspondait une
classe de lévites (Jos., Ant., VII, 14:7). Les chantres (1Ch
25) se divisaient en trois grandes corporations rattachées aux noms
d'Asaph (Guersonites), Héman (Kéhathites) et Jéduthun ou Éthan
(Mérarites); ils étaient en outre répartis en 24 classes. Ils étaient
chargés du chant des psaumes et de toute la musique sacrée. Ils
devinrent avec le temps les plus importants des fonctionnaires
subalternes du temple. L'historien Josèphe (Ant., XX, 9:6)
raconte que, peu de temps avant la
ruine du second temple, ils reçurent du roi Agrippa II, avec
l'assentiment du Sanhédrin, le droit de porter des vêtements de lin
comme les prêtres.
Les portiers (1Ch 2:1-19), qui avaient la garde de la maison
de l'Éternel, comprenaient également trois grandes familles et
peut-être 24 classes. La famille de Coré, qui figure 1Ch 26
parmi les portiers, est comptée ailleurs parmi les chantres (2Ch
20:19), et les titres des Ps 42 à 49, 84, 85, 87, 88 montrent
qu'elle en est devenue une des plus illustres corporations. Il y a
lieu d'admettre que toute l'organisation des chantres et des portiers
a subi de profondes modifications dans le cours des derniers siècles
avant notre ère. A côté de leurs fonctions dans le temple, les
lévites, les chantres et les portiers en avaient d'autres en dehors
du temple (cf. 1Ch 26:29 et suivants, Ne 11:16,2Ch 19:11
34:12 et suivant).
Les lévites étaient en charge de l'âge de 25 ans (No 8:2,1),
primitivement de 30 ans (No 4:3), jusqu'à 50 ans. Le chiffre de
25 ans nous semble être plus tard descendu à 20 (cf. 1Ch
23:24-27, en contradiction avec le verset 3 du même chap.). La loi
ne dit rien sur l'âge d'entrée des prêtres; la tradition rabbinique
le fixait à 20 ans.
9.
Les revenus des prêtres étaient, sous le régime de la loi
sacerdotale, beaucoup plus considérables que dans les temps
antérieurs. Nous n'y faisons pas rentrer les 48 villes qui étaient
cédées comme demeures à tous les membres de la tribu de Lévi, 13
étant spécialement réservées aux prêtres, car cela n'a jamais été que
pure théorie. (cf. Jos 21,No 35:1,8) Les revenus sont énumérés
No 18:8,32, mais ce passage doit être complété par d'autres. Ils
comprenaient:
1° Une partie des victimes et des offrandes
apportées à l'autel, une fois la part de l'Éternel consumée par le
feu, savoir:
(a) toute la chair des sacrifices pour le péché et des
sacrifices de culpabilité;
(b) toutes les offrandes non sanglantes y compris les
pains de proposition;
(c) deux morceaux des sacrifices d'actions de
grâces (poitrine et épaule droite, Le 7:31);
(d) la peau des victimes offertes en
holocauste (Le 7:8).
2° Les prémices qui devaient être apportées au
sanctuaire (=ce qu'il y avait de meilleur, en huile, en blé et en
moût), et en outre les premiers fruits de la terre, distincts des
prémices, ce qui n'était pas le cas autrefois, puis les prémices de
la pâte, c'est-à-dire les premiers gâteaux cuits avec la récolte de
la nouvelle année (No 15:17,21,Ne 10:37).
3° Les premiers-nés mâles des animaux et de l'homme.
Les premiers-nés de l'homme étaient rachetés au prix de cinq sicles
d'argent, sicle du sanctuaire, environ 16 fr.-or; les premiers-nés
des animaux impurs (âne, cheval, chameau) étaient rachetés par une
somme laissée à l'estimation du prêtre, plus un cinquième (Le
27:27; la taxe postérieure était de 1 sicle 1/2 =4,80 fr.-or); les
premiers-nés des animaux purs étaient présentés à l'autel, mais la
chair revenait aux prêtres, moins ce qui était consumé par le feu.
Voir Premier-né.
4° Les êtres et les objets que l'on avait consacrés
par un voeu à l'Éternel, ou la somme fixée pour le rachat, plus un
cinquième (Le 27:1,24). Ce qui avait été dévoué «par interdit»
(voir ce mot) ne pouvait être racheté; il fallait le livrer tel qu'il
avait été dévoué, fût-ce une personne, un animal ou un champ (Le
27:28 et suivant). Nous ajoutons ici que lorsqu'un objet mal acquis
ne pouvait être rendu à son véritable propriétaire, il revenait au
prêtre, qui offrait pour le coupable un bélier en sacrifice
d'expiation (No 5:8). Dans la pratique postérieure le produit
des voeux (voir ce mot) était ajouté au trésor du temple plutôt que
remis aux prêtres.
