ENTRAILLES

Généralités.

Le mot entrailles, qui ne s'emploie qu'au pluriel, n'est pas un terme
scientifique, car il ne désigne pas un organe ou un groupe d'organes
défini. Pris au sens restreint, il est synonyme d'intestin, non tant
comme conduit digestif que comme masse viscérale contenue dans la
cavité abdominale. Pris au sens large et commun, il désigne tous les
viscères contenus dans la partie basse du corps, le ventre, et par
conséquent les organes maternels. On parlera ainsi des entrailles
maternelles, du fruit des entrailles, des entrailles qui nous ont
portés, etc.

Au sens figuré, le mot entrailles sera utilisé pour nommer ce qui
est profond, presque inaccessible, ce qui est le centre caché et
vital: les entrailles de la terre, pour désigner la partie
inférieure, profonde et cachée du globe; les entrailles de la patrie,
pour désigner ce qu'il y a de plus intime dans un pays. Cette
dernière expression déborde le sens de partie profonde, et nuance
d'un élément sentimental le mot entrailles. C'est que ce terme, plus
évocateur que descriptif, plus poétique que précis, est employé dans
des images très répandues qui doivent leur sens à des idées antiques.

Les anciens faisaient des entrailles le centre de toute affection
ou émotion douce, agréable, heureuse; de là viennent beaucoup
d'expressions où entrailles devient synonyme de coeur, désignant la
source des sentiments. Les entrailles paternelles, les entrailles
maternelles, etc., désignent l'amour paternel, maternel, etc. Une
connaissance plus approfondie de la physiologie a ôté tout sens à
cette localisation du sentiment en des régions aussi peu distinguées
de l'organisme, mais les expressions ont subsisté. (C'est ce fait qui
a amené quelques traductions modernes [p. ex. Vers. Syn.] à
substituer parfois au mot entrailles un autre vocable, mais c'est là
une interprétation du texte, non une traduction.)

L'idée des anciens de faire des viscères ou du coeur le siège des
affections s'explique par les impressions qui sont ressenties dans
les entrailles sous le coup d'une émotion, et par les mouvements
accélérés du coeur sous l'effet des mêmes causes.--Les entrailles
jouèrent un grand rôle dans le paganisme antique, notamment chez les
Romains: une classe sacerdotale, les aruspices, avait pour mission
d'examiner les entrailles des victimes pour y trouver des divinations
et des présages. Cette pratique, d'origine étrusque, se maintint même
sous les empereurs chrétiens, jusqu'en 419, sous le règne d'Honorius,
qui condamna à la déportation tous les mathematici, lisez les
devins.

Bible.

Dans la Bible le mot entrailles est fréquemment employé aux divers
sens mentionnés plus haut. Au sens restreint il s'agit des viscères
intestinaux, siège de la digestion (Eze 3:3,Ap 10:9). Dans le
détail des sacrifices, il en est de même (Le 1:13 4:11 8:21
9:14,Ex 29:17); la graisse des entrailles (Ex 29:13,Le 3:3 4:8
7:3) représente le péritoine, c-à-d, le mésentère qui suspend
l'intestin et le grand épiploon qui recouvre les viscères, ce tissu
retenant spécialement la graisse. Les maladies d'entrailles sont des
dérangements ou des infections intestinales (2Ch 21:15,18,Ps
38:8,Jer 4:19). Les entrailles sont le siège de la maternité (Ge
15:4 25:23,2Ch 32:21,Pr 31:2,Lu 23:29) et le fruit des entrailles
désigne les enfants (De 7:13 28:4,11,18,53,Ps 127:3 132:11,Esa
49:15,Mic 6:7). Les entrailles désignent aussi les parties
profondes: «la terre est bouleversée dans ses entrailles» (Job
28:5), comme aussi les choses qui vous tiennent de très près: saint
Paul appelle Onésime «mes propres entrailles» (Phm 1:12). Comme
nous l'avons dit, il y a une relation entre les entrailles et les
sentiments: «mes entrailles bouillonnent, mon coeur est bouleversé,
ma bile se répand» (La 1:20 2:11), en sorte que dans la Bible
elles sont, au moins partiellement, le siège des affections: (Job
30:27,Ps 73) elles sont émues (Ge 43:30,1Ro 3:26,Pr 23:16,Esa
16:11 49:1 65:14,Jer 31:20). Fermer ses entrailles, c'est demeurer
insensible ( 2Co 6:12,1Jn 3:17). Les entrailles du
méchant sont cruelles (Pr 12:10), mais nous devons nous revêtir
d'entrailles de miséricorde (Col 3:12), car les entrailles de
notre Dieu sont miséricordieuses (Lu 1:78, cf. Esa 63:15).
H. L.