PENSÉE

Du latin pensare-- peser, payer (les deux sens viennent de ce
qu'on payait primitivement, non en monnaie, mais au moyen d'une
balance). La pensée apparaît donc dans son sens étymologique comme la
faculté de comparer, de juger, de soupeser la valeur des idées
données par l'intelligence. Hébr. hâgâh, réa, rayon ; gr.
dialogismos, dianoïa, noûs, etc.; Vulg, cogitatio,
consilium.
--Chez les Hébreux, le coeur était le siège de la pensée.
Ce qui est une notion philosophique fort suggestive. «Les grandes
pensées, dit Vauvenargues, viennent du coeur.» L'expérience de tous
les jours nous montre que les mauvaises pensées peuvent en venir
aussi.

L'A.T, nous parle de pensées de Jéhovah, infiniment supérieures à
celles de l'homme (Esa 55:9), infiniment meilleures (Esa
55:8), déconcertantes par leur profondeur (Ps 92:6,Esa 40:13,
cf. Ro 11:33), immuables (Job 23:13), incompréhensibles aux
païens (Mic 4:12), innombrables et précieuses pour le
fidèle (Ps 139:17 et suivant), destinées à procurer la paix, à
assurer l'avenir et à nourrir d'espérance le peuple de Dieu (Jer
29:11).

La Bible parle aussi des pensées de l'homme; elle les déclare
foncièrement mauvaises (Ge 6:5, cf. 1Jn 5:19). Dieu les
connaît (Ps 94:11 139:2-23,Esa 66:18,1Co 3:20 Heb 4:12 etc.).
Jésus les pénètre et, par cette vision prophétique, trouble ses
interlocuteurs et remplit d'admiration ses disciples (Mt 9:4
12:25,Mr 2:6 Lu 6:8 9:47 11:17,24:38,Jn 2:25). Tandis que l'amour
chrétien inspire de bonnes pensées (1Co 13:3 etc.), la sagesse
humaine livrée à elle-même ne nourrit la pensée que de vanité (Ro
1:21). Ce qu'il y a de plus redoutable pour l'homme, c'est qu'il se
laisse aller «au gré de ses pensées» (Esa 65:2,Jer 18:12, cf.
Sir 23:2, Sag 1:3,5,Eph 2:3); ce qui fait que
l'Évangile assure son salut, c'est qu'il amène «toutes les pensées
captives à l'obéissance de Christ» (2Co 10:5).

Jésus, s'en référant à la loi fondamentale du mosaïsme,
(De 6:4 et suivant) insiste sur le fait qu'il ne suffit pas d'aimer
Dieu de tout son coeur, son âme, sa force, mais qu'on doit aussi
l'aimer de toute sa «pensée» (Mr 12:30). Il met en lumière, par
là, le rôle de l'idée, à côté du sentiment et de la volonté, dans la
formation de nos convictions religieuses et la solidité de notre foi.

Comme la philosophie hébraïque n'a pas tous les compartiments
dont la nôtre a hérité de la spéculation des Grecs, il se trouve que,
malgré son caractère rudimentaire, elle respecte mieux l'unité
organique de l'être humain. C'est ainsi qu'on y trouve la pensée
liée, non pas seulement à la méditation (Ec 7:3,Mt 16:7,Ac
10:19), à la réflexion (Mt 21:23,Lu 1:29,1Co 13:11), à la
délibération intérieure qui s'exprime en conseils ou en
desseins (Esa 14:26,Pr 21:30,Ps 5:11 etc.), mais au coeur, à la
raison, à la conscience, à la volonté, d'un mot à tout ce qui, dans
la complexité de son être intime et dans ses réactions au contact du
monde extérieur, constitue l'homme vivant, agissant, et, dans ses
actes, indivisible (voir Homme, Coeur, Conscience, Chair, Esprit,
Sentiment).