COMMERCE

La Palestine n'a jamais été un centre de grande activité commerciale;
l'ancienne loi d'Israël renferme peu de prescriptions relatives au
commerce, et les paraboles de l'Évangile qui empruntent leurs
exemples concrets aux circonstances de la vie courante, n'y font
allusion qu'exceptionnellement.

Grandes voies commerciales: Voir Atlas 1

Conditions défavorables.

La Palestine est en effet un pays exclusivement agricole. En dehors
de l'asphalte recueilli sur la mer Morte et du sel de la même région,
le sous-sol ne contient aucun minerai; la mention du fer dans De
8:9 vise les contrées du Liban ou de Moab. L'industrie
métallurgique ne pouvait qu'être rudimentaire et l'absence de
forgerons signalée dans 1Sa 13:19-21 n'a rien d'étonnant; le
rôle de ces ouvriers paraît d'ailleurs se borner ici à la réparation
d'instruments usagés qui devaient être de provenance étrangère. Plus
tard, quand Salomon veut construire le Temple, il fait appel à un
Tyrien pour exécuter les ouvrages d'airain (1Ro 7:13 et
suivant
). Le bois aussi était rare. Salomon passe un contrat avec
Hiram, roi de Tyr, pour la fourniture des bois de cèdre et de cyprès
nécessaires à la construction du Temple (1Ro 5:6), et ici encore
il doit faire appel à la main-d'oeuvre étrangère (1Ro 5:6,18)
pour diriger le travail. David avait fait de même lorsqu'il bâtissait
son palais (2Sa 5:11). En dehors des industries du foyer
indiquées dans le portrait de la femme vertueuse (Pr 31), il
n'est fait allusion qu'à une famille juive fabriquant le byssus, le
«fin lin» de Vers. Syn (1Ch 4:21). et au travail des
poteries (1Ch 4:23). Les villes de la côte étant restées aux
mains des Philistins, les Israélites n'eurent jamais un accès direct
à la Méditerranée; c'était encore une circonstance peu favorable au
développement commercial. Enfin, l'esprit de la législation mosaïque
était hostile au commerce. Elle tendait à isoler le peuple d'Israël,
en restreignant le plus possible ses rapports avec les peuples
païens. Les pratiques de l'année sabbatique et du Jubilé (Le 25)
n'étaient pas sans gêner considérablement les échanges.
L'interdiction du prêt à intérêt (Le 25:36,37,De 23:19) rendait
impossible le lancement de grandes entreprises exigeant, alors comme
aujourd'hui, la disposition d'importants capitaux. Au temps même de
Jésus, l'historien Flavius Josèphe écrit, à propos de ses
compatriotes: «Nous ne prenons nul plaisir au trafic, nous n'aimons
pas nous mêler aux nations étrangères comme les commerçants.» Pour
les rabbins de la même époque, «se tenir loin des affaires» est l'une
des quarante-huit qualités de l'homme pieux.

Conditions favorables.

En regard de ces conditions défavorables, on ne peut citer que deux
faits encourageants. La production agricole, notamment en ce qui
concerne le blé, le vin et l'huile, était supérieure aux besoins de
la consommation locale et pouvait d'autant plus facilement alimenter
un certain commerce d'exportation que les riches cités phéniciennes
de la côte toute voisine n'avaient presque pas de cultures; d'après
Ac 12:20, au temps d'Hérode Agrippa I er, Tyr et Sidon étaient
ravitaillées par la Galilée, et vraisemblablement il en avait
toujours été ainsi. D'autre part, si la Palestine n'était pas
maîtresse des ports de la côte, elle se trouvait située au carrefour
des grandes routes commerciales d'Egypte et d'Arabie vers Damas et la
Mésopotamie. Ces routes convergeaient vers Pétra, au Nord du golfe
Aelanitique, où elles formaient deux branches: l'une allant vers
Gaza, l'autre longeant la côte E. de la mer Morte et la rive gauche
du Jourdain. De Gaza, la route suivait les dépressions de Judée et de
Galilée jusqu'à la plaine d'Esdrelon, où elle rencontrait une autre
voie venant d'Acco (Ptolémaïs) et conduisait ensuite vers Damas en
contournant au Nord-O, le lac de Galilée (voir Dalman, Itin.)

