MORT

Dans la Bible, ce mot possède plusieurs sens, qu'il faut examiner
successivement.

I Dans l'A.T.

1.

Le sens le plus habituel est évidemment celui de cessation de la vie.
Mais qu'est-ce qui meurt? est-ce la personnalité tout entière, ou
seulement l'une de ses parties? Rappelons ce qu'était l'être humain
aux yeux des Hébreux. L'A.T, présente deux conceptions
anthropologiques. L'une divise l'homme en deux éléments, le corps et
l'âme (à laquelle on donne aussi le nom d'esprit); cette âme
représente le principe de vie et s'identifie presque avec le sang;
lorsque l'âme se sépare du corps, la mort survient, soit
immédiatement, soit au plus tard lors de la décomposition du corps.
C'est l'âme qui descend au Cheol. L'autre conception ne fait que
développer le récit de Ge 2:4-3:22. (cf. Ge 2:7:
l'Éternel...souffla dans ses narines un souffle de vie et l'homme
devint une âme vivante) L'homme est composé de trois éléments: le
corps, l'âme et l'esprit; l'esprit, c'est le souffle divin
indispensable à la vie; (cf. Hab 2:19) l'âme privée de cet
esprit meurt aussitôt et le Cheol l'accueille, mais l'esprit ne meurt
jamais, il quitte le corps et retourne à Dieu;voir (Ps 146:4,Ec
12:9) Esprit.

2.

Que devient l'âme dans le séjour des morts? (voir Eschatologie,
Cheol). Notons d'abord que l'A.T, n'emploie jamais le terme d'âme ou
d'esprit pour désigner les morts; dans le Cheol n'existent que des
ombres (1Sa 28:13 dit même «un dieu»). La condition de ces
ombres est décrite de deux façons nettement distinctes:

(a) les morts sont dans un état d'activité
considérable et de pleine conscience. Ils sont appelés en hébreu
ideônim, litt. «ceux qui savent», les initiés, familiers avec les
choses d'outre-tombe, et auxquels on peut demander conseils ou
précieuses informations. (cf. Le 19:31 20:6,Esa 8:10 19:3, où
nos versions traduisent par esprits, devins, avenir) Un exemple
frappant de cette croyance est fourni par la scène de nécromancie
d'En-Dor (1Sa 28).

(b) Les morts sont dans un état d'inconscience,
d'oubli et de silence (Ps 88:12 94:17 115:17 etc.). Ceux qui
descendent au Cheol n'ont plus aucune communion avec Dieu (Esa
38), ils sont plongés dans un repos inconscient (Job 3:17,Ec
9:10 etc.).

3.

Pourquoi la mort existe-t-elle? Cette question devait inévitablement
se poser. L'A.T, présente souvent la mort comme une punition du péché
et de l'injustice. Toutefois, dans un passage comme De 30:15,19,
la force des antithèses employées (vie et mort, bien et mal) montre
qu'il s'agit d'un fait dont le sens ne correspond pas exactement à la
mort naturelle; de même dans Eze 18:4 et Pr 15:10. Lorsque
la mort est représentée comme un châtiment, il s'agit en réalité
d'une expérience religieuse intime qui dépasse les conditions de la
présente vie. D'ailleurs rappelons-nous la belle expression: «mourir
de la mort du juste» (No 23:10, cf. Ps 116:15,Pr 14:32,
etc.), qui marque aussi une expérience religieuse personnelle. En
réalité, l'A.T, ne dit rien sur la raison d'être de la mort; même le
récit de la chute (Ge 3) n'est pas une véritable explication du
rôle de la mort dans le monde; Adam et Eve ne meurent pas le jour
même de leur transgression, et le verset 22 laisse entendre que, même
après la faute, si seulement l'homme avait mangé du fruit de l'arbre
de vie, il aurait échappé à la mort.--Enfin, dans Esa 25:7 et
suivant
se montre l'idée de l'anéantissement final de la mort lorsque
Dieu l'aura décidé, pensée que reprendra l'apôtre Paul (1Co
15:54) en s'inspirant de Os 13:14.

