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Table des matires

PREFACE.. 4

PREMIERE PARTIE.. 5

SENS ET MISSION DE LA PRIRE.. 5

CHAPITRE PREMIER.. 5

La prire, la plus grande manifestation de la puissance divine. 5

1. Cinq manifestations de la puissance divine. 5

2. La prire embrasse le monde entier. 7

3. Prier, cest servir Dieu. 8

4. Lespace napporte aucune limitation la prire. 8

5. Les perspectives illimites de la prire. 9

CHAPITRE II. 10

La prire, facteur dcisif dans la lutte spirituelle. 10

1. Un conflit prhistorique. 10

2. La prire fait rayonner au loin notre personnalit spirituelle. 11

3. La prire permet Dieu dagir sur la terre. 12

CHAPITRE III. 13

La terre, champ de bataille o lutte la prire. 13

1. La prire, mesure de guerre. 13

2. Trois formes de prire. 13

3. Le point culminant de la prire. 14

4. Six faits fondamentaux. 14

5. Le plan grandiose du Vainqueur. 15

CHAPITRE IV.. 16

Dieu se laisse-t-il influencer par nos prires?. 16

1. Comment Dieu donne. 16

2. Une vieille question. 17

3. La plus belle prire. 18

DEUXIEME PARTIE.. 20

OBSTACLES A LA PRIRE.. 20

CHAPITRE PREMIER.. 20

Pourquoi ne sommes-nous pas exaucs?. 20

1. Rupture avec Dieu. 20

2. Le pch, point dappui donn Satan. 21

3. Le plus court chemin pour aller Dieu. 22

4. Eclaire-moi, mon Dieu! 23

CHAPITRE II. 24

Pourquoi lexaucement tarde-t-il?. 24

1. Comment Dieu sapproche de lhomme. 24

2. Pour le salut dun peuple. 24

3. Rejet dune prire en vue dune plus grande bndiction. 26

4. Lexplication dune grande preuve. 27

5. Priant genoux. 29

CHAPITRE III. 30

Le grand obstacle extrieur 30

1. Le tratre. 30

2. Prier, cest lutter 31

3. Un double engagement 33

4. La prire met en jeu trois personnes. 34

5. Dfaite dun ennemi opinitre. 35

TROISIEME PARTIE.. 36

COMMENT PRIER?. 36

CHAPITRE PREMIER.. 36

Comment raliser lunion avec Dieu. 36

1. Ambassadeurs de Dieu. 36

2. Six dclarations capitales. 36

3. Un verset capital 38

4. La prire justifie par son but 38

5. Trois lments la base de la vie de Jsus. 39

CHAPITRE II. 40

Comment prier?. 40

1. Action secrte de la prire. 40

2. Priant pour la ralisation du plan de Dieu. 41

3. O rencontrer Dieu. 42

4. Qui nous enseignera prier?. 43

5. Le pouvoir dun nom.. 43

6. Origine et progrs de la foi 44

CHAPITRE III. 44

Pour prier, il faut savoir couter 44

1. Une oreille exerce. 44

2. Par la Bible, vers Dieu. 46

3. Illumin par lEsprit 46

4. Une rapide lecture. 47

5. La Bible, miroir qui reflte lamour de Dieu. 48

CHAPITRE IV.. 49

La volont de Dieu et la prire. 49

1. Il vint chez les Siens. 49

2. Le but unique de la prire. 50

3. LEsprit dadoption. 51

4. Comment connatre la volont de Dieu. 52

CHAPITRE V.. 52

Pouvons-nous prier avec assurance pour la conversion de ceux que nous aimons?. 52

1. Comment Dieu pntre dans une demeure. 52

2. Lesclavage dun homme libre. 53

3. Lendroit o Dieu nest pas. 54

4. Lhomme agent du salut des siens. 54

5. Prparant les voies du Seigneur. 55

QUATRIEME PARTIE.. 56

COMMENT JSUS PRIAIT.. 56

CHAPITRE PREMIER.. 56

Simple Esquisse. 56

CHAPITRE II. 57

Coup dil rvlateur sur la vie de prire de Jsus. 57

CHAPITRE III. 59

Dans lombre grandissante. 59

CHAPITRE IV.. 60

Sous les oliviers. 60

CHAPITRE V.. 62

Dernier coup dil sur la vie de prire de Jsus. 62

1. Heures de prire de Jsus. 62

2. Lieux de prire. 62

3. Il tait toujours en prire. 62

4. Il priait dans les grandes crises de sa vie. 62

5. Il priait pour dautres. 62

6. Il priait avec dautres. 62

7. Les plus grandes bndictions de sa vie vinrent pendant la prire. 62

UNE DLIVRANCE MIRACULEUSE {1}. 63

RECUEILLEMENT ET PRIRE.. 69

ENCORE LE RECUEILLEMENT.. 70

SIMPLES ENTRETIENS SUR LA PRIERE

(Gordon)

PREFACE

Nous publions une 5 dition des Simples entretiens sur la prire. Leur auteur, S.-D. Gordon, est encore peu connu dans notre pays. Depuis longtemps dj, il exerce pourtant une puissante influence en Angleterre, en Ecosse et en Amrique. Ses ouvrages sont lus partout et ont de nombreuses ditions.

     Nous avons reu tant de bien de ses Quiet talks on prayer que nous avons ardemment dsir les mettre la porte des chrtiens de langue franaise. Ce ntait pas chose aise. Gordon se refuse parler franais. Il a fallu de grands efforts pour rendre dans notre langue ses fortes penses.

    En lisant ces pages tout vrai chrtien comprendra mieux limportance capitale de la prire et shumiliera davoir si peu et si mal pri.

    Quand nous nous plaons en face des promesses de Dieu, nous comprenons que nous navons pas le droit davoir des vies impuissantes, en grande partie striles, puisque tout est possible celui qui demande avec foi.

    En priant, en effet, nous entrons dans le royaume de la vrit et de la ralit, nous sommes arrachs toutes les tnbres, toutes les erreurs, tous les esclavages; nous sommes transports dans une atmosphre spirituelle qui permet toutes les semences de vrit dposes en nous de donner de glorieuses moissons.

    La prire nous rvle Dieu et nous mmes, elle fait descendre Dieu dans nos vies avec toutes ses vertus, elle fait de nous des vainqueurs, des rois; elle nous te nos illusions, notre confiance en nous, elle nous ouvre la Parole de Dieu, elle nous la rend vivante et puissante, elle nous y fait dcouvrir des trsors inconnus, de profonds abmes et de hautes montagnes. La prire vraie, faite au nom de Jsus, est ce quil y a de plus grand, de plus puissant ici-bas. Notre tmoignage na de valeur que dans la mesure o nous prions. Quand nous allons vers les pcheurs en sortant de la prsence de Dieu, nous leur donnons boire de leau vive, nous leur ouvrons des horizons ternels, nous les faisons monter. Entre tous les hommes, rois, millionnaires ou mendiants, les seuls vis--vis desquels Dieu se sent li, les seuls par le moyen desquels il transforme le monde, ce sont les hommes qui prient.

    La vraie prire, cest Dieu et lhomme se rencontrant sur lautel du sacrifice pour se donner lun lautre. Par consquent, prier cest nous quitter nous-mmes, cest mourir toute vie propre pour trouver Dieu, cest entrer dans son intimit de faon ne rester tranger aucune de ses penses damour, d ses souffrances, de ses indignations, de ses projets, de ses ambitions notre gard, lgard de lEglise et du monde. Cest en priant que nous comprenons par le coeur tout ce quil y a de tendresse dans le coeur paternel de Dieu pour chaque crature humaine. Alors nous ne pouvons plus accepter ce monde tel quil est; nous le voulons tel quil devrait tre.

    Que Dieu souffre de voir encore notre humanit dans un tel tat dignorance, dgarement, de mensonge, dabrutissement, de folie, de souffrances, dix-neuf sicles aprs quil nous a achet le pardon et le Saint-Esprit! Cest pour cela quil nous dit sous tant de formes et avec tant dinsistance: priez. Cest comme sil nous disait: ayez donc du coeur!

    En vrit, est-il juste que, Jsus-Christ ayant acquis toute crature les mmes grces qu nousle mme pardon, la mme paix, les mmes consolations, la mme libert, la mme esprancenous jouissions de ces grces quand tant dautres en sont privs? Etre riches et laisser mourir le monde quand Dieu nous dit de lui donner manger, cest inique! Mais si nous sommes riches pour enrichir les pauvres, pour nous dpenser leur profit, pour passer notre vie genoux en leur faveur, alors nos privilges sont une source de grces pour lhumanit, Laveuglement de ce monde livr Satan accuse Dieu. Les injustices de ce mondenous clairs, consols, envelopps de prires et de moyens de grce, et autour de nous dautres cratures dans la nuit de lignorance et du dsespoir, dans lhiver glacial de lgosme, enveloppes de tentationsaccusent Dieu. Et puisque la justice est la base de son trne, tout ce que nous avons reu par la Parole, par le Saint-Esprit, par la communion fraternelle, tous doivent le recevoir. Travaillons-y par la prire.

    Prier, cest crer dans les mes un terrain favorable, un climat propice la Parole de Dieu. Toute semence a besoin pour germer dun sol appropri sa nature, dun climat qui lui convienne. Si tant de semences de vrit jetes dans les mes donnent de si maigres moissons, cest parce que nous semons sur un sol glac. On ne sme pas en hiver. Cest pourquoi, avant de parler aux hommes, il faut parler Dieu; avant de pouvoir remporter la victoire sur les hommes, il faut lavoir remporte avec Dieu contre nous-mmes et contre Satan.

    Cest la mthode du Seigneur Jsus. Avant de commencer son ministre dans la puissance du Saint-Esprit, il avait remport la victoire sur Satan au dsert; avant dentrer dans la maison de lhomme fort pour piller ses biens, il lavait li. {Mt 12:24-30}

    Cest la mthode des aptres. Avant de descendre dans les rues de Jrusalem pour vangliser, ils ont pass dix jours en prire.

    Cest la mthode de tous les hommes de Dieu qui ont t des remueurs de consciences. Ctait dj la mthode des patriarches et des prophtes.

    Voyez Jacob pouvant en apprenant quEsa arrive avec quatre cents hommes. Il passe une nuit en prire, le coeur rempli dangoisse. Il plaide, il rappelle Dieu ses promesses, il demande la dlivrance. Et, pendant quil prie, Dieu transforme tellement les sentiments de son frre Esa que, le lendemain, au lieu dune pe pour le transpercer, Jacob trouve deux bras qui souvrent pour le presser sur le coeur mu de son frre.

    Pourquoi faut-il prier avant dagir? Pourquoi Dieu fait-Il, en rponse aux prires des croyants, ce quautrement II ne ferait pas, ce quil ne pourrait mme pas faire? Cest ce que Gordon va nous dire clairement et puissamment.

    On prie quelquefois comme si la prire avait pour but dmouvoir Dieu en faveur de ce monde et de le persuader quil doit rpandre son Esprit. On le supplie de telle faon quon donne limpression quil ne se soucie pas, comme nous, des mes sauver et que son amour pour le monde perdu est peu de chose en comparaison du ntre. Prier ainsi, ce nest pas prier intelligemment. Prier, cest faire passer ce qui nous proccupe de nos mains dans les siennes, cest abandonner notre faiblesse sa toute puissance, cest rappeler notre Dieu quelquune de ses promesses en lui disant: Tu sais, je compte sur Toi pour laccomplir. Et cest demeurer dans cette attitude de confiance. Dieu attend, pour accomplir de grandes choses, que nous ayons foi en Lui et que nous nous laissions vaincre par Lui.

    Que Dieu se serve de ce livre pour faire comprendre et prouver beaucoup de chrtiens quelle puissance de bndiction ils peuvent tre sils savent se livrer avec amour, avec foi, avec persvrance, au saint travail de lintercession.

    S. DELATTRE.

    PREMIERE PARTIE

    SENS ET MISSION DE LA PRIRE

CHAPITRE PREMIER

La prire, la plus grande manifestation de la puissance divine

    1. Cinq manifestations de la puissance divine

    Dieu a sujet de saffliger, car un des mondes quil a crs sest dtourn de Lui, comme un enfant prodigue. Ne lavouons qu voix basse: ce monde prodigue, cest le ntre. Plus bas encore, confessons que nous avons nous-mmes consenti cette trahison.

    Mais, de Sa voix la plus douce, par Son amour tendre et fort, Dieu a reconquis quelques-uns dentre nous et dsormaisque nos voix clatent dallgresse!nous, les rachets, nous pouvons tre pour dautres le chemin qui mne Dieu. Tel est Son plus grand dsir, et telle devrait tre aussi notre unique ambition. Pour nous aider atteindre ce but, Il nous a dous dune force particulire.

    Il ny a dans la vie humaine quune seule source de pouvoir, une seule, dis-je: le Saint-Esprit. Le Saint-Esprit est Puissance; il habite le coeur de toute crature qui se confie en Dieu; il franchit avec bonheur toute porte ouverte; il pntre en nous ds que nous y consentons, et sa prsence est chose vitale.

    Toutefois, chez beaucoup dentre nous, le Saint-Esprit nhabite pas en matre; il est un invit et non pas le matre de la maison; cest--dire quil est entrav dans son action naturelle, enchan, au point quil ne peut faire ce quil veut. Nous ne sommes pas conscients de sa prsence; si nous le sommes ce nest que partiellement.

    Reconnatre sa matrise, cultiver son amiti et lui donner toute libert, voil ce qui nous permettra dacqurir de la puissance. Il ny a donc quune seule source de pouvoir: le Saint-Esprit, habitant en nous et y dominant.

    La puissance divine se manifeste de cinq manires diffrentes; il y a cinq voies par lesquelles cet Esprit nous arrive et nous rvle son pouvoir.

    Tout dabord, par notre vie, par ce que nous sommes. Oui, simplement, par ce que nous sommes. Si nous agissons droitement, le pouvoir de Dieu, sans que nous en soyons, conscients, dbordera de tout notre tre. Une vie droite jette un clat tout particulier sur lhomme qui la vit. Il existe videmment, dans le coeur de tout chrtien, un dsir ardent de servir Dieu; soyons nanmoins certains que nous pouvons plus par ce que nous sommes que par ce que nous faisons. Nous servons Dieu bien mieux par notre vie de tous les jours que nous ne le ferions par telle ou telle grande action. Et ce simple fait, si nous ne loublions pas, devrait rendre la paix nos mes, lheure de la fatigue et du dcouragement qui laccompagne.

    Deuximement, pas nos lvres, par ce que nous disons. Nous pouvons bgayer, nous pouvons hsiter, mais si nous parlons de notre mieux, avec le dsir de plaire au Matre, notre effort sera bni dEn-Haut.

    Il mest arriv dentendre parler un homme qui hsitait, rougissait, et faisait fi des rgles de grammaire, mais en lcoutant mon coeur brlait. Jen ai entendu un autre prononcer un discours admirablement ordonn, mais ses paroles se sont effaces de mon esprit aussi vite et aussi facilement quelles taient sorties de sa bouche. Faisons notre possible et soyons sans souci pour le reste, car si nous vivons avec Dieu, Son feu brlera, oui, il brlera, que notre langue soit hsitante ou quelle soit sre delle-mme.

    LEsprit se rvle dune troisime manire: par notre service, par ce que nous faisons. Nous pouvons agir maladroitement et gauchement; notre mieux peut ne pas tre le mieux, mais si nous avons fait tout notre possible, notre effort portera des fruits.

    Une quatrime manire, cest par notre argent, par ce que nous ne gardons pas mais donnons pour Dieu. De tout ce que nous possdons, cest largent qui a le pouvoir le plus absolu.

    LEsprit, enfin, se rvle par notre prire, par ce que nous demandons au nom de Jsus. Et, chose trange, la plus grande force est celle qui rsulte de la prire.

    La vie dun homme a une influence considrable. Mais quels que soient sa force, sa douceur, sa puret, son dsintressement, son action est limite aux endroits o se passe sa vie.

    La puissance de la parole dpend entirement de la vie de celui qui parle. Tel discours embarrass nen est pas moins loquent et mouvant sil est appuy par une vie chrtienne, tandis que tel autre, aux priodes aises et polies, reste sans effet parce que lappui de cette vie lui fait dfaut.

    Linfluence que nous exerons par nos actes peut, elle aussi, tre grande et se rpartir en divers lieux; toutefois, elle sera toujours infrieure celle qui dcoule dune vraie vie chrtienne.

    La puissance de largent dpend entirement de lintention. Largent que le donateur regrette, largent quil a mal acquis, est un trsor sans valeur. Ce qui pouvait tre tout-puissant est frapp dimpuissance.

    Mais le pouvoir qui se dgage de la prire est au moins aussi extraordinairepour ne pas dire davantage maintenantque celui qui rsulte dune vie pure et vridique; et, sachez-le bien, ce pouvoir peut atteindre, non plus un seul endroit, mais un point quelconque de lunivers, votre choix.

    La plus grande chose que lon puisse faire pour Dieu et pour les hommes, cest de prier; ce nest pas la seule, mais cest la principale. La comparaison des diffrents moyens daction dont nous disposons nous amne donner la prire la premire place, car pour quun homme puisse prier vraiment, il faut tout dabord que ses intentions et sa vie tout entire soient droites. Un homme intgre qui donne la prire la place quelle doit avoir dans toute existence, verra ses actes, ses dons, ses paroles embellis et comme parfums par la prsence de Dieu.

    Les grands hommes dans le monde daujourdhui sont ceux qui prient. Je ne veux pas dire ceux qui parlent de la prire; ni ceux qui font profession de croire son efficacit; ni mme ceux qui expliquent ce quest la prire; non, jentends ceux qui prennent le temps de prier. Le temps leur manque, peut-tre. Nimporte, ils le prennent quelque antre occupation: importante, trs importante, urgente mme, elle est cependant moins importante, moins urgente que la prire. Il y a de nos jours de ces hommes qui savent faire passer la prire dabord, et qui, dans le plan de leur existence, groupent toutes leurs autres proccupations autour de la prire et aprs elle.

    Bien des gens font ainsi leur maximum pour Dieu; ils le font en gagnant des mes lEvangile; en rsolvant des problmes; en rveillant les fidles dune Eglise endormie; en fournissant hommes et argent des stations missionnaires; en maintenant jeunes et fortes des vies de sacrifice vcues bien loin, en terre trangre, l o la mle est la plus forte; en conservant enfin notre vieille terre quelques jours de paix de plus.

    Cest un service quils rendent en secret; part quelques conjectures, nous ne savons qui ils sont. Qui sait, cest peut-tre cette femme laspect simple qui se glisse hors de lglise; sa robe a t retourne deux ou trois fois; son chapeau remani plusieurs fois aussi; ses mains nont pas d connatre beaucoup la douceur des gants; et cest peine si nous lui accordons une pense furtive. Nous ne savons pas, nous ne devinons pas que peut-tre cest elle qui fait pour son Eglise, pour le monde et pour Dieu, bien plus quune centaine de fidles qui attirent davantage notre attention. Elle obtient ces beaux rsultats parce quelle prie, parce quelle prie vraiment selon que lEsprit de Dieu linspire et la guide.

    Jajouterai encore ceci: en exauant la prire de la plus humble de ses cratures, Dieu fera ce quautrement Il ne ferait pas. Oui, et jirai mme plus loin, je sens que je le dois, car la Bible elle-mme va plus loin: Dieu, en rponse la prire du plus humble de ses fidles, fera ce quautrement Il ne pourrait faire.

    On me dira: dcidment, ici, vous allez trop loin.

    Ecoutez alors les paroles que Jsus pronona dans le long et suprme entretien quil eut avec les onze disciples. Ctait dans la chambre haute, avant quils se rendissent la montagne des Oliviers. Jean nous a conserv une grande partie de cette conversation: Ce nest pas vous qui mavez choisi, mais moi, je vous ai choisis, et je vous ai tablis, afin que vous alliez, et que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure; afin queet voici justement un des motifs pour lesquels nous avons t choisisafin que ce que vous demanderez mon Pre en mon nom, Il vous le donne. {Jn 15:16} Dieu nagit donc pas seul, Il fait appel notre collaboration. Notre prire Lui rend possible ce quil ne pourrait faire sans notre concours.

    Du reste, si vous y rflchissez quelque peu, vous verrez que cette ide sadapte la vraie conception de la prire. Toute prire a et doit avoir deux facteurs: tout dabord, un Dieu pour donner. Vous maccordez ce point. Mais un second facteur est aussi indispensable: un homme pour recevoir. Le consentement des hommes est le canal par lequel Dieu parvient la terre: jamais Il ne presse, jamais il ne force; tout ce quil fait est pour et par lhomme; Il le fait toujours moyennant son consentement.

    Respectueusement, mais nettement, je dirai mme que Dieu ne peut rien faire pour un homme qui ferme sa main et son coeur. La main, le coeur et la vie doivent tre ouverts pour que Dieu puisse donner. Une vie ouverte, une main ouverte et tendue vers le ciel, voil ce qui unit le coeur de Dieu notre pauvre vieux monde gar. Notre prire, cest loccasion que nous donnons au Crateur de pntrer dans ce monde qui voudrait len exclure.

    2. La prire embrasse le monde entier

    La prire ouvre la terre entire lactivit de lhomme. Par elle, je puis tout aussi bien amener des coeurs Dieu dans lInde et la Chine lointaines que si jtais l-bas. Les moyens sont, il est vrai, diffrents, mais le rsultat est tout aussi sr. Jestime que le plus grand privilge accord un homme est de servir Dieu dans ces pays loigns. L-bas, en effet, les besoins sont plus grands, les tnbres plus paisses et les appels plus mouvants. Si donc un homme peut aller l-basheureux homme! sil a le privilge de se rendre ce champ dhonneur, il pourra y mettre directement en valeur les cinq pouvoirs que lui confre lEsprit.

    Il nhabite quun seul endroit; mais son influence rayonnera en proportion directe de son amour pour son Matre et de sa sympathie pour les dshrits. Quil vive en Afrique ou ailleurs, peu importe, car son coeur, en contact avec Jsus, brlera pour un monde. La prire, voil ce qui nous met en rapport direct avec le monde entier.

    Dans la solitude, dans le secret dune chambre close, un chrtien pourra vivre une demi-heure en Inde, aussi rellementmes paroles sont mrement rflchies et, tout exagres quelles paraissent, elles nen sont pas moins vraiesaussi rellement, dis-je, que sil y tait en chair et en os. Si cela est vrai, combien de demi-heures, vous et moi, nous devrions passer, dans la prire, servir Dieu secrtement! Il suffit de tourner la clef de notre porte, de nous isoler pendant quelques instants, et, grce au pouvoir de la prire, notre influence pourra tre aussi complte en Chine que si nous tions l-bas en personne. Sans doute, notre prsence nest pas visible; mais au point de vue de laction exerce, au point de vue de lobjet de notre prire, elle est absolument relle. Par la prire, nous pouvons clairer dune lumire nouvelle la page de la Bible que lit quelque indigne dAfrique; nous pouvons enflammer dun nouveau zle le prdicateur ou le professeur; nous pouvons rendre plus accessible aux hommes lhistoire de Jsus-Christ; nous pouvons amener Christ ceux que lesprit du mal et une hrdit mauvaise ballottent en tous sens; oui, certainement, nous pouvons leur faire accepter lEvangile, et, si besoin est, les sparer dtres aims, les lancer dans une nouvelle voie.

    Jentends ici lobjection que pourrait formuler un chrtien convaincu: Si jtais l-bas, je pourrais influencer mes frres perdus par un contact personnel, par mes paroles pleines de vie.Certainement, vous pourriez le faire, et plaise Dieu quun plus grand nombre se sentent appels payer de leur personne. Mais voici ce que ceux qui peuvent agir l-bas et ceux qui doivent rester chez eux doivent savoir: Peu importe o vous tes, vous ferez plus par votre prire que par votre personnalit. Si vous tiez aux Indes, vous pourriez, vos prires, ajouter le poids de votre personnalit et ce serait une belle action faire; mais que vous soyez l-bas ou ici, vous devez tout dabord remporter la victoire dans la solitude, gagner chaque pas, chaque mtre, chaque vie, dans le secret de la prire et ajouter alors la puissante influence de votre personnalit. Une fois que vous aurez pri, vous pourrez faire plus que de prier; mais tant que vous navez pas pri, vous ne pouvez rien faire de mieux que de faire monter au ciel vos supplications.

    Cest l prcisment que nous tous, certaines heures, nous avons fait fausse route, et l aussi que beaucoup, maintenant encore, font fausse route. Nous croyons que l o nous sommes, nous obtiendrons davantage par notre activit et qualors la prire nous donnera le pouvoir dagir. Non! mille fois non! Nous ne ferons rien de vraiment utile et durable si auparavant nous navons pas pri.

    Lorsquun homme est prs de moi, je peux lui parler, je peux faire agir ma personnalit sur lui, pour le gagner ma cause; mais avant de pouvoir influencer sa volont en faveur de Dieu, si peu que ce soit, il me faut tout dabord avoir remport la victoire dans la solitude. Lintercession consiste remporter cette victoire sur le chef des tnbres, et laction, qui la suit, consiste semparer du territoire dont ce prince a t expuls. Cette action est limite dans lespace, comme la personnalit mme qui agit; elle ne sexerce quen un seul endroit; tandis que la prire, sorte de tlgraphie spirituelle, met tout homme en relation directe avec le monde entier.

    Certains de nos amis croient faire preuve de sens pratique en disant: La grande chose, cest le travail; la prire est bonne, excellente, mais limportant est dagir.

    Cest le contraire qui est vrai. Quand on sait ce quest la prire et quon lui donne la place qui doit lui revenir, on est enflamm, au plus profond de son tre, par de nouvelles et puissantes raisons dagir; on comprend que lactivit qui plonge ses racines dans la prire est la plus capable de toucher le coeur humain; on dcouvre avec ravissement que lon peut exercer une action mondiale; on voit enfin son champ daction devenir aussi large que la pense du Matre.

    3. Prier, cest servir Dieu.

    Il est bon de se souvenir que la prire est un service, le plus grand service quun homme puisse rendre au plan de Dieu. Il est diffrent de tous les autres, mais il leur est suprieur, car il est moins limit. Partout ailleurs, nous trouvons de nombreux obstacles: lespace, la force corporelle, des entraves matrielles, des difficults provenant des diffrences entre les individus, etc. La prire ne connat pas de telles limites; elle ignore lespace; elle peut tre indpendante de toute diminution de force corporelle. Vraie tlgraphie de lesprit, elle pntre directement le coeur des hommes, traverse sans bruit les murs, force sans peine les serrures et arrive en contact direct avec le plus profond de lme, avec le centre de la volont quelle veut transformer.

    Toute action, au sens o lon prend ce mot dordinaire, est limite lendroit o se trouve la personne qui laccomplit, la distance que sa voix peut atteindre, au temps dont elle dispose avant de devoir quitter sa tche pour manger, se reposer ou dormir. Cette personne est limite par des murs, des serrures, des prjugs, et par ces petites diffrences de caractre quil faut avoir tudies avant de mettre le sige devant un coeur humain.

    Que defforts et quelle varit defforts sont ncessaires pour gagner des mes Dieu: exposer la vrit un groupe de personnes; lexposer une seule la fois; pratiquer les actes gnreux de la solidarit dans leur infinie varit; enseigner; ajoutons aussi le tout-puissant ministre de largent, lexemple constant dune vie pure et dsintresse, la correspondance, les livres et les traits. Tous ces efforts rentrent dans le plan de Dieu, pour racheter les mes; mais le fait extraordinaire remarquer est celui-ci: la victoire, dans chacun de ces cas, est remporte davance et dans le secret par la prire.

    Pntrer dans le camp ennemi et proclamer la victoire dj remporte, voil le but et lutilit incontestables de tous les autres efforts. Le jour o chaque chose recevra sa vraie place, o la prire viendra dabord, les autres formes de notre activit ensuiteje dis ensuite, car pour rien au monde il ne faudrait les omettre; bien au contraire, chaque service doit tre accompli avec tout le srieux, toute la rflexion, toute la force et tout lamour possibles; mais il ne doit ltre que lorsque la victoire a t remporte dans le secret, contre le vritable ennemi; il ne doit ltre quen sappuyant sur la certitude de cette victoirece jour-l, dis-je, notre activit extrieure obtiendra de bien plus grands rsultats dans le monde visible.

    Arms de la prire, nous marcherons de lavant, pleins de cette confiance qui, ds le dbut de lengagement, balaie le champ de bataille; et, fermement, nous nous attaquerons aux points de rsistance, jusqu ce que lennemi senfuie honteusement. La prire portera un coup fatal lennemi qui se dissimule, et nos efforts, dans la suite, se borneront tirer parti de ce coup mortel parmi les hommes que nous voyons et touchons. Une grande patience, beaucoup de tact, beaucoup dopinitret sont exigs dans ce service actif, car notre effort porte sur des volonts trs diffrentes les unes des autres. Un chef avis, qui veut vaincre, dbutera donc par le combat ardent et acharn de la prire.

    4. Lespace napporte aucune limitation la prire.

    Llectricit est une manifestation trange. Alors quelle est classe dans les sciences physiques, on croit avoir trouv sa vraie place dans le chapitre sur les forces naturelles. Toutefois, elle semble possder plusieurs proprits inhrentes au monde spirituel. Ceux qui lont tudie le plus fond avouent leur ignorance. On a trouv quelques-unes de ses lois, utilis son merveilleux pouvoir, mais sans savoir ce quelle est vraiment. Elle semble presque appartenir quelque domaine compris entre le monde physique et le monde spirituel, et elle nous fournit quelques comparaisons dun grand secours pour comprendre plus nettement la vie de lesprit.

    Dans lusine o llectricit est produite et asservie par leffort de lhomme, on trouve un tableau de dclenchement ou une chambre de commande munie de diffrents tableaux. Un homme entre dans cette chambre; il tourne un des commutateurs, ou plutt il dplace un des leviers sur une trs courte distance. Acte trs simple, facilement accompli, ne ncessitant presquaucun dploiement de force; mais il a suffi de cette simple intervention pour faire passer dans les fils la force emprisonne dans lusine et pour clairer, peut-tre, toute une partie de la ville.

    Quelques instants plus tard, louvrier rentre dans cette chambre et tourne un autre commutateur; et ce simple fait communique lnergie des centaines de voitures qui, rapides, emportent dinnombrables voyageurs. Le voil de nouveau qui pntre dans la mme pice, actionnant cette fois de plus petits leviers; et, linstant, il met en mouvement les roues de telle ou telle usine au personnel nombreux.

    Le service de cet employ chappe loeil de lobservateur; il a quelque chose de mystrieux; il consiste en un acte de la plus grande simplicit, mais il met en action des forces incommensurables. Personne jusquici, semble-t-il, na pu dterminer lagent mystrieux et terrible qui est en jeu. Quest-ce donc? Est-ce un fluide? Ce fluide passe-t-il lintrieur ou lextrieur du fil? Les spcialistes disent nen rien savoir. Par contre, les lois auxquelles cet agent mystrieux obit sont connues, et ds que les hommes y satisfont, sa puissance extraordinaire se manifeste.

Dans le domaine spirituel, il existe aussi une chambre de commande. Celui qui le dsire peut avoir dans sa vie un tableau de dclenchement. Ds lors, il peut aller de lavant, et, conformment aux lois de la puissance divine, faire rayonner, partout o il le veut, le pouvoir irrsistible de Dieu; jusquau Japon; en Chine; parmi les peuplades des plaines et des montagnes de lInde; dans lAfrique, qui est aussi prs de Jsus que notre propre pays; dans la maison, qui avoisine la vtre; dans tel quartier mal fam; dans le coeur du prdicateur qui vous parlera dimanche prochain, et dans les coeurs de ceux qui se rencontreront dans la salle dvanglisation ou lcole missionnaire.

    Les enfants ne sont pas autoriss toucher le commutateur, non plus quaucune main inhabile; car une fausse manoeuvre peut tre la cause de dommages considrables et de morts irrmdiables. Le commutateur spirituel, lui non plus, ne se prte pas des mains inexprimentes. Il se refuse au rude toucher des intrigants et des gostes, qui voudraient faire servir le courant leur profit personnel.

