AGAR

Esclave de Sara et mère d'Ismaël. Son nom dérive probablement d'une
racine arabe qu'on retrouve dans «Hégire» et qui signifie «fuir». Son
histoire dans Ge provient des trois sources P, J et E.

--D'après P (Ge 16:1,8,15 25:12), Saraï, encore stérile, donna
Agar, sa servante égyptienne, à Abram pour qu'il eût d'elle un
enfant; Abram nomma le fils d'Agar Ismaël.

--D'après J (Ge 16:1-2,4-14) Saraï avait un droit absolu sur sa
servante et sur les enfants qui pouvaient naître d'elle. Agar,
enorgueillie par l'espoir d'être mère, témoigne du mépris à sa
maîtresse. Celle-ci, furieuse, maltraite Agar qui s'enfuit au désert
de Sur, du côté de l'Egypte. Près d'une source, «l'ange de l'Éternel»
(mentionné ici pour la première fois) lui apparaît et lui donne
l'ordre de retourner auprès de Saraï et de se soumettre à elle; il
lui promet une postérité nombreuse et lui annonce la naissance d'un
fils auquel elle donnera le nom d'Ismaël (=l'Éternel entend). Les
verset 13-14, un peu obscurs, expliquent le nom du puits Lachaï-Roï
(=le Vivant de la Vision?) par l'exclamation d'Agar: Atta-El-Roï
(=Tu es un Dieu de vision?).

--D'après E (Ge 21:8-21), le jour où Isaac fut sevré, Sara vit
«rire» le fils de l'Egyptienne et elle demanda à Abraham de le
chasser avec sa mère. Abraham ne céda que sur l'ordre de Dieu.
Chassée, Agar erre dans le désert. Au moment où elle s'éloigne de son
fils pour ne pas le voir mourir de soif, «l'ange de l'Éternel»
l'appelle, lui promet qu'Ismaël deviendra une grande nation, lui
indique une source. Elle s'établit au désert de Paran, et son fils
s'unit plus tard à une Égyptienne.

L'apôtre Paul (Ga 4:21-31) considère l'histoire d'Agar comme
une allégorie: Agar, la femme esclave, et son fils Ismaël, dont les
descendants habitent près du mont Sinaï, représentent l'alliance de
la Loi, la Jérusalem terrestre; tandis que Sara, la femme libre, et
son fils correspondent à la nouvelle alliance, celle de la promesse
et de la grâce, à la Jérusalem d'En-haut. (Ce texte des Ga est plus
clair si, d'après plusieurs manuscrits, on ôte du verset 26 le nom
d'Agar.)

La critique moderne voit dans les trois récits de la Ge sur Agar
des variantes d'un même mythe ethnologique dont le sens serait le
suivant: les Ismaélites descendent, comme les Israélites, d'Abraham;
mais ils sont des fils illégitimes; en outre, leur sang est mêlé à
celui des Égyptiens; aussi n'ont-ils pas de part à l'héritage du
peuple élu.

Des traditions arabes, plus récentes que celles d'Israël, font
d'Agar l'épouse légitime d'Abraham; c'est son fils, l'aîné d'Isaac,
qui devait être sacrifié par le patriarche et qui reçut la plus
grande part de l'héritage. Les Musulmans vénèrent à La Mecque, dans
l'enceinte de la Kaaba, le puits Zemzem auprès duquel l'ange serait
apparu à Agar, ainsi que le tombeau de celle qu'ils regardent comme
l'ancêtre des Arabes.--Il n'y a probablement aucun rapport entre le
nom d'Agar (écrit aussi Hagar) et les Hagrites ou Hagaréniens (voir
ce mot). V B.