CHAR, CHARIOT

Ces deux mots, plus ou moins interchangeables en français, peuvent
désigner deux objets bien différents:

1.

Le chariot, traîné par des boeufs, véhicule assez long et massif,
pour transporter personnes (Ge 45:19 ss, No 7:3,Ac 8:28,
etc.) ou objets (Am 2:13). C'est un chariot de ce genre qui sert
à ramener l'arche (1Sa 6:7-14, cf. 2Sa 6:3).

2.

Le char de guerre (voir Armes), tiré par deux
chevaux, très court, monté sur deux roues, et où on ne se tenait que
debout.

Il ne fut sans doute pas employé en Israël avant Salomon. Le char
d'Absalom (2Sa 15:1) constitua un exemple unique de luxe
insolent. Pourtant les peuples voisins l'utilisaient. Les chars de
Pharaon en Egypte, et surtout à la mer Rouge, avaient fait aux
Hébreux une impression profonde (Ge 41:43,Ex 14:6 et suivant).
Les Cananéens les arrêtèrent net avec leurs propres chars (Jos
11:4-9). Dans Jug 1:19, on précise que ce sont des chars de
fer: Jabin en a 900 (Jug 4:3), Sisera de même (Jug 4:13
5:28). Du temps de Saül, les Philistins alignaient de nombreux chars
(1Sa 13:5, l'hébreu dit 30.000, d'autres versions 3.000;
peut-être faut-il lire 1.000). David réussit à capturer 700 chars aux
Syriens (2Sa 10:18, cf. 1Ro 20:1-21). Ces chars de guerre
(fig. 16) sont représentés sur les bas-reliefs hittites, assyriens et
égyptiens (ces derniers en figurent même la fabrication). Ils sont
tout en bois, ce qui explique qu'on puisse les incendier (Jos
11:6,Ps 46:10), plaqués de fer, sans doute plus tard de
faux (2Ma 13:2). Le timon monte obliquement en avant vers
deux petites selles reposant sur les garrots des deux chevaux. Il y
tient deux personnes debout, trois à la rigueur. Ils sont fermés
quelque peu devant et sur les côtés, où se placent le carquois et la
lance, mais ouverts par derrière (plus tard protégés aussi en arrière
chez les Assyriens).--Salomon, après avoir installé ses chars à
Jérusalem, ne tarda pas à les mettre dans des villes de
choix (1Ro 9:19), où l'eau et la proximité des frontières
devaient mieux leur convenir. Les chars firent désormais partie de
l'armement des royaumes d'Israël et de Juda, leur nombre variant sans
doute avec les ressources royales et avec les dispositions des États
fournisseurs (Egypte). Une inscription assyrienne montre Achab allant
attaquer, avec d'autres princes, Salmanasar en 854, et amenant 2.000
chars au combat. C'est sur son char personnel qu'il revient à toute
vitesse du Carmel a Jizréel, pourtant devancé par la course
extraordinaire d'Élie (1Ro 18:45 et suivant). Josaphat est
blessé mortellement dans son char (1Ro 22:35). Le roi de Syrie
écrase l'armée de Joachaz en ne lui laissant que 10 chars (2Ro
13:7). Plus tard, Antiochus Épiphane, pris de douleurs intolérables,
tombe de son char lancé à toute allure (2Ma 9:7). Le
Cantique des Cantiques évoque les chars des rois ou des
princes (Ca 1:9 6:12).

Si les Israélites ont tardé à adopter une arme aussi redoutable,
dont ils ne constataient que trop les effets, cela tient à plusieurs
raisons:

Leur terrain de combat traditionnel était les
escarpements, falaises et défilés, où les chars n'ont aucune utilité
et où ils excellaient aux coups de main en terrain difficile (1Sa
14:4,13). Ben-Hadad, roi de Syrie, s'écrie après une défaite: «Leur
dieu est un dieu de montagnes» (1Ro 20:23).

Le maigre développement de leur industrie du
fer (1Sa 13:19,Jug 5:8).

Une vieille tradition religieuse d'après laquelle
le char de guerre, y compris le cheval qui dans tout l'Orient ne sert
qu'à la `guerre, (cf. 2Sa 13:29,Job 39:22-28) serait un élément
païen dont il vaut mieux se priver (voir Cheval). D'où les mesures de
Josué (Jos 11:9) et de David (2Sa 8:4), qui après une
victoire brûlent les chars et abattent les chevaux. La même idée est
noblement exprimée dans Esa 31:1, d'autant plus justement que la
possession de chevaux risquait de mener au culte du soleil (Josias
dut y mettre fin: 2Ro 23:11).

Le prix élevé des chars et des chevaux, tous
devant être achetés au dehors: le livre des Rois insiste sur ce
luxe (1Ro 10:28 et suivant). Avant Salomon, semblable dépense
était impossible.

La politique d'alliance, donc de dépendance,
qu'entraînait l'usage des chars et de la cavalerie, puisqu'il fallait
à tout prix s'assurer l'amitié de l'Egypte. Les prophètes ont dénoncé
ce danger (Os 14:3,Esa 2:7 30:18 31:1, cf. De 17:16, etc.).

Au figuré, Esa 5:18 parle des «traits de chariot» avec
lesquels les impies s'attachent leur péché. La vision inaugurale du
livre d'Ézéchiel (voir ce mot), avec les roues et les ailes qui
transportent les quatre êtres vivants (Eze 1), est souvent
appelée la «vision dû chariot»; elle rappelle le récit de
l'enlèvement d'Élie dans un char de feu (2Ro 2: et suivants) et
symbolise l'omniscience et l'omniprésence de JHVH, glorieux et
tout-puissant, tandis que dans la vision du serviteur
d'Elisée (2Ro 6:17) chevaux et chars représentaient sa
protection. Dans les Psaumes, c'est une image poétique qui fait
transporter la majesté divine sur le char des nuages (Ps 68:5-18
104:3, cf. Esa 19:1), comme la mythologie en avait attribué à
nombre de dieux ou déesses.