    Il y a une science de la prire; mais les plans merveilleux de notre Dieu sont tels que cette science peut tre acquise par qui la dsire; une seule condition est exige: il faut la dsirer, et, ds lors, elle vient tout simplement.

    Nest-il pas trange que, comme pour llectricit, aucune explication ne soit satisfaisante?

    Comment se fait-il que, par suite du simple maniement de quelques leviers, des roues places des kilomtres de lusine se mettent tourner, actionnes par une force norme? Qui lexpliquera? Et pourtant, nous savons le fait exact, et nous voyons, chaque jour, les hommes baser leurs actions sur cette connaissance.

    Comment se peut-il aussi quune femme de Iowa prie pour la conversion de son mari incrdule, et quau milieu du congrs le plus important qui ait eu lieu Washington depuis la guerre civile, cet homme, compltement ignorant des penses de sa femme, devienne subitement et plusieurs reprises conscient de la prsence et du pouvoir du Dieu dont il nie lexistence? Comment se fait-il que, des mois aprs, cet esprit critique et pondr constate sur le calendrier que le jour o sa femme commena de prier, il commena, malgr lui, davoir cette impression si forte de la prsence de Dieu?

    Qui lexpliquera?... Qui dont pourrait le faire exactement? Et pourtant, les faits sont l, facilement contrlables et mis en vidence par le changement complet qui survint dans la vie et la profession de cet homme.

    Comment se peut-il quune femme du Missouri, priant pour un ami de Glasgow aux tendances intellectuelles et sceptiques, habile peser la valeur des arguments et y parer, comment se fait-il que cette femme trouve, dans la suite, que lpoque o elle pria concide avec le changement de convictions de cet homme? Changement dabord accept contre-coeur, mais bientt changement radical.

    Ces deux cas sont connus de beaucoup, et pourtant personne ne les a encore expliqus.

    Enfin, pour se rendre matre du mystrieux pouvoir de llectricit, il faut obir ses lois; de mme aussi pour disposer du pouvoir de la prire et en obtenir de merveilleux rsultats, il suffit de connatre ses lois et de sy conformer.

    5. Les perspectives illimites de la prire

    Les paroles qui prcdent suggrent lide que la vraie vie chrtienne a deux cts: le ct intrieur et le ct extrieur. A la plupart dentre nous, le ct extrieur semble le plus grand: vivre, servir, donner, agir, entretenir des relations avec les hommes, lutter simplement pour lexistence quotidienne, tout cela absorbe la plus grande partie de notre pense et de notre temps. Ces diffrentes occupations semblent tre le but primordial de lexistence, mme chez ceux qui croient sincrement la vie intrieure.

    Mais quand les yeux souvrent, les yeux intrieurs qui voient linvisible, le changement de perspective est tout dabord amusant, puis effrayant, puis mouvant.

    Amusant, cause du changement de proportions; effrayant, cause du but poursuivi; mouvant, parce quil sagit dhommes forts qui sont spirituellement aveugles, et qui, cause de cela, continuent de gaspiller une force splendide des futilits.

    Le ct extrieur a dtroites limites; il comprend mille proccupations: la nourriture et le vtement, le logement, le temps et lheure qui passent, lducation et linstruction, les joies de la vie de socit et ladoucissement de la souffrance. Toutes ces proccupations sont lgitimes; elles font partie du tableau de la vie humaine; elles en sont larrire-plan matriel.

    Le ct intrieur les comprend toutes, mais ses limites stendent infiniment plus loin. Elles comprennent le monde entier et latmosphre qui lenvironne. Le ct intrieur touche lesprit; il pntre les mobiles de nos actions, il pntre lamour, il pntre le coeur; il entre en contact avec les myriades de forces et dtres spirituels qui, sans cesse, parcourent la terre, souillant les mes et les vies des hommes. Il slve jusque vers Dieu, cooprant au sublime plan damour que le Crateur a forg pour le monde.

    Suivons pendant une journe tel homme qui a adopt la vraie vision des choses.

    Voici tout dabord le ct extrieur: un humble foyer o lon soigne un bb, o lon raccommode, o lon coud, o lon fait la cuisine; tel homme passera sa vie peser des marchandises ou marteler le clavier dune machine crire, contrler le grand-livre dune maison de commerce, huiler les rouages rapides, brocher sans trve des feuillets imprims, manier le levier dune locomotive, pousser la charrue, veiller sur les fonds publics, tailler les haies, crire dennuyeux rapports..., bref, accomplir toute une srie dactes divers qui doivent tre faits sans cesse, jour aprs jour; actes souvent banals, mais quon ne peut viter, et qui remplissent lexistence de la grande majorit des hommes.

    Celui que nous suivons, son insu, poursuit tranquillement et gament son oeuvre, et cela durant tout le jour. Sa face est claire, ses yeux illumins, son pas lger; sa prsence et lesprit qui lanime transforment les lieux o il vit. Il travaille pour Dieu; disons mieux, il travaille avec Dieu. Il a ses cts un Ami invisible dont la prsence change tout. La corve monotone cesse dtre monotone; elle cesse mme dtre une corve, par la simple raison quelle est faite pour un Matre si extraordinaire.

    Tel est le ct extrieur, le ct troit de cette vie; troit, non pas en lui-mme, mais compar avec loeuvre totale.

    Et maintenant, silence et attention, car voici le ct intrieur o saccomplit le plus grand travail de la vie; voici linstant pass seul avec Dieu, avec la Bible. Tantt cest lheure matinale quclaire la lampe, car le soleil na pas encore dor les monts; tantt cest vers le soir, quand le soleil hte sa course vers loccident et que lhomme fatigu soupire aprs le repos. Cest le moment o il voit Dieu face face; cest le moment dune lecture profonde et pieuse; le moment des supplications ardentes et varies, sur un seul thme: Ta volont soit faite, au nom de Jsus le Vainqueur. Dieu lui-mme est prsent dans cette chambre; Il est prsent avec Ses anges dans cette retraite qui souvre. spirituellement parlant, sur un espace aussi grand que la terre. Lhorizon de cette prire solitaire est aussi tendu que celui du globe, grce la prsence de Dieu dans cet homme.

    Aujourdhui, cet homme passe une demi-heure en Chine, priant pour les missionnaires de ce pays, ses chrtiens indignes, ses millions dhabitants; priant pour laction des traits dvanglisation; priant pour que le contact personnel du missionnaire et des paens soit bni; priant pour linfluence de la Bible, de lcole, du dispensaire et de lhpital. Et, traversant cette prire comme un filigrane dor, se font entendre ces mots: Victoire, au nom de Jsus! Victoire, au nom du Christ! aujourdhui! aujourdhui! Que Ta volont soit faite! Que la volont du Diable soit dtruite! Victoire, au nom de Jsus!

    Demain, il consacrera le mme temps au Japon peut-tre ou tel autre pays. Ainsi cet homme aux horizons extrieurs si limits, mais dont la vision intrieure ne connat pas de limites, parcourt le Japon, lInde, Ceylan, la Perse, lArabie, la Turquie, lAfrique, les territoires catholiques de lEurope, les Etats de lAmrique du Sud; son propre pays avec ses villes, ses frontires, ses bouges; il visite, par la prire, sa propre ville, son Eglise, son voisin; dedans comme dehors, dehors comme dedans, la mare montante de la prire savance, calme, sre, irrsistible!

    Voil la vraie vie chrtienne! Cet homme, au prs ou au loin, gagne des mes, en rveille dautres, et cela aussi bien que sil se transportait dans chacun de ces endroits.

    Tel est le plan de Dieu. Le vrai disciple de Jsus possde un horizon aussi tendu que celui de son Matre. La pense de Jsus dominait terres et mers; il en est de mme de la prire de son disciple. Lhomme dont nous venons de parler ne sait pas les rsultats de son intercession... et pourtant il les connat par la vision que lui donne la foi.

    La salle o nous sommes runis et o nous nous entretenons peut tre ferme et si parfaitement obscurcie quaucune lumire ny pntre. Supposons qualors une fente se produise: aussitt, un mince rayon de lumire sinfiltrera dans la prire. Ce rayon, brillant dans les tnbres, nous parle lui seul dun astre de lumire qui rpand ses clarts sur lunivers entier.

    Lhomme qui prie de mme, aura de temps en temps, souvent peut-tre, la certitude des transformations accomplies par suite de sa prire. Il y verra le rayon de glorieuse lumire qui nous parle dun foyer de clart plus parfait.

    Lesprit dbordant de joie et dune divine crainte, davoir pu et de pouvoir contribuer loeuvre de Dieu, le coeur plein de paix et de compassion, la vie embellie par la prsence invisible du Pre, il continuera rsolument sa route, le regard fix vers laube du grand jour.

CHAPITRE II

La prire, facteur dcisif dans la lutte spirituelle

    1. Un conflit prhistorique.

    La prire, dans son acception la plus simple, prend une part active dans un conflit. Comprise comme elle devait ltre, elle en est mme le facteur dcisif. Le thtre de cette lutte, cest la terre; le but, de dcider qui rgnera sur elle et ses habitants; le conflit dure depuis les temps obscurs qui suivirent la cration.

    Le prince lgitime de la terre, cest Jsus, le fils du Roi; mais il existe un prtendant qui fut un temps prince lgitime, avant dtre coupable de trahison. Comme fit autrefois Saul, lorsquil eut t rejet et que David fut oint sa place, il essaie par tous les moyens de conserver son royaume et den dpossder le matre lgitime.

    Ce dernier, par des moyens compltement diffrents, et spcialement par la persuasion, cherche ramener le monde la fidlit envers son Suzerain. Il a d soutenir une lutte terrible contre le prtendant; mais, aprs une srie de victoires, il a remport la grande victoire du matin de la rsurrection.

    Il y a, dans ce conflit, un trait particulier qui le rend diffrent de tous les autres: une victoire dcisive a t remporte et, malgr ce triomphe complet du gnral en chef, les hostilits nont pas cess. La raison de cette situation est trange: le Vainqueur, dans son amour, a lambition, non seulement de vaincre son ennemi, mais de pntrer dans le coeur des hommes, moyennant leur libre consentement. Ainsi, grce cet amour merveilleux, cette prudence, ce courage, la lutte reste ouverte pour le salut des hommes.

    Cest un conflit spirituel auquel prennent part des milliers desprits, bons ou mauvais, qui parcourent la surface de la terre et remplissent latmosphre. De chaque ct, ils possdent une organisation splendide et compacte.

    Lhomme est un tre spirituel, un esprit revtu dune enveloppe corporelle; il a un corps et un esprit. Mais il est avant tout un esprit. Les vraies luttes ressortissent du domaine spirituel, car elles ont pour thtre le domaine spirituel et les antagonistes sont des tres spirituels.

    Satan, lui aussi, est un tre spirituel, un esprit revtu dune enveloppe corporelle.

    Ou plutt il na pas de corps, mais, pour servir ses ruses, ses desseins profonds et mauvais, il sassure une forme corporelle dans les tres humains.

    Le seul pouvoir qui agisse dans le domaine spirituel est le pouvoir moral. Par o il ne faut pas entendre la bont, mais ce pouvoir, bon ou mauvais, qui chappe au domaine physique, pouvoir plus lev, infiniment plus lev et plus grand que le simple pouvoir matriel. La puissance morale est le contraire de la puissance violente ou physique.

    Dieu nemploie pas la force, la contrainte physique. Cette affirmation gnrale nadmet que quelques exceptions. Il y a eu des guerres justes du moins pour un des partis. Nous apprenons par la Bible que Dieu, dans des cas extrmes, a ordonn la guerre. Les peuplades quIsral dut passer au fil de lpe se seraient invitablement uses par leurs excs et leur mpris des lois vitales; mais en considration du peuple lu, il fut ncessaire de prcipiter les choses. Par exception donc, pour lachvement de son plan, pour le salut final dune race et dun monde, Dieu donna un ordre dextermination. Lurgence cre lexception. Il y a un cas o le meurtre dun homme se justifie: quand il est clairement tabli que Dieu, Source et Matre de toute vie, la ordonn. Mais ces cas mis part, Dieu nemploie jamais la contrainte.

    Remarquez, par contre, que la force physique est une des principales armes de Satan. A ce sujet, il y a lieu de faire deux observations intressantes:

    1 Satan ne peut user de cette force quautant quil trouve dans lhomme un alli dont il fasse son agent;

    2 En lemployant, il a voulu, le plus subtilement du monde, choisir son terrain. Il sait que le domaine de la force spirituelle pure et simple ne lui est pas favorable, quil y est battu, car, dans le camp oppos, il y a une force morale plus grande que celle dont il dispose. Il lui est impossible de rsister aux forces de la puret et de la justice dont Jsus est la personnification. En effet, cest sur ce terrain moral, dans ce domaine spirituel, que notre Sauveur a gagn la grande victoire. Durant les annes quil vcut sur la terre, il passa par une srie dpreuves, tour tour subtiles et terribles; mais il en sortit vainqueur, sans que la puret et la droiture de son coeur fussent entaches.

    2. La prire fait rayonner au loin notre personnalit spirituelle.

    La prire est une force spirituelle qui na affaire qu des tres et des forces spirituels. Sur le champ de bataille contest, la prire est lappel incessant dun homme, dun esprit revtu de chair; il demande Dieu que linfluence de la victoire de Jsus sur le gnie du mal stende toutes les cratures. La prire prend le caractre de celui qui prie. Lhomme est un tre spirituel: la prire devient une force spirituelle; cest la projection de lesprit de lhomme dans le royaume spirituel.

    La prire, parce quelle est une force spirituelle, possde certaines qualits, certains caractres inhrents au monde spirituel. Un tre essentiellement spirituel nest pas limit par lespace comme nous, pauvres humains; il pourra passer dun endroit un autre aussi rapidement que notre pense. Si je veux aller de New-York Londres, il me faut compter au moins une semaine pour my transporter corporellement, tandis que je peux me croire Londres en pense et en parcourir les rues avant davoir eu le temps de formuler un mot. Un tre spirituel peut donc voyager aussi rapidement que la pense.

    Les tres spirituels, en outre, ne sont pas limits par des barrires matrielles, telles que les murs dun btiment. Pour venir ici, aujourdhui, je suis entr par cette porte, et vous tous, vous tes entrs par ces portes. Nous avons t obligs dentrer, ou par les portes, ou par les fentres. Nanmoins, les tres spirituels qui nous coutent maintenant et sintressent vivement notre entretien ne se sont pas soucis des portes; ils ont pntr par les murs ou par le toit, sils taient au-dessus de nous, ou par le plancher, sils taient au-dessous.

    La prire possde cette qualit propre aux tres spirituels de ne pas tre limite par lespace, ni par les obstacles matriels. Prier, cest vraiment projeter notre esprit, cest--dire notre vraie personnalit, lendroit que nous dsirons atteindre, et y agir sur dautres tres spirituels. Supposons, par exemple, que je prie chaque jour pour un homme qui habite sur les rives de lAtlantique. Le simple fait de penser que chaque fois que je prie, ma prire est une force spirituelle qui, instantanment, traverse lespace qui nous spare de cet homme, quelle pntre, sans trouver le moindre obstacle, travers les murs de sa maison, quelle influence les tres spirituels qui lentourent, et, par l-mme, sa propre volont, cette seule pense, dis-je, rend ma prire plus active et plus prcise.

    Quand je suis arriv la certitude, il y a quelques annes, que Dieu ne voulait pas que je parte pour les champs de mission, jen ai t profondment attrist. Toutefois, dans la suite, comprenant mieux la sagesse du Tout-Puissant, je me suis rendu compte que, par la prire, je pouvais exercer une influence positive jusque dans ces pays loigns. Comme tant dautres lont fait, jai tabli une liste quotidienne de prires. Il y a certaines personnes pour lesquelles je prie intervalles fixes, et mon me se rjouit la pense que, chaque fois que je prie, ma personnalit spirituelle est projete l-bas et que je me trouve en fait Shangha, Calcutta ou Tokio; je suis heureux de penser que jintercde l-bas, pour la victoire du Christ sur le mal, que je prie pour les fidles qui, l-bas aussi, tiennent haut le drapeau du Dieu Fort.

    La lutte est rude. Satan est un gnral de toute premire force et un lutteur obstin. Il se refuse admettre sa dfaite, jusqu ce quil y soit forc, Cest pour lui une question de vie ou de mort. Si trange et peut-tre si absurde que cela paraisse, il espre videmment russir. Si nous savions tout, cela pourrait sembler moins trange et moins absurde, tant donn les atouts quil a dans son jeu. Il y a assurment, dans le monde, bien des faits qui ne peuvent que justifier ses esprances. La prire rclame avec insistance la victoire de Jsus et la retraite complte de lennemi.

    Lennemi ne cde que ce quil est oblig de cder; il ne cde que ce quon lui prend. Le terrain doit donc tre conquis pied par pied et, pour cela, la prire doit tre prcise. Lennemi ne cde que quand il y est forc; la prire doit donc tre incessante; et comme il renouvelle sans cesse ses attaques, il importe que le terrain conquis soit dfendu contre lui, au nom du Vainqueur.

    Ceci nous permet de comprendre pourquoi nous devons continuer de prier, alors mme que nous avons dj obtenu des rsultats partiels et que nous sommes srs du rsultat dfinitif.

    3. La prire permet Dieu dagir sur la terre.

    Le meilleur alli que Jsus trouve dans ce conflit, cest lhomme; lhomme qui, restant sur le champ de bataille, se tient dans la communion de son Sauveur et, sans cesse, avec insistance, avec foi, proclame la victoire au nom de Jsus. Il est le seul ennemi parmi les mortels, auquel Satan ne puisse rsister. Par la prire de la foi, il projette une force tellement irrsistible dans le royaume des esprits que Satan est oblig de cder.

    Nous sommes si accoutums, par les nombreux rcits de lhistoire, voir les victoires remportes par la force physique seule, que nous avons peine raliser que la force morale dfait un ennemi mieux quaucune autre force.

    Voyez les dmons dans les Evangiles et, de nos jours, en Chine, obligs contre leur propre volont, malgr une lutte intense, obligs, dis-je, de reconnatre leur dfaite et mme de rclamer les faveurs de leur vainqueur. Les biographies chrtiennes abondent en rcits extraordinaires de victoires remportes sur Satan et dindividus transforms par linfluence de la prire.

    Si nous avions des yeux pour voir les esprits et assister aux conflits spirituels, nous pourrions contempler les dfaites constantes de lennemi, grce la prire persistante de quelque intime alli de Jsus. Chaque fois quun tel homme prie, ltendard sanglant de Jsus est dploy dans le monde des esprits et flotte au-dessus de la tte de Satan. Tout homme qui se livre entirement et librement Dieu et qui sapplique la prire conquiert pour son Matre un nouveau point du territoire en litige. Sur ce point, il peut planter la bannire de la victoire.

    Les Japonais combattirent des semaines entires pour obtenir une base dopration dans la pninsule de Port-Arthur; ils le firent mme aprs leurs victoires navales qui, pourtant, avaient ruin la force maritime de la Russie. Malgr cela, avec cette tnacit qui les a caractriss durant la guerre, ils ont lutt pour semparer de cette base dopration. Tant quils ne lavaient pas, ils ne pouvaient rien faire.

    Par la prire, lhomme donne Dieu un point dappui sur le territoire contest de notre terre. Communiant avec Dieu, priant, priant sans cesse, cet homme forme sur le sol ennemi une base dopration pour Dieu; sa conscration fournit au Gnral en chef un nouveau quartier gnral qui, situ sur le champ de bataille, servira de base dopration en vue de lattaque. Et le Saint-Esprit, qui est dans cet homme, forcera lennemi la retraite, au nom de Jsus le Vainqueur.

    Voil ce quest la prire!

    Et nous, en luttant genoux, nlargirons-nous pas la base dopration de Dieu sur cette terre prodigue?

CHAPITRE III

La terre, champ de bataille o lutte la prire

    1. La prire, mesure de guerre.

    Notre monde est le fils prodigue de Dieu. Le coeur du Pre souffre au souvenir de cet enfant; il y a si longtemps quil est loin, si longtemps que le cercle de famille est bris.

    Dans son amour, Dieu a conu un plan merveilleux pour ramener la maison paternelle cet exil volontaire, et les anges et les hommes se sont merveills de ce plan, de sa porte, de ses dtails, de sa force et de sa sagesse. Mais Dieu a besoin de nous pour son excution; Il veut nous employer; Il veut nous honorer en nous prenant son service. Cela est exact, mais ce nest quune partie de la vrit: le chemin que Dieu prend pour arriver un coeur humain passe par un autre coeur humain. Lorsque Dieu voulut raliser son plan, il dut descendre sur la terre et devenir homme. Il a besoin de lhomme pour accomplir son plan.

    Le plus puissant agent mis notre disposition est la prire. Pour comprendre vraiment cette parole, il faut dfinir la prire, et pour donner une dfinition exacte de cette dernire, il faut employer des termes guerriers. Le langage de la paix ne convient pas la situation. La terre est dans un tat de guerre. La bataille est chaude; ainsi donc, il faut des expressions guerrires pour faire comprendre ce quest la vraie prire.

Du ct de Dieu, la prire est la communication entre Lui et ses allis sur le territoire ennemi.

    Prier, ce nest pas persuader Dieu; la prire ninfluence pas Ses desseins; elle ne consiste pas non plus Le gagner de notre ct. Notre Pre dsire plus ardemment que nous ce qu bon droit nous brlons dobtenir. Le mal, le pch, la souffrance qui nous peinent le peinent bien plus encore; Il est mieux renseign; Il est plus sensible aux souffrances et au mal que le plus sensible dentre nous. Tout mouvement de compassion qui nous pousse prier, vient de Lui. Cest Lui qui prend linitiative de chaque prire. Il linspire.

    En effet, toute prire se meut dans un cercle. Elle commence dans le coeur de Dieu, puis descend sur la terre dans un coeur humain, atteignant ainsi notre globe qui est le champ de bataille de la prire, et remonte Dieu, son point de dpart, aprs avoir accompli sa tche ici-bas.

    2. Trois formes de prire.

    Nous donnons habituellement le nom de prire tout entretien avec Dieu. Il faut pourtant se souvenir que ces entretiens revtent diffrentes formes.

    La premire forme est la communion. Elle consiste simplement vivre en parfait accord avec Dieu. Cet accord nexiste que si nous sommes purifis de nos pchs dans le sang de la Croix. Il faut donc que nous venions Dieu par Jsus-Christ. Point nest besoin davoir un sujet spcial, une demande particulire; il suffit de jouir de Sa prsence, de Laimer, de penser Lui; il suffit dadmirer Sa force, Sa beaut, Sa sagesse, Son amour, et de lui parler sans mots, du coeur. La vraie adoration consiste penser quil est digne de recevoir le meilleur de nos vies, le meilleur de nos efforts... et plus encore. Cette communion demande un parfait accord entre Dieu et moi. Elle ncessite une confession de ma part, un pardon de la part de Dieu; cest la seule condition de ces rapports intimes. Culte et adoration, voil les caractres de cette premire forme de la prire.

    La communion est la base de toute prire: cest la respiration indispensable la vraie vie chrtienne. Elle ne concerne que Dieu et moi, Dieu et chacun de vous. Son influence est toute subjective: cest sur moi quelle agit.

    La seconde forme de la prire est la requte. Jemploie ce mot dans son sens troit de demande personnelle. La prire ainsi envisage est une requte prcise, adresse Dieu, au sujet dune chose qui mest ncessaire. Notre vie entire dpend compltement de la gnrosit de Dieu; tout ce dont nous avons besoin vient de Lui. Nos amitis, notre habilet gagner de largent, notre sant, notre force dans la tentation et dans la tristesse, notre conduite dans les circonstances difficiles ou ordinaires, notre aide, quelle soit financire, corporelle, intellectuelle ou spirituelle... tout vient de Dieu et ncessite une union constante avec Lui. Des demandes innombrables, des prires mentales doivent sans cesse monter vers les Cieux; en rponse, il en descendra un torrent de rponses et de secours. La porte qui nous spare de Dieu doit toujours tre ouverte, mais le verrou quil faut ouvrir est de notre ct. Du ct de Dieu, la porte est ouverte depuis longtemps; elle est toujours reste ouverte. La vie entire dpend de cet entretien ininterrompu avec notre Dieu, si admirable. Telle est la deuxime forme, le deuxime degr de la prire. Deux personnes seulement sont en jeu: Dieu et lhomme qui prie. Son influence est subjective, sa porte toute personnelle.

    La troisime forme de la prire est lintercession. Lhomme qui prie vraiment ne se borne pas prier pour lui-mme; la prire doit stendre dautres. Le vrai sens du mot intercession implique un effort pour quelquun dautre. Celui qui intercde est l comme un intermdiaire, un ami commun entre Dieu et une de Ses cratures qui nest pas en communion avec Lui ou qui a besoin dun secours spcial. Lintercession est le point culminant de la prire, la manifestation extrieure de sa force, son but effectif. La communion et la demande ont pour thtre le ciel et la terre; lintercession repose sur lune et sur lautre comme sur ses fondations; la communion et la demande fournissent la vie humaine la puissance divine; lintercession utilise ce pouvoir en faveur des autres; les deux premires ont un but personnel; la troisime envisage lhumanit; celles-l tablissent lalliance dun homme avec Dieu; celle-ci fait servir cette alliance autrui. Lintercession est la plante eh pleine force, mais ses racines puisent leur sve dans les deux autres formes de la prire; cest elle, enfin, qui aide Dieu raliser Son plan damour, ramener Lui notre plante.

    Il sera utile, au cours de ces entretiens, de nous souvenir de cette simple analyse de la prire et de ne pas oublier les deux premires formes, alors que nous parlerons surtout de la troisime, lintercession.

    3. Le point culminant de la prire.

    Dieu considre lhomme tout dabord comme un but, puis, en mme temps, comme un point do Son Esprit pourra rayonner. Dieu envisage lhomme premirement pour lui-mme; secondement, pour son utilit possible dans la conqute des autres hommes.

    La communion et la requte tablissent et entretiennent les relations dun chrtien avec Dieu, prparant ainsi le troisime et suprme degr de la prire: lintercession. La prire doit dbuter par les deux premires formes, mais elle atteint son maximum dans la troisime. La communion et la demande sont ncessairement personnelles, tandis que lintercession a une porte mondiale. Toute vraie prire dsirera donc toujours possder ces trois lments. Lunion avec Dieu est ncessaire; les besoins continuels de lhomme rendent les demandes incessantes; mais le coeur du vrai fidle, enflamm du saint zle du Christ, brle dobtenir quelque exaucement pour ses frres.

    Lintercession est donc le sommet de la prire.

    On parle beaucoup de la valeur subjective et objective de la prire, de son influence sur celui qui prie et de ses effets sur des personnes et des vnements tout fait loigns de lui.

    Les deux premires formes de la prire sont forcment subjectives quant leurs effets; elles ne se rapportent qu la personne qui prie. Tout aussi invitablement, la prire dintercession est objective; elle nexiste que pour les autres. Il y a mme, dans ce dernier cas, une double influence: mon union avec Dieu, pendant que jintercde auprs de Lui pour une autre personne, a, sur moi, une influence invitable. Mais cest l le petit ct de la question; le but principal est hors de nous.

    Dans certains milieux, on en est venu mettre tout laccent sur la valeur subjective de la prire et diminuer ou nier entirement la valeur objective. Certains orateurs ou crivains, dont le succs est grand, sexpriment trs librement ce sujet. Cela prouve quils nont pas compris toute la pense divine sur la puissance de la prire.

    En prsence de leurs affirmations, il faut rappeler nettement que le point de vue biblique est toujours celui-ci: grce la prire, se produisent des faits compltement extrieurs nous-mmes et qui, dans lordre naturel des choses, ne se seraient pas produits. Jsus na pas cess de laffirmer. Lide quon se fait tout naturellement dune prire exauce, cest que, par elle, on sassure un rsultat vritable dans le monde actuel.

    Mais ce nest pas l une explication suffisante de la prire, car, dans sa plus simple dfinition, elle suppose un changement que lon ne peut obtenir autrement. Au point de vue scripturaire aussi bien quau point de vue plus difficile de la philosophie, le but de toute vraie prire est en dehors de celui qui prie. Linfluence subjective de la prire prpare son influence objective, qui est la manifestation suprme, dans le monde extrieur, du plan rdempteur du Dieu damour.

    4. Six faits fondamentaux.

    Pour clairer la question, revenons en arrire et considrons certains faits qui sont la base de la prire.

    Tout dpend du point de vue auquel on se place. Le vrai point de vue est celui qui permet denvisager tous les points essentiels dune question. Si on ne sy place pas, on se fait une ide fausse et on risque de sgarer. Je nai pas lintention de prouver ici la vrit des affirmations de la Bible, ni dtablir la vraie manire de les interprter: ce pourrait tre le sujet dun livre entier. Mais laffirmation de certains principes permet de dblayer le terrain. Je tiens donc dclarer que je crois lexactitude des affirmations de la Bible et jajoute que je le fais sans aucune difficult.

    Il y a, dans notre vieille Bible, des faits certains, continuellement affirms. On les trouve dans lhistoire dIsral: ils se mlent la posie de ce peuple, et ils sont la base de tous les crits prophtiques, de la Gense la fin des visions de Jean Patmos.

    Peut-tre qu force de nous tre familiers, ils sont sortis de notre mmoire. Aussi, quoiquils soient bien vieux, je les rappelle, comme sils taient nouveaux. En voici six qui senchanent:

    1 A lEternel, la terre et tout ce quelle renferme. {Ps 24:1} Elle lui appartient par droit de cration, il en est le souverain. LEternel a prsid au Dluge. {Ps 24:10}

    2 Dieu a donn lhomme la domination sur la terre; il lui en a confi la royaut, il la charg de la surveiller et dutiliser ses forces {Ge 1:26,28 Ps 8:6. Voir les citations de ces passages, propos de celui qui rtablira cette domination. 1Co 15:27 Eph 1:22 Heb 2:8 Ps 115:16}.

    3 Lhomme qui avait la domination sur la terre, par faveur divine, transfra son autorit quelquun dautre; mais son action fut une dception pour lui. Cet acte fut double; car ce fut un acte dobissance et un acte de dsobissance. Dsobissance Dieu; obissance un autre, ce prince qui cherchait semparer de la domination sur toute la terre. La dsobissance de lhomme rompit lalliance qui lunissait Dieu et, du mme coup, abolit la souverainet du Crateur; son obissance lautre prince dplaa la souverainet au profit de ce dernier et, du mme coup, lui donna lautorit sur le monde.

    4 Lautorit, la royaut sur cette terre, accorde lhomme, nappartient donc plus Dieu, puisquil la confre Sa crature; mais elle nappartient plus lhomme puisquil la donne quelquun dautre. Elle est chue ce prince magnifique, qui son caractre ondoyant a mrit le nom de Satan, lennemi, le hasseur. Jsus, maintes reprises, parle du prince de ce monde, entendant celui qui y rgne actuellement. {Jn 12:31: 14:30 16:11} Jean, dans ses visions, parle dun temps venir o le Royaume du monde sera remis notre Seigneur et son Christ. {Ap 11:15} De ces assertions nous pouvons dduire nettement que ce royaume nest plus Jsus. Lautorit sur la terre, qui avait t accorde lhomme, est maintenant lapanage de Satan.

    5 Dieu est impatient de rendre la terre son premier Matre; Il le dsire pour lui-mme, pour lhomme et pour le monde. Nous ne connaissons pas lunivers tel quil est sorti des mains du Crateur. Maintenant encore Sa cration est dune beaut extraordinaireexaminez les toiles, les vgtaux, les eaux, la coloration et les nuances exquises de toutes choses, la combinaison de ces mille teintesoui, notre terre est infiniment belle. Toutefois, ce nest pas le monde tel quil fut, ni tel quil sera un jour venir. Sous son matre actuel, il a t tristement mutil, tristement chang, si chang mme que les premiers hommes ne reconnatraient probablement plus les lieux de leur premier sjour.

    Dieu, avons-nous dit, est impatient de ramener notre vieux monde son premier Matre. Pour cela, il lui faut un homme qui soit le dpositaire fidle des traditions anciennes et grce auquel il puisse replacer la terre sous son premier suzerain. La terre fut donne lhomme; les hommes en firent fi; il faut maintenant que ce soit lhomme qui lui rende sa condition premire.