4.

Les Apocryphes apportent maints renseignements sur les préoccupations
du judaïsme concernant la mort. La Sagesse (ch. 1-5) décrit
l'attitude de l'impie à l'égard de la mort, aborde le problème de la
mort prématurée du juste et celui du sort final des bons et des
méchants. Le Siracide avait également abordé ces questions; pour
alléger les tristesses de la mort, il la présente comme un parfait
repos (Sag 38:23).

II Dans le N.T.

1.

D'une façon générale, le N.T. envisage la cessation de la vie d'une
manière très semblable à celle de l'A.T. L'homme est composé de trois
éléments: le corps, l'âme et l'esprit; l'âme et le sang se confondent
plus ou moins, mais l'âme, en tant que siège de la personnalité,
survit au corps (Mt 10:39), descend dans l'Hadès et reçoit alors
son châtiment (Géhenne) ou les récompenses éternelles (sein
d'Abraham, Paradis). Quant à l'esprit, il n'est que la partie la plus
noble de l'âme; s'il quitte le corps, la mort se produit; s'il
revient, la vie reparaît (Lu 8:55). Souvent les morts sont
appelés des esprits (1Pi 3:19 4:6,Heb 12:23), parfois des
âmes. (Ap 6:9 20:4)

--L'apôtre Paul cependant développe une anthropologie un peu
différente; distinguant trois éléments, le corps (ou chair), l'âme et
l'esprit, il voit dans l'âme, incapable de rien saisir de ce qui est
esprit, le principe vital de la chair; l'esprit, d'autre part,
représente la partie morale et intellectuelle, qui peut entrer en
communion avec l'Esprit de Dieu et constitue une personnalité
immatérielle survivant seule à la mort (1Co 5:5).

2.

L'enseignement de Jésus ne contient rien qui puisse éclairer le
phénomène physique de la mort; et c'est un contraste frappant avec
les écrits rabbiniques de l'époque. La mort elle-même n'est pas
présentée comme un mal en soi, les récits de résurrections ne
montrent pas le retour à la vie comme une délivrance et un bien pour
le ressuscité; c'est par compassion pour le chagrin des autres que
Jésus agit, ou «pour la gloire de Dieu» (Jn 11:4-40). Souvent le
Christ parle de la mort comme d'un sommeil (Mr 5:39,Jn 11:11,13)
qui tombe sur l'homme après les jours de la vie, et dont il
s'éveillera. Enfin, dans le 4 e évangile la mort désigne surtout, au
sens figuré, l'état de l'homme plongé dans Je péché (Jn 5:24
6:50 8:21-24). Dans Jn 11:25,27, la délivrance promise se
rapporte à la mort spirituelle, et cette délivrance dépouille la mort
naturelle de ses terreurs. Voir Eschatologie, Cheol, Hadès, Géhenne,
Paradis.

3.

Dans les autres livres du N.T., on peut noter les points suivants:

(a) La doctrine paulinienne qui voit dans la mort
naturelle la conséquence du péché représente l'interprétation juive
habituelle du récit de la chute, et ne trouve pas d'appui direct dans
les évangiles. Pourtant une idée toute semblable, le sentiment que
«l'aiguillon de la mort, c'est le péché», est largement répandue dans
tout le N.T.

(b) La mort représente souvent un état spirituel qui
permet la vie, mais dans lequel l'homme est privé de tout ce qui est
digne d'être appelé vie.

(c) (cf. Eph 2:1,5 5:14 etc.) La mort désigne
enfin le passage d'une vie de péché à une vie nouvelle et
transformée. Le croyant est alors «mort au péché» (Ro 6:2,1Pi
2:24); il est «mort avec Christ» (Ro 6:8,Col 2:20). Edm. R.