Les aptitudes commerciales du peuple d'Israël se trouvaient donc
à peu près limitées à la vente des produits du sol et à un certain
commerce de transit, que n'encourageaient pas les lois religieuses
fondamentales.

L'activité commerciale au temps des rois.

Pour trouver trace de quelque activité commerciale sérieuse, il faut
attendre le règne de David. Le pays est alors pacifié; l'existence de
fonctionnaires réguliers, payés par le roi, a pour conséquence
l'élaboration d'un système financier avec lequel le recensement de
2Sa 24:2 ne doit pas être sans rapports. Sont en effet
mentionnés un «préposé aux trésors du roi» (1Ch 27:25) et, dans
la liste des fonctionnaires de Salomon (1Ro 4:6 s), un «préposé
aux impôts» et douze intendants, dont les circonscriptions bien
délimitées devaient alimenter les finances royales chacune pendant un
mois. D'après le budget rudimentaire que constitue 1Ro 10:14 et
suivant
, les ressources royales viennent de trois côtés, entre autres
de «ce qu'il prélevait sur les marchands et sur le trafic des
négociants». Il y avait donc un système de droits et de péages sur
les marchandises transportées par les caravanes qui se rendaient
d'Egypte et d'Arabie à Damas, en empruntant les grandes routes
naturelles. Le roi tirait un profit analogue de l'importation des
chevaux d'Egypte destinés aux rois des Hittites et des Syriens.
L'achat se faisait à prix fixe, d'après 1Ro 10:28 et suivant et
2Ch 1:16 et suivant, mais le texte n'indique pas qu'il en fût
ainsi de la vente.

A côté de ce commerce de transit, il y eut tout un trafic
d'importation quand David et Salomon commencèrent à bâtir. David fait
venir de Tyr des bois de cèdre et des ouvriers (2Sa 5:11). Les
relations ainsi nouées avec Hiram continuent sous le règne de
Salomon, qui fait appel à lui pour la fourniture des bois du Temple
et de son palais (1Ro 5:1-11,2Ch 2:1-18). Cèdres et cyprès sont
expédiés par radeaux jusqu'à Japho, et Salomon donne en échange des
produits agricoles: blé et olives.

L'alliance entre Salomon et Hiram eut pour conséquence la
création d'entreprises commerciales lointaines. Les Israélites
s'installèrent à Etsion-Guéber, sur le golfe Aelanitique, et ils en
assurèrent l'accès à travers le désert. Des vaisseaux furent équipés
en commun et, montés par des marins de Tyr, partirent pour le
mystérieux pays d'Ophir, qu'il faut chercher sans doute au Sud de
l'Arabie; Ils en rapportèrent les produits de l'Inde et de l'Afrique:
de l'or, du bois de sandal (voir ce mot), des pierres précieuses, de
l'ivoire, des singes, des paons (1Ro 9:28-23 10:11). D'autres
vaisseaux, les «navires de Tarsis», souvent mentionnés dans l'A.T.,
et qui devaient être fournis par une colonie phénicienne établie en
Espagne, participaient aussi à ces expéditions (1Ro 10:22,2Ch
9:21) et accomplissaient des voyages réguliers tous les trois ans.
Plus tard, Josaphat, roi de Juda, avec le concours d'Achazia, roi
d'Israël, fréta de nouveau des «vaisseaux de Tarsis»; mais ceux-ci
furent détruits par la tempête dans le port d'Etsion-Guéber (1Ro
22:49,2Ch 20:35-37). Sous le règne de son ûls, Joram, les Iduméens
s'affranchirent du joug d'Israël (2Ro 8:20,22), qui perdit son
débouché sur la mer Rouge. C'en était fait des entreprises lointaines.