    Un Homme vint, et puisque Jsus reprsentait lhumanit parfaite et complte, nous crivons ce mot Homme avec une majuscule, parce quil est lHomme suprieur tous les autres. Cet Homme, plus vraiment homme que tous les autres, fut linitiateur dun mouvement pour ramener le monde son premier matre.

    Voici enfin le sixime fait: ces deux hommes, lHomme de Dieu et le prtendant, eurent une lutte, la plus terrible qui fut jamais. Elle commena au berceau menac par Hrode, pour finir le matin du Calvaire et les deux jours qui suivirent. Pendant trente-trois ans, la lutte se poursuivit avec une ardeur et une intensit inconnue jusqualors, et, depuis Satan, redoubla deffort pendant les annes de Nazareth, puis dans le dsert, puis Gethsman, et enfin au Calvaire. Le dernier jour, trois heures, le mchant crut quil lavait emport. Le camp du prince de ce monde tressaillit alors dallgresse, pensant avoir la victoire, puisque lHomme de Dieu gisait dans le tombeau, derrire les portes de la mort, sous lautorit immdiate du matre de la mort. Mais le troisime matin vint et les barreaux de la mort furent briss comme des fils de coton. Jsus, vainqueur, se dressa, car il ntait pas possible quIl ft retenu par le prince de la mort; et Satan connut alors quil tait battu. Jsus, lHomme de Dieu, le loyal vassal du Roi, avait remport la victoire.

    Remarquons pourtant avec soin quatre faits au sujet de Satan:

    1 Il refuse de convenir de sa dfaite.

    2 Il refuse de rendre son territoire tant quil ny est pas forc; il ne cde que ce quil faut et quand il le faut.

    3 Lhomme seconde ses ambitions; il admet son autorit. Aujourdhui, comme de tout temps, la majorit des habitants de la terre admet cette autorit. Cest donc grce au consentement des hommes que Satan la possde. (Satan, en effet, ne peut pntrer dans le coeur des hommes sans leur consentement, et Dieu, qui le pourrait, ne le veut pas).

    4 Satan espre rendre ternellement durable son pouvoir sur la terre.

    5. Le plan grandiose du Vainqueur.

    Notons maintenant avec recueillement laction sans prcdent, laction inimite du prince victorieux.

    Il a laiss le conflit ouvert; il a laiss le chef vaincu sur le champ de bataille, car il veut vaincre non seulement le chef, mais encore toute la race prodigue et la ramener au foyer paternel. La grande bataille range est encore venir; ou plutt une bataille, car la plus grande a dj t livre. Jsus marche au prochain combat en vainqueur et Satan engagera sa dernire bataille lombre et dans la honte dune dfaite. Apparemment, le diable sefforce de trouver un Jsus; car, de mme que lHomme de Dieu fut envoy du ciel pour ramener le monde au bien, de mme, lhomme choisi par Satan sera une crature qui luttera pour lui, comme Jsus lutta pour Dieu; ce sera un homme qui personnifiera Satan comme Jsus fut la personnification, la parfaite image de Dieu; et cet homme, enfin, il le choisira parmi la race humaine, qui la domination de la terre avait t confie. Lorsquil y aura russi, il engagera la lutte suprme, bataille perdue davance.

    Voici maintenant ce quest la prire: un homme, un membre de la race qui a reu la terre en dpt et la livre Satan; un homme vivant sur la terre, sur notre pauvre vieille terre pcheresse, maudite et prement dispute; cet homme restant sur la terre, mais se tenant en communion dans toute sa vie avec le Christ Vainqueur et nayant rien de commun avec lusurpateur, se dresse et rclame que Satan cde, pas pas, vie aprs vie, devant la victoire de Jsus. Satan sait que Jsus est victorieux et il le redoute. Devant lapproche du Vainqueur il cde, et il doit cder aussi lorsque, sur la terre, un homme se prsente au nom de Jsus. Il cde contre-coeur, avec colre, aussi lentement quil le peut; il dfend opinitrement chaque pouce de terrain; mais il doit senfuir devant cet homme qui incarne Jsus.

    Jsus a dit: le prince de ce monde vient, mais il na rien en moi. {Jn 14:30} Le jour o, nous confiant humblement dans la grce de Dieu et nous appuyant sur une rsolution nergique et inbranlable, nous dirons, nous aussi, comme cela est possible: Que le prince de ce monde vienne, il ne trouvera rien en moi, pas de secours, pas mme daccs dans mon coeur, ce jour-l nous mettrons Satan en droute en proclamant la victoire au nom du Vainqueur.

CHAPITRE IV

Dieu se laisse-t-il influencer par nos prires?

    1. Comment Dieu donne

    Daucuns pourraient objecter ce qui prcde que les affirmations bibliques ne concordent pas avec le point de vue que nous venons dexposer.

    Je rpondrai ces objections par quelques passages familiers et frquemment cits qui me reviennent lesprit:

Invoque-moi et je te rpondrai; je tannoncerai de grandes choses, des choses caches que tu ne connais Pas.{Jer 33}

Invoque-moi au jour de ta dtresse; je te dlivrerai et tu me Glorifieras.{Ps 50:15}

Demandez et lon vous donnera; cherchez et vous trouverez; frappez et lon vous Ouvrira.{Mt 7:7}

Il semble daprs ces passageset cest ainsi que les gnrations ont pensque cest notre demande qui pousse Dieu agir; persistante, continuelle, elle est ncessaire pour provoquer lintervention de Dieu. On dit habituellement que Dieu veut par l prouver notre foi et, quavant dexaucer nos requtes, il cherche produire en nous certains changements. Cette explication est, pour une part, indubitablement vraie; mais, sachons-le bien, elle ne lest quen partie; car, si on considre la vrit entire, on se rend compte que cette explication laisse dans lombre une partie du sujet.

    Nous apprenons connatre Dieu par analogie et quoique ce procd ne puisse nous donner une connaissance complte de Ses perfections infinies, cest ainsi toutefois que nous nous rapprochons le plus de la vrit. Nous arrivons connatre Dieu daprs ce que nous savons de nous-mmes.

    Observez comment les hommes donnent. Parmi ceux qui soutiennent des oeuvres de bienfaisance, nous pouvons distinguer trois classes de donateurs, et, dans chacune, quelques nuances.

    Il y a celui qui donne parce quil est influenc par les autres. Si un homme habile ou un comit lui adressent un appel, lui prsentant adroitement leur cause, utilisant habilement son caractre, sa position, son gosme, lui montrant la possibilit dun gain, lui disant ce que donnent des hommes dans la socit desquels il aime tre class, et ainsi de suite touchant tout ce qui peut lintresser; sils persistent dans leurs demandes, il finira par donner. Il y mettra peu dempressement, plus ou moins de bonne grce, mais il donnera.

    Il y a une deuxime classe: celle de lhomme bienveillant et gnreux, dsireux de donner et dtre ainsi utile ses concitoyens. Il prte une oreille attentive lexpos qui lui est fait et nattend, avant de donner, que davoir pu se faire une ide de limportance de loeuvre en question et de la somme quil doit offrir; ensuite, il donne.

    La troisime classe de donateurs est moins nombreuse que les deux prcdentes, cest celle des hommes qui prennent linitiative de leurs dons. Tel, par exemple, regarde autour de lui, fait des enqutes, mdite sur les besoins si nombreux de ses concitoyens. Il dcide de donner l o son argent peut tre le plus utile et, une fois quil a fix son choix, il offre, lui-mme, de donner. Sa gnrosit pourrait, il est vrai, tre exploite par des gens qui convoitent son argent pour dautres oeuvres que celles auxquelles il destine ses dons. Pour obvier ce danger, il pose certaines conditions quil faudra observer et dont le but est dtablir des relations de sympathie entre lui et ceux quil voudrait aider.

    Lun dsire ardemment que lhistoire du Christ soit connue du peuple innombrable de la Chine. Il donnera cinq millions et chargera la Mission dans lintrieur de la Chine den surveiller lemploi, et cela dune manire qui satisfasse ses dsirs dvanglisation.

    Un autre confiera lUnion Chrtienne de Jeunes Gens de la ville quil habite une forte somme qui sera dpense selon certaines conditions. Sa pense nest pas de fonder une organisation spciale, mais den faire bnficier une foule de jeunes gens de sa ville. Cet homme a appris connatre cette association et il en devient ainsi un ferme soutien.

    Un autre a le sentiment que si le peuple pouvait avoir de bonnes lectures, il en tirerait dans la vie un norme avantage; et le voil qui offre spontanment une fortune pour fonder dans la ville une foule de bibliothques. Grce ce don splendide, des milliers de gens, qui aspirent augmenter leurs connaissances, entrent en contact avec le donateur.

    Dans tous ces cas, la pense du gnreux bienfaiteur est dobtenir certains rsultats auprs de personnes qui, pour une raison ou pour une autre, lui sont sympathiques.

    Il est difficile dassimiler les actions de Dieu aux ntres; toutefois, de ces trois manires de donner, il ny en a quune, une seule, qui puisse nous indiquer comment notre Pre donne.

    Quoique mes paroles puissent tre taxes de superficielles, je suis de plus en plus port croire que la plupart dentre nous croient, sans y rflchir davantage, que Dieu exauce nos prires la faon du premier donateur. Dautres lassimilent au second. Il nen est pourtant rien; ni lune ni lautre manire ne se rapproche de celle de Dieu; la troisime seule voque le Dieu damour qui coute et qui donne.

    Notre Pre dsire ardemment reconqurir Son monde prodigue et chacun de Ses enfants; il Lui tarde de voir abolis les effets du pch et de contempler une humanit transforme. Pour atteindre ce rsultat, Il prend linitiative. Mais tout ce qui est fait pour lhomme doit tre ncessairement fait par lhomme, par son consentement libre et joyeux. Les obstacles ce but ne sont ni innombrables, ni insurmontables; ils sont nanmoins nombreux et importants; le prtendant est fin, rus et pass matre dans lart de manier les hommes; les volonts sont fausses, affaiblies; les consciences sont souilles; les esprits sont endormis et les sensibilits dsesprment mousses. Le pch na pas seulement souill la vie; il a fauss le jugement, sap la volont, et aveugl loeil intrieur. La tche de Dieu sen trouve complique, parce que tout changement doit ncessairement intervenir par lintermdiaire de ces volonts fausses et diminues.

    Mais, si difficile que ce soit, le plan de Dieu est simple; son appel est merveilleusement clair. Invoque-Moi, dit-il, et Je te rpondrai; Je tannoncerai de grandes choses, des choses caches que tu ne connais pas. Lorsquun homme Linvoque, cela prouve quil a dj tourn sa face vers Lui. Sa volont a agi et agi doublement: en lloignant du mal et en le rapprochant de Dieu. Cest un simple pas, mais un pas capital.

    Cette invocation est le point de contact avec Dieu, le point o Sa volont et celle de lhomme sunissent. Celui qui crie au secours est entour de difficults et soupire aprs la dlivrance. Dieu, qui lui parle, a vu depuis longtemps ces difficults et, de tout temps, Il a dsir les carter. Maintenant laccord est complet et Dieu, grce cette volont qui sunit la Sienne, atteint facilement Son but.

    2. Une vieille question

    Cela nous amne cette question si souvent pose: Dieu se laisse-t-il influencer par nos prires? Aucun problme na t plus souvent et plus srieusement discut. Des incrdules, doubls de savants, ont rpondu nettement: Non. Des chrtiens, des gens instruits, mais possdant une forte foi, ont rpondu avec une certitude gale: Oui.

    Fait singulier; ils ont raison les uns et les autres; non pas, il est vrai, quils aient raison dans toutes leurs affirmations, ni dans toutes leurs croyances, ni mme dans toutes leurs manires de penser, mais dans leurs conclusions dernires, exprimes par ces mots si brefs: Non! Oui!

    La prire ninfluence pas Dieu.La prire influence srement Dieu. Elle ninfluence pas Son but, elle influence Ses actes. Chaque chose pour laquelle on Le prie, chaque chose juste, videmment, a t dj lobjet de Ses penses, mais il ne fait rien sans notre consentement. Son plan a t entrav par notre manque de bonne volont. Quand nous apprenons connatre Ses intentions et que nous en faisons un objet de prires, nous Lui donnons par l mme loccasion dagir.

    Il en rsulte un double effet, heureux pour lhomme, nfaste pour Satan. Notre simple consentement annule lopposition du diable; il ouvre les voies Dieu et enlve les obstacles. La route, ds lors, est libre pour lexcution du plan prmdit.

    La question des lois de la nature, introduite parfois ce sujet, est affaire purement accessoire. Elles ne sont que les simples moyens daction dont Dieu se sert en face des forces secondaires; elles ne rentrent pas dans le plan de Dieu qui na pour but quun rsultat moral. Que le soleil reste quelques minutes de plus au-dessus de tel ou tel point de la terre, cest un simple dtail de fort peu dimportance pour le Crateur, Son pouvoir nen est pas affect, car tout est entre Ses mains; Son plan non plus nen est pas modifi, car Il a pour but des rsultats bien plus srieux.

    Le pch a plong la terre dans une situation si critique, que de telles interventions sont parfois ncessaires, pour que le plan de Dieu puisse se raliser.

    Dans les situations critiques, toute rgle de conduite, divine ou humaine, est change. Cest alors quon peut juger de la valeur dun homme.

    Si un homme jette terre le fardeau quil porte et se prcipite au milieu de la rue; si, sans motif apparent, il saisit convulsivement quelque chose sur le sol, nous concluons immdiatement quil est fou. Mais sil accomplit le mme acte pour se prcipiter au secours dun petit enfant qui trottine presque sous les sabots des chevaux ou sous un tramway lectrique, personne ne pensera le critiquer; on admirera au contraire, son courage, sa dcision, et on attendra avec anxit le rsultat de son intervention.

    Les situations imprvues obligent une initiative particulire; quand elles se produisent, elles mettent notre force lpreuve; elles justifient nos actes et elles expliquent dune manire satisfaisante ce que rien dautre ne pourrait expliquer.

    Le pch a plong le monde dans une situation critique. Mis en prsence de ce fait terrible, serons-nous des hommes de prire, des hommes capables des plus grands efforts que lon puisse demander des cratures mortelles? En face de ce fait inou, commencerons-nous de comprendre lintervention de Dieu dans lhistoire et dans nos vies? Le plus grand vnement qui eut lieu sur la terre, la croix, fut, lui aussi, un vnement imprvu sortant des lois de lhistoire.

    Le fait que la prire ne produit aucun changement dans la pense et dans le but de Dieu rvle dune manire touchante son amour merveilleux.

    Supposons que je dsire vivement quelque chose et que cette chose me soit absolument ncessaire. Je vais Dieu et je la Lui demande. Supposons aussi quil hsite mexaucer, quil nait pas le dsir de maccorder lobjet de ma demande, quil hsite vraiment. Jinsiste, je plaide, je persiste dans mes supplications, et Dieu, peu peu, est frapp de mon srieux; Il voit que jai besoin de cette chose et, dans sa bont, Il maccorde ce que je demande. Nest-il pas un Dieu damour dcouter ainsi mon appel? Assurment. Navons-nous pas vu souvent de telles scnes se passer entre lenfant et son pre? Lenfant pense en lui-mme: Comme mon pre maime! Il ma donn ce que je lui ai demand.

    Mais supposons que Dieu pense sans cesse moi. Dans son coeur, Il forme des plans damour pour moi, Il a le vif dsir de me donner une grande part de ce quil possde. Cependant, dans Sa sagesse, Il ne me la donne pas, parce que je ne connais pas mes propres besoins. Sil me donnait ce quil a dcid de maccorder avant que jen aie compris la valeur et senti le besoin, je pourrais en abuser. Mais, ds que japprends connatre mes besoins et la valeur des grces divines, Dieu se rjouit de cet heureux changement en moi et Il sempresse de rpondre mes prires.

    Dites-moi, un tel Dieu nest-il pas plus digne dadoration que le premier? Jsus a dit: Votre Pre connat vos besoins avant que vous les formuliez.

    Dieu est un Pre. Il a pour le monde un amour paternel, on pourrait mme dire un amour maternel. Il sait tout ce dont nous avons besoin, et il a dcid davance de nous le donner. Pour moi, la grande question, quand je demande un exaucement personnel, est celle-ci: Est-ce que je connais ce quil sait me manquer? Est-ce que je pense ce quil estime mtre ncessaire? Souvenez-vous aussi que Dieu est plus consacr Son plan damour que le plus sage, le plus aimant des pres que nous connaissions. Une mre pense aux besoins de son enfant, la nourriture, aux petits plaisirs, au luxe mme. Ainsi fait Dieu notre gard, mais Il est plus aimant et plus sage que le meilleur dentre nous.

    Jai souvent pens que si Dieu venait me dire: Je dsire te donner quelque chose comme preuve spciale de Mon amour, parce que je taime, que dsires-tu avoir? je lui rpondrais: Mon Dieu, choisis. Je choisis ce que tu choisiras.

    Il pense moi; Il sait quoi je pense; Il connat mes plus grands dsirs et Son amour est si grand, quil choisirait quelque chose de plus beau que ce que jaurais souhait. Tel est notre Dieu. La prire ne change pas, ne peut pas changer un Dieu si bon. Pour toute chose juste et bonne nous pouvons recourir Lui, car Il a dj dcid de nous laccorder; mais la prire ne modifie pas la volont de Dieu; Il ne peut donner contre notre volont, et notre consentement, exprim par notre demande, Lui fournit seulement loccasion de faire ce quil avait dj dcid.

    3. La plus belle prire

    Il y a une prire par excellence, la plus belle que lon puisse adresser Dieu; cest la base de toute vraie prire, laliment de toute supplication inspire par lEsprit. Jsus lui-mme nous la donne; cest la seule quil nous laissa. Elle est courte, mais puissante; quatre mots: Ta volont soit faite!

    Recueillons-nous et approfondissons le sens de cette parole; que sa force, son essence, entre dans nos coeurs et les remplisse.

    Ta volont; celle de Dieu.

    Premirement, Dieu est sage; il possde toute la force intellectuelle, toute la pntration, toute la sret de jugement que nous puissions concevoir. Deuximement, il est fort, avec tout ce que ce mot implique de puissance et de pouvoir irrsistible. Troisimement, Il est bon, pur, saint, et nous pouvons donner ces mots toute la force que nous leur attribuons quand nous les appliquons ceux que nous connaissons intimement. Enfin, il est aimant, ou plutt, car ladjectif est insuffisant, Il est amour, il personnifie lamour. Et sachez que nous ne connaissons pas le sens de ces mots; la meilleure dfinition que nous en donnions, la meilleure reprsentation que nous nous en fassions, mme dans nos rves, nen donne quune ple ide. Nous ne comprenons pas le sens intime de ces mots, car ils signifient infiniment plus que nous ne pouvons le supposer. Leur sens dpasse de mille coudes notre entendement.

    Et pourtant, malgr toute Sa perfection, ce Dieu sage, fort, bon et amour est notre Pre; nous lui appartenons.

    Pre tendre, Berger fidle, Il nous conduit avec amour. Nourris de Sa main paternelle, Nous sommes Lui pour toujours.

    Nous sommes Ses enfants de par la cration et par une nouvelle cration en Jsus-Christ. Il est notre Pre, par Sa propre volont. Voil le sens de Taun Dieu sage, fort, pur, amour, qui nous tient lieu de pre et de mre, un Dieu qui est notre Dieu.

    Ta volont. La volont de Dieu, ce sont Ses dsirs, Ses plans, loeuvre dont il souhaite lachvement et laquelle Il prte Sa force pour quelle sachve. La terre est Sa cration; les hommes sont Ses enfants. Comme le font des parents prudents et aimants, Dieu sest, lui aussi, consacr Lui-mme tous, pensant chaque crature humaine, faisant des plans pour lhumanit entire, pour chaque homme, pour la terre elle-mme. Son plan est le plus sage, le plus pur, le plus gnreux qui se puisse imaginer, et plus encore. Il sempare de toute notre vie, de chacun de ses dtails. Rien nchappe Sa vigilance, car elle est taye sur lamour. Quest-ce qui peut tre aussi vigilant, aussi clairvoyant que lamour? La haine, son contraire, est ce qui y russirait le mieux. Ce sont toujours les extrmes qui se touchent. Toutefois, pour ce qui est de la vigilance, la haine ne peut pas toujours rivaliser avec lamour. La sant, la force, le foyer, ceux quon aime, largent, les conseils, la protection, les choses ncessaires notre vie, Tes attentions auxquelles pense toujours lamour, les services: tout cela est compris dans la pense damour que Dieu nous consacre.

    Telle est Sa volont, qui se modifie suivant notre obissance et que les circonstances de la vie transforment leur tour. La vie est comme un cheveau embrouill et Dieu, dans Sa patience infinie travaille habilement le dmler et tirer le meilleur parti possible de ce fouillis de fils. Ce qui nous semble absolument parfait lest rarement dans la ralit; ce qui est trs bon en soi-mme nest en gnral pas excellent dans toutes les circonstances et surtout quand des vies humaines sont en jeu.

    Dieu a une habilet extraordinaire, une patience illimite et un amour sans bornes. Il est sans cesse occup utiliser chaque circonstance pour en tirer le meilleur rsultat possible. Il pourrait souvent faire plus et ce plus, le faire dans un temps beaucoup plus court, si nos volonts taient plus flexibles. Nous pouvons nous abandonner Lui, sans arrire-pense, mme dans la nuit o lon ne peut rien voir. Et cette confiance doit tre de la confiance, non une preuve; l o on se confie, on ne met pas lpreuve, car l o on met lpreuve il ny a pas de confiance. Si vous priez ainsi, cest que vous vous confiez en Dieu. Voil ce quil est, ce quest Sa volont et voil la signification des prires que nous lui offrons.

    Ta volont soit faite. La volont dun homme est lhomme agissant dans les limites de son pouvoir. La volont de Dieu, pour lhomme, est Dieu lui-mme agissant dans les limites de notre coopration. Le verbe est employ au passif, mais le mot soit contient en lui-mme une ide daction. Il faut laide du verbe tre pour exprimer le sens passif de tout verbe actif; de mme il faut une volont intensment active pour transformer ce passif en action humaine. La plus grande force se rvle en cdant intelligemment. Dans ce cas, la prire exprime le parfait consentement dun homme ce que la volont de Dieu se fasse en lui et par lui. Un homme ne perd pas sa volont sans cesser dtre homme. Ici, au contraire, ne sachant se soumettre il rend sa volont aussi forte quelle peut tre, aussi forte quun barreau dacier, aussi ferme que le chne vigoureux dont la force est si grande quil sincline et plie au vent. Il emploie ensuite toute cette force devenir passif devant une volont plus haute, mme si le but de cette dernire nest pas claire son intelligence limite.

    Ta volont soit faite, cest--dire accomplie, ralise. Le mot faite indique une action paracheve, finie. Sa volont soit entirement accomplie, dans tout son ensemble, dans tous ses dtails. Ces mots nexpriment pas seulement le srieux dsir dun coeur qui prie, mais la volont dtermine que chaque vnement de la vie soit soumis laction du plan de Dieu. Quand cette prire est faite avec sincrit, elle change compltement le coeur des hommes qui la font et le plan de Dieu se ralise dans leur vie. Ces mots loignrent dun trne puissant le plus grand juriste de la terre, le lgislateur hbreu, pour lamener rechercher lalliance dune race desclaves. Ces mots firent abandonner au prophte Jrmie, ce gant spirituel, un commandement facile et agrable, pour lui confier une cause mprise dont lui-mme ne devait retirer que de la honte. Ces mots arrachrent Paul la place en vue quil occupait, pour le conduire chez un peuple o il endura des souffrances inoues qui se terminrent par une mort sanglante. Ces mots, enfin, ont fait renoncer Jsus, le Fils de Dieu, un royaume pour Le conduire la croix.

    Dans chaque gnration, le prestige de ces quatre mots a transform des vies et leurs multiples ambitions. Ta volont soit faite, voil la prire par excellence qui a t linstrument de Dieu dans toutes Ses grandes actions parmi les hommes.

    Cette volont est faite partout, dans la totalit des mondes crs par Dieu; il existe une seule exception: notre terre et la partie du monde spirituel qui lui est allie. Partout ailleurs, cest lharmonie complte avec la volont du Pre. Sur notre terre seule se fait entendre la note discordante de la rsistance.

    A cette prire se rattachent deux clauses qui lui donnent son caractre particulier et lexpliquent; elles ont t ajoutes pour en rendre le contenu plus clair. La premire de ces clauses donne ltendue de Sa volont; la deuxime montre lopposition faite cette volont, ses consquences pour nos propres vies, pour la race et pour la terre.

    Voici la premire clause: Ton rgne vienne. Dans chacune de ces courtes sentences: Ta volont soit faite; Ton rgne vienne, le mot sur lequel tombe laccent est Ton. Ce mot marque ici un contraste absolu. Il y a maintenant sur la terre un autre royaume; il y a aussi une autre volont. Cet autre royaume doit disparatre pour que le rgne de Dieu puisse venir.

    Les deux royaumes en question sont opposs en tout; ils sont rivaux; ils se disputent la mme suzerainet, le mme territoire; ils ne peuvent coexister. Charles Il et Cromwell ne pouvaient vivre ensemble Londres.

    Ton rgne vienne sous-entend ncessairement cette autre demande: Que lautre royaume disparaisse. Ton rgne vienne signifie aussi: Ton roi vienne, car, dans la nature des choses, il ne peut y avoir de royaume sans roi. Par la mme dduction, ces mots signifient aussi: Que lautre prince parte, celui qui prtend tre le vritable hritier du trne. Ta volont soit faite, cest encore, pour la mme raison: Que lautre volont soit annihile.

    La deuxime clause contenue dans notre prire et ajoute pour manifester la force de laction divine est celle-ci: Dlivre-nous du mal. Ces deux sentences: Ta volont soit faite et Dlivre-nous du mal sont unies par un lien tout naturel. Chacune suppose lautre. Laction complte de Dieu dans nos coeurs ncessite lmancipation de toute influence mauvaise, soit directe, soit indirecte, soit encore hrditaire. Etre dlivr du mal signifie que toute pense et tout plan de Dieu notre gard doivent tre entirement accomplis.

    Il y a, dans le monde, deux grandes forces loeuvre, deux forces qui se heurtent sans cesse et que nous retrouvons dans le dveloppement de lhistoire et de nos vies. Chez beaucoup dentre nous, chez nous tous mme, quoique a des degrs trs diffrents, ces deux volonts se combattent sans cesse. Lhomme est le vrai champ de bataille; la lutte la plus terrible se passe dans sa volont. Dieu ne veut pas accomplir Sa volont chez un homme sans que ce dernier y consente; Satan, lui, ne le peut pas. Le point de dpart de la lutte contre la volont de Dieu est linfluence du Diable, et, dun autre ct, ce qui traverse effectivement les plans de Satan, cest un homme entirement consacr faire ce que Dieu veut.

    La prire par excellence commence donc par parcourir tout le champ de bataille; elle eh atteint ensuite le centre pour finalement sattaquer lEnnemi. Cette prire, la voici: Ton rgne vienne! Ta volont soit faite! Dlivre-nous du mal! Toute prire vridique que nous offrons au Matre drive de ces paroles si simples et si comprhensives. Et cette supplication peut tre adresse, est de fait adresse Dieu sous mille formes, avec une infinit de dtails. Elle est la prire par excellence, parce quelle est une prire universelle; elle comprend toutes les autres demandes, car la volont de Dieu embrasse tout ce qui est lobjet dune vritable prire. Elle est la prire par excellence, cause de son intensit; elle frappe au coeur lEnnemi de Dieu.

DEUXIEME PARTIE

OBSTACLES A LA PRIRE

CHAPITRE PREMIER

Pourquoi ne sommes-nous pas exaucs?

    1. Rupture avec Dieu

    Dieu rpond la prire. La prire, cest en somme Dieu et lhomme salliant en vue dun but lev: ltablissement du rgne de Dieu ici-bas. Cest l le but de la prire.

    Notre demande et notre attente, laction de Dieu qui rpond nous permettent dobtenir des rsultats quil serait impossible davoir autrement. La prire transforme tout.

    Pourtant beaucoup de prires demeurent sans rponse ou, pour parler plus exactement, beaucoup de prires demeurent sans rsultat. Il serait mme juste de dire que des milliers de supplications montent au Ciel pour en redescendre sans effet. Le fait est certain; convenons-en franchement et simplement. Plusieurs personnes disent, visant le rsultat: La prire nest pas ce que vous dites; nous avons pri, mais en vain; rien na t chang.

    Vous entendrez cette affirmation un peu partout et un peu dans toutes les langues. Des rudits, au style pondr, des gens irrflchis, qui effleurent peine le sujet, bref, des gens de toute sorte se trouvent unis par cette affirmation. Et ils ont raison, parfaitement raison. Malheureusement, ils ne disent pas tout, et ce quils omettent est de nature changer compltement la conclusion. Ne dire quune partie de la vrit, cest mentir, et de la pire manire.

    Le plan de Dieu au sujet de la prire, comme beaucoup dautres plans, a t fortement modifi; souvent mme il fut bris. Aussi celui qui dsire marcher avec Dieu et acqurir autant de puissance que possible doit tout dabord dcouvrir ce qui fait obstacle laction de la prire.

    Il y a trois sortes dobstacles. Premirement, nous trouvons en nous une catgorie de sentiments qui coupent toute relation avec Dieu, Source de toute transformation. Puis, il y a en nous certaines choses qui retardent ou diminuent les rsultats, contrevenant au complet dveloppement du plan daction de la prire. Enfin, il y a un grand obstacle extrieur avec lequel il faut compter.

    Nous parlerons dabord de la premire catgorie dobstacles, savoir ceux qui interceptent tout rapport entre Dieu et Son alli humain.

    Ici encore nous rencontrons une triple division, car la Bible mentionne en toutes lettres trois choses qui dtruisent leffet de la prire, La premire nous est bien familire, car, hlas! des choses rpugnantes finissent par nous devenir si familires que nous nprouvons plus de rpulsion leur vue. Le pch, voil une des principales entraves la prire. Dans les premiers chapitres dEsae, Dieu dit lui-mme: Quand vous tendez vos mainsindiquant par l comment le peuple priait, debout, les mains tenduesje dtourne de vous mes yeux; quand vous multipliez les prires, je ncoute pas. {Esa 1:15} Pourquoi? Quel empchement y a-t-il? Ces mains tendues sont souilles. Ils tendent vers Dieu des mains souilles par le pch; et Lui doit assister ce spectacle qui Lui rpugne. Dans le cinquante-neuvime chapitre de ce livre dEsae, {Esa 59:1-3} Dieu parle encore et dit:

    Non, la main de lEternel nest pas trop courte pour sauver, ni son oreille trop dure pour vous entendre.

    Il ny a donc pas le moindre dsordre de Son ct; Dieu est parfait.

    Maisprtez maintenant toute votre attentionvos iniquits... vos pchs... vos mains... vos doigts... vos lvres... votre langue... la vase du pch sinfiltre partout.

    Voyons aussi le Psaume soixante-six: {Ps 66:18} Si javais conu liniquit dans mon coeur, le Seigneur ne maurait pas exauc. Combien plus grave encore, si le pch conu dans le coeur devient par les mains une puissance agissante! Une fois pour toutes, disons clairement, sans rticences: Le pch est un obstacle la prire. Cela na rien de surprenant; cest le contraire qui le serait. La prire nous met en relation avec Dieu; le pch rompt toute relation avec Lui.

    Supposez que mon appartement soit reli par un fil direct avec ma maison de Cleveland et que quelquun dtende le fil et lui fasse toucher le sol sur une longue tendue; pourrai-je tlgraphier par ce fil? Un enfant mme sait que cela me serait impossible. Supposez aussi que quelquun coupe le fil; les deux bouts sont spars; il ny a pas un kilomtre, que dis-je? peut-tre pas un mtre de distance; mais cela suffit: les deux fils sont nettement spars. Russirai-je tlgraphier par ce fil? Assurment non. Et pourtant, je pourrais tre assis dans ma chambre et tlgraphier une heure durant, compltement absorb; je pourrais expdier le plus beau et le plus persuasif des discours. A quoi bon? Le fil est coup. Tout mon beau plaidoyer sen va dans les airs ou dans la terre. De mme, le pch coupe le fil et le message disparat dans le sol.

