MULTITUDE

Dans l'A.T. , traduction de deux mots hébreu:

(a) hâmôn, employé 62 fois dans le sens d'une
grande quantité d'hommes;

(b) rôb, employé 67 fois pour désigner une grande
quantité d'objets.

Dans le N.T. , le mot multitude est employé pour rendre deux mots grec:

(a) okhlos, en général traduit par «foule», qui se
rencontre 174 fois;

(b) plêthos ; ce dernier est presque particulier à
Luc, car, sur 32 fois dans tout le N.T., il se rencontre 8 fois dans
le 3 e évangile et 17 fois dans les Actes. Dans la plupart des cas,
okhlos, qui vient d'un verbe ayant le sens de: remuer, veut dire
foule, sans nuance spéciale.
Plêthos, qui vient d'un verbe qui exprime l'idée d'être plein,
est, au contraire, beaucoup plus riche; il peut signifier, soit une
grande foule, soit les habitants d'un pays ou d'une ville, soit une
assemblée, soit une grande quantité d'objets.

Multitude évoque l'idée d'une très grande, quantité, d'une masse,
souvent confuse, d'hommes; mais les mots hébreux et grecs employés
dans le texte biblique peuvent exprimer des nuances plus ou moins
rapprochées du sens original, et dont nous avons à tenir compte.

L'A.T., par exemple, qui emploie «multitude» pour un grand
rassemblement d'hommes (voir Ramassis d'étrangers), peut aussi parler
d'une multitude de chars (Esa 37:24), de sacrifices (Esa
1:11), de sortilèges (Esa 47:12), d'iniquités et de
péchés (Jer 30:14,15).

Dans le N.T., «multitude» peut avoir le même sens de foule,
surtout lorsque ce terme rend le mot okhlos, mais, même dans ce
cas, les nuances en sont plus riches. L'idée de confusion, de
désordre, qui s'attache à «multitude», peut aussi bien s'appliquer
aux foules qui éveillent la compassion de Jésus parce qu'elles sont
comme des brebis qui errent çà et là, n'ayant pas de berger pour les
conduire (par ex. Mt 13:2 14:14,19 15:31,32,33,39 Marc 6:34
8:1,2), que, dans un sens péjoratif, à la foule ameutée (par ex.
Ac 16:22 19:33 21:34). L'idée de «très grande foule» est
particulièrement marquée dans Lu 6:17, où la foule (okhlos)
des disciples est opposée à la multitude (plêthos) de ceux qui
étaient venus écouter Jésus. Le mot plêthos peut, du reste, comme
nous l'avons dit, exprimer plusieurs idées plus ou moins parentes de
multitude.

En grec classique, il est employé quelquefois pour désigner le
peuple soit en général: le peuple juif (1Ma 8:20,2Ma
11:16), soit dans le sens de plèbe opposée à l'aristocratie, soit
dans le sens péjoratif de populace.

Ces nuances se retrouvent dans le N.T., en particulier dans Luc
et dans les Actes. Luc emploie plêthos en parlant du peuple d'une
ville ou d'un pays (Lu 8:37,Ac 14:4), de l'ensemble du peuple
juif, considéré comme corps politique (Ac 25:24); il lui donne
un sens plus restreint, connu d'ailleurs par des inscriptions
antiques, celui de communauté, quand il l'emploie pour désigner
l'assemblée des fidèles (Ac 4:32 6:2,5 15:30). Le fait que ce
mot désigne dans Ac 15:12 le concile de Jérusalem semble bien
indiquer que cette assemblée comprenait non seulement les apôtres et
les anciens, mais aussi l'Église dans son ensemble, ce qui est
confirmé par Ac 15:22.

Plêthos prend son sens péjoratif dans Lu 23:1, où ceux
qui amènent Jésus devant Pilate comprennent, en plus des membres du
sanhédrin, la populace qu'ils traînent derrière eux; dans Ac
21:36, où il s'agit d'une véritable émeute de la multitude réunie
dans le temple, ou dans Ac 23:7, où les juges de Paul
s'abandonnent au désordre d'une assemblée populaire.

Enfin, comme dans l'A.T., multitude (plêthos) peut désigner
une grande quantité d'animaux ou d'objets, par exemple dans les deux
récits de pêche miraculeuse une multitude de poissons (Lu 5:6,Jn
21:6), et dans Jas 5:20 et 1Pi 4:8 une multitude de
péchés.

En résumé, nous pouvons dire, sans chercher dans les passages
auxquels nous avons fait allusion une signification forcée, que
l'emploi des mots synonymes multitude et foule dans le N.T. montre
l'attitude, faite d'amour et de raison, de Jésus et de ses véritables
disciples à l'égard de l'humanité: compassion agissante pour les
masses souffrantes, même quand elles sont égarées, mais en même temps
éloignement pour toute forme de désordre.

Ch. B.