Furent-elles très productives? On peut en douter, d'autant plus
que les marchandises échangées devaient être de provenance
phénicienne, les produits agricoles d'Israël ne paraissant pas
d'écoulement facile dans les pays éloignés. D'un autre côté, nous
voyons Salomon, débiteur de Hiram, lui céder vingt villes pour 120
talents d'or (1Ro 9:11-14), ce qui ne témoigne pas de grandes
disponibilités. Un fait montrant le peu d'importance du commerce
israélite à cette époque, c'est l'absence de toute allusion à une
monnaie métallique dans l'A.T. Les paiements se font en lingots,
au poids (1Ro 10:29) ou en nature, et les réserves d'or de
Salomon (1Ro 10:16-21) étaient constituées par des boucliers et
de la vaisselle.

On a voulu voir dans Eze 26:2 l'indication d'une rivalité
commerciale entre Tyr et Jérusalem. Ce passage fait plus simplement
allusion aux profits que les trafiquants tyriens tiraient
habituellement d'opérations consécutives au pillage d'une ville dans
une guerre malheureuse. Une telle concurrence est bien peu
vraisemblable, car la disproportion entre l'activité des deux cités
est nettement marquée dans l'A.T.: Esa 23 et Eze 27
montrent la puissance de Tyr et sont muets en ce qui concerne
Jérusalem.

Principales exportations et importations.

L'A.T. mentionne parmi les denrées exportées: le blé (Eze
27:17,1Ro 5:11) et l'orge (2Ch 2:10), tous deux en Phénicie;
l'huile en Egypte (Os 12:2), en Phénicie (Eze 27:17,1Ro
5:11,2Ch 2:10); le vin en Phénicie (2Ch 2:10); le miel et le
baume (Ge 43:11,Eze 27:17); les fruits, épices, pistaches,
amandes (Ge 43:11); le bois de chêne de Basan à Tyr (Eze
27:6). Au tableau des importations figurent des matières premières:
bois, métaux (1Ro 5:10); des chevaux et des chars
d'Egypte (1Ro 10:28,2Ch 1:16); surtout des articles de luxe:
tapis d'Egypte (Pr 7:16); l'ivoire et les pierres précieuses de
l'Ethiopie et de l'Arabie (1Ro 10:22,Job 28:19). Le commerce des
esclaves était prévu par la loi (Le 25:44 et suivants), mais il
est à peine mentionné dans l'A.T.; il était alimenté par les
prisonniers de guerre (Joe 3:6) et par les débiteurs
insolvables (2Ro 4:1,Mt 18:25); le texte de Joël le met au compte
des Phéniciens (voir Esclave).

Le commerce de détail après l'exil.

La vente directe, du producteur au consommateur, tient une grande
place (Ne 13:15). Les produits du sol étaient abondants et
dépassaient les capacités de la consommation familiale. Ils
alimentaient les marchés, qui se tenaient deux fois par semaine dans
les villes. A côté des paysans, les femmes avaient le droit d'y
vendre certains produits de leur élevage et de leur industrie:
lainages en Judée, toiles de lin en Galilée, veaux dans la plaine de
Saron, et, partout, oeufs et poules, qui jusqu'à l'exil étaient
inconnus des Israélites. Un marché spécial se tenait aux portes du
Temple: on y trouvait tout ce qui était nécessaire à la célébration
des sacrifices; il était en effet impossible aux habitants des
provinces éloignées d'apporter les dîmes en nature. De 14:24-29
les autorisait à apporter en argent la valeur de ces dîmes et à se
procurer sur place les animaux et tous les produits nécessaires. Ce
marché devait prendre une telle extension qu'il envahit peu à peu les
parvis du Temple, ce qui explique l'intervention de Jésus (Mt
21:12 et suivant, Mr 11:15,Lu 10:4-5,Jn 2:13-17).

