GOUVERNEMENT DE L'ÉGLISE

Après la mort et la résurrection de Jésus, ses disciples--et plus
spécialement parmi eux les apôtres, ou les Douze (Mt 10:1,Mr
6:7,Lu 9:1,Ac 1:2), qui avaient vécu, avec lui et l'avaient
accompagné pendant son activité terrestre--devinrent le noyau autour
duquel se groupèrent les fidèles. (cf. Ac 1:14) A Jérusalem,
après quelques années, les apôtres Pierre et Jean, avec Jacques le
frère du Seigneur, seront désignés par saint Paul comme «les colonnes
de l'Église» (Ga 2:9). A l'origine, nous ne trouvons aucun souci
d'une organisation ecclésiastique, encore moins d'une hiérarchie; peu
à peu cependant les besoins de communautés grandissantes donnèrent
naissance à des ministères divers. Paul énumère comme dirigeant
l'Église les apôtres, les prophètes et les docteurs (1Co 12:28);
nous trouvons de même des prophètes et des docteurs à la tête de
l'Église d'Antioche (Ac 13:1). Cette liste nous fournit un point
de départ.

1.

Apôtres.

Lorsqu'il s'agit de remplacer Judas, les fidèles (et non pas les
apôtres) désignèrent Justus et Matthias; pour choisir entre les deux
candidats, on eut recours non aux apôtres, mais au sort (Ac
1:26). Cet exemple montre que la première communauté, d'ailleurs peu
nombreuse, s'administrait elle-même; par contre, les apôtres en
étaient les inspirateurs, leur tâche était d'affermir la foi des
fidèles, d'enseigner (Ac 2:42), de propager leurs convictions au
dehors. Le cas de Matthias nous apprend que pour être apôtre il
fallait avoir connu Jésus-Christ, l'avoir accompagné depuis son
baptême et avoir été témoin de sa résurrection. Nous ignorons si
Barnabas (Ac 14:14), Andronique et Junias (Ro 16:7)
remplissaient ces trois conditions; quant à saint Paul, pour avoir
été l'objet d'une apparition du Ressuscité (1Co 15:6,8), il se
considérait comme un apôtre, l'égal des Douze (1Co 9:1), chargé
spécialement d'un ministère auprès des païens (Ga 2:8), et il
n'hésita pas, en vertu de cette vocation surnaturelle, à entrer en
contestation avec Pierre (Ga 2:11). Apôtre (voir ce mot) ne
signifie donc pas exclusivement l'un des Douze. L'apôtre
(grec apostolos) est un envoyé, chargé d'une mission spéciale (2Co
8:23), et ceci en vertu d'un appel direct du Christ (Ga
1:1,11,Ro 1:1 etc.).

2.

Prophètes.

Avec Anne (Lu 2:36) et Jean-Baptiste, nous constatons
l'existence du prophétisme dans la sphère du N.T. Jésus aussi a été
qualifié de prophète (Mr 6:15). Les prophètes étaient nombreux
dans l'Église primitive; ces prédicateurs inspirés révélaient ce que
Dieu leur dictait; ils étaient en outre chargés d'exhorter, d'édifier
et de consoler (1Co 14:3); leur ministère était considéré comme
constituant, avec celui des apôtres, la base même de
l'Église (Eph 2:20 3:5); Paul en appréciait hautement la
valeur (1Co 14). Le prophétisme était l'une des charges
importantes de l'Église, comme le montrent Ac 11:27 13:1 21:10.
Ce ministère était aussi exercé par des femmes (Ac 21:9,1Co
11:6). Mais, de la recommandation de 1Th 5:20, il résulte que
de bonne heure cette activité tomba en discrédit; 1_Jean, 2Pi et Jude
mettent leurs lecteurs en garde contre les faux prophètes.

3.

Docteurs.

Ceux-ci avaient plus spécialement la charge de l'enseignement, soit
pour compléter les connaissances des néophytes, soit pour instruire
l'ensemble de la communauté.

4.

Évangélistes.

Mentionnés Ac 21:8,Eph 4:11. Leur ministère semble participer à
la fois de l'apostolat, du prophétisme et de l'enseignement;
l'évangéliste figure toujours après les apôtres et les prophètes,
niais dans certaines listes il précède les docteurs (Eph 4: et
suivant
). D'après Ac 6:1-6, les évangélistes sont les aides des
apôtres; cependant les sept personnages, choisis pour le service des
tables et couramment appelés diacres, quoique ce mot ne figure pas
dans Act., mais parce qu'y figure le mot diaconia =
service (Ac 6:1 et suivant), loin de se confiner dans cette
tâche, agissent comme évangélistes-missionnaires: Etienne (Ac
6:8 et suivants), Philippe (Ac 8:6 et suivant).