    Parfaitement, me dira-t-on; mais, par cette affirmation, vous nous coupez nous tous toute communication. Chacun de nous na-t-il pas sur la conscience quelque pch, petit ou grand, contre lequel il doit lutter et quil doit surmonter sans cesse? Il est certainement exact que plus un homme se sent prs de Dieu, plus il est conscient de ses tendances pcheresses, mme sil remporte continuellement la victoire. Voici simplement ce que veut dire lEcriture: Si je conserve dans ma vie un interdit, si je nobis pas lordre du Matre, je commets un pch. Mon action peut tre mauvaise en elle-mme, comme elle peut ne pas ltre; qui sait? elle peut tre juste aux yeux dun autre. Quimporte! si la voix intrieure, fidle et sereine, a parl, si je sais ce que le Matre dsire et si je nobis pas, jai pch. Alors il est inutile de prier, cest une pure perte de temps; dans cette situation, la prire ne peut que provoquer des dceptions. En effet, je me dirai: Je ne suis pas aussi bon que celui-ci ou celui-l; toutefois, je ne suis pas tellement mauvais, puisque je prie. En ralit, parce que jai rompu avec Dieu, ma prireou plutt les mots que je dis sous forme de prirena absolument aucune valeur.

    Vous voyez que le pch est une insulte faite Dieu. Il peut tre poli, civilis; il est capable datteindre un haut degr de finesse ou il peut tre tout fait vulgaire. Un homme se soucie-t-il de la nature du gourdin qui le frappe? Comment, Dieu et moi, pouvons-nous causer ensemble si jai pch et si, persvrant dans cet tat, je nai pas implor Son pardon? Et si nous ne pouvons causer avec Dieu quand nous demeurons dans le pch, nous ne pourrons naturellement travailler ensemble. Or, la prire est un travail fait de concert avec Dieu. Prier, cest hter lexcution du plan que Dieu a fait pour notre monde. Et nous, qui savons cela, narracherons-nous pas de nos coeurs ce qui est mal? Ny mettrons-nous pas la place ce que le Matre dsire? Ne le ferons-nous pas au nom de Jsus? Au nom des hommes mme? Au nom de ces pauvres hommes tromps qui sont tenus loin de Dieu, parce quil ne peut les atteindre par notre moyen? Ne nous humilierons-nous pas et ne demanderons-nous pas pardon pour notre pch, notre enttement mesquin qui a contrari le plan damour du Matre? Pendant que nous implorons notre pardon, il y a, l-bas, des vies fausses, arrtes dans leur dveloppementpis peut-treuniquement cause de lobstacle quil y a en nous; et ces vies, tandis que nous sortons de cette assemble, restent plonges dans ce triste tat.

    Puisse cette pense, lavenir, nous rendre particulirement attentifs nos actes!

    2. Le pch, point dappui donn Satan

    La Bible parle dun second obstacle lexaucement de la prire. Il en est question dans lptre de Jacques: {Jas 4:2-3} Vous ne possdez pas, parce que vous ne demandez pas. Voil qui explique mainte vie dessche, mainte Eglise endormie et plus dun problme insoluble. Nous noffrons pas au Crateur loccasion dintervenir. Laptre continue et dit: Vous demandez et vous ne recevez pas. Ah! nous y voil! Cette absence de rponse nos prires est videmment une vieille question. Mais pourquoi ne recevez-vous pas? Parce que vous demandez mal, parce que vous demandez dans le but de satisfaire vos passions Ce qui veut dire que notre prire est goste, que nous rclamons ce que nous dsirons pour notre propre usage.

    Voici une mre qui prie pour son fils, presque un jeune homme dj; ce nest pas un chrtien, cest toutefois un brave garon. Elle se dit: Je dsire que mon fils me fasse honneur; il porte mon nom; mon sang coule dans ses veines. Je souhaite quil soit. un homme distingu, quil honore sa famille. Certainement il sera tout cela sil est un vrai chrtien. Je dsire donc quil devienne chrtien. Cest ainsi quelle prie sans cesse, avec ferveur. Dieu pourrait toucher le coeur de son garon et dire: Jai besoin de toi aux Indes pour maider regagner mon territoire. Mais elle, la mre, ne pensait pas cela. Son fils, l-bas, si loin, aux Indes! Oh! non, pas cela! Cest par gosme quelle a pri. Sa prire est un ruisseau qui se dverse dans une mer morte. Elle ne pensait pas Dieu, Son oeuvre de salut pour notre pauvre monde abus par le pch. La prire de cette femme est en elle-mme, et, tant donn son objet, tout fait naturelle, et Dieu a exauc dj un nombre incalculable de demandes semblables. Mais, prenons-y garde, le motif goste, lgosme qui lanime, devient un marchepied pour Satan, et ainsi le but de la prire se trouve dplac.

    Voici maintenant une autre femme priant pour que son mari devienne chrtien. Sa pense est celle-ci: Je dsire quil se convertisse; cela serait si gentil; vraiment, il ny aurait rien de plus beau; il viendrait lglise avec moi et sassirait notre banc; ce serait parfait. Elle pense probablement encore quil n jurerait plus, quil ne boirait plus et serait plus aimable la maison. Elle ajoute peut-tre: Il prierait avant les repas! Nous aurions le culte de famille. Il se pourrait bien que lexaucement de sa prire ne soit pas immdiat. Voici ce que jen pense moi-mme: Si les penses de cette femme ne dpassent pas un certain cercle dides, vous auriez raison de la qualifier dgoste. Elle pense elle-mme et non pas Dieu qui est afflig de voir son mari dans un tat de rbellion contre Ses lois. Qui sait, Dieu pourrait toucher le coeur de son mari et lui dire: Jai besoin de toi pour la conqute du monde. Ce changement de vie amnerait probablement une diminution de ses revenus, changerait sa position sociale. Oh! non, elle navait pas song ces transformations, mais uniquement son propre avantage.

    Voici maintenant un pasteur qui demande Dieu le rveil de son Eglise. Ses penses intimes, peine connues de lui-mme, sont peut-tre celles-ci; Puissions-nous avoir un puissant rveil dans notre Eglise; puisse le nombre de ses membres saccrotre, la frquentation des cultes augmenter; nos finances seront amliores; mon propre traitement sera lev et mon Eglise fera parler delle; qui sait, je pourrai tre promu un poste plus important. Ah! si seulement nous avions un rveil!

    Aucun pasteur, de nos jours, ne tiendrait un tel langage, ni nentretiendrait de propos dlibr une telle pense. Mais vous savez quelle ruse se cache dans le trfonds de nos coeurs. Sil arrive donc que nous ayons de telles penses la base de nos prires, le motif en est videmment goste. Cest ainsi que Satan en a chang le nom et le caractre. Notez, je vous prie, que ce nest pas par rpugnance accomplir une chose dsirable que Dieu nexauce pas de telles prires. Au contraire, jamais Il ne perd loccasion de travailler pour Son peuple, pourvu quil ait quelque chance de russite; Il lui arrive mme demployer des hommes dont les conceptions sont fausses et les motifs intresss. La raison de son refus est plus profonde: cest que lgosme permet Satan de prendre pied; il lui donne un refuge dans notre coeur. Le diable fait tout son possible pour arrter nos prires et, quand il ne peut y russir, il sefforce, autant que faire se peut, den gter les rsultats.

    On peut, en toute conscience, prier pour plusieurs motifs tout fait personnels: pour se maintenir en sant, pour tre guri; on prie pour ceux quon aime; on prie quand on a besoin dargent; en vrit, nous osons prier pour mille choses qui peuvent ne pas tre ncessaires, mais seulement dsirables, car notre Dieu est un Dieu damour dont le dsir est que Ses cratures jouissent pleinement de la vie.

    La raison pour laquelle nous prions, voil ce qui dtermine le bien-fond de nos requtes. Quand le but de la vie dun homme est le plan de Dieu, toutes ces choses peuvent tre demandes librement, selon linspiration du Saint-Esprit. Et point nest besoin de se creuser la tte, de rflchir sans cesse. Il sait si le but de nos coeurs! correspond Ses dsirs.

    3. Le plus court chemin pour aller Dieu

    Un troisime obstacle la prire est un esprit rancunier. Vous avez pu remarquer que Jsus parle beaucoup de la prire et beaucoup aussi de pardon; mais avez-vous observ combien souvent Il joint ces deux mots: prire et pardon? Je me suis souvent demand pourquoi; maintenant, cela ne mtonne gure. Lexplication monte de toutes les blessures mal fermes que nous observons de partout. Mme lorsquon nen tend pas de plainte, il suffit douvrir les yeux pour voir combien dlicat est notre piderme et vive notre sensibilit, pour apercevoir de tous cts, largement ouvertes des plaies que personne na soignes.

    Les nombreuses allusions de Jsus ce sujet nous montrent combien lOriental et lOccidental, le premier et le vingtime sicle se ressemblent. Prenez lEvangile de Matthieu, vous y lirez: Si tu tapproches de lautelcest--dire de Dieu par la prireet que tu te souviennes que ton frre a quelque chose contre toi, laisse l ton offrande et ten va jusqu ce que tu sois rconcili (Mt 5:23-24..

    Voici venir un homme avec un agneau; il sapproche avec solennit et respect de lautel de Dieu. Mais comme il savance, subitement surgit dans son esprit limage dun homme avec lequel il a eu quelques difficults. A ce seul souvenir, ses poings se serrent, ses dents grincent. Jsus dit: Si tel est le cas, laisse l ton agneau. Comment! il faut sen aller, brusquement? Que vont dire les gens qui se rendent au temple?Pose lagneau et ten va.Le plus court chemin pour aller Dieu nest pas celui de lautel, mais celui qui passe devant la maison de ton ennemi.Premirement, rconcilie-toila rconciliation dabord, cest absolument essentielensuite, va et prsente ton offrande.

    Dans le chapitre six de saint Matthieu, {Mt 6:9-15} Dieu nous donne la prire-type que nous appelons communment loraison dominicale. Elle renferme sept demandes, dont une, celle du pardon, reoit un accent tout spcial.

    Au chapitre dix-huitime {Mt 18:19}, nous voyons Jsus sentretenant seul avec ses disciples sur la prire. Pierre semble se souvenir des remarques faites prcdemment sur les relations du pardon et de la prire; il pose cette question: Mais combien de fois dois-je pardonner un homme? Sera-ce jusqu sept fois?Srement, Pierre estime quil a fait de grands progrs spirituels, puisquil peut maintenant penser pardonner sept fois de suite son prochain. Le Matre lui rpond: Pierre, tu ne mas pas compris. Le pardon nest pas du domaine des mathmatiques; il ne sagit pas de faire ton prochain tel ou tel crdit. Ce nest pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois Et les yeux de laptre souvrent tout grands dtonnementQuatre cent quatre-vingt-dix fois... successivement... un seul homme!... Jsus, apparemment, espre par l quil se fatiguera de compter et conclura que le pardon est prfrable tout; ce que Jsus veut, cest que Son disciple arrive simprgner de lesprit du pardon.

    Selon son habitude, Jsus leur raconta une histoire pour illustrer sa pense: Un homme devait son matre une somme norme, mille talents, cest--dire une somme que, en fait, il ne pouvait pas payer et qui correspond des millions de notre monnaie. Le dbiteur se rendit chez son crancier et lui demanda un dlai. Je nai pas les fonds en ce moment, lui dit-il, mais jai la ferme intention de payer; je ne veux nullement me drober mes obligations; je demande un arrangement et, en temps voulu, je paierai la somme entire. Le matre alors lui remit compltement sa dette.Tel est le tableau que Jsus fait de Dieu, et personne ne connat mieux le Pre que le Fils.

    -Cet homme sortit alors et trouva un camarade qui lui devaitceci nous montre que Jsus avait un sens profond du comiquequi lui devait quatre-vingts francs et quelques centimes; aussitt il le saisit la gorge et lui dit: Paie-moi ce que tu me dois. Son dbiteur de le supplier instamment et de lui dire: Je ten prie, sois accommodant; jai la ferme intention de payer; je suis justement court ces jours-ci, mais je ne veux nullement me drober mes obligations; aie un peu de patience. Ces mots sont familiers celui auxquels ils sadressent, mais il ne veut pas les entendre et fait jeter son dbiteur en prison, ce qui ntait gure le moyen de se faire payer.

    Telle est la peinture que Jsus fait de lhomme, et qui, mieux que lui, connat le coeur de lhomme? Il nous dit, en effet, que le pardon que Dieu nous a accord est celui dune faute norme. Que sont donc les torts des autres notre gard en comparaison de ce qui nous a t pardonn? Et combien mesquins et petits nous sommes dans nos penses et nos sentiments!

    Mais, me dira-t-on, vous ne savez pas combien il est dur de pardonner. Oui, je le sais, je sais quil y a des choses difficiles oublier, des cas o lon ne peut pardonner, de soi-mme. Je suis heureux dajouter que je sais aussi autre chose; que je sais que, si vous laissez lEsprit de Jsus remplir votre coeur, Il vous fera aimer des personnes que vous hassez; et ce ne sera pas une simple attraction suscite par une similitude de caractres, mais un vrai amour, une vraie sympathie venant du coeur. Lamour de Jsus, quand on lui laisse libre accs, remplit le coeur de piti pour la personne qui vous a bless il suscite une compassion tendre et infinie pour cette crature quune chute si profonde a rendue capable dune si mchante action.

    Ce dont il faut se souvenir avant tout, ce sur quoi nous devons insister, cest que nous devons pardonner librement, franchement, gnreusement, exactement comme Dieu,  si nous voulons tre unis Lui par la prire. La raison en est simple trouver: le pardon mne Dieu, la haine Satan. Si la prire, dans son sens le plus lev, est une association, le mme esprit doit animer les deux associs, Dieu et lhomme; cest le seul moyen dobtenir de grands rsultats.

    Puisque les racines de la rancune plongent dans la haine, Satan a toute libert dagir dans le coeur dun homme qui sy adonne-La rancune! quelle famille se groupe autour de ce mot, au prs et au loin! La jalousie, lenvie, lamertume, les mots acerbes, le sarcasme aiguis et acr comme le dard empoisonn dune flche, les regards mauvais, les lvres amres: quelle triste parent!

    4. Eclaire-moi, mon Dieu!

    Le pch, lgosme, la rancune, que ces mots sont rvlateurs! Plus dune belle vie passe spirituellement inutile, cause de ces obstacles; et, par l mme, le grand plan damour de Dieu est contrecarr; et des mes sont perdues, cause du petit nombre dassocis fidles priant pour le salut du monde.

    Adressons au Ciel cette prire: Eclaire-moi, Dieu, connais mon coeur et aide-moi le connatre; sonde-moi; pntre mes penses les plus profondes, mon but, mes ambitions les plus intimes, et aide-moi les connatre; vois ce qui, en moi, est une source de chagrin pour Toi; puis conduis-moi, conduis-moi loin de cette voie dangereuse, dans Ta voie qui mne la vie ternelle. {Ps 139:23-24} Au nom de Jsus et pour lamour des hommes. Amen!

CHAPITRE II

Pourquoi lexaucement tarde-t-il?

    1. Comment Dieu sapproche de lhomme

    Dieu influence les hommes par les hommes; le chemin de lesprit vers un coeur humain passe par un autre coeur humain. Nous pouvons dire, avec le respect d Dieu, et pourtant en toute vrit, que son plan de salut est entrav par des obstacles venant des hommes. Ces paroles paraissent signifier plus quelles ne signifient vraiment. Lide que nous nous faisons de lhumanit est celle dune socit affaiblie, humilie, amoindrie; mais quels grands changements peuvent survenir ds que lEsprit de Dieu rgne en Matre.

    Dieu a besoin de lhomme pour achever son oeuvre; voil le fait qui ressort dune tude sur la prire. La prire est le meilleur agent de Dieu; cest aussi le meilleur agent de lhomme, car lintercession consiste vaincre Satan et gagner des hommes. Dieu compte sur notre effort, et Il peut compter entirement sur lhomme qui, fidlement, pratique la prire.

    Les rsultats que notre Pre souhaite ont t retards; ils ont t amoindris, parce que beaucoup dentre nous nont pas appris prier simplement et efficacement. Cela doit tre appris. Dieu le sait et facilitera lui-mme notre tche. Nous devons ds lors tre consentants, et notre consentement doit tre actif; cest l que gt la difficult. Une forte volont, cdant entirement la volont divine, abdiquant ses droits devant des droits plus grands, voil le plus puissant alli du Crateur pour Son oeuvre de rdemption.

    Dieu retarde lexaucement ou refuse de rpondre nos prires, soit par bont, soit pour nous donner davantage, soit encore pour atteindre un rsultat plus important; mais le fait primordial, cest que les plans de Dieu sont entravs, entravs parce que nous ne voulons pas apprendre prier, entravs par notre lenteurje dirais presque notre stupidit apprendre prier. Que ma prire soit exauce ou non, cela importe peu, semble-t-il. Je ne nuis gure qu moi-mme en priant peu ou en priant dans de mauvaises conditions. Cest l une grave erreur, car cest une chose terrible que, par ma faute, lexcution du plan de Dieu lgard du monde puisse tre retarde. Lide que la prire consiste dans un exaucement personnel est bien petite, bien mesquine, et pourtant bien courante Bien comprise, la prire fait de nous, en ralit, les collaborateurs de Dieu dans son oeuvre mondiale, et le reste vient ct, comme un dtail, dailleurs important.

    La vraie raison du retard ou de lchec dans lexaucement est simplement la diffrence quil y a entre les points de vue divin et humain. Quand nous prions, ou bien nous navons pas atteint le degr de sagesse ncessaire, ou bien nous navons pas acquis le dsintressement qui nous rend propres sacrifier une chose bonne une meilleure, la meilleure, le dsintressement qui sacrifie un petit dsir personnel au salut des foules.

    La mthode denseignement quaffectionnait tout particulirement Jsus tait la mthode image; cest par des comparaisons, par des rcits, par des images que filtre mmoire est le plus vivement impressionne. A notre tour, recourons ce procd. Il y a, dans la Bible, quatre exemples frappants de prires non exauces. On pourrait en donner dautres, mais ces quatre exemples ressortent tout spcialement et contiennent les principaux enseignements dont nous avons besoin. Tous les cas de prires non exauces qui nous sont familiers se rattachent probablement lun de ces types; exceptons-en toutefois les cas o entre en jeu le grand obstacle extrieur que nous tudierons plus tard.

    Ces quatre cas sont: la demande de Mose dentrer en Canaan, la prire dAnne demandant un fils, lcharde de Paul et la prire de Jsus Gethsman. Etudions-les tour tour.

    2. Pour le salut dun peuple

    Le premier cas est le refus quencourut la demande de Mose.

    Mose tait le guide de son peuple; do quon le considre, sous quelque angle quon lexamine, cest un des gants de la race humaine. Ses lois sont encore la base de la jurisprudence. Nous voyons, par le rcit quil nous fait de sa vie, que le secret de son pouvoir comme lgislateur, comme organisateur dune nation aux destines merveilleuses, comme chef et comme homme de erre, nous voyons, dis-je, que le secret de toute sa puissance rsidait dans son commerce direct avec Dieu. Il a t et est encore aujourdhui un type dhomme de prire. Il rapportait tout Dieu et dclarait que toutes choses: lois, organisation, culte, plans, que tout lui venait de Dieu. Dans des circonstances critiques, quand une catastrophe morale tait imminente, il implorait Dieu, et la situation tait change selon sa requte. Ses demandes personnelles lui taient accordes. Ctait avant tout un homme qui traitait avec Dieu directement, en toutes circonstances, simples ou complexes, personnelles ou dordre national. Ce que nous savons de lui montre que la prire est la simple et profonde explication de sa carrire tonnante. Il priait et Dieu agissait selon les prires de lhomme quil avait choisi. Lhistoire de Mose est la preuve de cette affirmation.

    Nous trouvons toutefois dans sa vie une exception, une seule. Le fait que lexception est unique dans une longue carrire est justement ce qui rend ce cas si frappant. Mose, diffrentes reprises, pria Dieu de lui accorder un certain exaucement, et toujours il lui fut refus. Dieu pourtant nest ni capricieux, ni arbitraire; il doit donc y avoir une raison ce refus. La raison existe en effet, claire et comprhensible.

    Voici les faits: Le peuple dIsral, libr du joug des Pharaons, tait une troupe indiscipline et avec laquelle il tait difficile de vivre toujours daccord. Les Isralites taient lents, sensuels, mesquins, ignorants, impulsifs, immodrs, pnibles, nervants. Quelle entreprise que de vouloir faire de ces anciens esclaves une nation, la nation par excellence, dans laquelle se concentraient toute lambition profonde et tout lamour clairvoyant de Dieu; quelle entreprise que de transformer le monde avec un si misrable outil! Comparez-les avec lEglise difie par les aptres, ces paysans de Galile. Quelle victoire! Dieu seul pouvait accomplir de telles choses! Mais quelle patience il fallut pour duquer ce peuple! Mose avait appris la patience quand il vivait avec ses brebis dans le dsert; Dieu la lui avait enseigne; mais le caractre inconstant de ce troupeau danciens esclaves porta cette qualit bien prs de la perfection.

    Venons-en maintenant au fait qui nous occupe Le peuple dIsral manque deau; la soif loppresse, et la soif ntait pas peu de chose au milieu de ces dserts de sable; il y avait l des milliers dtres humains, des femmes, des enfants, du btail, qui en souffraient. Tout cela, pourtant, avait peu dimportance, trs peu mme, car Dieu tait l et lexpdition tait Sa chose, Sa proccupation; cet trange voyage tait Son affaire. De plus, dans leur courte exprience, les fugitifs connaissaient leur Guide suffisamment bien pour oser attendre un secours correspondant leurs besoins... et plus encore. Ne se souvenaient-ils plus de cette srie dvnements tonnants qui eurent lieu, avant la sortie de lEgypte? Avaient-ils oubli le passage de la Mer Rouge, la nourriture frache dpose chaque jour la porte d chaque tente, le gibier, les oiseaux exquiset cela seul et d suffireleau, leau de source coulant frache, abondante et limpide du coeur dun rocher, Oui, assurment, ctait fort peu de chose que de manquer deau quand un Dieu gnreux marchait avec Son peuple.

    Mais, ils oublirent. Leurs sens taient plus aiguiss que leurs mmoires; leurs apptits les guidaient plus que leurs coeurs, et les oignons dEgypte avaient produit sur eux une impression plus durable que ce Dieu tendre et patient. Ils oublirent mme les eaux limpides jaillissant des rochers. Nous devons tre de la mme race que ce peuple, car il semble que nous ayons plus dun trait commun avec lui.

    Mais coutez la suite. Ils commencent se plaindre. Dieu, patient, ne dit rien, mais pourvoit leurs besoins. Mose, lui, na pas encore atteint le haut dveloppement auquel lamneront des expriences ultrieures. Il remplace Dieu auprs des Isralites. Combien toutefois il Lui ressemble peu! Irrit, il prononce des paroles de colre et frappe le roc. Il tait dans le plan de Dieu de le frapper une fois et de parler ensuite avec calme. Combien de fois, nous aussi, navons-nous pas frapp le roc dans notre impatience. Les eaux nanmoins jaillirent. Voil la rponse de Dieu, plein de sollicitude pour ceux qui viennent de Le mpriser et de Lui dsobir.

    Et maintenant, tout le peuple, pench vers le ruisseau, se dsaltre, tandis que Dieu, l-haut, se tient dans lombre, afflig, profondment afflig de la fausse ide que Son peuple sest faite de Lui, cause de la colre de Mose. Les paroles enflammes et le regard irrit de ce dernier ont occasionn dans leurs esprits une blessure morale que des annes ne guriront pas. Il faut que quelque chose soit fait en faveur du peuple. Mose a dsobi Dieu; Mose a dshonor Dieu, et toutefois les eaux ont t accordes, car les Isralites en avaient besoin, mais il fallait quils apprissent la ncessit de lobissance, le danger de la dsobissance; il fallait quils lapprissent de manire ne jamais loublier.

    Mose tait un chef. Les chefs peuvent ne pas agir comme de simples mortels; on ne les traite pas non plus de la mme manire, car ils dominent le peuple de trs haut et leur influence est immense. Aussi Dieu dit Mose: Tu nentreras pas dans le pays de Canaan; tu conduiras mon peuple jusqu la frontire; tu pourras mme apercevoir le pays de loin, mais tu ny entreras pas.

    Punition svre pour Mose, mais plus dure encore pour Dieu, dont le coeur est plus tendre que celui de Mose. Il est hors de doute que ces paroles rigoureuses furent prononces bien contre-coeur;  elles furent dites pour le bien de Mose. Il nimporte, elles furent prononces nettement, irrvocablement, pour le bien de tous. Mose dsirait ardemment que cette dcision pt tre change; plusieurs fois il supplia lEternel de revenir sur Ses paroles svres, car il dsirait voir ce pays merveilleux que Dieu avait choisi; il sentait le dard de la punition; la brlure du fouet de la discipline le faisait cruellement souffrir. Dieu lui rpondit: Ne me parle plus de cela. Donc, rien faire; la dcision tait irrvocable. Elle ne let pas t si Mose seul avait t en cause, car les actions qui prcdrent sa faute parlaient hautement en sa faveur; mais il sagissait du salut dune nation, bien plus, du salut de tout un monde prodigue dont cette nation devait tre linstrument; Dieu ne pouvait revenir en arrire. Ce refus, pour les Hbreux, fut une leon dobissance, une leon de respect, quaucun ordre, aucun miracle, mme la mort des Egyptiens dans la Mer Rouge, navaient encore obtenue, et, de tente en tente, alors quon se runissait pour le repas du soir, on chuchotait ces paroles: Mose a dsobi; il a manqu de respect Dieu; il nentrera pas dans le pays de Canaan. Ces paroles se disaient loreille; elles attristaient les coeurs, et, mesure quelles passaient de bouche en bouche, on voyait sur les visages des signes de frayeur et dmotion. Bien des femmes et des enfants pleuraient. Ils aimaient tous Mose, et tous ils lhonoraient. Quelle joie ils auraient eue de le voir franchir avec eux les frontires de la terre promise!

    Ces deux mots: obissance..., dsobissance, restrent, des annes durant, prsents lesprit du peuple. Longtemps aprs, il est srement arriv quune femme isralite raconta son enfant, curieux dentendre une histoire, celle de Mose, le grand conducteur du peuple dIsral; elle lui aura dcrit son aspect extrieur, ses yeux enfoncs, sa longue barbe, son air majestueux, et, avec tout cela, sa tendresse et la douceur qui accompagnait sa force; elle lui aura srement parl de sa rencontre avec Dieu sur la montagne. Lenfant a cout tranquillement; puis ses yeux se sont ouverts tout grands en entendant sa mre conclure par ces mots: Mais il ne put entrer dans la terre promise, car il dsobit Dieu. Plus dun pre a rpt maintes fois ses garons lhistoire du grand prophte, et ainsi furent tisss, dans la trame mme de la vie nationale, ces mots: obissance, respectueuse obissance Dieu. Quant Mose, nous pouvons facilement nous le reprsenter regardant du haut des cieux sur la terre, heureux de ce que sa demande ait t refuse pour le salut de son peuple.

La prire dun homme ne fut pas exauce pour quune nation apprt lobissance.

    3. Rejet dune prire en vue dune plus grande bndiction

    Etudions maintenant le deuxime cas, lhistoire dAnne, et traons tout dabord quelques lignes gnrales pour situer le sujet.

    Dans le temps qui spare les deux captivits, celle dEgypte et celle de Chalde, le peuple dIsral passa moralement par deux priodes deffondrement; par deux fois, lesprit national subit un triste dclin, jusqu ce quil sannihilt dans la valle de lEuphrate. Elie fit une suprme tentative qui retarda quelque peu la catastrophe finale. Lhistoire dAnne se rattache par contre la premire de ces tristes priodes, au premier affaiblissement, la premire humiliation.

    Depuis longtemps dj, le grand lgislateur nest plus; son successeur, lui aussi, est parti, suivi dune gnration, dune seconde et de plusieurs encore. Les gants ont fait place des chefs de force infrieure; mais ces derniers aussi sont partis. Les sommets des montagnes sont devenus des collines, celles-ci ce sont transformes en dunes, puis tout a t nivel, et maintenant, tout est plat, mortellement plat.

    Le peuple dIsral est sans guide. Il commena par ignorer son vrai Chef, ensuite il loublia; sans idal, il marche, la tte baisse, vers la terre quil laboure. Il y a bien, au fond, dissimul, un bon courant; mais il faudrait un chef pour lamener la surface. Pauvre peuple gar!

    Telle tait la situation au temps o se passe lhistoire dAnne. La nation descendait rapidement vers les plus bas chelons de lchelle morale. A Silo, lancienne forme de culte tait maintenue; quoi bon? Ses prtres taient souills des pires impurets. Une anarchie lourde et inconsciente prvalait dans le pays. Tout homme faisait ce qui lui semblait bon. Il ny avait personne qui et la force de rprimer les abus ou la puissance de faire rougir de honte ceux qui les commettaient. Pas de gouvernement, pas desprit dominant; on et trouv chez le peuple dIsral le mme tat que celui qui rgnait Sodome.

    Voil larrire-plan du tableau o se passe lhistoire dAnne, arrire-plan quil importe de connatre si lon veut comprendre la scne qui sy droula.

    Dans la partie montagneuse dEphram vivait un homme au coeur pur et bon; il tait fermier, cultivait la terre, rcoltait du bl et des fruits. Homme srieux, sa pit, toutefois, ne dpassait pas celle de son pouse; habitant non loin de Silo, lieu de culte national, il sy rendait chaque anne avec sa famille; mais la maldiction de Lamech tait sur son foyer. Il avait deux femmes dont Anne tait la prfre. Aimable et rflchie, elle tait doue dun esprit profond et srieux; malheureusement elle eut un dsappointement qui saccrut avec les ans; son plus grand dsir navait pas t accompli; elle navait pas denfants.

    Quoique le fait ne soit pas mentionn, nous pouvons conclure du rcit quelle suppliait Dieu ardemment et incessamment; mais, sa grande surprise, son grand chagrin, la rponse dsire narrivait pas. Sa rivalequel triste mot pour la femme qui vivait au mme foyer!augmentait son affliction et lui prodiguait les mortifications pour la porter sirriter contre lEternel. Or, toutes les annes et durant toute lanne, il en tait ainsi; cette femme mchante et mesquine tait son tourment continuel. Quel intrieur agrable! Est-il tonnant, aprs cela, que lme pleine damertume, elle ait pleur? Son mari essaie tendrement de la consoler. En vain; son me est blesse profondment. De nouvelles annes passent et, de nouveau, supplications et prires montent au Ciel. Toujours pas de rponse et toujours, autour delle, cette atmosphre amre, ces allusions irritantes. Pourquoi, se dit-elle, pourquoi ne suis-je pas exauce?

    Que se passait-il? Il est ncessaire de reculer un peu pour obtenir une vision plus large du sujet, car les limites troites de lentourage de cette femme, et je dirais presque de son esprit, nous empchent den juger sainement.

    Voici ce quelle voyait; son plus grand espoir inexauc, ses annes de prire demeurant sans rsultat, une querelle incessante dans son propre foyer.

    Voici ce quelle dsirait: un fils. Tel tait son horizon et ses penses ne le dpassaient pas.

    Voici ce que Dieu voyait: une nation, la nation dont Il avait fait le centre de son plan rdempteur, la nation qui devait ramener Lui le monde prodigue. Or, le messager envoy vers lenfant prodigue avait t sduit par ce dernier. La nation rdemptrice stait perdue elle-mme; et le projet si longuement et si patiemment nourri, dont la ralisation devait tre le salut dun monde, tait menac dun chec complet.

    Voici ce quil dsirait: un chef! Mais il ny en avait pas; pis mme, il ny avait pas dhomme dont on pt faire un chef, aucun homme qui et en lui ltoffe dun gnral. Pis encore, il ny avait pas de femmes capables dlever et de former un homme pour cette haute mission. Tel tait le degr de dcadence auquel ce peuple tait arriv, le plus bas degr quune nation puisse atteindre. Il fallait Dieu une femme dlite avant davoir lhomme dlite. Anne avait les qualits dont Il avait besoin: Dieu lui fit lhonneur de la choisir. Mais, avant quelle pt tre utile, il fallait que son coeur ft chang. Viennent alors ces annes dpreuves, de soucis, qui avaient pour but de discipliner son coeur. Ce temps dpreuve, les expriences quelle en tira, en firent une nouvelle femme dont la vision stait largie, lesprit mri et les forces dveloppes; une femme dont la ferme volont savait se plier devant une volont plus haute et sacrifier le plus grand de ses dsirs lintrt mondial; une femme, enfin, qui sut vouloir que son trsor le plus prcieux ft avant tout le trsor de son peuple.

