EXCELLENT

L'épithète grecque kratistos, appliquée chez les classiques aux
dieux ou aux rois «tout-puissants», était fréquente dans l'Empire
romain comme titre honorifique de grands personnages appartenant à la
chevalerie de Rome. Il correspondait à l'expression protocolaire
«Votre Excellence» et désignait le haut rang social, sans jugement de
valeur sur le caractère.

C'est ainsi qu'en deux occasions officielles, une lettre et une
plaidoirie, il est adressé au procurateur Félix (Ac 23:26 24:3),
et que saint Paul l'adresse aussi au procurateur Festus (Ac
26:25). Dans les papyrus des premiers siècles, ce terme qualifie de
même des dignitaires de marque: préfet, gouverneur général, etc.; et
ce n'est qu'au III e siècle qu'on commence à l'appliquer à de
moindres fonctionnaires (VGT, p. 358).

Si Luc l'emploie aussi avec sa valeur strictement protocolaire
dans la préface de son évangile: «excellent Théophile» (Lu 1:3),
la situation officielle de celui-ci dans l'empire s'accorde d'autant
mieux avec le point de vue de Luc, surtout dans les Actes, plutôt
favorable à la puissance impériale. D'après Zahn, les chrétiens ne se
seraient pas décerné entre eux de ces titres honorifiques, d'où il
s'ensuivrait que Théophile n'était pas encore chrétien; mais cette
remarque est sans preuve. D'ailleurs on peut encore admettre que par
ce terme d'excellent, Luc n'adresse à Théophile qu'un hommage de
courtoise amitié, comme on en connaît des exemples profanes (Denys
d'Halic, Josèphe, etc.): il est à noter que, dans son deuxième
volume, il ne le répète pas; il dit simplement: «ô Théophile» (Ac
1:1).