Il y avait aussi des boutiques. Les prophéties comme
Esa 3:18,24, qui énumèrent les objets de luxe dont elles condamnent
l'emploi, n'y font pas allusion. Cependant Jer 37:21 mentionne
une «rue des boulangers» à Jérusalem. Néhémie parle de Tyriens
établis à Jérusalem et qui vendent du poisson (Ne 13:18); il
nomme aussi, parmi ceux qui travaillent à la reconstruction des
murailles, les orfèvres, les parfumeurs (Ne 3:8) et les
marchands (Ne 3:32), et donne comme point de départ d'un lot de
travail la «maison des marchands» (Ne 3:31), les mêmes sans
doute dont parle Sop 1:11. L'existence de bazars, tenus par des
étrangers, dans les villes d'Israël, est attestée par 1Ro 20:34,
qui constitue un véritable traité de commerce entre Achab et le roi
de Syrie.

Les caravanes sont mentionnées dans Job 6:18 et suivant et
Esa 21:13 (Sg.); il y est fait allusion dans Jug 5:6. Leurs
chameaux apparaissent dans 1Ro 10:2,Esa 60:6,2Ro 8:9 et 1Ch
12:40 qui parle aussi des mulets, des boeufs et des ânes; à en
juger par les nombreuses prescriptions de la loi et de la coutume à
leur sujet, ces derniers devaient être le plus couramment employés.
Le commerce était fait dans une large mesure par des marchands
ambulants, surtout aux temps anciens. L'un des mots qui désignent le
marchand (par ex. dans 1Ro 10:15,Eze 27:23) signifie «celui qui
va et vient»; plusieurs textes le montrent voyageant au loin par mer
(Ps 107:23 et suivant, Pr 31:14).

Après comme avant l'exil Te commerce d'exportation se borne au
ravitaillement des villes arabes de l'Est, des cités grecques de
l'intérieur, telle Scythopolis, ou de la côte: Ptolémaïs, ainsi que
des ports phéniciens (Ac 12:20). S'il faut en croire Pline, les
figues de Jérico étaient exportées dans tout l'Orient et elles
servaient à aromatiser les vins; le baume de même provenance, dont la
production s'était beaucoup développée, était aussi très recherché,
ainsi que les poissons du lac de Tibériade, mis en conserve à
Tarichée. L'industrie, représentée par les poteries imitées de Sidon
et par les toiles de Sephoris--ville presque exclusivement
grecque--n'était pas maîtresse du marché national: un grand nombre
d'objets touchant à l'ameublement et au vêtement portent des noms
latins et devaient être importés (fauteuils, chaises, rideaux,
miroirs, serviettes, sandales, etc.). Les toiles de l'Inde, le feutre
de Cilicie, et des produits alimentaires: bière de Médie, vinaigre
d'Idumée, moutarde, pastèques, fèves, lentilles, gruau de Cilicie,
fromages de Bithynie, pénétraient aussi en Palestine.

Moeurs commerciales.

L'acheteur savait déjà déprécier la marchandise pour l'avoir à
meilleur compte (Pr 20:14). Le vendeur n'hésitait pas à faire
une bonne publicité en donnant aux enfants des graines ou des noix,
en vendant même à perte certains articles. Mais il hésitait encore
moins à mélanger des qualités différentes, à mouiller le vin ou à
mettre au-dessus du panier les plus beaux produits, chose condamnée
par les rabbins. Il savait aussi maquiller un esclave ou un animal,
pour les vendre dans de meilleures conditions. Le marchandage
sévissait comme de nos jours encore en Orient: le vendeur s'efforçait
d'obtenir deux ou trois fois le prix de ses articles. Les faux poids
et les fausses mesures n'étaient pas inconnus (Mic 6:10 et
suivant
, Am 8:5). La spéculation apparaît dans Pr 11:28 et,
avec plus de détails, dans Am 8:5 où la capacité de la
mesure diminue tandis que le prix monte pour des «déchets de blé».
Aussi voyons-nous intervenir, dans les décisions des rabbins, un
certain nombre de mesures protectrices. Un inspecteur des marchés,
désigné par le Sanhédrin local, fixait les cours officiels, et
vérifiait les poids et les mesurés. Celles-ci devaient être nettoyées
une fois par mois chez les marchands en gros et deux fois par semaine
chez les détaillants; les poids devaient être lavés tous les huit
jours et les balances essuyées après chaque pesée. Dans la crainte de
tromper l'acheteur, il était prescrit au vendeur d'ajouter une once
chaque fois qu'il pesait 10 livres de liquide, ou une demi-once s'il
s'agissait de produits solides. Lorsque l'acheteur s'apercevait qu'il
avait payé un prix excessif, assurant un bénéfice illégitime, il
pouvait rapporter la marchandise et réclamer le trop-perçu, à la
condition--assez restrictive--de le faire dans un délai n'excédant
pas le temps nécessaire pour consulter une autre personne. Il était
interdit de mêler les produits de qualité différente et de mouiller
le vin, sauf dans les villes, où c'était l'usage courant. La loi qui
exposait le débiteur insolvable à être vendu (Ex 22:3,Le 25:39)
après saisie de sa maison et de ses vêtements, s'était, dans la
pratique, considérablement adoucie: les vêtements, la literie, les
ustensiles nécessaires à la préparation des aliments, les charrues ne
pouvaient être pris en gage et on ne pouvait vendre ce qui
appartenait à une veuve (voir Dette).