    Elle passa en prire les mois pendant lesquels elle lattendait. Et Samuel naquit, envelopp, ds avant sa naissance, dune atmosphre de prire et de conscration la volont de Dieu. Linfluence de la pit maternelle produisit lhomme que Dieu voulait, et ainsi une nation, la nation par excellence, et le plan du salut du monde taient sauvs. Cet homme tait une rponse vivante la prire. Lhistoire touchante du petit garon du tabernacle de Silo se rpandit rapidement travers la nation; son nom de Samuelcest--dire Dieu exaucetait une preuve pour le peuple de la prsence active de Dieu et du pouvoir de la prire. Samuel, comme enfant, comme homme et comme vieillard, tait une preuve visible de lexaucement de la prire et la reconnaissance de la foi religieuse, que son activit suscita dans le peuple, eut son point de dpart dans lhistoire extraordinaire de sa naissance.

    Dieu retarda sa rponse pour pouvoir donner davantage. Et le joyeux cantique de louange, qui sortit des lvres dAnne, montre la perfection morale que son me avait atteinte; il montre aussi sa reconnaissance pour ce Dieu qui, patiemment et dessein, avait retard sa rponse.

    4. Lexplication dune grande preuve

    La troisime grande figure de ce groupe est celle de Paul.

    Lorsquon parle de lexaucement de nos prires, une question se pose presque invitablement: Comment expliquer lcharde dans la chair dont parle Paul? Cette question, des mes srieusement embarrasses se la sont pose; elle a t souleve aussi par des gens heureux de rencontrer cette difficult pour en tirer une thorie hostile au christianisme.

    Ces quatre portraits: de Mose, dAnne? de Paul, de Jsus, nous ont t donns pour notre dification examinons maintenant le troisime et voyons lapport dont cette belle figure enrichira nos coeurs.

    Et, tout dabord, tudions Paul lui-mme. La meilleure explication de cette charde cest lui qui nous la donne; lhomme explique lpreuve.

    La tte de Paul est entoure dune aurole de gloire; quel homme consacr Dieu! Il fut son lu pour un ministre spcial. Un des douze aptres aurait pu tre choisi pour ouvrir la porte du grand monde paen; mais Dieu prfra sortir de ce cercle et choisir, pour ce vaste domaine, un homme dducation diffrente.

    N et duqu eh pleine atmosphre juive, jamais il ne perdit le point de vue juif; toutefois son entourage, le contact quil eut avec la culture grecque, la tournure de son esprit, le rendirent particulirement apte la tche immense qui lui fut dvolue. Son esprit minemment dialectique, sa vive imagination, sa volont de fer, sa pit ardente, sa persvrance inbranlable, le tendre attachement quil professait pour son Matre font de lui un homme hors pair.

    On sexplique ds lors le dsir de Dieu dattacher Son service un homme de cette envergure. Paul, cependant, avait ses cts faibles. Evoquons-les modestement, nous souvenant quune faute chez lui rappelle les fautes innombrables que nous avons commises nous-mmes. Le point faible dun homme est gnralement le contraire de son point fort. Paul avait une volont terrible; jug sous cet angle, il tait un gant, un Hercule. Ses voyages incessants, pleins d redoutables expriences proclament cette volont forte et surhumaine. Mais, avouons-le, il lui arrivait de pousser lextrme cette nergie. Ctait un effet, sans doute, de ses nerfs surexcits. Mais enfin, parfois, il tait obstin, entt et dur; parfois, il attaquait avec violence, il fonait, la tte baisse. Disons-le tout bas, car nous parlons de notre vieux saint Paul qui nous est infiniment cher; mais disons-le cependant, car cest la vrit.

    Dieu eut lutter pour maintenir Paul dans le chemin quil dsirait lui voir suivre, car laptre avait parfois ses projets lui. Si vous voulez vous en rendre compte, considrez-le dans ses tournes, suivez-le quand il slance passionnment lassaut des ides paennes. Lisez, par exemple, dans le seizime chapitre du livre des Actes: Ayant t empchs par le Saint-Esprit dannoncer la Parole dans lAsie... {Ac 16:6} et rapprochez ces paroles de la maladie qui le frappa en Galatie, o lui parvint cette dfense de partir. Continuant notre lecture, nous trouvons ces mots: Ils se disposaient entrer en Bithynie, mais lesprit de Jsus ne le leur permit pas. {Ac 16:7}

    Sont-ce l les voies de lEsprit de Dieu? Nous laisse-t-Il nous lancer dans une voie pour nous arrter subitement et nous faire rebrousser chemin? Assurment, cest ce quil est oblig de faire souvent avec nous; mais est-ce l la manire dagir quil prfre? Est-ce l sa vraie mthode? Evidemment non. Il prfre se tenir prs de nous sans intervenir, invisible, mais surveillant tous nos pas; Il prfre lattitude de Jsus qui disait: Pour moi, je ne monte pas la fte; {3Jn 7:8} puis qui, quelques jours plus tard, y monte, car Il en avait reu lordre formel. Ces mots: Ils se disposaient aller... Ils furent empchs... Il ne permit pas... sont des mots rvlateurs; ils nous font connatre le caractre de Paul, cet homme nergique.

    Il y a encore une preuve beaucoup plus forte. Paul caressait lambition de parler aux Juifs de Jrusalem;  ds le dbut de sa nouvelle vie, ce dsir le brla. Le mot de Jrusalem semble avoir hant ses penses et ses rves. Oh! si seulement il pouvait parler ces Juifs de Jrusalem! Il les connaissait. Il stait form au milieu deux. Il tait un des chef de la jeunesse juive; et, quand ses compatriotes taient enflamms de colre contre ces chrtiens, lui ltait plus quaucun dentre eux. Ces Juifs le connaissaient aussi; ils comptaient sur Paul pour tenir tte cette nouvelle secte. Ah! si seulement il avait loccasion daller l-bas, il sentait quil pourrait transformer le courant antichrtien. Mais ds lheure critique quil vcut sur le chemin de Damas, ces mots rsonnrent ses oreilles Les Gentils!... Les Gentils!... Et il avait obi; oui, il avait obi avec toute lardeur de son cur transform. Mais... mais... ces Juifs de Jrusalem! Si seulement il pouvait aller vers eux!

    Le Matre, cependant, ds la conversion de Saul, ne permit pas ce nouveau disciple de Le servir Jrusalem. Il lui fit connatre ses intentions par une vision spciale quil eut dans le temple: Ils ne recevront pas ton tmoignage mon sujet. {Ac 22:17-21} Ces paroles ne sont-elles pas assez catgoriques?Pourtant, chose tonnante, Paul essaie de prouver au Matre quil pourrait lui permettre de rester Jrusalem. Ctait prendre trop de libert. Comment! un subordonn discutant avec son gnral en chef les ordres qui lui ont t dicts! Cen tait trop! Le Matre termine la vision par un commandement prparatoire: Va! Je tenverrai au loin (loin de Jrusalem o tu dsires agir) vers les paens.

    Voil un portrait de cet homme; il nous rvle le ct faible de ce gant qui nous domine par la force et par lamour. Tel est lhomme que Dieu a employ pour accomplir son plan; ctait videmment lhomme le plus capable; dans sa grandeur, il dpassait de la tte les hommes de sa gnration et de celles qui suivirent. Nanmoins, avec le respect qui lui est d, nous devons ajouter que Dieu eut de la peine le faire travailler toujours dans la voie quil lui avait destine.

    Ceci dit de lhomme, voyons quelle tait son charde. Daprs ce que nous savons, il y eut quelque chose dans la vie de Paul qui fut pour lui une constante preuve. Il lappelle une charde; ce mot est tout fait expressif: une pointe acre senfonant dans sa chair, le piquant, le faisant souffrir sans cesse; quil soit endormi ou veill, quil tisse de la toile, quil prche ou quil crive, toujours cette pine plantait son dard dans sa chair vive. Il ne sen mut pas beaucoup au dbut, parce quil pouvait sadresser Dieu. Il le pria et Lui dit: Je Ten prie, enlve-la. Mais lpine resta. Il renouvela sa prire une deuxime fois, la faisant plus urgente mesure que la douleur augmentait. Aucun changement. Lpreuve du temps est la plus dure de toutes.Toujours aucun changement. Une troisime fois, il crie Dieu, mettant dans sa prire toute lnergie et tout le srieux possibles.

Remarquez maintenant trois choses: Premirement, il y eut une rponse. Dieu rpondit lhomme. Quoiquil nexaut pas sa prire, Il lui rpondit; Il ne feignit pas de lignorer, lui et sa requte. Puis, il dit franchement Paul quil valait mieux ne pas enlever cette charde. Cest probablement pendant les longues heures dune nuit dinsomnie que lEsprit de Jsus sapprocha de Paul. Sans tre entendu de personne autre, Il lui parla tendrement, avec la douceur dun homme qui cause avec un ami Paul, disait la voix, Je connais cette charde, Je sais quelle te blesse; elle Me blesse aussi. Si Je ne regardais qu toi, Je lenlverais sans tarder; mais, Paul,et sa voix se faisait plus douce encorevaut mieux, pour le salut des autres, que tu continues den souffrir; par toi, Mon plan peut saccomplir pour des milliers et des milliers de tes frres

    Telles furent les premires paroles de leur entretien. Et Paul resta couch, rflchissant, lesprit profondment troubl.

    Au bout de quelques instants, la voix se fit de nouveau entendre, plus calme encore: Je serai tes cts; tu recevras de telles rvlations de Ma gloire que ta peine en sera attnue; la gloire surpassera la douleur.

    Je me reprsente Paul, g et courb, se tenant un soir dans la maison quil a loue Rome. Il est tard; la journe a t dure; les auditeurs sont tous partis. Laptre, assis sur un vieux banc, jouit dun peu de tranquillit avant daller prendre quelques heures de repos. Il a, ses cts, Luc, lami fidle, et le jeune Timothe. Les yeux brillants, la voix tremblante dmotion, il leur dit justement: Voyez-vous, mes amis, je ne voudrais pas ne pas avoir cette charde, cause de la prsence glorieuse et merveilleuseil met tout son coeur dans ses paroles et sa voix tremble dmotion; ayant d sinterrompre, il reprend: oui, cause de la prsence glorieuse et admirable de Jsus qui, par le moyen de cette preuve, ma t accorde.

    Ainsi donc, une double bndiction sortit de cette exprience; premirement, le travail eh vue de la rdemption de la terre fut activ, et secondement, la communion entre Dieu et Paul devint beaucoup plus intime.

Dieu rpondit la prire de lhomme, mais Il refusa de lexaucer pour que cet homme pt mieux servir Son Plan Rdempteur.

    5. Priant genoux

    Le dernier de ces portraits ressemble la Madone Sixtine de Raphal au Muse, de Dresde. Comme Dresde aussi, une salle entire lui est rserve. On entre silencieusement, respectueusement et lon aperoit Jsus Gethsman. Voici le Cdron, la colline, le groupe de vieux oliviers noueux. La lune claire nettement la scne qui sy passe; sa lumire rend plus noire encore ce fouillis dombre; sur le sol, quelques hommes; ils semblent dormir. Plus loin, parmi les arbres, un plus petit groupe dhommes se tient immobile. Eux aussi, ils dorment. Plus loin encore, se dresse une forme solitaire; Il est seul, tout seul; jamais Il na t plus seul, sauf une fois, le lendemain.

    Il y a un pressentiment de lagonie de Gethsman dans lentretien que, quelques jours auparavant, les Grecs demandrent Jsus. Lagonie du Mont des Oliviers commena lors de la vision que les Grecs provoqurent involontairement, mais elle atteignit son plus haut degr sous ces arbres quclairait la lune.

    Jsus! Fils de Dieu! Dieu le Fils! Le Fils de lHomme: Dieu, un homme!

    Personne na encore tabli la dmarcation entre Sa divinit et Son humanit; personne ne le fera jamais, car lunion du divin et de lhumain est divine en elle-mme et dpasse par l mme lentendement humain. Dans la scne que nous voquons, Son humanit est mise en vidence elle ressort pathtique et lumineuse. Soyons pleins de respect en abordant ce sujet: cest un terrain sacr. Le sort de la bataille du jour suivant a t dcid l. La victoire manifeste sur le Calvaire a t remporte dans les bosquets de Gethsman.

    Il est absolument impossible lhomme, souill depuis des sicles par le pch, de comprendre lhorreur quprouve au contact du mal une me pure de toute souillure. Lorsquil pntra dans le Jardin des Oliviers, cette nuit-l, Jsus se rendit compte quil entrait en contactle mot a ici une porte qui nous dpasseavec le pch; une horreur intense le saisit. Fait mystrieux, Il allait tre fait pch {2Co 5:21} pour nous.

    Les mots employs pour dcrire Ses motions sont si forts quaucun quivalent franais ne semble capable den exprimer lintensit. Une horreur indescriptible, un frisson de terreur, un tremblement deffroi le saisirent. Les miasmes empoisonns du pch paraissent remplir Ses narines et Ltouffer. L-bas, seul, au milieu des arbres, Il est en proie lagonie; la pense de la mort ltreint. Ny aurait-il pas quelque autre moyen de sauver le monde que celui-ci...,  oui, que celui-ci? Sa prire nous parvient entrecoupe; Sa voix est trangement altre par lmotion. Sil est possible... que cette coupe passe loin de moi! On sent, dans ces mots, comme lesprance dune autre solution. (Lauteur de lptre aux Hbreux jette de la lumire sur ce sujet). La tension de Son esprit est si grande que Sa vie mme semble dfaillir. Il fait alors monter vers les Cieux une prire entrecoupe, pour demander du secours, et les anges descendent pour Le fortifier. Avec quel respect ne doivent-ils pas Lavoir secouru!

    Cependant, mme aprs cette intervention, la lutte continue; puis, peu peu le calme renat, et, de lobscurit grandissante, monte une deuxime supplication. La tempte est apaise; cest maintenant la victoire entire et complte, et la prire, ds lors, se trans-. forme. Sil nest pas possible que cette coupe sloigne, si elle est ncessaire lachvement de Ton plan rdempteurTa... volontces mots viennent lentement, mais distinctementTa... volont... soit... faite...

    Cest genoux, cest en priant quil transforma Son cri de dtresse en un cri dobissance. Dans la solitude, Dieu lui rvla quelle tait sa volont:

Au Mont des Oliviers, mon Matre se rendit,

cras par son faix de pch et de honte,

Au Mont des Oliviers, mon Matre se rendit,

Sentant faiblir son coeur devant le flot qui monte

Mais les vieux oliviers au feuillage gris-vert

Smurent sa vue de faon bien touchante,

Heureux de saluer le Roi de lunivers

Et de sympathiser sa douleur poignante,

Quand Il vint pour prier

Au bois des oliviers.

Puis Il quitta le bois du Mont des Oliviers

Et porta rsolu notre honte accablante.

Puis Il quitta le bois du Mont des Oliviers,

Ne craignant plus la mort ni la douleur poignante.

Quand la honte, la mort, Lui se prsentrent,

Il les suivit, soumis, plein de paix et de joie;

Muet comme un agneau, ils le crucifirent.

Il suivit jusquau bout sa douloureuse voie,

Aprs avoir pri

Au Mont des Oliviers.

(Adapt de Sydney Lanier.)

    La vraie prire est celle qui sexprime genoux, lorsquon est seul avec Dieu, Ce qui tait vrai pour Jsus pendant les jours quil passa sur la terre, ne lest-il pas infiniment plus pour nous?

    Ne dciderons-nous pas, nous aussi, de nous rencontrer avec Dieu, seul, chaque jour? Nous fermerons notre porte, nous ouvrirons la Bible, et nous plierons notre volont de manire tre digne de collaborer, par la prire, loeuvre de notre Pre. Nous obtiendrons alors une vision plus claire des choses; le but de notre vie deviendra plus important; notre sagesse augmentera; nous atteindrons le vrai dsintressement, mortel tout gosme; nous apprendrons demander et attendre, et nous connatrons la joie de travailler avec Lui, sous la protection de Son amour; alors aussi viendra le temps des grandes victoires. que Dieu remportera dans le monde. Toutefois, nous narriverons pas connatre un dixime de ce que nous devrions savoir, avant que la nuit ait cd le pas laube blanchissante, avant que les tnbres pais ses qui recouvrent la terre actuelle soient dissipes par lclat de Sa prsence.

CHAPITRE III

Le grand obstacle extrieur

    1. Le tratre

    Il nous reste encore dire quelques mots sur les obstacles la prire; ces quelques mots ont mme une importance capitale. Ce que nous avons dit jusquici nest quune prface ce que nous devons ajouter maintenant. Il nous faut, en effet, considrer un ct trange de la prire; trange, uniquement parce quil ne nous est pas familier; car, tout trange quil soit, il nen contient pas moins le noeud de la question. Cest l que se livre la bataille des batailles et lon peut stonner quil en soit si peu fait mention; car, si la prire avait t vraiment comprise et nettement pratique, il y aurait de plus grandes dfaites, de plus grandes victoires: dfaites de lennemi, Satan; victoires de notre prince lgitime, Jsus.

    Voici ce qui en est: Satan a le pouvoir dentraver la rponse... pour un temps; de retarder le rsultat... pour un temps. Il ne peut retenir la rponse dfinitivement si lintress comprend vraiment la prire et lexerce avec une persvrance ferme et tranquille. Leffort principal de la prire doit donc tre dirig contre Satan.

    Notre gnration se soucie fort peu de Satan et, la rigueur, on peut len excuser. Les diffrentes conceptions qui existent sur Satan; ses armes, ses attributs, quun Dante, un Milton, un Dor, ont rendus classiques; toutes ces productions littraires et artistiques ont beaucoup contribu obscurcir la question. Les images que ces artistes voquaient ont tquils le voulussent ou nonpresque universellement prises la lettre. Tout homme familier avec les agissements de Satan reconnatra l, une fois de plus, sa parfaite habilet. Quimporte quon le caricature, quimporte quon ne tienne nul compte de lui, si, par l mme, il peut consolider son pouvoir.

    Les cornes, les sabots, la queue fourchue et tout le reste ont pour but de donner cet tre une forme matrielle. Ce sont des reprsentations grotesques au dernier point et elles font de Satan une vraie caricature. Celle-ci disproportionne et exagre si bien son objet quelle le rend hideux et ridicule. A notre poque, o lon examine les fondements de toutes nos connaissances, on sest dtourn tout naturellement et inconsciemment de ce Satan dont on nous faisait de telles reprsentations; mais sous la caricature se cache toujours une vrit. Il est videmment facile dignorer cette vrit quand elle se dissimule sous le masque de la caricature; prenons garde, cela est dangereux; oui, il est toujours dangereux de fermer les yeux devant la vrit.

    Nous prouvons un vrai rconfort, voire un grand intrt, passer de ces conceptions littraires celles de lEcriture. Daprs la Bible, Satan possde une grande beaut; il occupe maintenant encore une haute position; il est dou des pouvoirs intellectuels les plus remarquables; cest le chef de la plus admirable et de la plus compacte organisation; et cette organisation, grce son adresse extraordinaire, il la utilise avec succs pour seconder ses buts ambitieux.

    De plus il nest pas encore enchan. A ce propos, je me souviens dune conversation que jeus un jour dans le local dune Union Chrtienne de Jeunes Gens, avec un jeune pasteur. Ctait dans une ville minire du sud-ouest des Etats-Unis, ville qui, comme tant dautres semblables, offre mille tentations, mille occasions de pcher. Le jour prcdent, un dimanche, avait t rempli par des services spciaux; nous avions donc t trs occups et ressentions quelque fatigue. Comme nous nous reposions en causant tranquillement, je fis remarquer mon ami quel beau jour ce serait que celui du millnium. Il me rpondit immdiatement: Nous sommes maintenant dans le millnium.Mais, repartis-je, je croyais que Satan devait tre enchan cette poque. La Bible ne dit-elle pas quelque chose dapprochant?Parfaitement, me dit-il, mais je crois que Satan est actuellement enchan. Je ne pus alors retenir la rponse que javais sur les lvres et je lui dis: Sil est enchan, il faut avouer que sa chane est terriblement longue, car elle semble bien peu lentraver dans son action.

    Daprs tout ce que nous pouvons voir, ce prince puissant nest pas encore enchan, et nous ferions bien de mieux nous renseigner son sujet. La vieille maxime militaire: Apprends connatre ton ennemi devrait tre observe de plus prs dans ce cas.

    Fait curieux, le plus ancien des livres de la Bible et le plus rcent, Job et lApocalypse, nous donnent des renseignements trs prcis sur Satan. Ces deux livres, ajouts aux renseignements tirs des Evangiles, nous fournissent presque toutes les donnes ncessaires pour connatre Satan. En effet, les trois ans et demi que dura lactivit de Jsus forment, notre connaissance, la priode o le diable dploya sa plus grande activit. Les allusions que Jsus lui-mme fait son sujet sont nombreuses et positives. Il y a quatre passages sur lesquels je tiens spcialement attirer votre attention; je dis quatre, mais je ne veux pas dire par l que mes assertions reposent sur ces quelques textes isols; non, une vrit si importante nest pas lie quelques textes dtachs: elle se rencontre travers la Bible tout entire; on peut dire quelle y est comme tisse.

    Semblables deux fils qui se croisent et forment la trame et la chane dune pice dtoffe fine, deux faits parcourent les Ecritures, du commencement la fin. O que vous promeniez vos ciseaux dans le fin tissu auquel on peut comparer la Bible, vous rencontrerez ces deux fils. Ils se croisent et se mlent dune faon inextricable. Lun est noir, noir charbon, noir comme de lencre; lautre est brillant, pareil un rayon de gloire. Ces deux fils sont partout. Le noir est un ennemi. Parcourez lAncien et le Nouveau Testament, de la Gense lApocalypse; vous y trouverez toujours lennemi; il est pntrant, subtil, malin, cruel, obstin; cest un matre.

    Le deuxime fil, ce sont les chefs que Dieu a choisis et qui tous ont t avant tout des hommes de prire. Ils sont aussi des hommes de puissance, non seulement comme prdicateurs, mais encore comme personnalits capables dinfluencer leurs frres. Toutefois, ils sont avant tout des hommes de prire. Ils donnent la prire la premire place. Cette affirmation ne comporte, ma connaissance, quune exception frappante: le roi Saul. Bien plus, ltude de cette exception projette une brillante lumire sur le caractre de Satan. Car Sal semble tre, dans la Bible, la plus grande illustration de loeuvre de ce prince rengat et dchu. Les passages que nous voulons tudier spcialement forment comme les modles, les chantillons dune toffe: le dessin y est particulirement accentu, les couleurs y sont plus nettes. Lexemple typique est fourni par les Evangiles, o les couleurs atteignent leur plus vif clat, o le contraste est le plus saisissant.

    2. Prier, cest lutter

    Venons-en donc la Bible, car ce que nous savons, cest delle seule que nous le tenons; le reste nest que supposition. Les seules donnes dcisives que nous ayons sur Satan semblent tre celles que ce Livre nous donne. Nous commencerons par le Nouveau Testament.

    LAncien Testament est le livre des images, le Nouveau celui des explications et de lenseignement. Lenseignement que nous donne lAncien Testament emprunte les mthodes de la pdagogie enfantine: ctait alors le meilleur mode denseigner, car le monde ntait quun enfant. Le Nouveau Testament, par contre, procde par prceptes. Nous trouvons aussi ce procd dans lAncien Testament, o il est trs employ galement; de mme lenseignement imagin joue un rle important dans le Nouveau Testament, tmoin les Evangiles qui sont maills de paraboles; mais ce que je veux dire, cest que lenseignement au moyen de paraboles et dexemples est la caractristique de lAncien Testament, tandis que lenseignement par voie de prceptes est celle du Nouveau.

    Prenons maintenant lptre aux Ephsiens. Cette lettre est en somme une prire, ce qui dj est un point tout fait significatif. Parmi les treize lettres de Paul, celle quil adressa aux Ephsiens est spcialement une lettre-prire; quand laptre lcrivit, il priait.

    Paul a beaucoup de choses dire ces frres quil a gagns Christ, mais il les glisse dans sa prire, comme autant de parenthses. La phrase qui sans cesse unit les diffrentes ides est celle-ci: Voil pourquoi je prie... je flchis les genoux, Puis, cet homme, lesprit exceptionnel, passe la condition des Eglises et donne quelques exhortations pratiques toujours ncessaires la vie de tous les jours. La prire reprend ensuite et lptre atteint son maximum de force dans un paragraphe remarquable sur la prire. La plus belle partie de cette lettre-prire, cest cette courte tude, et la plus belle partie de cette tude, cest la prire. Il prie et le fait de prier le pousse encourager les autres limiter. Ouvrons notre Bible pendant cet entretien et mettons sous nos yeux ce sixime chapitre, des versets dix vingt exclusivement.

    Le but principal de toute vie chrtienne semble dune clart parfaite ce vtran des champs de bataille: Que vous puissiez tenir contre les ruses du diable.

    Laptre semble navoir eu aucune difficult croire en un diable personnel; probablement quil avait eu trop de corps--corps avec lui pour pouvoir en douter. Pour Paul, Satan est un chef rus, habile profiter pour la lutte de toutes les ressources et de tous les avantages.

    Ce passage du chapitre sixime nous montre deux choses: en premier lieu, quel est le vritable ennemi, contre lequel la bataille se livre, et, en second lieu, il indique avec une intensit extraordinaire les armes qui le mettent en droute.

    Quel est le vritable ennemi? Ecoutez: Car nous navons pas lutter contre la chair et le sangdonc pas contre les hommes; cela, jamais! contre quelque chose de plus subtilmais contre les dominationscest--dire une organisation compacte dindividuscontre les autoritsnon seulement organises, mais doues dune haute valeur intellectuellecontre les princes de ce monde de tnbres ce sont des princes et non de simples mortelscontre les esprits mchants dans les lieux clestesdes esprits, des. armes desprits qui ont lu leur quartier gnral quelque part, au-dessus de la terre. Lennemi, ce sont des milliers dtres spirituels et intelligents, formant un tout solide et uni, souverains du royaume des tnbres; leur centre dactivit est au-dessus de la terre, au-dessus du trne de Dieu; mais ils sont en relations continuelles avec les habitants de la terre.

    Dans le deuxime chapitre de lptre, la tte de cette organisation est appele le prince de la puissance de lair. {Eph 2:2}

    Puis, dans une de ces priodes fortement ordonnes qui lui sont familires, saint Paul nous dit comment la victoire sera gagne. Cette phrase comprend sept versets qui forment une gradation ininterrompue.

    Il y a six membres de phrase qui conduisent laffirmation centrale et qui numrent les pices de larmure dun soldat romain arm pour la bataille: les reins ceints; la cuirasse recouvrant la poitrine; les pieds chausss; le bouclier pass au bras; le casque sur la tte et lpe la main. Un lgionnaire romain, lisant ce qui prcde ou entendant Paul prcher, sattendrait cette conclusion: et combattant de toute votre force.

    Ce serait videmment la conclusion logique de tout le dveloppement. Mais quand Paul atteint le dernier degr de la gradation, il laisse tomber la figure de rhtorique pour introduire ce avec quoi, dans notre cas, la bataille est gagne: en priant intensment. Au lieu du mot attendu combattant, arrive priant. Notre lutte consiste prier. La prire est une lutte, une lutte spirituelle. Ce vieillard, la fois vangliste, missionnaire et vque, nous dit donc par l que nous sommes en pleine mle. La guerre est dclare. Comment combattrons-nous le mieux?

    Tout dabord, mettons-nous dans les meilleures dispositions possibles pour prier; puis, arms de la force que donne la prire et de notre intelligence, prions!

    Ce mot de Paul: priant est le point culminant de cette longue gradation, la quintessence de toute lptre. Laction quil indique attaquera victorieusement le flanc de lennemi et le mettra en droute, car il ne peut rsister au travail qui se fait genoux, la prire persvrante.

    Remarquez maintenant avec quelle profondeur Paul dcrit lhomme qui agit ainsi par la prire. Sous les noms des six parties de larmure se cachent six qualits: une claire comprhension de la vrit; une vie tout fait soumise; un service srieux; une foi simple et forte en Dieu; une assurance parfaite de son propre salut; une connaissance exacte des liens qui nous unissent Dieu; une bonne intelligence de la vrit prsenter aux autres; voil ce qui prpare un homme pour le combat victorieux de la prire.

Lhomme qui remplit ces conditionset qui priemet en droute les armes du prince rengat. Celui qui prie est invincible, grce son Chef, Jsus. Lquipement du soldat est simple; pour lobtenir, il suffit de le dsirer srieusement.

    Etudions encore laffirmation essentielle qui termine cette priode; elle est hrisse de pointes, telles celles des baonnettes. Les instructions quelle contient sont celles dun gnral la veille dune bataille. Faites toutes sortes de prires et de supplicationscest lintensit de laction, priezcest le motif gnral, en tout tempssans cesse, nuit et jour; par le chaud comme par le froid, par le beau temps comme par la pluie, par lEspritguid par le Chefet veillez celavigilance ininterrompue; le mot veille est un mot militaire; surveiller lennemi, surveiller ses propres forcesavec une entire persvrance

-puissance de laction, joyeuse, tenace, obstinepour tous les saintsil faut tre en contact avec toute larmeet priez

pour moimoi, cest le chef de la terre, le ralliement autour du chef direct.

    Voil donc lennemi combattre et la tactique qui le mettra en droute.

    3. Un double engagement

    Revenons maintenant la partie image de la Bible pour obtenir une illustration et une explication des paroles de Paul. Nous la trouvons au chapitre dix du livre de Daniel.

    Daniel est un homme g. Exil, il na pas vu depuis son enfance les vertes collines de son pays natal. Vivant Babylone, ville construite sur un terrain plat, il regrette ses chres montagnes de Palestine et gmit sur le sort pitoyable de son peuple. Il a tudi les prophties de Jrmie et y trouve la promesse certaine que les Hbreux, au bout de soixante-dix ans, pourront regagner leur patrie. Retourner dans la patrie! A cette simple pense, son pouls bat plus vite; le voil qui compte les annes. Les soixante-dix ans sont bientt rvolus! Daniel consacre alors une partie de son temps la prire; il assige, pour ainsi dire, la place de ses supplications.

    Vous savez certainement ce qutait Daniel. Premier fonctionnaire du pays assyrien, cest lui qui dirigeait, sous le contrle du roi, les destines du plus grand empire de lpoque. Homme de force et de ressources, ctait un vrai gnie administrateur.

    Il rpartit son travail de faon tre libre un certain temps et, emmenant avec lui quelques compatriotes qui partageaient ses aspirations, il se rend dans une fort quarrose le Tigre. L-bas, ils passent un jour dans le jene, dans la mditation et dans la prire; leur jene nest pas absolu; ils se contentent simplement dune nourriture frugale. Je suppose que, pendant ce temps de retraite, ils prient isolment ou runis; puis ils lisent les prophties de Jrmie, les mditent, les discutent et se remettent prier, Ils passent de cette faon un jour entier lire, mditer et prier.

    Ils attendent une rponse; ils lattendent fermement. Point de rponse. Un deuxime jour passe, un troisime, un quatrime, une semaine... et toujours pas de rponse. Sans aucune hsitation, ils continuent faire monter au Ciel leurs supplications. Deux semaines! Comme cela dut leur paratre long! Reprsentez-vous ce que sont quatorze jours dattente, dattente fbrile; lesprit est tendu vers lobjet que lon dsire. Pas de rponse! Dieu pourrait tre mort, selon le mot de Catherine Luther, puisquaucune rponse ne leur parvient. Mais Daniel ntait pas un homme se laisser dconcerter si facilement. Il sait, pour lavoir pratique, la valeur de la prire. Il ne songe donc nullement se dcourager; non, il va de lavant, il persvre. Vingt-trois jours passent sans amener aucun changement. Et toujours ils persistent. Puis arrive le vingt-quatrime jour et, avec lui, la rponse dsire. Il est accord Daniel une vision dont lclat dpasse ce quun homme peut supporter; aprs quelques instants, lorsquil peut entendre les paroles de lenvoy de Dieu et quil put y rpondre, voici ce quil entendit: Daniel, ds le premier jour, ta prire fut entendue, et cest cause de tes paroles que je viens. Daniel est stupfait dtonnement: Le premier jour... il y a plus de trois semaines.Oui, il y a trois semaines, je quittai la prsence de Dieu avec la rponse ta prire. Mais (coutez, car ce qui suit est trange) le chef du royaume de Perse ma rsist vingt et un jours; voici, Mical, lun des principaux chefs, est venu mon secours, et je viens maintenant te faire connatre ce qui doit arriver ton peuple.

