EZÉCHIAS

Roi de Juda, d'environ 719 à 691, fils d'Achaz et contemporain des
prophètes Ésaïe et Michée. L'Assyrie est alors de plus en plus
maîtresse des destinées de la Palestine. Samarie a succombé sous ses
coups en 722, Juda et ses voisins en subissent la suzeraineté. Les
Assyriens n'en doivent pas moins faire face aux menaces
d'intervention égyptienne, tandis que les vassaux n'aspirent qu'à
redresser la tête.

Sous Ézéchias, un parti fermement résolu à secouer le joug de
l'Assyrie s'oppose à celui qui, avec Ésaïe, estime toute résistance
vouée aux pires échecs, et l'appel au secours de l'Egypte également
décevant. Mais la voix du prophète ne fut pas écoutée. Une première
révolte, à laquelle Juda ne semble pas avoir participé, s'achève par
la défaite de Karkar, près Hamath. Une seconde, fomentée par la ville
philistine d'Asdod, eut bientôt le même sort (Esa 20:1). La mort
du souverain assyrien,Sargon (705), rendit pourtant l'espoir à ses
vassaux impatients de recouvrer leur indépendance; Phéniciens,
Philistins et Judéens, tablant sur l'appui de l'Egypte et peut-être
après accord avec le roi des Caldéens, Mérodac-Baladan, conclurent
une alliance où entrèrent aussi les princes secondaires de Palestine.
L'entreprise était aussi désespérée que les précédentes. Il suffit à
Sanchérib, successeur de Sargon, de paraître en Syrie pour soumettre
les Phéniciens, puis les Philistins. Il s'empara ensuite de Lakis, au
Sud de Jérusalem, et investit la capitale. Lorsqu'une armée
égyptienne se présenta, elle fut défaite à Elthéké (Altakou), entre
Jérusalem et Ékron. Obligés de se retirer fortuitement avant d'avoir
enlevé d'assaut la ville sainte, les Assyriens n'en maintinrent pas
moins leur puissante suzeraineté. Ézéchias avait dû leur livrer
trente talents d'or et 300 (ou 800 d'après les textes assyriens)
talents d'argent, qu'il se procura en aliénant les trésors du temple.
200.000 hommes furent déportés, tandis que quarante-six localités,
presque tout l'ouest de Juda, étaient abandonnées aux Philistins.
Cette fois l'abaissement prenait des proportions telles qu'aucune
autre tentative d'insurrection ne s'affirmera durant plusieurs
dizaines d'années. L'existence nationale de Juda subsistait
cependant, fort précaire, et Jérusalem avait échappé à la ruine; le
petit groupe des disciples d'Ésaïe vit là un accomplissement frappant
des discours de ce prophète.

D'après 2Ro 18:4, Ézéchias avait entrepris d'abolir le culte
des «hauts-lieux», avec leurs stèles et arbres sacrés; il avait mis
fin à l'adoration du serpent d'airain. Cette réforme religieuse
fut-elle due à l'influence du prophète Ésaïe, plus écouté qu'en
politique? Hypothèse plausible mais invérifiable. On ne peut se
fonder sur les développements tardifs de 2Ch 29 2Ch 30 2Ch 31.
La campagne de Sanchérib en Palestine, l'an 701, est relatée dans les
deux passages identiques (2Ro 18 et 2Ro 19,Esa 36 et Esa
37), où la critique moderne distingue trois documents: une notice
historique spécifiant le tribut imposé à Ézéchias (2Ro
18:13-16, non conservé dans Es.), et deux récits amplifiés:
ambassade de Sanchérib à Ézéchias (2Ro 18:17-32,36 19:1-9,36)
délivrance de Jérusalem (2Ro 19:10-21,32-35) réunis par le
rédacteur en 2Ro 19:9. Sanchérib envoie à Ézéchias sommation de
se rendre; Ézéchias consulte l'Éternel. La réponse divine prédit la
retraite de Sanchérib, et un ange de l'Éternel frappe l'armée
assyrienne de la peste. Il y a là deux séries de faits presque
identiques qui représentent deux recensions d'une même tradition;
l'une et l'autre laissent voir que du profond abaissement d'Ézéchias
la fierté nationale parvient à tirer des motifs d'exalter au
contraire son prétendu triomphe, et d'abord celui de son Dieu, sur
l'idolâtre Assyrie. C'est encore une tradition remaniée qui raconte
la maladie d'Ézéchias (2Ro 20:1-11,Esa 38); le signe miraculeux
du cadran (voir Cadran d'Achaz) est plus amplifié dans le texte des
Rois.

Le pieux Ézéchias de ces récits contraste avec le monarque épris
de magnificence qui, dans 2Ro 20:12-19,Esa 39:1,8, étale avec
complaisance ses trésors devant les envoyés de Mérodac-Baladan, roi
des Caldéens. Cet événement peut se placer entre 719 et 709 ou en
703-702, alors que ce personnage régnait à Babylone. Ésaïe prédit à
ce propos à Ézéchias que ses richesses mêmes lui seront ravies pour
être emportées en Babylonie.

Enfin divers éléments sont insérés dans la trame des récits
précédents:

Un beau discours d'Ésaïe, évidemment authentique:
2Ro 19:21-31.

Un psaume: Esa 38:10-20, absent du texte des
Rois. C'est un hymne d'actions de grâces, qui, comme ceux du
psautier, décrit d'abord la souffrance (maladie) pour aboutir à
célébrer l'intervention de l'Éternel et la délivrance reçue de lui.

Notices relatives à la victoire d'Ézéchias sur les
Philistins: 2Ro 18:8; à l'aqueduc qu'il construisit en prévision
du siège: 2Ro 20:20,2Ch 32:30, Sir 48:17 (Il doit s'agir là
du canal de Siloé); à des fortifications: 2Ch 32:5

D'après Pr 25:1, ce roi aurait fait réunir une collection de
sentences, noyau de celle qu'on lit dans Pr 25-29.--Il est cité
dans Mt 1:9. JQ. M.