Le vendeur était aussi protégé: on ne pouvait lui faire dire le
plus bas prix d'une marchandise si l'on n'avait pas réellement
l'intention de l'acheter; il était aussi défendu de lui rappeler des
profits exagérés, faits par lui en d'autres circonstances, pour
l'amener à baisser ses prix.

Pour parer à la spéculation, le marché n'était vraiment conclu
que par la prise de possession. Il arrivait cependant que des marchés
fussent passés avec des paysans, pour la fourniture d'une année: le
vendeur y avait le double avantage d'un écoulement assuré et du
paiement comptant, l'acheteur celui de payer au bas prix. Il était
interdit de modifier ces contrats à la hausse; à la baisse,
l'attitude était moins nette. On ne pouvait d'ailleurs les conclure
qu'après la fixation officielle des cours. Le vendeur devait
réellement posséder les marchandises: pour vendre du blé, il fallait
avoir des gerbes en tas.

Qui faisait le commerce? Des Juifs s'y livraient: Fl. Josèphe
conte l'histoire de Jean de Giscala qui avait obtenu le monopole de
la fourniture de l'huile à Césarée et qui multipliait le prix d'achat
par 8. Mais le trafic était en général aux mains des étrangers. Le
terme de «Cananéens» employé, même après l'exil, pour désigner les
marchands, est significatif (Za 14:21,Os 12:8,Eze 17:4,Pr
31:24 etc.). Les Phéniciens ont été longtemps les maîtres du
marché (Esa 23:2,8). Au temps de Néhémie, des Tyriens faisaient
commerce à Jérusalem (Ne 13:16); sous le règne d'Achab, des
marchands syriens étaient établis à Samarie (1Ro 20:34). Plus
tard, les Grecs prennent une place importante: au V e siècle, Gaza a
des monnaies du modèle d'Athènes, avec inscriptions mi-partie
grecque, mi-partie phénicienne. Sous Hyrcan I er (135-105), il y a
une colonie athénienne si florissante à Jérusalem, qu'Athènes décerne
à Hyrcan une statue de bronze et une couronne d'or. Le mot qui
désigne le commerçant le plus important, le marchand de blé, est
directement transcrit du grec; de même les termes de la langue
commerciale (comptabilité, acquit, etc.) sont des mots grecs. La
ville où se fait le commerce des poissons salés est appelée Tarichée,
du nom grec de son industrie. Enfin, lorsqu'Hérode fonde le port de
Césarée, très peu de Juifs vont l'habiter et la ville reste païenne.

Trafic de l'argent.