    Notez maintenant quatre points que chacun de vous admettra sans peine. Cet tre qui parla Daniel est un tre essentiellement spirituel; il est contrecarr dans sa mission par quelquun; cet adversaire, videmment, doit tre, lui aussi, un tre spirituel pour rsister un esprit. Le messager de Daniel vient de la part de Dieu; aucun doute ce sujet; ladversaire doit ds lors venir du camp oppos. Donc, fait trange et inattendu, lesprit du mal a le pouvoir de retenir, de retarder lange de Dieu, et cela pendant trois semaines. Enfin, il arrive du secours; le messager du mal choue dans sa mission et lange du bien est libre de suivre sa route et de porter son message.

    Il y a donc une double action; nous assistons lune, tandis que lautre nous est cache. Tout dabord, une lutte se livre dans le royaume des esprits, lutte invisible; puis, comme nous lindique le chapitre douze, deux esprits revtus dune enveloppe humaine se tiennent de chaque ct de la rivire. Les deux scnes se rapportent au mme but.

    Telle est lhistoire de Daniel. Comme elle illustre les paroles de Paul! Cest une image pleine de vie relle; cette image est double. De mme, toute prire comporte une double action et un double thtre; elle se passe la fois sur la terre, parmi les hommes, et dans les rgions suprieures, parmi les esprits. Beaucoup dentre nous, ne voyant que la partie visible, perdent courage. Pendant que nous regardons les choses visibles, regardons aussi attentivement les invisibles; ce que nous voyons est secondaire, ce que nous ne voyons pas est capital, et cest dans ces sphres suprieures que se dcident les destines humaines.

    Voici la premire action, celle que lon voit; un groupe dhommes conduit par un chef dune nergie remarquable et capable de diriger un empire; tous sont prosterns devant Dieu, lesprit lucide, tranquille, vigilant; jour aprs jour, infatigablement, ils prient.

    Voici maintenant ce que lon ne voit pas: une lutte ardente, opinitre, o chaque adversaire dploie son habilet; cette lutte est engage entre les deux princes du royaume spirituel. Daprs les explications de Paul, les deux mondes, visible et invisible, sont en rapport troit.

    Daniel et ses compagnons, eux aussi, sont des lutteurs; ils participent activement cette lutte supraterrestre; ce sont eux qui dcident de lissue de la bataille, car ils sont sur le terrain contest. Ces hommes font vraiment en tout temps par lEsprit toutes sortes de prires et de supplications, veillant cela avec une entire persvrance. Et enfin la victoire vient.

    4. La prire met en jeu trois personnes

    Revenons maintenant la figure centrale du dessin. Jsus, dans une de ses paraboles, rpand des flots de lumire sur les rapports de Satan avec la prire.

    Deux paraboles tratent spcialement de la prire; celle de lhomme qui va trouver un ami au milieu de la nuit {Lu 11:5-13} et celle du juge inique. {Lu 18:1-8} Cest dans la seconde quil est question de Satan. Cette remarquable description de la prire nous a t conserve par Luc, qui nous renseigne le mieux aussi sur la vie de prire de Jsus.

    Voici quelle fut loccasion de cette parabole. La vie de Jsus approche de sa fin. Quittant le terrain de la simple conversation, Il passe la parabole. Sa lutte avec les Pharisiens a atteint son caractre le plus aigu et leur haine, son apoge, sexhale dans laccusation, dont ils chargent Jsus, dtre inspir du Diable. Ressentant vivement leur attaque, Il leur rpond directement et pleinement; cest alors quil prononce la parabole de lhomme fort quil faut lier avant de pouvoir piller sa maison. {Lu 11:21} Et aucun des assistants nose lui demander ce que cela signifie.

    Examinons maintenant de plus prs la seconde des deux paraboles que nous venons de citer, car elle est pleine denseignement pour ceux qui veulent cooprer loeuvre de rdemption de notre monde.

    Jsus semble si dsireux que ses auditeurs comprennent la porte de ce quil va dire, quil abandonne son procd habituel et explique nettement que sa grande pense dans cette parabole, ce quil veut quon comprenne, cest quil faut toujours prier et ne point se relcher. Le fait essentiel, dit-il, est la prire, et le fait essentiel dans la prire est la persvrance;  le danger dans la prire est de perdre courage, de faiblir devant la tche et dy renoncer. Ne point se relcher! ces mots prouvent la suprme importance du combat.

    La parabole met en jeu trois acteurs: un juge, une veuve, un adversaire. Le juge est profondment goste, injuste, impie et insouciant de lopinion dautrui..., la pire espce dhomme, la dernire dont on dt faire un juge. Il sait parfaitement que le droit, dans le procs quil doit juger, est du ct de la veuve. Quant cette dernire, que peut-on ajouter de plus ce qualificatif de veuve? Est-il possible de dire davantage pour rendre le cas plus pathtique? Une veuve nest-elle pas limage de labandon et de limpuissance? Une femme a besoin dun appui. Celle-ci a perdu son ami le plus proche, le plus cher, son protecteur. Elle est seule.

    Il y a, troisimement, une partie adverse qui, contre toute lgalit, a remport un avantage sur la veuve et qui, sans trve, laccule au pied du mur. La femme cherche gagner le juge sa juste cause; sa demande pressante, maintes fois rpte, est celle-ci; Fais-moi justice de ma partie adverse.

    Telle est limage que Jsus emploie pour dpeindre la prire incessante. Etudions-la de plus prs.

    Adversaire est un qualificatif commun dans les Ecritures pour dsigner Satan. Cest laccusateur, le hasseur, lennemi. Le sens tymologique de ce mot est: partie adverse dans un procs civil. Cest le mme terme que Pierre employa plus tard: Votre adversaire, le diable, rde comme un lion rugissant, cherchant qui il dvorera. Les mots fais-moi justice, qui reviennent par quatre fois, montrent que la veuve a des preuves en mains pour gagner son procs et que ladversaire la emport sur elle, en dpit de tout droit, uniquement par la force.

    Signalons aussi dans cette parabole, un trait trange qui doit avoir sa signification: un homme franchement impie et peu scrupuleux y reprsente Dieu. Voil qui est extraordinaire. Dans toute autre bouche que celle de Jsus, cela semblerait un manque de respect; mais ici il faut y voir une extrme habilet. Si cet homme est choisi comme juge, cest pour mettre en vidence que les procds ncessaires pour gagner cet individu ne sont certainement pas exigs par Dieu. La veuve doit insister et plaider; cest cause du juge auquel elle a affaire. Dieu, lui, ne peut lui tre compar; cest pourquoi, sil faut ainsi insister dans nos prires notre Pre cleste, la cause en est attribuable des raisons essentiellement diffrentes. Si donc, avec Dieu, de tels mobiles nentrent pas en jeu, il ne peut rester quun obstacle nos supplications, savoir celui que suscite ladversaire.

    Ayant choisi, dessein, un tel homme pour illustrer Sa parabole, Jsus en profite pour parler du vrai caractre de Dieu: Et tardera-t-Il leur gard? Ces paroles, dans la bouche de Jsus, suggrent immdiatement lide de lamour, et spcialement de la patience dans lamour. Les thologiens ont beaucoup argu pour savoir, dans cette phrase, en faveur de qui ou avec quoi il avait tant de patience. A leur gard, voil les mots qui provoquent la discussion. Combien de temps tardera-t-Il encore en faveur de ceux qui prient? ou combien de temps tardera-t-Il svir justement contre quelque adversaire opinitre? Quel est-il? La phrase suivante renferme un mot qui forme un frappant contraste avec celui que nous envisageons: promptement. Quel contraste entre ces mots: tardera-t-Il et promptement!

    Ces paroles clairent dune vive lumire un sujet rest obscur et qui renferme plus de lumire que nous ne sommes capables den trouver. Les paroles de Jsus sont touts pleines de pense; ses mots sont toujours choisis avec sagacit.

    Si lon pense ladversaire pour lequel Il fait preuve de tant de patience, la parabole signifierait: une grande lutte se livre dans les sphres suprieures. Dieu y montre une grande patience. Il est juste et droit. Les tres qui prennent part la lutte sont tous ses cratures. Il agit aussi droitement avec le diable et sa grande arme desprits malfaisants quavec ses autres cratures; il fait preuve dune longue patience pour quaucune action dloyale ne soit commise contre ces cratures qui sont aussi les siennes. Il dirige nanmoins tous ses efforts vers une issue rapide de la lutte, pour le salut des fidles quil aime et pour que la justice prvale.

    Lenseignement de la parabole est fort simple; il renferme pour nous deux vrits terribles et capitales; celle-ci tout dabord: la prire concerne trois personnes et pas seulement deux, Dieu que nous prions, lhomme qui prie sur le territoire contest, et le diable contre qui nous prions. Le but de la prire nest pas de persuader ou dinfluencer Dieu, mais dunir nos forces aux Siennes contre lennemi. Non pas vers Dieu, mais avec Dieu et contre Satan. Tel est lenseignement capital que nous devons nous rappeler quand nous prions. Le but essentiel nest pas datteindre Dieu, mais de repousser Satan.

    La deuxime vrit capitale est que la qualit matresse avoir quand nous prions est la persvrance. Cest lpreuve finale, le dernier obstacle franchir. Beaucoup de chrtiens, qui luttent admirablement pour la cause du Christ, perdent pied sur ce point et, par l, perdent tout. Beaucoup de fidles, admirablement prpars par la prire, chouent l o il faudrait persvrer et leur chec est srement d une comprhension incomplte de ce quest la prire.

    La voix du Matre rsonne aujourdhui encore, claire et pressante, nos oreilles: Priez sans cesse et ne vous relchez point.

    5. Dfaite dun ennemi opinitre

    Voyons maintenant une dclaration nette de Jsus-Christ touchant la prire. Nous la trouvons dans lhistoire dun jeune dmoniaque et dun pre angoiss et nous assistons, au pied de la montagne, un chec des disciples. {Mt 17:14-20 Mr 9:14-29 Lu 9:37-43}

    Dans ce cas, les extrmes se touchent srement; le sommet de la montagne quils venaient de quitter forme un contraste extraordinaire avec la valle o la scne se passe. Le dmon qui possde lenfant semble tre de toute premire force; nous en avons la preuve dans ce quil fait du possd; son but est de le dtruire. Il y a toutefois une limite ses forces, car ses efforts ne furent pas suivis dun succs complet. Sa persvrance est trs grande; il rsiste toutes les tentatives faites pour le chasser du corps du jeune homme; et, jusqu un certain point, il lutte avec succs. Les disciples ont essay de le chasser; on comptait sur eux; ils comptaient eux-mmes russir, car ce ntait pas leur premire tentative. Ils chourent honteusement, au milieu des ricanements et des railleries de la foule et eh face de la dtresse croissante du pauvre pre.

    Alors survint Jsus. Restait-il sur Son visage quelque trace de la gloire de la transfiguration? Il semblerait. La foule, en Le voyant, fut surprise et accourut Le saluer. Sa prsence changeait tout. Le dmon, furieux, partit en faisant un dernier effort pour dtruire le corps quil tait oblig dabandonner. Lenfant fut guri et la foule tonne de la puissance de Dieu.

    Les disciples agirent alors avec beaucoup de sagesse. Si parfois ils commirent des erreurs, cette fois ils firent preuve de discernement; ils cherchrent un entretien priv avec Jsus. Il ny a pas de plus grande preuve de sagacit que celle-l. Quand vous avez essuy un chec, quittez votre travail et recherchez un entretien priv avec Jsus.

    Ils sont tonns, dcourags; aussi cette question sort immdiatement de leur coeur abattu: Pourquoi navons-nous pu chasser ce dmon? Matthieu et Marc nous ont transmis la rponse complte que Jsus fit leur demande; elle commena probablement par ces mots: cause de votre petite foi. En effet, ils avaient perdu courage devant la force du dmon, et le dmon lavait su; ils avaient t plus impressionns par la force du mauvais esprit que par celle de Dieu, et le dmon lavait vu; ils navaient pas pri victorieusement contre lui. Le Matre dit: Si vous aviez de la foi comme un grain de moutarde, vous diriez cette montagne: Transporte-toi! Remarquez une fois de plus que la force de la foi est dirige contre lobstacle et que ce fut le dmon qui fut le plus directement influenc par la foi de Jsus.

    Vient ensuite la deuxime partie de la rponse: Cette sorte de dmon ne sort que par la prire. Certains dmons moins tenaces peuvent tre expulss par la foi qui nat de notre contact personnel et constant avec lEsprit de Dieu. Cette sorte ncessite une prire spciale et la prire seule russit. La vraie victoire doit tre gagne dans le secret. Laction de la foi, en pleine bataille, nest que la ralisation dune victoire dj gagne. Ce dmon est dcid ne pas partir; il combat avec force, avec acharnement; il russit. Survient alors lHomme de prire. Un ordre tranquille est prononc et le dmon est oblig de partir.

    Ces disciples ressemblent dune manire frappante certains dentre nous; ils navaient pas compris o la vraie victoire se gagne. Eux aussi, ils avaient prononc cet ordre, le donnant sans doute au nom de Jsus; mais il ny avait pas entre Dieu et eux ce contact qui donne la victoire. Leur visage rvlait la crainte quils avaient du dmon.

    La prire, la vraie prire, la prire intelligente, voil ce qui mettra en fuite les dmons de Satan, car elle met en droute le chef lui-mme. David tua le lion et lours dans le silence des forts avant daffronter le gant Goliath; les disciples affrontaient le gant sans avoir fait lexprience de la lutte dans la solitude. Cette phrase: Mais cette sorte de dmon ne sort que par la prire et le jene signifie que cette sorte de dmon sort et doit sortir devant lhomme qui prie. Ce que Jsus appelle prier chasse les dmons. Puissions-nous connatre mieux par exprience ce quil entendait par la prire, car nous exercerions une influence positive sur les armes des mauvais esprits. Ils la craignent et redoutent lhomme qui devient habile la manier.

    Il y a videmment beaucoup dautres passages bibliques tout aussi explicites que ceux que nous avons tudis et qui donnent un enseignement tout aussi simple et aussi clair. La Bible entire est pleine de cette vrit; mais ces quatre grands exemples sont tout fait suffisants pour claircir parfaitement cette question. Le grand prince rengatSatanest actuellement un facteur actif dans la vie des hommes; il croit la puissance de la prire; il la craint; il peut, pour un temps, en retarder les rsultats et il fait son possible pour y arriver.

    Elle contrecarre ses plans et le met en droute. Il ne peut pas tenir devant elle. Il tremble ds quun homme de foi simple et vivante fait monter sa prire vers Dieu. Prier, cest rclamer avec persvrance que la volont de Dieu soit faite. La prire exige une volont en communion absolue avec Dieu; elle sappuie sur la victoire de Jsus; elle met nant la volont mauvaise du grand et dloyal adversaire.

TROISIEME PARTIE

COMMENT PRIER?

CHAPITRE PREMIER

Comment raliser lunion avec Dieu

    1. Ambassadeurs de Dieu

    Si je caressais lambition de reprsenter ma patrie ltranger comme ambassadeur, il me faudrait deux choses. Tout dabordet ce serait la chose essentielletre investi de cette fonction; et, pour cela, je devrais entrer en relations avec notre Prsident, possder certaines qualits quil juge indispensables, et finalement obtenir de lui la charge dsire et des lettres maccrditant auprs de tel ou tel gouvernement. Ces conditions, une fois remplies, dtermineraient mes rapports comme reprsentant de mon pays auprs dune nation trangre et tabliraient par l mme mes droits agir en mon nom.

    Cette investiture toutefois ne mempcherait pas, une fois en charge, de commettre de grosses erreurs. Ma maladresse peut provoquer une telle tension des relations diplomatiques quil faudra maintes explications, voire des excuses, pour remettre les choses au point; de plus, les souvenirs que je laisserai aprs moi seront longs disparatre. Combien de fois de telles complications ne se sont-elles pas produites! Les nations sont trs susceptibles; aussi les affaires dEtat doivent-elles tre traites avec le plus grand discernement. Il y a donc une seconde chose que je ferais certainement si jtais jug capable de remplir les fonctions dambassadeur. Jirais voir nos diplomates les plus en vue; je les interviewerais et jobtiendrais deux tous les renseignements possibles sur la vie officielle du pays o je dois me rendre, sur ltiquette qui rgne la cour, sur les personnages que mes fonctions mobligeront frquenter, bref, sur ce quil faut faire et ce quil faut viter. Mon unique pense serait dtre un diplomate habile, de maintenir les bons rapports existant entre les deux gouvernements, de gagner des amis, dveiller des sympathies pour mon pays. Mes efforts seraient tendus vers ce seul point, mon esprit orient dans cette seule direction: avoir une politique heureuse.

    La premire des conditions, ma nomination ferait de moi lgalement un ambassadeur; la seconde tendrait me doter dune certaine habilet professionnelle.

    Nous trouvons dans la prire les deux mmes conditions; en effet, dun ct, lunion entre Dieu et le fidle doit tre tablie avant que lon puisse rien faire dautre; et, dun autre ct, il est de toute importance dacqurir une grande habilet en vue de laccomplissement de la tche qui nous est chue.

    Pour le moment, nous nous bornerons parler de la premire de ces conditions, de lunion ncessaire entre le Crateur et la crature qui veut le prier. La prire repose sur une entente parfaite avec Dieu; elle est Sa mandataire dans le royaume spirituel de notre monde; elle dfend Ses droits, et, grce aux pouvoirs quil lui a confis, elle combat pour Sa cause. La seule base dun tel accord est et ne peut tre que Jsus. Nous avons t mis hors la loi par le pch; allis de Dieu, nous avons rompu lalliance. Etant donne notre action, nous naurions pu par nous-mmes effacer les effets de cette rupture; il a fallu que Jsus vnt. Dieu et Homme la fois, Il nous runit Dieu; cest par Lui et par Lui seul que nous rentrons en grce. Le sang de la Croix a scell cette nouvelle alliance; par ce sang, lunion que ncessite toute prire est tablie nouveau. Mes supplications ne seront entendues que si je viens Dieu par lintermdiaire de Jsus et si le but de ma vie est en accord constant avec lexemple de notre Sauveur.

    2. Six dclarations capitales

    Les propres paroles de Jsus justifient et clairent cette affirmation. Les Evangiles nous fournissent deux groupes denseignements sur la prire. Le premier nous est donn dans le Sermon sur la montagne, que Jsus pronona au milieu de la deuxime anne de Son ministre; le second, la fin de sa vie, dans les derniers six mois; la partie la plus importante nous est mme fournie par les dix derniers jours; enfin lenseignement primordiale ne nous est confi que la veille du jour suprme.

    Cest aprs la violente rupture de Jsus et des chefs du peuple que nous est donne cette deuxime srie daffirmations; ce sont les plus positives et les plus importantes que Jsus ait prononces sur la prire; nous y trouvons six des huit promesses quil fit touchant lintercession. Examinons-les maintenant; nous montrerons ensuite dans quel rapport elles se trouvent avec notre sujet.

    Nous rencontrons la premire dans lEvangile de Mt 17:19-20: Je vous dis encore que, si deux dentre vous saccordent sur la terre pour demander une chose quelconque, elle leur sera accorde par mon Pre qui est dans les cieux.

    Notez dans cette promesse lorigine de la prire: sur la terre;  sa porte: une chose quelconque;  la certitude de lexaucement: elle leur sera accorde. Voyez ensuite la raison de cet exaucement: Car, l o deux ou trois sont assembls en mon nom, je suis au milieu deux cest--dire, sil y a deux personnes qui prient, il y en a en ralit trois; sil y a trois personnes qui se rencontrent pour prier, en ralit il y en a quatre; il y a toujours quelquun de plus, quelquun dinvisible. Si peut-tre, dans un moment de dcouragement, vous vous dites: Il ne mentendra pas; je suis si pcheur, si faiblevous auriez tort de le faire; mais que de fois hlas! nous nous tromponssi donc vous avez jamais une telle pense, reposez-vous immdiatement sur celle-ci: le Pre entend toujours Jsus, et Jsus entend toute prire srieuse et la prsente comme sienne.

    La deuxime promesse est contenue dans les versets 22 24 du chapitre XI de lEvangile de Marc: Jsus prit la parole et leur dit: Ayez foi en DieuDieu, le facteur essentiel dans chaque prireJe vous le dis en vrit, si quelquun dit cette montagne: Ote-toi de l et jette-toi dans la mer {Mr 11:22-24} Il choisit, vous le voyez, la chose la plus invraisemblable qui puisse arriver. Jamais nous navons entendu dire que Jsus ait dplac une montagne; la ncessit dune telle action semble ne jamais stre fait sentir, mais Jsus choisit la chose la plus difficile pour illustrer ses paroles. Peut-on, en effet, simaginer une montagne glissant la mer: la Jungfrau, le Mont Blanc, le Mont Rainier?et sil ne doute point en son curtelle est la dfinition que Jsus donne de la foimais croit que ce quil dit arrivera, il le verra saccomplir. Cest pourquoi je vous dis: Tout ce que vous demanderez en priant, croyez que vous le recevrez, et vous le verrez saccomplir... Quelle certitude dans cette dernire affirmation! Pour la rendre plus complte, Jsus la fait prcder de ces mots solennels: Cest pourquoi je vous dis... Oui, vous le recevrez, quoi que ce soit, qui que ce soit; toute chose, tout homme.

    Nous sentons tout naturellement que ces affirmations doivent tre accompagnes de conditions prcises; nous voudrions les entourer dune barrire solide. Patientons un moment et nous verrons de quelle barrire Jsus lui-mme les entoure.

    Les quatre dernires dclarations sur la prire se trouvent dans lEvangile de Jean; elles furent prononces dans un long et dernier entretien, la nuit o Jsus fut trahi. Jean nous a conserv, dans les chapitres XIII XVII, une grande partie de cette conversation intime.

    Voici ce que nous lisons au chapitre XIV, aux versets 13 et 14: Et tout ce que vous demanderez au Pre en mon nom, je le ferai, afin que le Pre soit glorifi dans le Fils. Si vous demandez quelque chose en mon nom, je le ferai. Cette rptition a pour but de marquer solennellement la diversit illimite des demandes que nous pouvons adresser.

    Jean XV, vers. 7: Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous {Jn 15:7}

    -Ce mot demeurent est trs expressif; il nindique pas un bref passage, un sjour de quelques heures; non, il dsigne une demeure stableDemandez ce que vous voulez. Dautres versions traduisent: Vous demanderez, mais il est plus exact et plus prcis de dire: Demandez; oui, demandez; je vous demande de demander. Il nest rien dit qui se rapporte directement la volont de Dieu, mais il est question de notre propre volont, nous Ses cratures

    -et cela vous sera accord, ou si vous voulez, plus littralement: Je ferai que vous lobteniez.

    Cela me rappelle une phrase que me rapporta un jour un de mes amis. Il habite le Nord et appartient lEglise mthodiste, mais son influence stend toutes les Eglises, tant dans sa patrie qu ltranger. Il sentretenait avec un des vques de son Eglise, qui soccupait beaucoup des missions en terre paenne. Ce dernier dsirait vivement que mon ami acceptt la charge de secrtaire de la Socit de mission de son Eglise. Mais il savait, ce que chacun sait combien il est difficile de grouper quelques fidles, en dehors des heures de culte, dans de grandes congrgations. Aprs avoir srieusement discut avec mon ami, il termina par cette phrase: Si vous mautorisez me servir de votre nom pour cette runion, je me porte garant du succs.

    Permettez-moi dappliquer cet exemple au cas qui nous occupe et de dire quil est lexplication pratique des paroles de Jsus: Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vousexercent une influence sur vousdemandez ce que vous voudrez et... je me porte garant de lobtenir pour vous. Voil le sens net et positif de ces paroles de Jsus.

    Un peu plus loin, au verset 16 du mme chapitre, nous lisons ces mots: Ce nest pas vous qui mavez choisi; mais moi, je vous ai choisis et je vous ai tablis, afin que vous alliez, et que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure, afin que ce que vous demanderez au Pre en. mon nom, Il vous le donne. Ainsi, en nous choisissant, Dieu avait en vue notre alliance avec Lui par la prire.

    Vient enfin la dernire dclaration, contenue dans Jean XVI, vers. 28-24: En vrit, en vrit, je vous le dis, ce que vous demanderez au Pre en mon nom, Il vous le donnera. Jusqu prsent vous navez rien demand en mon nom. Demandez et vous recevrez, afin que votre joie soit parfaite.

    Ces dclarations sont les plus positives) que nous puissions trouver dans les Ecritures touchant la prire. Chacun a donc pleine libert de demander, et la demande ne souffre aucune restriction. Trois conditions seulement sont imposes: la prire doit passer par Jsus;  celui qui prie doit vivre en parfaite union avec Lui; et, enfin, il doit possder une grande foi.

    3. Un verset capital

    Rappelons-nous maintenant que ces six dclarations ne furent pas prononces devant les foules, mais ne furent confies quau petit groupe intime des douze. Jsus a une manire spciale de sadresser aux multitudes; il ne leur parle pas comme il parle ces hommes qui ont quitt la foule pour pntrer dans le cercle intime de ses disciples.

    Notons de plus quavant de sadresser ce petite groupe de fidles, il avait dit quelque chose dautre, quelque chose de dcisif, qui avait provoqu un incident entre lui et Pierre, quil dut reprendre svrement. Les paroles quil pronona alors fixent clairement les rapports des disciples et du Sauveur. Rappelons-nous dans quelles circonstances elles furent prononces: ctait aprs la rupture complte avec les chefs du peuple, lorsque Jsus tait accus dagir sous linfluence de Satan. Le complot se tramait, et il ny avait plus de remde possible; aussi le Matre se retirait-il souvent de la foule avec les douze disciples. Telle fut loccasion des grandes promesses que nous tudions.

    Avant de se donner en quelque sorte eux en les leur faisant, il leur dit: Si quelquun veut venir aprs moi, quil renonce lui-mme, quil se charge de sa croix (Luc ajoute: chaque Jour) et quil me suive. {Mt 16:24} Ces paroles devraient tre crites en travers des six dclarations prcdentes. Jsus, en effet, ne pronona jamais de paroles plus nettes et, partant, plus importantes. Ces promesses, nous disent-elles clairement, ne sadressent pas tous; elles ne sappliquent qu ceux qui conforment leur vie lordre prcis que Jsus nous a laiss.

    Tout homme qui brle dexercer le pouvoir de la prire devrait examiner les promesses de Jsus sous cet angle nouveau. Si quelquun veut venir aprs moi, cela implique une dcision ferme, inbranlable comme le roc; une dcision qui sattache son but comme le lierre senroule autour de larbre qui le supporte; une rsolution qui ait la solidit des nuds que font les marins et que personne ne peut dnouer.

    Venir aprs moi ..., ces mots rappellent toute la vie de Jsus, sa puissance, mais aussi ses souffrances. Ils rappellent le dsert et la terrible tentation. Pour lun, ils signifient Nazareth, village obscur et solitaire. Pour un autre, la premire anne du ministre en Jude, cest--dire des dbuts difficiles. Pour un autre, les derniers mois, labandon de tous les amis. Pour tous, sans aucun doute, ils signifient Gethsman, car tout disciple du Matre a, dans sa vie, de telles heures dagonie. Venir aprs lui, cest passer par les mmes expriences que lui, de faon moins tragique sans doute, mais relle pourtant. Cest avoir, nous aussi, notre Calvaire gravir, un Calvaire diffrent du sien, mais pourtant un Calvaire. Se charger de sa croix et venir aprs lui, cest le seul moyen par lequel lhomme, avec sa volont gangrene par le pch, peut cependant sunir Dieu et se rclamer de toutes les promesses faites ceux qui prient. Cela peut paratre dur et difficile; en ralit, cest chose trs aise pour lhomme qui sait vouloir, car la prsence de Jsus dans sa vie surmonte tous les obstacles.

    Le chrtien, qui obit lordre de ce vingt-quatrime verset du chapitre XVI de lEvangile de Matthieu, peut demander ce quil voudra; cela lui sera accord. Si les prires de tant de gens restent inefficaces, cest que ceux qui prient ne veulent pasjappuie sur ce motne veulent pas se laisser pntrer par lesprit de ce verset. Par contre, un homme qui, tranquillement et rsolument, suivra lexemple du Christexemple qui ne le conduira rien dextrme, doutr, ni de morbide, mais au but que notre conscience nous indique tout bas jour aprs jourcet homme sera stupfait de dcouvrir que la prire a pour lui un sens tout nouveau.

    4. La prire justifie par son but

    Une union vivante se justifie toujours par un but. Celui dun ambassadeur sera de servir les intrts de son pays. Jsus dit, et cela seul rvle la nature de Son union avec Son Pre: Je fais toujours les choses qui Lui plaisent.

    Lunion qui est la base de toute prire a un but capital: plaire Jsus. Ceci peut paratre fort ais, et pourtant peu de mots comportent des consquences plus grandes: Lui plaire! Rflchissez cette parole et, par elle, rglez votre vie. Si vous ne lavez pas fait, essayez un jour, une semaine, et servez-vous de ces mots comme dune pierre de touche pour juger vos penses, vos paroles, vos actions. Introduisez-les dans vos affaires personnelles, la maison, dans le commerce, dans vos relations sociales ou familiales. Il ne sagit pas par l de se demander: Ceci est-il droit? cela ne lest-il pas? Non, il nest pas question de tirer une ligne de dmarcation entre le bien et le mal, le licite et lillicite, car il y a bien des choses dont on ne peut pas dire quelles soient mal, mais qui ne sont pourtant pas les meilleures quon puisse faire, qui ne sont pas celles que prfre notre Sauveur.

    Tel ngociant sera rendu tout perplexe par cet ordre: Lui plaire? Que faut-il faire? Ne pas couler ce produit? Mais o donc est le mal? Il ny en a assurment aucun; mes collgues, chrtiens eux aussi, le vendent dans tout le pays et mme ltranger.., mais il faut Lui plaire...,  de plus je perdrais tout un profit, une vraie somme.., mais il faut Lui plaireet cette lumire une seule solution se prsente: dtruire la marchandise.

    Une matresse de maison pense runir toute une jeunesse chez elle, dans le but doffrir une agrable soire ses filles. Elle organisera quelques jeux tels quil est coutume den avoir un peu partout; ils sont inoffensifs, nous en avons eu maintes fois la preuve..., mais peuvent-ils Lui plaire?A cette lumire, ces jeux aussi devront tre supprims; soyez persuads, du reste, que cela nempche pas cette femme srieuse, consacre Dieu, dorganiser une soire tout aussi agrable.

    Bref, ces deux mots: Lui plaire feront rflchir chacun; lun ses habitudes, un autre ses procds commerciaux, celui-ci ses relations sociales, celui-l aux socits dont il fait partie, et chaque fois ils pntreront au fond de lme comme un dard quon ne peut arracher.

    Certains pourraient stonner et dire: Pourquoi mettre de telles conditions la base de la prire?Je leur rpondrai ceci: La vraie base de la prire est la communion avec Dieu, lunit de but que Dieu et lhomme poursuivent. La prire nextorque pas des faveurs; ce nest pas une opration de banque, lencaissement dun billet. Non, son but est tout autre et, avant tout, il est unique et ncessite une unit defforts. Dune part, Dieu et Son Fils le Vainqueur ; Ses cts; de lautre, sur la terre, un homme, et les trois vivent dans une telle union que les penses de Dieu deviennent celles de lhomme et que Ses volonts sont exprimes et rptes dans chacune des prires de son serviteur.