5° La dîme (voir ce mot) de toutes les productions
de la terre; c'était de beaucoup la portion la plus importante des
revenus des prêtres. D'après No 18:25-32 et Ne 10:37,39,
elle appartenait aux lévites, qui devaient en donner aux prêtres la
dixième partie (la dîme de la dîme); mais dans la pratique
postérieure, elle était remise à l'administration centrale à
Jérusalem, qui était l'affaire des prêtres plus que celle des
lévites. On sait avec quelle scrupulosité elle était payée par les
gens pieux, même pour les plus petites choses (Mt 23:23).
D'après la Mischna elle était due sur toutes les productions de la
terre qui servent à la nourriture des hommes et du bétail.
Grandes étaient donc, en faveur des prêtres, les prestations qui
figurent dans la loi sacerdotale. La loi entendait évidemment
supprimer toutes les dispositions contraires des législations
antérieures. (cf. Ne 10:32,39, qui indique les engagements pris
par le peuple au moment de sa publication et du renouvellement de
l'alliance avec l'Éternel, en 444) Mais les scribes des siècles
suivants ne l'ont pas entendu ainsi. Le Pentateuque définitivement
constitué comprenait le Deutéronome à côté de la loi sacerdotale.
Pour accomplir toute justice, on a ajouté aux prescriptions de
celle-ci les prescriptions différentes de celui-là.
Il en est résulté un surcroît d'obligations imposées aux membres de
la communauté:
(a) De 18:3, différent de Le 7:34, a été
appliqué non plus aux victimes présentées à l'autel, mais aux animaux
de simple boucherie servant à la nourriture des hommes, en quelque
endroit que ce fût (Jos., Ant., IV, 4:4). On ne sait du reste pas
très bien comment les morceaux réservés aux prêtres leur étaient
remis.--
(b) La dîme de De 14:22-27 a été ajoutée à la
première (5°, ci-dessus), comme seconde dîme. Mais ce n'était pas
précisément une prestation en faveur dès prêtres. Elle servait à de
joyeux repas accompagnés de sacrifices au sanctuaire de Jérusalem
(Jos., Ant., IV, 8:8). Les Juifs trop éloignés du temple la
convertissaient en argent, y ajoutaient un cinquième du prix obtenu
et achetaient sur place ce qui devait être consommé à Jérusalem. On
faisait rentrer dans cette seconde dîme celle qui est mentionnée
Le 27:30 et suivant, et la dîme du bétail qui figure dans les
versets suivants (verset 32 et suivant). Un traité de la Mischna
(Maaser scheni) est consacré tout entier à cette seconde dîme.--
(c) La dîme de la 3 e année (De 14:28 26:12),
-primitivement même dîme que celle des années précédentes avec
destination spéciale, était comptée dans les temps postérieurs comme
une troisième dîme, que l'on devait prélever tous les trois ans et
ajouter au produit de la seconde (Maaser scheni, 5:6).--
(d) Les prémices de la toison des brebis (De 18:4),
qui étaient omises dans le Code sacerdotal, ont été rétablies
plus tard (Jos., Ant., IV, 4:4).
De toutes ces prestations qui étaient imposées aux Juifs des
temps postérieurs en faveur des prêtres, sauf la seconde et la
troisième dîmes, il faut distinguer les redevances pour le temple et
l'entretien du culte:
1° La capitation d'un demi-sicle due par tout
Israélite mâle, âgé de plus de 20 ans, qu'il fût riche ou pauvre. Au
lieu d'un demi-sicle (Ex 30:11,15), Ne 10:32 et suivant dit
un tiers de sicle, mais cela tient sans doute à une différence dans
la valeur du sicle. Plus tard le demi-sicle équivalait à deux
drachmes, environ 1,60 fr.-or (cf. Mt 17:24-27 statère =4
drachmes);voir Monnaie.
2° La livraison du bois nécessaire pour brûler les
victimes et les offrandes sur l'autel (Ne 10:34). A cela
s'ajoutaient les offrandes volontaires de diverses natures, qui
pouvaient être très considérables. C'est pour ces offrandes
volontaires que des troncs en forme de trompettes étaient placés dans
le parvis des femmes, près du bâtiment du trésor (Mr 12:41-44).
On voit que l'argent remis aux prêtres, pour eux-mêmes ou pour
l'administration du temple et du culte, ne manquait pas. Tout cela
exigeait un nombreux personnel, et nous ne nous étonnons pas que les
prêtres et les lévites aient occupé une si grande place dans la
communauté post-exilique, spécialement dans les derniers siècles de
l'existence nationale du peuple juif.
Voir Sacrifices, Tabernacle, Temple, Lévitique, Sanctuaire, etc.
CONSULTER. Les Manuels et Dictionnaires d'Antiquités
bibliques.--Wellhausen, Proleg. zur Gesch. Israeïs, 1878, 6 e éd.
1927.--Baudissin, Gesch. des A.T. Priestertums, 1889.--A.
Westphal, Sources, t. II--Schurer, Gesch. des jüd. Volkes im
Zeit. J.-C, II, 4 e éd. 1907.--Koeberle, dans RE, 3° éd., art.
Priestertum im A.T. (vol. 16). L. A.