DIACONESSE

Dans les premiers siècles, se dit de femmes chrétiennes régulièrement
au service de l'Église (en grec diaconos, tardivement diaconissa)

1.

Au 1 er siècle.

Avant de parler de la diaconesse féminine, il faut se rappeler le
rôle considérable que les femmes ont joué dans l'introduction de
nouveaux cultes, dans le paganisme, et la bienfaisance des femmes en
Israël,

(a) La vocation de la diaconesse a ses racines dans le
coeur aimant et agissant de la femme chrétienne, sa première esquisse
dans le cercle des saintes femmes qui assistaient de leurs biens le
Seigneur et ses disciples (Lu 8:3). Elle a déjà son luxe dans le
vase de parfum (Mr 14:3-9) et sa beauté propre dans le don de la
veuve (Lu 21:1-4). Elle s'essaye dans la charité de
Dorcas (Ac 9:39). Elle apparaît en Phoebé, diaconesse de
l'Église de Cenchrées (Ro 16:1 et suivant). Paul, le grand
organisateur, sait ce qu'il refusera et demandera à la femme. Elle
n'enseignera pas dans les assemblées (1Co 14:34). L'égalité
spirituelle des âmes n'est pas en question (Gal 3:28), mais les
convenances du temps opposent une barrière infranchissable (1Co
11:2 14:34), exception faite pour la prière et la prophétie où
l'Esprit est à l'oeuvre (1Co 11:5, cf. Ac 21:9). Servir est
son domaine. Phoebé a le même titre que les diacres (Php 1:1).
Elle remplit une fonction (étant diaconesse); son rôle a été
considérable (le terme employé indique une activité protectrice);
Paul demande qu'elle soit traitée comme il convient aux saints et
dans le Seigneur. Que pourrait-il dire de plus? La 1re épître à
Timothée semble bien montrer que la charge se généralise. Reuss juge
probable que le passage 1Ti 3:11 se rapporte aux diaconesses et
non aux femmes des diacres. Il y a non pas leurs, mais les
femmes semblablement,
ce qui indique plutôt celles qui sont de même
fonction, de même titre. Le texte est intercalé entre les diacres et
ce qui est dit ensuite de leur famille. Les qualités énumérées sont
celles de la charge (fidèles en toute chose, 1Ti 3:11). Leur
place serait ainsi déjà officiellement fixée. Un peu plus tard, vers
III, la lettre de Pline à Trajan parle de deux diaconesses (ministres)
que l'exquis écrivain a fait mettre à la torture pour
surprendre les secrets de l'Église. On voit quel rôle elles jouent
déjà.

(b) II faut marquer, au moins brièvement, la place de
la veuve dans l'Église (voir Veuve) et son rapport avec la
diaconesse. Dès les premiers jours l'Église a accueilli les veuves
délaissées, malheureuses. Le besoin d'être juste envers toutes a fait
constituer le diaconat (Ac 6:1 9:39,41). Le passage 1Ti
5:3-16 donne leur statut vers la fin du I er siècle. L'Église a un
registre des veuves. Qui doit y être inscrite? La veuve de 60 ans qui
a donné l'exemple des vertus de la charité. Le texte énumère ses
vertus, honneur et force de la chrétienté naissante. Les veuves qui
n'inspirent pas confiance, et celles aussi que leur famille peut
soutenir, restent en dehors. On garde ainsi une élite de femmes que
l'Église aide et qui aident l'Église par leurs oeuvres continuées et
par l'autorité de leurs vertus. Entre elles et les diaconesses il y a
de grands rapports, parfois une sorte de confusion, mais une
différence essentielle: les veuves sont des laïques assistées; les
diaconesses ont une charge qui les apparente au clergé.

2.

Dans les siècles suivants.

La place et la charge de la diaconesse grandissent et se précisent.
Au III e siècle, il est probable que peu d'Églises sont sans
diaconesses. Par contre les veuves restent ce qu'elles étaient,
assistées et honorées, mais formant de moins en moins un corps
constitué. On voit clairement dans les Constitutions
apostoliques,
qui donnent au IV e siècle un tableau des usages du
III°, le vrai rapport. Il y est beaucoup parlé des veuves (III, 1ss).
Elles sont «soumises aux évêques, aux prêtres, aux diacres et même
aux diaconesses», à qui elles fournissent des recrues; elles restent
dans leurs maisons «à chanter, à prier et à lire» (III, 7). La
diaconesse, par contre, est l'objet d'une consécration; l'évêque
assisté des prêtres, des diacres et des diaconesses lui impose les
mains et prie ainsi: «Donne-lui l'Esprit-Saint, préserve-la de toute
souillure.» Cette consécration est rapportée entre celles du diacre
et du sous-diacre (VIII, 18s). Les auteurs qui cherchent à en
diminuer la portée ne tiennent pas compte de ce que ce don de
l'Esprit signifie pour l'antiquité chrétienne (et en particulier dans
les Const. apost.). L'Église a besoin des services
ecclésiastiques de la diaconesse pour tous les cas où le diacre ne
peut fonctionner: ainsi les onctions des femmes au baptême par
immersion, la cure d'âme féminine (III, 15: «là où l'on ne peut
envoyer un diacre»). Il faut y joindre le soin des femmes malades,
des orphelins, des veuves, l'accueil à faire aux femmes pauvres dans
le culte, à la porte, et pour les placer, la surveillance des veuves
et des vierges. La diaconesse aurait voulu davantage participer en
quelque mesure au sacrement de l'eucharistie, prendre la parole.
L'Église ne l'a jamais admis. En Irlande elles présentent le calice
aux femmes: c'est un cas unique. Chez les gnostiques, les
Montanistes, les Nestoriens et dans les communautés des
Priscillianistes, elles sont arrivées à leurs fins. Les Const.
apost,
constatent et consacrent la fonction dans un temps où déjà
sa décadence est proche. Le clergé se défie des empiétements du
ministère féminin; ses succès hors de l'Église l'ont compromis. Le
baptême par immersion, peu à peu abandonné, rend une partie de ses
services inutiles. La vie monastique absorbant les vocations y met
fin. En Gaule le concile d'Orange (441) décide qu' «on n'ordonnera
plus de diaconesses». La chrétienté d'Occident suit de loin. En
Orient la charge dure plus longtemps: à Constantinople, sous
Justinien, il y a encore, pour 60 diacres et 90 sous-diacres, 60
diaconesses; le Basileus veille rigoureusement sur leur célibat. Mais
de plus en plus ce n'est qu'un titre d'honneur qu'on donne aux femmes
pieuses, aux abbesses. On sait que le pasteur Fliedner, en 1836, a
relevé le nom et la chose dans les Églises évangéliques. An.