    5. Trois lments la base de la vie de Jsus

    Reportons-nous maintenant pendant quelques instants la vie que Jsus-Homme passa sur la terre. Voyez son activit merveilleuse durant ces quelques annes, activit qui excita et excite de nos jours encore ltonnement du monde. Comparez ensuite sa vie de prire tout intime que nous ne faisons quentrevoir de temps autre, et groupez autour de ces mots: Je fais toujours les choses qui Lui plaisent, les phrases nergiques o un accent spcial est mis sur la ngation: non; non pas ma volont, non pas mon travail, non pas mes paroles. Jsus nous montre par l quil faisait la volont de quelquun dautre; le but justificateur de sa vie tait de plaire Son Pre, et cest l que gt le secret du pouvoir de Sa carrire terrestre. Communion avec Dieu; une vie de prire secrte et intime; un pouvoir merveilleux sur les hommes; voil les trois lments qui dominent et dirigent Sa vie.

    A la fin du chapitre Il de lEvangile de Jean, nous trouvons une expression tonnante: Plusieurs crurent en son nom, voyant les miracles quil faisait. Mais Jsus ne se fiait pas eux, parce quil les connaissait tous. Le texte original grec donne le mme verbe pour les deux franais crurent et se fiait, de sorte que nous pourrions tout aussi bien traduire le verset de cette faon-ci: plusieurs se firent lui, voyant ce quil faisait, mais Jsus ne se fiait point eux parce quil les connaissait.

    Jai la ferme conviction que la plupart dentre vous se fient lui; mais permettez-moi de vous demander: Peut-il se fier vous?Aucun dentre vous noserait rpondre franchement et entirement: Oui! et pourtant, si lon envisage notre intention, le but de notre vie, cette question peut en toute conscience recevoir une rponse affirmative. Quel est votre but?Lui plaire?Si oui, Il le sait.

    Quel rconfort que de savoir que Dieu juge un homme non daprs le rsultat, mais daprs lintention; quil me juge non comme je suis, mais comme je voudrais tre; quil me juge daprs le but primordial de ma vie. Dieu rpand sur nous toutes les forces quil nous croit capables demployer Son service.

    Le commerce nous fournit ce propos un exemple frappant. Un homme est employ par une maison de commerce en qualit de commis. Son habilet et sa probit se manifestent dans diffrentes circonstances. Premier rsultat: il est promu un poste plus lev, et sa responsabilit est accrue. Grce son caractre toute preuve, on se confie de plus en plus en lui, jusqu ce quil devienne un moment donn lhomme de confiance de la maison: il en connat dsormais les secrets comme il connat aussi ceux du coffre-fort, et tout cela, parce quon sait, pour en avoir eu la preuve, quil usera de tout pour le plus grand intrt de la maison et non dans un but goste.

    Dans le cas qui nous occupe, il sagit de questions plus leves, mais le principe est le mme. Si jarrive raliser lunion avec Dieu quimpliquent ces mots: Si quelquun veut venir aprs moi, quil renonce lui-mme, quil se charge de sa croix, et quil me suiveet tels doivent tre le but et le dsir de ma vie,je pourrai alors demander ce que je veux, cela me sera accord.

    Tout homme qui vit daprs lordre compris dans Mt 16:24, et suit lexemple donn par Jsusrien de plus, cest--dire pas de fanatisme, pas dexagration, rien autre que suivre lexemple du Christ jour aprs jourcet homme peut disposer entirement des six promesses de Jsus dont la porte est sans limites.

CHAPITRE II

Comment prier?

    1. Action secrte de la prire

    Une des illustrations modernes les plus remarquables du pouvoir de la prire peut tre tire de la vie de Moody. La prire explique sa carrire incomparable et unique de revivaliste, et il est tonnant que lon nen ait pas parl davantage. Lexemple de cet homme consacr est en effet un vrai stimulant. Je suppose que la raison doit en tre attribue la modestie de Moody lui-mme. Toutefois, durant la dernire anne de sa vie, comme sil y avait t inconsciemment pouss, il fit de plus frquentes allusions son exprience.

    La dernire fois que je lentendis, ce fut dans sa propre glise de Chicago et, si je ne fais erreur, quelques mois avant sa mort. Un matin, dans cette vieille glise, clbre par son influence, il nous en raconta lhistoire. Il remonta jusquen 1871, poque o une grande partie de la ville fut dvaste par un incendie. La reconstruction de cette glise, nous dit-il, ntait pas encore assez avance pour quon pt y faire grand travail; je dcidai ds lors de passer lAtlantique et daller lcole des grands prdicateurs de lEurope; jesprais obtenir, dans la suite, en suivant leurs exemples, de meilleurs rsultats Chicago. Jarrivai Londres, et l je profitai de toutes les occasions possibles dentendre les prdicateurs anglais. Un soir, jallai entendre Spurgeon au Metropolitan Tabernacle; apprenant quil devait parler une seconde fois dans la soire loccasion de la ddicace dune glise, je me glissai hors du temple et courus pendant un mille derrire sa voiture; je voulais tre sr de lentendre une deuxime fois. Eh! oui, ajouta-t-il en souriant, cest ainsi que je courais aprs les hommes de talent. Jusqualors je navais parl nulle part; je mtais born couter. Un jour, ctait un samedi, midi, je me rendis Exeter Hall, sur le Strand. Me sentant pouss dire quelques mots, je me levai et parlai. A la fin de la runion, plusieurs personnes vinrent me saluer et, parmi elles, un pasteur. Ce dernier me pria de venir prcher, le jour suivant, dans son glise, et jacceptai son invitation. Le lendemain matin, je pntrai donc dans la dite glise et je me trouvai en face dune grande affluence de fidles. Je parlai..., mais prsent encore, il me semble que cest le travail le plus pnible que jaie jamais accompli. Je ne sentais aucun lien entre lauditoire et moi; tous ces visages taient impassibles; ils ne rpondaient pas ma voix; vraiment, ils semblaient tre sculpts dans la pierre ou dans la glace. Quelle corve! Je souhaitais dtre cent lieues de cette glise et surtout je souhaitais de navoir pas promis de nouveau le soir. Mais javais promis; il fallait donc tenir parole.

    Le soir, ce fut la mme chose: salle pleine, auditoire respectueux, mais ne manifestant aucun intrt, ne vibrant pas. Et de nouveau jtais au supplice quand tout coup, au milieu de mon discours, survint un changement. Il me sembla que les portes du ciel souvraient et quun souffle vivifiant en descendait. Latmosphre du btiment se transforma: lexpression de mes auditeurs, elle aussi, se transforma. Jen fus si impressionn qu la fin de ma prdication, jinvitai ceux qui voulaient tre chrtiens se lever. Je pensais que quelques auditeurs rpondraient mon appel; aussi fus-je stupfait de voir des groupes entiers. Je me tournai vers le ministre de lglise et lui dis: Quest-ce que cela veut dire?Je vous assure que je nen sais rien, me rpondit-il.Pour sr quils mont mal compris, ajoutais-je, je vais leur expliquer ce que je voulais dire.Je leur annonai alors un second service qui se tiendrait dans la salle du bas et je leur dis qutaient invits ceux-l seuls qui voulaient tre chrtiens. Jexpliquai encore ce que jentendais par l et congdiai lassemble.

    Nous gagnmes la salle en question et les auditeurs arrivrent en foule, se pressant, remplissant tous les siges, toutes les places disponibles, les corridors et lentre. Je parlai pendant quelques minutes et rptai ensuite mon appel: Que ceux qui veulent tre chrtiens se lvent! Cette fois, je savais que je mtais fait comprendre. Et, de nouveau, ils se levrent par groupes entiers, par sries de cinquante et plus. Je me tournai vers le pasteur et lui dis: Quest-ce que cela veut dire?Je vous assure que je nen sais rien, me rpondit-il; puis, aprs quelques instants: Que ferais-je de cette foule? Je ne sais quen faire... Il y a quelque chose de nouveau.A votre place, lui dis-je, je fixerais une runion pour demain soir et pour aprs-demain soir et je verrais alors ce qui se passera; quant moi, je dois membarquer pour Dublin. Je partis; mais peine tais-je dbarqu que je reus un tlgramme du dit pasteur avec ces mots: Revenez immdiatement. Eglise bonde. Je revins donc et restai dix jours. Le rsultat de ces dix jours fut que lEglise saugmenta de quatre cents membres et que les autres Eglises reurent, par contre-coup, un lan et une impulsion extraordinaires.

    Aprs avoir fait ce rcit, Moody baissa la tte, comme sil rflchissait ces vnements passs; puis il ajouta: Je ne pensais rien dautre qu mon Eglise, mais le rsultat de ce voyage fut que je me vouai au ministre itinrant; depuis lors, je ne lai pas quitt.

    Et maintenant, comment expliquer luvre merveilleuse qui se fit ce dimanche-l et les jours qui suivirent? Moody nen tait pas linitiateur, bien quil ft un homme de valeur que Dieu pouvait employer et quil employa largement; le ministre de la dite Eglise ne peut, lui non plus, en tre rendu responsable, car il fut aussi grandement surpris que son hte. Il stait videmment pass quelque chose de mystrieux pendant ces dix jours. Moody, avec sa pntration habituelle, entreprit de dcouvrir ce secret.

    Quelque temps aprs, le fait suivant parvint sa connaissance. Un membre de lEglise, une femme tait tombe malade plusieurs mois avant ce magnifique rveil. Son tat empira; les mdecins la condamnrent. Sa maladie ntait pas de celles dont on meurt subitement; elle allait vivre des annes encore, mais clotre dans sa maison. Elle resta donc couche, sefforant de comprendre le but de cette longue et douloureuse preuve. Elle fit un retour sur elle-mme et se dit: Quai-je donc fait pour Dieu? En fait, rien; et maintenant, que puis-je faire, couche et isole du monde? Je puis prier, se dit-elle.

    Permettez-moi douvrir ici une courte parenthse. Dieu permet souvent que nous soyons enferms et isols. Ce nest pas Lui qui nous isole, Il na pas besoin de le faire; Il se contente de retirer lgrement Sa main, et notre dsobissance Ses lois a vite fait de nous sparer des humains. Ce qui arrive alors Lafflige; cest malgr Ses premires intentions notre gard quil permet cette solitude force, mais Il le fait, parce quainsi seulement Il arrive tourner notre attention vers ce quil dsire que nous accomplissions; ainsi seulement, Il parvient nous rendre attentifs certaines choses et nous les faire juger comme Il dsire quon en juge. Mais revenons notre rcit.

    Elle se dit: Je peux prier, donc je prierai. Elle le fit et pria, entre autres objets, pour son Eglise. Sa sur, membre de la mme paroisse, vivait avec elle; ctait son seul lien avec le monde extrieur. Le dimanche, aprs le service, la malade demandait toujours: Y a-t-il eu quelque chose de nouveau lEglise aujourdhui?Non, rpondait invariablement la sur. Chaque mercredi soir, aprs la runion de prire, elle interrogeait sa sur: Quelque chose de nouveau ce soir? Il doit y avoir eu quelque chose.Non, rien de nouveau; les mmes vieux diacres ont fait les mmes vieilles prires.

    Mais, un dimanche, midi, la sur rentra du culte et demanda la malade: Devine qui a prch ce matin.Je nen sais rien, qui donc?Eh! bien, un tranger, un Amricain du nom de Moody, ce que jai entendu. Le visage de la patiente plit, ses yeux devinrent fixes et ses lvres tremblrent, mais elle dit tranquillement: Je sais ce quil en est; cest une visite la vieille Eglise. Ne mapporte pas manger, car je veux passer laprs-midi dans la prire. Ainsi fut fait, et le mme soir se produisait ce changement tonnant dans lauditoire de Moody.

    Ce dernier dcouvrit la malade; elle lui raconta comme quoi, environ deux ans auparavant, un exemplaire de Watchmann, publi Chicago, lui tait tomb entre les mains; il contenait un discours que Moody avait prononc dans cette ville. Tout ce quelle savait, ctait que ce discours enflamma son cur et quil tait sign Moody. Elle insista ds lors dans ses prires pour que Dieu envoyt cet homme Londres, dans son Eglise. Et voil.! Quoi de plus simple que cette prire!

    Les mois passrent; une anne scoula et toujours elle priait. Sauf Dieu, personne ne le savait. Pas de changement? Nimporte, elle priait, et pour finir... sa prire triompha.De mme toute prire vraiment inspire de lEsprit remporte la victoire. Le succs! voil la pierre de touche de nos supplications.

    Lesprit de Dieu poussa Moody traverser les mers, venir Londres, pntrer dans cette glise. Puis vint la concentration de toutes les forces, le dernier assaut, et cette nuit-l la victoire fut remporte.

    Je suis persuad quun jour, quand les tnbres auront disparu et que la lumire rayonnera partout, quand nous connatrons comme nous avons t connus, je suis persuad qualors nous dcouvrirons que le facteur le plus important de ces dix jours o des milliers dmes se sont donnes leur Sauveur, sous linfluence de Moody, aura t la prire de cette femme. Non pas le seul facteur, il est vrai, car il faut y ajouter lappui de la puissante personnalit de Moody et le travail concentr de centaines de pasteurs et de laques. Toutefois, je place sans hsiter, avant linfluence de Moody et de tous les autres, la prire de cette infirme.

    Je ne connais pas son nom, tandis que je connais celui de Moody. Je pourrais citer un grand nombre daides qui se consacrrent luvre du grand revivaliste. Mais cette femme, qui fut la cause humaine de ce grand succs, je ne la connais pas. On me dit quelle vit au nord de Londres et quelle continue de faire monter au Ciel ses supplications. Cest vraiment un service secret que celui de la prire, et dans ce domaine nous ne savons pas quels sont les plus puissants des hommes de prire.

    Et nous, prierons-nous? saurons-nous prier? saurons-nous, en face dun vnement important, attribuer la premire place la prire?

    2. Priant pour la ralisation du plan de Dieu

    Laissez-moi vous dire maintenant quelques mots sur la manire de prier. Oui, comment devons-nous prier?

    La premire condition de toute prire est de connatre les intentions de Dieu, leur direction, leur porte. Il nous faut connatre avant tout la pense de Dieu et demander ensuite quelle se ralise. Dieu est assis dans les cieux sur son trne, avec Jsus glorifi ses cts. Partout, dans tous les mondes, la volont du Crateur est observe; une seule exception: la partie que lon appelle la terre, avec latmosphre qui lentoure, est le coin du Ciel o rgnent Satan et ses armes.

    La volont divine fut accomplie sur la terre par un homme: Jsus. Il descendit vers ce monde prodigue et fit la volont de Son Pre qui est dans les cieux; puis Il partit. Depuis Il a cherch et cherche maintenant encore sur la terre des hommes qui soient dans une telle union avec Lui, quil puisse, en eux et par eux, faire ce quil veut. Il dsire trouver des imitateurs de Lui-mme et obtenir ainsi que, par leur moyen la volont de Dieu rgne de nouveau en matresse sur la terre. Voici maintenant ce quest la prire: dcouvrir les intentions divines notre gard, lgard du monde, et demander avec insistance quelles se ralisent. Limportant est de dcouvrir la volont de Dieu et de prier sans cesse quelle soit faite. Voil la rponse la question: Comment devons-nous prier?

    Je me suis rencontr plus dune fois avec des chrtiens dans le but de prier ensemble, et les sujets dintercession furent naturellement des plus divers. Tel homme demandent ceci, tel autre cela et ainsi de suite; mais pendant qu genoux et priant moi-mme, jcoutais les supplications quun frre faisait monter vers les cieux, je me suis dit souvent, sans vouloir toutefois jouer le rle de critique: Voici ce que je dois dire: Esprit Saint, Tu connais cet homme, Tu sais ce qui lui manque; Tu connais aussi cette femme malade, et Tu sais quelles sont ses peines; Tu connais cette question que nous tapportons, Tu en sais les difficults; Esprit Saint, insuffle en moi la prire que Toi-mme Tu formules pour cet homme, pour cette femme, pour cette question. Ta prire est la mienne, au nom de Jsus. Que ta volont soit faite en tout et partout! Quelquefois je vois clairement ce que je dois demander, mais souvent je suis embarrass. Je connais tel fait particulier; je ne puis connatre tous les faits. Par exemple, je connais cet homme qui a besoin de mes prires; cest peut-tre un chrtien; son caractre, ses ides, sa volont me sont connus; toutefois il y a en lui quelque chose que je ne connais pas et ce quelque chose dinconnu est cause de toute la difficult. Ds lors, je suis oblig davouer que je ne puis prier comme je le devrais. Mais lEsprit qui est en moi intercdera pour cet homme selon que je lui laisserai toute latitude dagir et de prier, et Celui qui, l-haut, prte loreille ds quil entend que Sa volont, Sa pense pour telle ou telle de ses cratures est proclame sur le champ de bataille, reconnatra certainement Sa propre volont dans ma prire. Le rsultat sera lexaucement de ma prire cause de la victoire de Jsus sur Satan.

    De plus, je puis devenir sensible la pense et la prsence de lEsprit au point de percevoir plus facilement et plus rapidement ce pour quoi il me faut prier. Je serai par l-mme un associ toujours plus utile pour raliser la volont divine sur la terre.

    3. O rencontrer Dieu

    La prire ne peut tre exerce que dans certaines conditions; nous en distinguons six.

    Tout dabord, il nous faut du temps pour prier. Trouvons chaque jour le temps ncessaire, et sachons aussi oublier ce qui nous entoure et les occupations qui nous attendent. Ne soyons pas presss par lheure. Telle personne se lve prcipitamment le matin, shabille en hte et sagenouille quelques instants avant daller vaquer ses affaires; mais ce nest pas l prier. Telle autre, fatigue par le travail quotidien, se dshabille, en hte aussi, car elle a besoin de repos; par habitudehabitude qui peut tre excellenteelle parcourt quelques versets, sagenouille un instant et croit avoir pri; mais ce nest pas l prier. Je ne critique pas la bonne intention; mais je tiens dire nettement que, si lon veut vraiment prier, prier srieusement, il faut prendre le temps de le faire lheure o lesprit est frais et dispos, et non lorsquil est mouss par la fatigue du jour.

    Nous navons pas le temps; la vie est trop remplie, dira-t-on. Cest possible; mais ce temps, nous devons le prendre, ft-ce quelque chose dimportant; ce sera toujours une chose moins importante que la prire.

    Le sacrifice est la loi continuelle de la vie; limportant doit tre sacrifi au plus important. Il faut arriver possder un jugement mr, sinon notre force sera dilapide dans mille dtails secondaires et limportant ne sera pas accompli, ou si pauvrement quil ne sera daucune valeur. Si nous dsirons intercder utilement et savoir comment prier simplement, prenons le temps de passer chaque jour quelques instants dans le calme et la solitude.

    En second lieu, il nous faut un endroit pour prier. Il va sans dire quon peut prier partout, dans la rue, dans les bureaux, en voyageant, en travaillant, en lavant la vaisselle..., que sais-je encore; mais vous ne pouvez vraiment vous recueillir que si vous recherchez un endroit tranquille pour y tre seul avec Dieu. Le Matre nous dit: Entre dans ta chambre, ferme ta portecette porte joue un rle important, elle isole compltementet prie ton Pre en secret. Dieu se trouve dans cet endroit solitaire. Il faut tre seul pour se rendre compte quon nest jamais seul. Plus nous sommes seuls, humainement parlant, et moins nous le sommes au point de vue divin.

    La solitude et la tranquillit nous sont ncessaires pour dvelopper notre entendement. Une mre entendra le plus faible cri de son bb qui se rveille; les pleurs viennent dun autre tage peut-tre; ce nest quun lger bruit que personne nentend; mais loreille maternelle la saisi immdiatement et dj la mre est auprs du berceau. Son oreille est exerce dune faon toute spciale par lamour.

    Nous aussi, nous devons exercer notre oreille. Un endroit retir interceptera les bruits extrieurs et donnera loue intrieure la possibilit dentendre dautres voix.

    Un homme se trouvait un jour dans une cabine tlphonique; plac devant lappareil, il essayait de comprendre la communication quon lui faisait; mais ctait en vain, et sans cesse il rptait: Je nentends pas, je nentends pas. Son interlocuteur, aprs quelques essais, lui cria un peu schement: Si vous voulez entendre, fermez donc la porte. Sa porte lui tait ferme et il pouvait entendre non seulement la voix de la personne qui il tlphonait, mais aussi les bruits de la rue et des acheteurs qui remplissaient le magasin o se trouvait la cabine tlphonique.

    Certaines personnes nentendent pas bien, parce quelles nont pas ferm suffisamment la porte. La voix de lhomme et la voix de Dieu rsonnent et se confondent dans leurs oreilles; elles ne peuvent les distinguer. La faute en est pour une part la porte: Si vous voulez entendre, fermez donc votre porte!

    La troisime condition mrite aujourdhui une attention toute spciale: Donnez la Bible sa place dans la prire. La prire ne consiste pas simplement parler Dieu; non, coutez dabord, vous parlerez ensuite. La prire se sert de trois organes: loreille, la langue et les yeux. Loreille pour entendre ce que Dieu dit, la langue pour lui parler, les yeux pour voir le rsultat. Lire la Bible, cest couter ce que Dieu dit. Ses paroles nous pntrent; elles trouvent notre cur o elles prennent un peu de notre personnalit, et elles ressortent de notre bouche sous forme de prire. Quelle peine Dieu a obtenir quon Lcoute! Il parle constamment; mais les bruits de la terre assourdissent le son de Sa voix, mme chez ceux qui auraient quelque dsir de lentendre. Dieu parle par Sa parole; ce que nous savons de Lui, nous le savons par elle. La Bible a t inspire, et elle est inspire. Dieu Lui-mme parle dans ce livre. Cest donc un livre part, diffrent de tous les autres. Etudions-le avec soin, avec intelligence, avec respect, et son contenu nous rvlera la volont souveraine de Dieu. Ce quil dit changera compltement ce que vous vouliez dire.

    4. Qui nous enseignera prier?

La quatrime condition est celle-ci: Laissez le Saint-Esprit vous apprendre prier. Plus vous prierez et plus vous vous direz: Je ne sais pas comment prier. Vous reconnaissez l lexprience et les paroles mmes de Paul. Dieu, qui connat et comprend cette difficult, sait comment y remdier. Il nous a envoy le Saint-Esprit, qui doit habiter dans nos curs et nous apprendre lart si difficile de la prire. Laissez-vous donc enseigner par Lui.

    Quand vous vous rfugiez, avec votre Bible, dans la solitude et la tranquillit, que votre prire soit: Esprit saint et bni, Esprit de prire, apprends-moi prier! Et il le fera. Ne soyez pas nerv, agit, et ne vous demandez pas sil vous comprendra. Apprenez tre calme, dans votre corps et dans votre esprit. Soyez tranquilles, et coutez. Souvenez-vous de la version que donne Luther du Psaume XXXVII, verset 7: Sois silencieux devant lEternel et laisse-toi faonner par ses mains {Ps 37:7}.

    Vous verrez alors quelle transformation subiront vos prires. Vous parierez plus simplement, tel un homme occup ses affaires ou un enfant faisant une demande,avec, en plus, videmment, tout le respect que vous devez Dieu. Vous cesserez de prier pour certaines choses et vous abandonnerez aussi quelques redites; vous emploierez moins de mots peut-tre, mais vous les prononcerez avec une tranquillit, avec une foi si compltes que votre demande sera exauce.

    Cette influence du Saint-Esprit doit exister au dbut de chaque prire et se maintenir jusqu la fin, car il est le facteur principal qui la guidera vers Dieu. Le Saint-Esprit est avant tout un Esprit de prire. La loi suprme de la vie chrtienne est une obissance complte aux directions du Saint-Esprit. Il faut un jugement clair pour comprendre ses voies et ne pas prendre nos penses imparfaites pour ses ordres. Nous devrions lautoriser nous enseigner prier et plus encore rgler nos prires. La bataille spirituelle se passe sous ses yeux; il est le gnral de Dieu sur le champ de bataille.

    Des flchissements peuvent se produire durant le combat; il y a des hauts et des bas. Le Saint-Esprit sait alors quand la prire est ncessaire pour ramener lavantage et, par l, la victoire. Nous devons donc consacrer un temps spcial la prire et y persvrer jusqu ce que le triomphe soit assur. Obissons par consquent son inspiration.

    Nous nous sentons parfois pousss prier ou demander quelquun de prier, et nous nous disons: Pourquoi donc prier encore? Je viens de le faire. Ou bien: Je ne vois pas la ncessit dinciter cette personne prier, car elle le fait srement. Ne pensons pas cela, et contentons-nous de suivre cette inspiration de lEsprit et de lexcuter avec le moins dexplications possibles.

    Laissez cet Esprit merveilleux vous enseigner prier. Ce sera long; mais, si vous cdez devant sa sagesse et attendez patiemment, il vous enseignera comment il faut prier; il vous suggrera des sujets prcis et souvent vous fournira les mots de votre prire.

    Si vous y rflchissez, vous remarquerez que le but principal de ces quatre premires conditions est dapprendre connatre la volont de Dieu. Un endroit solitaire, un moment de tranquillit, la Bible, lEsprit, voil qui fera de nous de vrais hommes de prire. Nous apprendrons ainsi connatre la volont du Trs-Haut, et cette connaissance nous fera toujours plus dsirer que cette volont soit faite et toujours plus prier quelle puisse tre accomplie.

    Il est un mot souvent employ dans les Psaumes et dans le livre dEsae pour dsigner notre attitude: attendre. Ce mot est sans cesse pris pour dsigner cette union avec Dieu, qui nous rvlera Sa volont et nous fera part de Ses intentions. Le mot attendre nindique rien daccidentel, rien de press; il signifie fermet, cest--dire persvrance; patience, cest--dire constance; esprance, cest--dire confiance en Dieu; obissance, cest--dire entier consentement; il signifie aussi attention, cest--dire calme et tranquillit pour mieux entendre la voix du ciel.

    5. Le pouvoir dun nom

    La cinquime condition a dj t indique, mais nous tenons souligner son importance. La prire doit tre faite au nom de Jsus;  elle doit tre offerte en son nom, parce que toute sa force repose sur lui. Je me souviens dune contre que jhabitai quelque temps et o jentendis rarement employer le nom de Jsus dans les prires. A diffrentes reprises, jentendis prier des hommes que je savais tre de vrais chrtiens, et toujours sans mention du nom de Jsus. Rappelons-nous que nous navons pas accs auprs de Dieu, si ce nest par Jsus.

    Supposons que le plus habile des juristes anglais, connaissant fond les lois amricaines, les statuts de lIllinois et les ordonnances municipales de Chicago, vienne en Amrique; pourrait-il plaider devant nos tribunaux? Vous savez pertinemment quil ne le pourrait pas, car il ny serait pas lgalement autoris. De mme, vous et moi, nous ne sommes pas autoriss plaider la barre de Dieu; nous en sommes exclus de par le pch; nous ne pourrons parvenir Lui que par Jsus qui a accs au tribunal cleste.

    Mais, inversement, puisque nous venons au nom de Jsus, cest la mme chose que si Jsus priait, sil nous prenait par la main et nous conduisait son Pre en disant: Pre, voici un de mes amis; je Ten prie, accorde-lui ce quil Te demande, par amour pour moi. Dieu se penchera vers vous et dira: Que dsires-tu? Ce que tu demanderas, tu lobtiendras, au nom de Mon Fils. Tel est leffet dune demande faite au nom de Jsus.

    Je suis persuad, absolument persuad, et cest pourquoi jy reviens avec tant dinsistance, quen dernire analyse, si nous pouvons nous rclamer du nom de Jsus, cest quil a vaincu le prince du mal. Prier, cest rpter le nom du Vainqueur, le proclamer aux oreilles de Satan et demander la dfaite finale de ce dernier. La prire incessante au nom de Jsus provoquera la fuite de lEnnemi; contre-cur, irrit, il devra lcher prise et abandonner le champ de bataille.

    6. Origine et progrs de la foi

    La sixime et dernire condition nous est familire et, pourtant, combien elle est mal comprise. La prire doit tre faite avec foi. Remarquez, ce propos, que la foi ne consiste pas croire que Dieu peut, mais quil veut. Lhomme de foi sagenouille, prie et dit ensuite: Pre, je Te remercie. Tu exauces ma prire, je Te remercie. Il se lve et va ses occupations en se disant que la chose est sre. A travers son travail de la journe, il rpte la prire et les actions de grces, et il a la ferme assurance de son exaucement. Sil rpte sa prire, ce nest pas pour persuader Dieu, mais parce quil sait que la prire est une force dcisive dans la lutte spirituelle et que chaque prire est une blessure nouvelle au front de lennemi.

    Daucuns diront: Ne poussez-vous pas les choses lextrme? Pouvons-nous tous avoir une foi si grande? Pouvons-nous nous forcer croire? Cette question rvle une erreur que commettent beaucoup de personnes des plus srieuses. Non, assurment, nous naurons pas tous une foi si parfaite; cela ne fait aucun doute et la raison en est fort simple donner. La foi qui croit que Dieu fera ce quon Lui demande ne nat pas en un jour; elle ne nat pas non plus dans le tumulte de la rue, ni dans le brouhaha de la foule. Voulez-vous savoir quelle est son origine? Elle se manifeste et se dveloppe dans le cur de tout homme qui a mis part, chaque jour, quelques instants pour les vivre avec Dieu et couter ce que Sa Sagesse lui rvle; le rsultat de tels entretiens est la conviction que Dieu exauce toutes les prires que lon se sent press de lui adresser.

    Cette foi possde quatre qualits. Elle est intelligente;  elle dcouvre ce que Dieu veut. La foi nest jamais loppos de la raison; seulement, parfois, elle la dpasse. Secondement, elle est obissante;  elle adapte sa vie la volont de Dieu. De temps autre, il y a quelques heurts, mais la foi les surmonte. En troisime lieu, elle est attentive;  je dis attentive, en pensant au sens original de ce mot, cest--dire dirige, tendue vers un but. Elle est enfin persvrante;  elle sattache son but et scrie: Que nul ne se dcourage! Revenons la charge, sept fois et soixante-dix fois sept fois. Connaissant la volont de Dieu, sachant quelle ne change pas, la foi explique les retards et les lenteurs par la prsence dune troisime personne, lEnnemi, et elle est persuade que cette rsistance opinitre sera brise au nom du Vainqueur et que le diable laissera bientt le champ libre.

CHAPITRE III

Pour prier, il faut savoir couter

    1. Une oreille exerce

    Dans la prire, loreille est un organe capital; son importance est gale celle de la langue, mais elle doit nanmoins tre cite en premier. Loreille est en effet le chemin qui conduit la langue. Lenfant entend avant de parler. Lart de la parole suppose une priode o on a d couter. La preuve en est que, chez tout tre normal, le langage dpend uniquement de loue. Telle est la mthode quemploie la nature. Lesprit se dveloppe surtout par loreille et par les yeux; il sexprime et saffirme par la langue. Ce que loreille laisse pntrer, lesprit le travaille et la langue le fait connatre.

    Cest lordre que nous trouvons dans le passage prophtique du chapitre 50 du Livre dEsae: Le Seigneur, lEternel ma donn une langue exerce... Chaque matin, il veille mon oreille pour que jcoute comme coutent des disciples. {Esa 50:4} Loreille est donc veille pour que la langue puisse apprendre parler, et si beaucoup dentre nous nont pas une langue exerce, cest quils nont pas fourni Dieu loccasion dveiller leur oreille.

    Il est frappant de voir que les hommes qui ont t le plus puissants par la prire taient aussi des hommes qui connaissaient Dieu intimement. Ils furent particulirement sensibles Sa volont et frapps de respect devant Son amour et Sa grandeur. LAncien Testament nous offre trois types dhommes de Dieu qui furent spcialement des hommes de prire. Jrmie nous dit que lorsque Dieu lui parla de lextrme perversit du peuple juif; il ajouta ces mots: Quand Mose et Samuel se prsenteraient devant moi, je ne serais pas favorable ce peuple.Lorsque Jacques cherche pour les Juifs disperss un type dhomme de prire, il parle dElie et dun moment spcial de sa carrire, la prire sur le Mont Carmel. Mose, Samuel, Elie sont les trois grands hommes qui apparurent dans les grandes crises Je lhistoire du peuple dIsral. Mose fut aprs Dieu le crateur de la nation lue; cest lui qui la forma. Samuel en fut le patient pdagogue; il introduisit dans la vie nationale un nouvel ordre de choses. Elie en fut le guide svre et rigide lorsque le culte national de Jhovah tait prs dtre annihil. Ces trois hommes: le crateur, le pdagogue, le guide occupent une place prdominante dans lhistoire, comme hommes de prire.