Les ministères énumérés plus haut ont un double caractère:

(a) Ils sont conçus comme des charismes, ou dons de
l'Esprit, répartis à l'exclusion de toute intervention humaine et de
l'initiative des fidèles (1Co 12:4-11). Dieu choisit
souverainement des organes, dont l'autorité réside dans cette
élection même,

(b) Ces ministères ne sont pas localisés dans telle ou
telle communauté; les apôtres, les prophètes, etc., agissent dans
l'ensemble des groupements chrétiens, et leur itinérance assure
l'unité des Églises en une Église. Il en va autrement des fonctions
dont il nous reste à parler.

5.

Anciens (Ac 11:30 15:4,6,22,23).

Avec les anciens (grec presbutéroï) apparaît pour la première
fois une fonction localisée, par conséquent un commencement
d'organisation. Les anciens ou presbytres ne sont pas forcément les
membres les plus âgés du groupement, ce sont les notables; ils
administrent les fonds et délibèrent à côté des apôtres sur les
questions intéressant la communauté. Dans Ac 21:18, les anciens
prennent des décisions avec Jacques, frère de Jésus, sans qu'il soit
question des apôtres. Dans les différentes listes de dons spirituels
ou charismes dressées par Paul (1Co 12:28,Ro 12:6,8,Eph
4:11-12), le presbytérat ne figure pas; par contre, il est question
du pro-ïstaménos (président: Ro 12:8,1Th 5:12) qui doit agir
avec zèle. Ces proïstaménoï n'ont pas d'autorité spéciale, ils
organisent la communauté, s'occupent sans doute des questions
financières, mais dès qu'il s'agit de conflits dogmatiques (1Co
1:10 et suivants), moraux (1Co 5:1,8) ou
disciplinaires (1Co 11:17-34), Paul intervient lui-même, il en
appelle à son autorité ou au jugement de la communauté (1Co 10:16
14:37 et suivant, etc.), jamais à certaines personnes dont les
fonctions auraient été de gouverner l'Église locale. Dans les
communautés auxquelles Paul a adressé des lettres, nous ne constatons
pas l'existence d'anciens, mais Ac 14:23 raconte que Paul et
Barnabas établirent des anciens à Lystre, à Iconium et à Antioche de
Pisidie, et d'autre part il y avait des anciens à Éphèse (Ac
20:17). Il n'est pas impossible que les proïstaménoï de
Thessalonique aient reçu en Asie Mineure le nom de presbytres;
l'organisation des premières communautés différait certainement
suivant les circonstances et les régions (voir Ancien).

6.

Évêques. Voir ce mot.

7.

Diacres.

Nous avons déjà indiqué que les «sept» choisis pour aider les
apôtres (Ac 6) étaient des évangélistes et non des diacres au
sens traditionnel de ce mot. Nous trouvons les diacres associés aux
évêques parmi les destinataires de la lettre à l'Église de
Philippes (Php 1:1). Une diaconesse est nommée Ro 16:1. Les
femmes dont il est parlé 1Ti 3:11 sont des diaconesses. Il y a
là les premiers éléments d'une organisation qui ne tardera pas à se
stabiliser et à se spécialiser, les presbytres étant chargés des
affaires proprement religieuses et les diacres des affaires
matérielles, de l'assistance aux pauvres, etc. L'inspiration
individuelle demeure très vivante; il n'y a encore aucun gouvernement
ecclésiastique et surtout aucune organisation identique pour toutes
les communautés. Voir Diacre, Diaconesse.

Les livres les plus récents du N.T. nous montrent dans quel sens
va se dessiner l'évolution. Dans Jas 5:16, les fidèles
confessent leurs péchés les uns aux autres, et non aux presbytres,
mais la prière du presbytre et son onction ont une valeur spéciale
(verset 14); c'est la première étape de la transformation du
presbytre en prêtre.

Une nouvelle étape est atteinte avec les Pastorales: les
presbytres ou évêques forment un corps constitué, ils absorbent les
fonctions des prophètes, docteurs et évangélistes (1Ti 5:17),
leur recrutement est soumis à certaines conditions (1Ti 3:1-7
5:22) --le célibat n'y figure pas; ils sont aidés dans leur tâche
par les diacres, qui se trouvent ainsi associés au gouvernement de la
communauté. L'organisation se précise: Ti est chargé d'installer des
anciens dans chaque ville de Crète (Tit 1:6), selon certaines
règles définies (Tit 1:6,9). Avec l'épître aux Hébreux,
l'autorité s'accentue: les conducteurs ou directeurs sont
responsables du salut des âmes, l'obéissance leur est due (Heb
13:7,17,24); mais le pouvoir spirituel et la discipline ne sont pas
encore concentrés entre les mains d'un seul, la communauté est
dirigée par un collège de conducteurs. Voir Église.

Rl P.