MALÉDICTION

La malédiction, malgré l'interprétation religieuse qu'elle reçoit
dans l'A.T., a longtemps gardé cette signification: maudire =faire du
mal à quelqu'un par des paroles efficaces; voir (Ge 8:21)
Sorcellerie.

Une fois lancée, la malédiction ne pouvait plus être retenue, même
par la divinité (Jos 6:26,1Ro 16:34,Ps 109:17-19,Za 5:3).

Ce n'est qu'après l'exil que l'on reconnu qu'une malédiction
injustifiée n'a pas d'effet (Pr 26:2), ou que Yahvé peut changer
une malédiction en bénédiction (De 23:5 et suivant, Ne
13:2).

L'auteur de No 23-24 pense que dans un tel cas
l'intervention divine empêche la prononciation de la malédiction.

On prononce une malédiction contre le coupable pour se protéger
contre les conséquences du crime qu'il a commis (2Sa 3:28 et
suivant
). Cette malédiction force le coupable à se dénoncer pour
échapper aux effets de la malédiction.

Expiation faite, on annule la malédiction par une bénédiction
(Jug 17:1 et suivant, 2Sa 21:3).

Souvent la malédiction est accompagnée d'un rite de magie
imitative: la femme soupçonnée d'infidélité doit avaler la
malédiction, c'est-à-dire l'encre qui a servi à l'écrire (No
5:11,31); pour conclure une alliance les contractants passent entre
les morceaux d'un ou de trois animaux coupés par le milieu: que Dieu
les taille en pièces comme ces animaux s'ils ne restent pas fidèles à
leurs engagements (Jer 34:17,20,Ge 15:7,17: Yahvé lui-même se
soumet à cette malédiction!).

Chez les prophètes nous retrouvons la même liaison étroite entre
la malédiction et l'alliance. Jérémie (Jer 11:3-8) maudit
l'homme qui n'observera pas l'alliance renouvelée par le Deutéronome,
et Ézéchiel (Eze 16:59) considère la catastrophe de 586 comme
une malédiction qui frappe son peuple infracteur du traité d'alliance
conclu avec son Dieu.

Le type primitif du serment prononce également une malédiction
efficace pour le cas où l'affirmation qu'il s'agit de corroborer ne
serait pas vraie (1Sa 14:24-28).

Mais généralement la malédiction est sous-entendue dans la
formule du serment (2Sa 19:8,1Ro 1:51), ou bien remplacée par un
euphémisme (1Sa 25:22,2Ro 6:31). Car on craint de prononcer une
malédiction sans condition comme Ps 7:4,6,2Sa 1:21; on spécifie
sous quelles conditions la malédiction devra agir (Jug 9:16-20,2Sa
3:9), ou bien on la supprime complètement.

C'est pourquoi l'A.T, ne contient qu'un petit nombre de
malédictions, bien que dans un peuple aussi passionné et fougueux
qu'Israël la malédiction ait dû jouer un grand rôle; les quatre
synonymes dont dispose l'hébreu pour exprimer l'idée de malédiction
et la défense formelle de Ex 20:7 n'admettent aucun doute à ce
sujet.

Si la malédiction une fois prononcée se réalise tôt ou tard, à
moins d'être neutralisée par une bénédiction, son objet par contre peut
changer. Ainsi Rébecca se substitue à Jacob en disant: «Que la
malédiction qui pourrait te frapper retombe sur moi!» (Ge
27:13). Une substitution semblable est le pivot de l'interprétation
paulinienne de la rédemption.

En établissant une équivalence entre la malédiction qui résulte
de la mort sur la croix (De 21:23) et celle dont la Loi menace
le transgresseur, l'apôtre explique la puissance rédemptrice de la
mort du Christ (Ga 3:13), conception qui, depuis Anselme de
Cantorbéry, joue un grand rôle dans la dogmatique chrétienne.

Dans l'A.T, une malédiction prononcée dans le passé sert souvent
à expliquer des faits présents. Le genre de vie du serpent et son
inimitié contre l'homme (Ge 3:14), les douleurs de
l'enfantement (Ge 3:16), la dureté du travail (Ge 3:17,19),
la servitude des Cananéens (Ge 9:25) sont dus à une malédiction.

Le plus haut niveau religieux atteint par le judaïsme permet
encore de maudire ses ennemis. (cf. Ne 6:14,Ps 137:8 139:19-22
etc.)

Jésus (Mt 5:44,Lu 6:28) et son grand apôtre (Ro 12:14)
sont les premiers à répondre par une bénédiction à ceux qui
maudissent.

Mais les «malheur à vous!» prononcés par le Seigneur ne sont pas
des malédictions: ce sont des déclarations prophétiques constatant
par anticipation les malheurs auxquels se vouent les pécheurs
obstinés (Lu 6:24,26,Mt 11:21 23:13 24:19 26:24 etc.).

F. K.

Révision Yves Petrakian 2005