Il n'y avait pas en Israël de banques prêtant à intérêt comme il s'en
trouvait à Babylone. La loi défendait cette sorte de prêt entre
Israélites (Ex 22:25, précisé par De 23:19 et suivant). Un
autre texte (Le 25:36 et suivant) étendait l'interdiction à
l'étranger affilié au peuple. Après l'exil, est condamné le prêt à
intérêt, appelé «usure» dans Vers. Syn. (Eze 18:13,Ps 15:5,Ne
5:7), sans qu'il y ait de sanctions pénales. Cependant, la parabole
des talents (Mt 25:37) ne présente pas l'intérêt comme une chose
abominable et montre en tout cas qu'il existait des banques accordant
une rémunération pour les fonds déposés. Il est vrai que l'Israélite
pouvait toujours emprunter à un païen ou même à un prosélyte, et
transmettre ensuite le prêt à un coreligionnaire. C'est exactement la
situation dans laquelle se trouva le christianisme, au Moyen âge,
quand l'Église prit à son compte l'interdiction biblique: le chrétien
ne pouvait prêter au chrétien, ni le Juif au Juif, mais le Juif
pouvait prêter au chrétien en toute conscience et celui-ci accepter
de même. L'antique loi d'Israël n'avait en réalité prévu que le
prêt-assistance en cas de gêne momentanée, et ses dispositions ne
cadraient plus avec des conditions de vie justifiant le prêt
commercial. Malgré les moyens indiqués ci-dessus, de tourner la loi,
ces opérations financières ne devaient pas être très développées.

Le change était une autre forme du trafic de l'argent. Un grand
nombre de monnaies (voir ce mot) avaient cours en Palestine: pièces
frappées à l'effigie des rois, monnaies tyriennes ou romaines, et
elles ne pouvaient être indifféremment employées à tous usages: la
monnaie du Temple, par exemple, n'était pas celle de l'impôt. Il
fallait recourir aux bons offices des changeurs (Mt 21:12,Mr
11:15,Lu 19:45 et suivant, Jn 2:15), qui prélevaient une
commission fixe et pouvaient aussi recevoir des dépôts de fonds (voir
Changeur).

Conclusion.

Si le commerce israélite n'a jamais pris une grande extension sur la
terre de Palestine, les Juifs, transportés loin de leur milieu
habituel, n'ont pas tardé à développer leurs aptitudes commerciales.
Déjà l'exil à Babylone, centre mondial du négoce, les avait
accoutumés à une autre vie que la vie agricole: certains exilés
pourront envoyer à Jérusalem de l'argent et de l'or (Za 6:10 et
suivant
), et «de nombreux noms juifs figurent dans les papiers d'une
grande maison de commerce de Nippour au V e siècle» (Bertholet,
Hist. Civ. Isr.,
p. 247). Mais c'est surtout à Alexandrie que
nous trouvons une communauté juive en pleine activité, sur un sol
étranger. Privilégiés, au même titre que les Grecs, ils exercent une
influence prépondérante. Ils occupent deux des cinq quartiers de la
ville, sur la côte et au bord du Nil. Ils sont à la tête de tout
commerce, en particulier du plus important de tous, celui des grains,
dont dépend le ravitaillement de Rome. On dit même que les banquiers
juifs d'Alexandrie étaient si bien et si rapidement renseignés par
leurs informateurs politiques sur ce qui se passait à Rome, en ces
temps troublés, qu'ils pouvaient, au bon moment, se déclarer pour
Octave ou pour Antoine, au grand avantage de leurs opérations.

Le N.T. parle, entre autres, du marchand de perles;
(Mt 13:45 et suivant) de Lydie de Thyatire, marchande de pourpre à
Philippes (Ac 16:14); de la maison de Chloé, autre commerçante
qui avait ses voyageurs (1Co 1:11); des hommes d'affaires qui
présument de l'avenir (Jas 4:13). La lettre à Laodicée (voir ce
mot) fait une allusion voilée aux fameuses manufactures d'étoffes de
laine et aux banques réputées de cette ville (Ap 3:17 et
suivant
).

Après la destruction de Jérusalem, les communautés juives,
dispersées dans le monde, ont suivi l'exemple d'Alexandrie, et,
trouvant dans tous les pays des conditions favorables au
développement de leurs qualités commerciales, elles ont joué et elles
jouent encore un rôle de premier plan dans les opérations de banque
et de trafic. G. V