ESPÉRANCE
Le verbe espérer (du latin spero) au début voulait dire attendre
en général. Ce sens; se retrouve dans le langage des marins, dans
celui de certaines régions du Midi de la France ( espérez-moi),
dans l'espagnol (salle d 'espérance, pour salle; d 'attente).
Maintenant, espérer signifie attendre comme probable
un bien qu'on désire.
I Dans l'A.T.
Il arrive que nos versions rendent occasionnellement par «espérer» ou
«espérance» des termes hébreux dont la racine exprime une nuance
voisine: par ex. bâtakh, qui représente un état de tranquille
sécurité, la confiance, presque la foi, en Dieu, en certaines
personnes ou en l'avenir (Jer 17:7,Ec 9:4 etc.); câsal, qui
évoque les reins et par là l'idée de s'appuyer, se soutenir (Job
4:6), mais qui lorsque l'appui est mal choisi désigne plus souvent
la sottise (Ecc 7:25); sâbar, mot tardif, qui signifie
examiner, puis compter sur qqn ou quelque chose (Ps 119:116,Est
9:1 etc.); iâkhal, plus commun, qui exprime l'attente (Job
6:11,Ps 33:18,22 42:5,11 43:4,La 3:24 etc.). Mais c'est thiqvâh
qui en hébreu désigne proprement l'espérance; la racine de
ce nom, qâvâh, évoque la «tension» (comparable à celle d'une
corde) qui se trouve aussi dans notre verbe «attendre»; c'est la
patience ferme, endurante, tournée vers un bien à venir (Ge
49:18,Ru 1:12,Job 14:7,19,Ps 25:21,Os 2:15,Eze 37:11,Za 9:12 etc.).
Les espérances de l'A.T, ont été graduelles. Tout d'abord elles
ont envisagé les avantages terrestres, la restauration politique, le
rétablissement du peuple. Dans les origines, Jéhovah est considéré
comme Dieu de la nation, qui la protégera toujours, même sur terre
étrangère. Mais les prophètes affirment que l'espérance d'Israël est
subordonnée à sa fidélité; et, après des catastrophes, paraîtra
l'Israël nouveau, la Jérusalem de l'avenir. La restauration sera en
Palestine, dans le pays. C'est avec Jérémie et Ézéchiel que
l'idéalisme religieux se dégage du nationalisme vulgaire et que la
piété individualiste commence à s'affirmer. Et même l'Israël ne sera
nouveau qu'après la disparition tragique de l'Israël ancien (Jer
31:31-34). Voici Israël en exil. La tradition religieuse est
conservée. L'espérance se développe, elle devient universelle,
Jéhovah est le maître du monde, le Dieu de la terre et du ciel. Pour
le second Ésaïe, Dieu est le Dieu de toutes les nations. Israël sera
le témoin de Dieu parmi tous les peuples qui viendront à Jérusalem.
Mais l'espérance prend toujours plus de grandeur, de spiritualité, de
sublimité, dans Esa 53. Le «Serviteur de l'Éternel» (voir art.)
viendra; par la souffrance et l'humiliation il sauvera son peuple.
Esa 42:1-4 montre que le monde espère en son enseignement. Puis
ce sera la gloire du Serviteur de l'Éternel, l'ère messianique, la
nouvelle humanité. Elle espérera en Dieu et elle ne sera pas
confondue (Esa 49:23). A côté de l'espérance messianique et de
l'attente du royaume de Dieu, progresse la croyance à la résurrection
des morts (Esa 25:8 26:19,Da 12:2,Ps 16:8,11 17:15).
Les Apocalypses juives exaspérèrent l'orgueil national et
l'espérance politique aux premiers temps de l'ère chrétienne, mais en
gardant toujours la vision de l'humanité où le péché sera aboli et où
il n'y aura plus de mort. L'espérance est immense, toute la création
y est intéressée.
II Dans le N.T.
Le substantif grec elpis, le verbe elpizeïn, veulent dire
espérance, attente, bonne ou mauvaise. En voici quelques citations:
attente de l'avenir (Lu 6:34 23:8,Ac 26:7,1Co 16:7,Php 2:23,1Ti
3:14,2Jn 1:12,3Jn 1:14); confiance placée en quelqu'un (Mt
12:21,Ro 15:12 etc.), principalement en Dieu (1Pi 3:5,2Co
1:10,1Ti 4:10), en Jésus (1Co 15:19); espoir qui est déjà
possession (1Co 13:13,2Co 3:12), ou qui confère les
réalités (Tit 3:7); espoir qui anime la personne (Ac
28:20: espérance d'Israël); enfin espoir de la vie future, et, par
métonymie, l'auteur de cet espoir (Ac 23:6, etc., Col 1:27,
etc.); quelques fois l'espérance se complète de la patience:
«patience de l'espérance» (1Th 1:3); ainsi, attendre, souhaiter,
compter sur, deviennent interchangeables (Ro 8:19,25). Les
espérances du N.T. n'apparaissent vraiment qu'avec la vie chrétienne;
elles commencent à la résurrection de Jésus, prennent corps lors du
don du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte, et jouent un grand rôle
dans les épîtres. L'eschatologie de saint Paul forme le résumé des
espérances bibliques du N.T. L'objet de l'espérance est la gloire de
Dieu, la parousie ou retour du Seigneur (1Co 15:22,Phi 1:10
3:21); la vie nouvelle qui est en Christ doit éclore dans la
résurrection de nos corps mortels (Ro 8:23). Ce n'est pas la
même matière qui formera la plante nouvelle et pourtant le type en
restera: le corps, semé corruptible, ressuscitera incorruptible; le
corps deviendra lui-même spirituel. Alors sera le triomphe absolu de
Jésus. Il n'y aura d'autre autorité que la sienne. Ses ennemis seront
mis sous ses pieds (1Co 15:24,28). Le but est le ciel; ce
n'est pas le simple progrès moral, mais bien l'avènement du Seigneur,
qui est le but. Les raisons de croire sont dans les promesses de
Dieu, et la garantie est dans la résurrection et l'ascension du
Sauveur. Les sujets sont les hommes de la foi, les chrétiens.
Enfin l'espérance est collective, c'est l'héritage du corps de
Christ. C'est une consolation éternelle, que la «bonne
espérance» (2Th 2:16). On a pu résumer toutes les données
scripturaires sur l'espérance dans cette définition: «l'attente des
biens que Dieu nous a promis» (Jean Monod, dans Encycl., t.
IV, p. 537). Elle est tout entière contenue dans Jn 3:16 et
6:68. Paul la condense en ces mots: «Jésus, notre espérance» (1Ti
1:1,Col 1:27). H. B.