JAËL

Femme de Héber le Kénien, connue dans l'histoire de Débora comme la
meurtrière du roi Sisera, ennemi d'Israël. (voir Jug 4-5) Après
la victoire de Barak sur les Cananéens à Méguiddo, Sisera vaincu,
poursuivi par les Israélites, passa auprès de la tente de Jaël et
crut trouver chez elle un refuge, selon les lois de l'hospitalité en
honneur chez les bédouins. D'après le récit en prose (Jug 4),
Jaël, après lui avoir donné à boire, attendit son sommeil pour
l'assassiner en lui perçant la tempe avec un piquet de tente (verset
21). D'après le poème, appelé «cantique de Débora» (Jug 5), elle
le frappa à l'instant même où il buvait à la coupe pleine de lait
qu'elle lui tendait (verset 26). Elle dut commettre cet acte affreux
de trahison pour servir la cause israélite: on la décrit s'empressant
au-devant de Barak afin de lui annoncer la nouvelle (Jug 4:22);
aussi est-elle louée sans réserve par le poète, comme un instrument
de Jéhovah (cf. la prédiction de Débora dans Jug 4:9: tout le
mérite de la victoire revient à l'Éternel, qui a choisi pour vaincre
ses ennemis deux simples femmes). Cette approbation du crime
s'explique par le caractère guerrier de ce chant: tous les moyens
semblent bons à l'auteur pour supprimer les ennemis de Jéhovah.

La famille du Kénien Héber intervient d'une façon assez inattendue
dans l'histoire de Débora. La tradition représente les Kéniens (voir
ce mot) comme descendants de Caïn, et explique par là leur existence
de nomades; ce groupement eut de bonne heure des relations d'amitié
avec les tribus hébraïques: le beau-père de Moïse est représenté
comme un Kénien. Bédouins non israélites, voyageant de pâturage en
pâturage, ils ne devaient pas être considérés par les Cananéens comme
des envahisseurs au même titre que les tribus hébraïques. Cela peut
expliquer la notice de Jug 4:17 sur les relations amicales entre
Héber et Jabin, roi cananéen de Hatsor. On ne s'attendrait pourtant
pas à trouver les Kéniens, bédouins du Négeb (désert du S.) au Nord
de la Palestine à Kédès (verset 11); moins surprenante est la suite
du récit, qui nous montre Jaël installée dans la plaine de Jizréel,
sur le passage de Sisera fuyant, aux environs de Haroseth-Goïm, car
des troupes de bédouins du S. pouvaient fort bien venir séjourner
dans cette vallée fertile.

L'expression du poème: «aux jours de Jaël» (Jug 5:6)
s'explique par l'importance historique de son intervention; certains
critiques y voient pourtant une allusion à un chef, peut-être un
juge, par ailleurs totalement inconnu.