    Rien nest intressant comme de les voir tous trois couter la voix de Dieu. Leurs oreilles furent exerces trs tt et trs longuement, jusqu ce quelles fussent extraordinairement sensibles la parole de lEternel. Il semble mme que Dieu ait pris une peine toute spciale former le premier de ces hommes, ce gant de lhistoire, le plus grand juriste quait connu lunivers. Son ducation passa par deux phases distinctes. Il y eut tout dabord ces quarante ans de solitude dans le dsert, seul avec les brebis, seul avec les toiles, seul avec Dieu. Son oreille tait exerce par le silence. Il tait spar et isol du bruit, du tumulte de la vie gyptienne. Comme la voix de Dieu est silencieuse, et combien peu sont capables dendurer ce silence! Cest dans le silence que Dieu parle loreille intrieure.

Lutte pour obtenir le silence en ton me,

Le silence parfait que ton Dieu te rclame

Avant de te parler, silence intrieur,

Salutaire et propice.

Oui, lutte avec ardeur

Pour touffer la voix de tes vaines penses,

De tes impressions imparfaites et fausses;

Que tout se taise en toi devant sa Majest.

Tu connatras vraiment quelle est sa volont

Dans le recueillement, et tu pourras sans crainte,

Ayant ou sa voix, sa voix divine et sainte,

Obir dun cur simple sa parfaite loi

Et laccomplir avec foi. (Traduit de Longfellow.)

    Un artiste dune certaine rputation demanda un de ses amis de venir chez lui examiner une peinture quil venait de terminer. Lami vint lheure fixe, fut introduit par un serviteur dans une chambre tout fait obscure et laiss l. Trs surpris, il attendit nanmoins tranquillement la suite des vnements. Au bout denviron quinze minutes, le peintre le rejoignit dans cette pice et le salua cordialement, puis tous deux gagnrent latelier o se trouvait la peinture. Luvre fut trs admire. Avant de se sparer, lartiste dit en riant son hte: Je suppose que vous avez d trouver trange davoir t laiss si longtemps seul dans cette chambre obscure.En effet, lui rpondit-il.Voici lexplication! Je savais que si vous pntriez dans moi atelier avec lclat de la rue dans vos yeux, vous ne pourriez apprcier le fin coloris du tableau, et cest pourquoi je vous ai laiss dans lobscurit, attendant que vos yeux se soient reposs.

    Le premier stage de Mose eut pour but, de larracher au tumulte de la vie, de lui donner ce repos qui le rendit capable dentendre les accents calmes et doux de la voix de Dieu. Pour devenir habile dans la prire, il devait passer quelques semaines lcole de Dieu, dans les dserts de lArabie.

    Puis vint le second stage; ces quarante annes furent suivies de quarante jours et de quarante nuits passs couter la voix de Dieu qui parlait, l-haut, sur la montagne. Cette preuve fit de lui un intercesseur hors ligne.

    Samuel passa lcole du silence plus tt que Mose. Encore enfant, avant que ses oreilles fussent remplies du bruit de la terre, il fut prpar entendre la voix de Dieu, et la nation juive apprit bien vite quelle possdait un homme qui Dieu parlait. Le cur des enfants souvre naturellement la voix divine; ils entendent facilement, et ils comprennent facilement. Ils sont accessibles la voix dEn-Haut. Oh! si nous pouvions garder le cur de nos enfants ouvert la parole divine et habituer leurs oreilles cette voix qui vient du Ciel!

    Nous savons peu de chose du troisime de ces intercesseurs; il ne nous est connu que par les quelques vnements importants dans lesquels il figure. La scne qui se termine au Mont Carmel et o les cluses des cieux souvrirent sur une terre assoiffe est celle qui nous est raconte avec le plus de dtails. Remarquons ce propos que ce chapitre XVIII du premier livre des Rois, qui nous parle du conflit du Carmel, commence par un message de Dieu Elie... La parole de lEternel fut ainsi adresse Elie... Je ferai tomber de la pluie sur la face du sol. Cette promesse explique la prire que le prophte adresse lEternel; elle explique aussi son attente pendant laquelle il envoya, par sept fois, son serviteur regarder du ct de la mer si la pluie arrivait. Elie entendit tout dabord la voix de Dieu; il pria alors avec insistance et enfin il leva les yeux vers les cieux pour voir le rsultat dont il tait certain. La voix de Dieu, ensuite la voix de lhomme, tel est lordre normal dans le domaine de la prire. La mise en pratique de cet ordre donnera toujours des rsultats admirables.

    2. Par la Bible, vers Dieu

    Il sagit donc dexercer notre oreille intrieure; nous y parviendrons, une fois lextrme jeunesse passe, par lintermdiaire des yeux. Ce que Dieu a dit dautres a t crit pour nous. Nous entendons par nos yeux; lil ouvre le chemin de loreille intrieure. Dieu se rvle dans son Livre; Il Sy rvle maintenant encore et, par lui, Il nous parle. Toute la question est l: apprendre a connatre Dieu. Il se manifeste nous par Ses propres paroles et par celles de Ses messagers. Il se manifeste galement par Son action parmi les hommes. Chaque fait, chaque exprience que nous trouvons dans la Bible refltent limage de Dieu; cest par elle que nous pouvons le voir.

    Il faut tudier la Bible, non pour elle-mme, mais pour y trouver la connaissance de Dieu. Le but de cette lecture est non pas la Bible, mais Dieu rvl en elle. Tel ira lUniversit et suivra des cours sur la Bible; il augmentera ses connaissances, enrichira son vocabulaire, mais il pourra retirer de cette tude les ides les plus errones sur Dieu. Tel autre suivra des cours de droit, tudiera les codes du premier des juristes; il obtiendra une comprhension claire et nette des actes de Mose, mais, malgr tout, il pourra rester parfaitement ignorant de la nature de Dieu.

    Une autre personne pourra se rendre une cole biblique, y devenir capable danalyser et de synthtiser, desquisser le plan de telle ou telle partie de la Bible, dexposer le contenu de divers chapitres; bref, elle pourra possder toute une connaissance prcieuse et indispensable et nanmoins tre incapable de comprendre Dieu, de comprendre Son amour et Sa volont admirables. Ce nest pas le Livre que nous devons apprendre, mais Dieu par le Livre; ce nest pas la vrit que nous devons saisir, mais, par lintermdiaire de la vrit, Dieu lui-mme, qui est la Vrit.

    Nous trouvons dans 2Sa 23:9-10, un rcit extraordinaire propos dun des vaillants guerriers de David. Il y eut un jour une attaque soudaine des Philistins contre le camp isralite. Les Philistins taient lennemi hrditaire; le seul mot de Philistin frappait de terreur les Hbreux. Or, tous les hommes darmes taient absents. Seul, cet homme tait l. Tranquillement et rapidement il saisit son pe et frappa en tous sens: en haut, en bas, gauche, droite; il fit terrible besogne, si bien que lennemi tourna les talons et senfuit. Et, dtail curieux, les muscles de la main du hros devinrent si raides quelle resta attache la poigne de lpe. Lhomme et lpe ne faisaient quun dans ce combat singulier contre lennemi hrditaire. Quand nous, notre tour, nous serons tellement pntrs par la Bible et par lEsprit qui est en elle et la vivifie, que ceux qui nous entourent ne pourront pas faire la dmarcation entre lhomme et lEsprit de Dieu qui est dans lhomme, alors nous obtiendrons dEn-Haut le pouvoir surhumain de la prire pour mettre en fuite lennemi. Dieu et lhomme ne formeront quun dans laction contre le mal.

    3. Illumin par lEsprit

    Je dsire donner quelques simples conseils en vue de ltude de la Bible, et, ce faisant, montrer comment elle mne Dieu. Ceci nous permettra de revenir sur des sujets dj traits, car une partie de ce qui va suivre a dj t expose, sous un angle diffrent, il est vrai. Insistons tout dabord sur la notion du temps. Nous devons mettre part au moins une demi-heure par jour quand lesprit est encore frais. Un esprit fatigu ne saisit pas facilement les choses. Il faut persister, persvrer dans cette lecture et garder lesprit en repos et labri de toute distraction.

    Ce temps, de plus, devrait tre consacr la Bible elle-mme. Si on consulte ou si on lit dautres livres, ce qui est parfaitement lgitime, que cela soit aprs la lecture de la Bible. Laissez Dieu vous parler directement plutt que par lintermdiaire de quelquun dautre. Abandonnez-vous tout dabord Lui; donnez au Livre par excellence la premire place sur votre table, et donnez aux autres livres la seconde place.

    De plus, lisez dans un esprit de prire, car cest dans cet esprit que nous apprenons prier. LEcriture ne rvle pas sa douceur et sa force lhomme intelligent, mais uniquement lhomme clair par lEsprit. Ce qui nous ouvrira les portes de la vraie connaissance, ce sont nos facults mentales naturelles illumines par la claire lumire du Saint-Esprit. Jai parfois demand la signification de certains passages un savant clair. Il mexpliquait les tournures orientales, faisait dhabiles distinctions philologiques, me donnait la traduction la plus exacte; mais il ne semblait pas connatre le simple sens spirituel des mots que nous discutions. Jai pos les mmes questions un vieux serviteur de Dieu; il navait aucune ide de la langue hbraque, mais il sentait immdiatement la profonde vrit spirituelle que les mots en question renfermaient.

    Nos connaissances, si grandes et si dveloppes soient-elles, seront toujours augmentes et approfondies par lEsprit qui inspira les Saintes Ecritures.

    Lisez avec rflexion. La lecture attentive est un art qui semble se perdre. Les journaux sont si nombreux, la littrature si abondante, que nous sommes devenus une race claire, mais non une race rflchie. Le courant de nos connaissances est souvent trs large; hlas! il na pas de profondeur. Luttez contre ce manque de profondeurs contre cette superficialit. Efforcez-vous de lire avec rflexion. La Bible renferme un mot trs suggestif pour dsigner ce genre de lecture: mditer. Mditer, cest rpter une chose dans son esprit, la tourner en tous sens, la digrer.

    Il est tonnant de remarquer combien daliment la Bible fournit la mditation, en comparaison dautres livres. On peut mditer les uvres de Tennyson, de Browning, de Longfellow; mais, soit dit sans vouloir diminuer ces nobles potes qui sont mes auteurs favoris, ils ne nous donnent pas cette nourriture riche et abondante que nous trouvons dans la Bible. Le Livre de Dieu est unique par sa richesse et par sa fracheur. Il nous arrive de lire un passage pour lacentime lois et de dcouvrir un nouveau sens que nous navions pas souponn.

Un autre conseil plus facile donner qu suivre est de lire avec obissance, cest--dire, lorsque la vrit en appelle notre conscience, de la laisser transformer notre vie et nos habitudes.

    Obissez la lumire et vous laugmenterez; rsistez-lui, vous amnerez la nuit.Qui donc nous aidera choisir notre voiesi nous perdons lamour de la lumire. (Traduit de Joseph Cook)

    Jsus nous donne la loi de la connaissance dans ses fameuses paroles: Si quelquun veut faire la volont de Dieu, il connatra si ma doctrine est de Dieu. {Jn 7:17} Si nous faisons ce que nous savons devoir faire, notre connaissance en sera accrue. Si nous savons ce que nous avons faire, mais que nous hsitions et refusions dobir, notre vue intrieure sobscurcira et disparatra; le sens de ce qui est droit smoussera et se perdra. Lobissance la vrit, voil ce qui clairera toujours notre esprit.

    4. Une rapide lecture

    Il faut avoir un plan lorsquon lit, car, grce une ide directrice, les divers moments que nous passerons lire la Parole seront groups en un tout. Ayons un bon plan et tenons-nous-y. Il vaut mieux en avoir un assez bon, mais scrupuleusement suivi, quun excellent, mais appliqu sans rgularit. Les nombreuses mthodes pour tudier la Bible peuvent tre groupes sous trois rubriques gnrales: lecture rapide travers toute lEcriture, tude limite, tude textuelle.

    Nous faisons tous, dune manire plus ou moins approfondie, une tude textuelle de la Bible; par exemple, en mditant une phrase ou un verset, pour en exprimer la vraie et profonde signification. De mme, nous nous livrons tous ltude limite de telle ou telle partie des Saintes Ecritures quand nous tudions un caractre ou recherchons certains passages concernant le mme sujet. Le nom le plus prtentieux donn ces tudes est Thologie biblique; elles consistent trouver et ordonner tout ce que la Bible nous enseigne sur nimporte quel sujet.

    Pour ma part, je tiens affirmer que la lecture rapide ou cursive est la base de toute tude biblique; cest la mthode simple, naturelle, scientifique. Elle est la porte de toutes les intelligences. Je crus un temps quelle convenait surtout aux tudiants, mais ctait une erreur; jai actuellement la ferme conviction que cest la mthode par excellence et quelle sapplique tout et tous. Elle est la base de toutes les tudes qui ont pour but de faire connatre le Saint Livre, et cest elle qui nous donne la plus complte comprhension possible ici-bas de notre Crateur.

    Jentends par lecture cursive une lecture rapide, insouciante des divisions en versets, chapitres ou livres; une lecture comme le serait celle dune histoire telle que: Le Sige de Pkin ou Histoire dun amour inavou. La Bible videmment inspire un respect tout autre; mais ce que je veux dire, cest quil faut la lire avec la mme mthode que celle employe pour lire le premier livre venu; la lire pour savoir ce quelle renferme. Lu de cette manire, aucun livre nest plus fascinant que la Bible.

Commencez tout dabord par la Gense et parcourez-la rapidement, en gros. Nessayez pas de tout comprendre; vous ne le pourriez pas. Ne vous en inquitez pas pour le moment, mais allez de lavant. Nessayez pas de vous souvenir de tout; ny songez pas, mais retenez ce que vous pourrez; vous serez tonns de ce dont vous vous souviendrez. Eh une demi-heure, vous lirez de dix vingt pages, et, la fois suivante, vous recommencerez o vous en serez rests. Il suffira de quelques jours pour lire le livre de la Gense en entier; tout dpendra des dispositions o vous serez et de votre manire de lire plus ou moins rapide. Toute la Bible est comprise dans la Gense; cest un livre admirable, fascinant. Rien que par ses anecdotes, ses intrigues, la rapidit de laction, la beaut du langage, il dpasse infiniment tout livre humain.

    Passons maintenant lExode; cest un livre semblable au prcdent. Continuons notre lecture rapide, et abordons le Lvitique. Il ne faut pas essayer de le comprendre la premire fois; vous ny russirez pas mme la centime, mais il est ais den grouper le contenu. Ainsi, des chapitres parlent des offrandes, dautres de la loi des offrandes; survient ensuite un incident; puis arrivent les prescriptions hyginiques, et ainsi de suite jusqu la fin du livre. A travers toutes ces pages, nous apercevons limage de Dieu et cest l le point principal. Une seconde opration de cette lecture rapide consiste runir les diffrentes parties. Vous savez que lordre biblique nest pas tout fait chronologique; les livres de la Bible ont plutt t classs daprs la matire quils traitent. Nos esprits sont presque esclaves de lordre chronologique; ceux des Orientaux en usaient plus librement. Ouvrez votre Bible la fin dEsther et ensuite la fin de Malachie. De la Gense Esther, cest la partie historique, tandis que la deuxime partie est potique et prophtique. Il y a videmment de lhistoire dans la partie prophtique et des prophties, de la posie dans la partie historique; mais, en gros, la premire partie est historique, la deuxime, potique et prophtique. Les deux parties forment un tout, nanmoins; la deuxime peut sintercaler dans la premire; elle en fut retire et mise part lorsquon prfra la classification par genres la classification chronologique.

    La deuxime opration consistera runir, introduire la posie et la prophtie dans lhistoire. Faites ce travail par vous-mmes, comme sil navait jamais t fait. En somme, il a t fait mieux que vous ne pourrez le faire, car vous nviterez videmment pas certaines erreurs; srement vous serez embarrasss devant certains passages et ne saurez o les situer. Quimporte! Le but est de se pntrer de la Bible, den faire une partie de vous-mmes; elle doit devenir os de vos os, chair de votre chair, mentalement et spirituellement; il faut boire sa source. De ce travail sortira une nouvelle vision de Dieu, qui transformera radicalement le lecteur pieux. Cherchez obtenir le sens historique et, pour cela, prenez le recul suffisant pour juger ce que tel ou tel fait signifiait pour ces gens, lorsquil se produisit.

    Continuez cette tude travers le Nouveau Testament, mais sans essayer de faire des quatre Evangiles un seul rcit, en en fondant tous les dtails. Efforcez-vous plutt dobtenir une claire vision de lactivit de Jsus pendant ces quelques annes, comme nous la font connatre les quatre vanglistes. Introduisez, aussi bien que vous pourrez, les lettres de Paul dans le livre des Actes. Vous vous rendez compte que cette mthode nest pas employer un mois, ni mme une anne, mais des annes. Ltude limite et ltude textuelle dcouleront naturellement de cette rapide lecture. Et, pendant que vous ferez connaissance avec ce livre classique merveilleux, vous aurez sous les yeux le style le plus magique que nous possdions, et mieux encore, vous introduirez dans vos mes une conception de Dieu nouvelle, large, profonde et touchante.

    5. La Bible, miroir qui reflte lamour de Dieu

    Il est vraiment stupfiant de voir quelle lumire projettent certaines pages quand elles sont rintroduites dans leur place historique. Nous en avons un exemple Ps 3:6:

    Je me couche et je mendors;

    Je me rveille, car lEternel est mon soutien;

    Jai reu mon instruction religieuse dans une vieille Eglise o lon chantait ce Psaume.

    Je le savais par cur. Enfant, je supposais que la nuit tait venue et que David dormait; il avait fait sa prire, tait all au lit, et dormait alors paisiblement. Voil ce que ces versets me suggraient. Mais la premire fois que je fis cette lecture rapide travers la Bible, mes yeux furent attirs, comme le furent videmment souvent les vtres, par len-tte du Psaume:Psaume de David loccasion de sa fuite devant Absalom, son fils.

    Sans tarder, je revins au 2 livre de Samuel pour trouver le rcit mentionn. Voici le tableau que jobtins: David, un vieillard cheveux blancs, nu-pieds, est accompagn de quelques serviteurs fidles, et cest Absalom, son fils favori, qui vient la tte des forces nationales pour semparer du royaume et de la vie de son propre pre. Cette nuit-l, le grand roi coucha sur la terre nue, ayant pour toit le ciel toile, et pendant quil cherchait le sommeil, il pouvait presque entendre la marche pesante de larme qui, passant sur les collines, guettait son trne et sa vie.

    Une question maintenant: Pensez-vous que vous auriez beaucoup dormi cette nuit-l? Plus dun, srement, serait rest tristement veill et aurait pens toute la nuit: Pauvre homme que je suis, chass de mon royaume, de ma maison, par mon propre fils que jai aim plus que ma vie!

    -Avouons que nous naurions gure dormi.

    David, lui, parlant dans la suite de cette nuit dangoisse, crivit ces mots:

    Je me couche et je mendors;  

    Je me rveille (sous-entendu raffermi), car lEternel est mon soutien.

    Eh lisant ces vers, ma pense fut alors celle-ci: Je naurai plus dinsomnies, car je me confierai en Dieu.

    Vous voyez par cet exemple quelle leon de confiance en Dieu dcoule de ce psaume lorsquon le remet sa place historique. Cette leon, que je nai jamais oublie, me raffermit et me fortifia. Quel Dieu que Celui qui peut donner le sommeil dans de telles circonstances!

    Nous avons une autre illustration de la mme ide dans le Nouveau Testament. A la fin de lptre de Paul aux Philippiens, nous voyons que Paul est couch dans la cellule humide dune prison. Il fait nuit, il fait froid. Le dos du prisonnier saigne des coups quil a reus; ses articulations sont douloureuses et ses pieds sont meurtris par les fers.

    Mais ce nest l quune partie des circonstances historiques de cette ptre; voici maintenant le reste: Paul est prisonnier Rome. Sil essaie de reposer son corps en changeant de position, une chane fixe ses chevilles lui rappelle le soldat couch ses cts. Veut-il crire un dernier mot damour ses vieux et fidles amis, une chane retient son poignet, et cest avec mille peines quil russit crire cette lettre aux Philippiens qui rsonne encore du bruit des chanes.

    Quel est le mot qui, dans cette ptre, reviendra plus souvent que tout autre?Patience? Assurment il serait de saison.Endurance? Ce mot serait encore mieux appropri. Toutefois, ce nest ni lun ni lautre, mais bien plutt un mot en contraste absolu avec le dcor qui entourait Paul. La souffrance est comme un nuage qui ne sert qu faire ressortir lclat du soleil.Joie, rjouissance, allgresse! Voil le cantique qui remplit cette lettre aux Philippiens. Quel Matre admirable que ce Jsus qui inspire de telles paroles son disciple souffrant cause de sa fidlit!

    Chaque fait, chaque vnement que rapportent ces pages est un miroir qui reflte la perfection de lamour divin.

Parole de Dieu, tu es mon appui

Pendant mon long plerinage.

Avec le sceptre dor, je puis

Marcher en paix dans mon voyage:

Tout ce que mon Sauveur a dit

Est immuable comme Lui.

Parole du Pre, tu es mon appui,

Toi qui es si douce et si pure

Et comme un invincible abri.

Tu es trs forte et trs sre,

Toi, la charte de mon salut,

Scurit de tout lu.

Sainte Parole, tu es mon appui;

La vrit, seule ternelle

Tu demeures quand tout finit,

Et ta beaut est immortelle.

Jamais tu ne me tromperas

Et toujours tu me soutiendras! (Daprs Frances Ridley Havergal.)

CHAPITRE IV

La volont de Dieu et la prire

    1. Il vint chez les Siens

    Le but de la prire, cest laccomplissement de la volont de Dieu. Mais combien Dieu est tranger dans Son propre monde! Nul nest plus calomni que Lui. Il descend vers Ses cratures, mais elles Le laissent heurter la porte, tel un plerin, le bton la main, et elles Lobservent avec mfiance. Certains dentre nous se refusent Lui confier pleinement leur vie et si la vraie raison en tait connue, on dcouvrirait quils ont peur de Dieu. Ils ont peur quil introduise quelque souffrance dans leur vie, quelque difficult sur leur chemin. Sils ont peur de Lui, cest tout simplement quils ne Le connaissent pas. La prire qui sortit du cur de Jsus, en cette nuit tragique o il veillait avec les onze, tait celle-ci: Quils Te connaissent, Toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoy, Jsus-Christ.. {Jn 17:3}

    Pour comprendre la volont de Dieu, il faut comprendre Son caractre, il faut Le connatre Lui-mme.

    Il y a cinq mots que nous employons tous les jours et qui peuvent nous aider nous faire une ide de Dieu; ce sont des mots familiers, dun usage constant. Pre est le premier. Le pre, cest la force, mais la force dans lamour. Un pre fait des plans pour les siens; il pourvoit leurs besoins; il les protge. Rflchissez au meilleur pre que vous ayez connu; revoyez-le en pense et dites-vous que Dieu est un pre, mais quil est suprieur au plus parfait des pres que vous puissiez imaginer; et que sa volont pour votre vie (je ne parle pas ici du ciel, ni de vos mes) sa volont pour votre vie, ici-bas sur la terre, est la volont dun pre pour ceux quil chrit.

Le deuxime mot est un mot encore plus beau; cest le mot de Mre. Si le pre incarne la force, la mre incarne lamour, un amour grand, patient, tendre et durable. Que ne ferait-elle pas pour lenfant quelle aime? Pour quil vnt au monde, elle descendit dans la valle des larmes, et elle le fit avec joie, les yeux brillant de la lumire de lamour. Et cette preuve, elle la subirait nouveau pour sauver la vie de son enfant. Voil la mre! Pensez maintenant la mre la plus parfaite que vous connaissiezces mots voquent dans ma mmoire des souvenirs bnispuis souvenez-vous de ceci: Dieu est une mre, seulement Il est plus parfait que la plus parfaite des mres.

    Les passages bibliques assimilant Dieu une mre sont nombreux. Sous ses ailes est une image fminine. La poule rassemble ses poussins sous ses ailes pour les rchauffer et les protger. Il est vrai que le mot mre nest pas employ dans la Bible pour Dieu. Je suppose que cela tient ce que lexpression Dieu le Pre comprend aussi les qualits de la mre. Toute la force du pre, tout le splendide amour de la mre, sont compris dans le mot de Pre quand il sagit de Dieu. Et sa volont notre gard est la volont dune mre, la volont dune mre prudente et aimante pour son enfant bien-aim.

    Ami est le troisime mot; et par l je nentends pas le terme quaimablement et par politesse on applique toutes sortes de connaissances. Tupper dit que nous qualifions damis tous ceux que nous ne considrons pas comme nos ennemis. Je prends le mot en un sens plus exact, plus profond. Lami cest celui qui vous aime dune affection dsintresse, qui sattache fermement vous, sans penser provoquer de la reconnaissance ou mme se faire aimer en retour. Les Anglais ont un dicton qui dit: Vous pouvez remplir lglise de vos connaissances, mais vous ne remplirez pas les siges de lestrade de vos amis. Si vous russissez avoir dans votre vie un ou deux vrais amis, vous tes assurment trs riches. Pensez maintenant au meilleur ami possible, puis mditez cette parole: Dieu est un ami, seulement il est meilleur que le meilleur des amis que vous puissiez connatre, et le plan quil a conu pour votre vie correspond en grandeur la grandeur de son amiti.

    Jhsite employer le quatrime mot, et pourtant je puis le faire sans crainte dtre mal compris. Mon hsitation provient de ce que le mot et ce quil implique ont souvent un sens trop superficiel, et cela mme dans la socit srieuse: cest le mot de fianc. Il voqu pour moi deux personnes qui se rencontrent et qui, peu peu, passent dune simple connaissance lamiti la plus profonde; cette amiti, son tour, se transforme en un sentiment plus parfait, plus sacr. Que ne ferait-il pas pour elle? Elle devient le nouveau centre de sa vie; il baise le sol que ses pieds ont foul; et elle, elle renoncera la richesse pour embrasser la pauvret, pourvu quelle puisse vivre avec lui dans les jours venir; elle quittera parents et amis et se rendra aux extrmits de la terre pour rejoindre celui quelle aime. Rappelez votre souvenir les fiancs les plus parfaits que vous connaissiez, et permettez-moi de dire avec tout le respect d Dieu: Dieu est un fianc, seulement Il est plus parfait que le plus parfait des fiancs que vous puissiez connatre, et Sa volont, Son plan pour votre vie et pour la mienne est la volont dun fianc pour celle quil chrit.

    Le cinquime mot ressemble au quatrime, mais sa signification est plus complte, plus leve; cest le mot poux. Epoux cest le mot qui dsigne les liens les plus sacrs sur terre; cest lapoge de lunion. Chez les hommes, toutefois, le mot dpoux nest pas toujours plus beau que celui damant. Quel crime! Comment lhomme ose-t-il amoindrir les plans de Dieu? Comment ose-t-il mpriser lamande et prfrer la coquille? Dans la pense de Dieu, lpoux est lamant parfait. Il est tout ce que le meilleur amant peut tre; plus encore, car il est plus tendre, plus empress, plus prvenant. Deux vies sont unies et commencent vivre une seule vie; deux volonts sont fondues en une seule; deux personnes et pourtant une seule direction; cest la dualit dans lunit. Evoquez le type le plus parfait dpoux que jamais femme de votre connaissance ait eu, puis souvenez-vous que Dieu est un poux; seulement Il est infiniment plus prvenant que le plus prvenant des poux que vous puissiez connatre, et Sa volont pour votre vie est la volont, la sollicitude dun poux pour lamie et la compagne de sa vie.

    Maintenant, que nul de vous ne choisisse un de ces mots et ne dise: Celui-l me plat. Que nul autre ne dise: Cette conception de Dieu est conforme mes ides. Nous diminuons Dieu par ltroitesse de nos ides. Il faut accepter les cinq mots, admettre le sens parfait de tous les cinq, et les unir ensuite tous pour obtenir une ide exacte de lEternel, car Il est tout cela, et plus encore.

    Vous remarquerez que Dieu est si grand, que la dfinition de ce quil est ncessite lunion de cinq qualits humaines. Cest un pre, une mre, un ami, un fianc, un poux. A lappui de cette thse je nai avanc aucun livre, aucun chapitre, aucun verset; mais vous savez que nous pourrions passer des heures ensemble lire les nombreux passages qui appuieraient mes cinq affirmations.

    La volont de Dieu notre gard, cest de raliser son plan si parfait; Sa volont pense au corps, la sant, la force corporelle, la famille et ses proccupations; elle sapplique lamiti, au choix du meilleur ami; elle comprend le travail quotidien, la vie tout entire et la totalit des vies humaines. Dieu a pens tout cela, avec amour et avec prudence.

    Une mre prudente et avise ne pense-t-elle pas aux besoins de son enfant, aux exigences et aux attentions dlicates quil rclame? Vous savez quil en est ainsi, et telle est aussi la sagesse de Dieu.

    2. Le but unique de la prire

    Le but de la prire est donc dobtenir que la volont de ce Dieu si parfait se fasse dans nos vies et sur la terre. La prire par excellence est celle-ci: Que ta volont soit faite! Elle peut tre exprime sous mille formes diverses, accompagne de mille dtails diffrents, variant selon les circonstances, mais ces cinq mots en seront toujours la base. Il ny a rien de vraiment bon auquel vous ayez pens et que Jsus nait pas dj prvu avant vous... en y ajoutant probablement quelque chose de plus.

    Sachez, en outre, quil ne sagit pas dimplorer Dieu regret et de dire, en soupirant: Ta volont soit supporte;  elle est amre, mais je dois my rsigner en qualit de chrtien. Ta volont soit supporte! Non, pas cela, je vous en prie, ce serait calomnier Dieu. Il existe chez beaucoup une croyance superficielle qui charge le Crateur dune foule daccidents et de malheurs dont Il nest pas du tout responsable; au contraire, Il dirige tous ses efforts, dans toutes les circonstances, en vue du meilleur rsultat. Ah! sil ntait pas oblig de lutter contre ces volonts ttues et fausses que Lui opposent les hommes! Avec infiniment de patience, dhabilet, de diplomatie, et aussi de succs, Il travaille sans cesse dmler lcheveau de la vie humaine embrouill par la volont do lhomme.

    Il peut tre utile de nous souvenir que Dieu a deux volonts pour nous, une suprieure, et lautre infrieure. Il prfre toujours que sa premire volont soit accomplie en nous; mais, lorsque nous natteignons pas cette hauteur, Il descend jusquau point que nous avons atteint, et l travaille avec nous. Par exemple, la premire dcision de Dieu pour Isral tait dtre lui-mme leur Roi, car cette royaut devait mettre le royaume part des autres pays. Hlas! pour le plus grand chagrin de Samuel, plus encore de Dieu, les Isralites demandrent un roi qui vct au milieu deux; et Dieu le leur donna. David le berger, le psalmiste et le roi, fut un homme selon le cur de Dieu et le Sauveur du monde descendit de la ligne davidique. Cest ainsi que Dieu travailla au niveau quIsral avait choisi et vous savez comment Il sut tirer parti des conditions quon lui faisait. Quel travail ce fut! Toutefois, lonction dun premier roi et cette succession de rois ntaient pas dans le plan original de Dieu; ce fut le rsultat dune deuxime dcision prise, parce quIsral ne voulait pas accepter la premire; Dieu fait toujours pour nous le plus quil peut faire par notre moyen.

    Le premier plan de Dieu lgard de nos corps est videmment de doter chacun de nous dun corps robuste et sain; toutefois, il faut voir beaucoup plus haut que cette question de sant. Voil pourquoi, malgr la douleur quil en ressent Lui-mme, Il permet que la faiblesse et la maladie semparent de nous, car, tant donne notre volont, les biens plus levs ne peuvent tre atteints que par la souffrance. Mais quand la volont humaine saccorde avec la volont de Dieu et quainsi une plus grande perfection peut tre obtenue, Il fait disparatre avec joie et empressement tout dsavantage physique.

    Deux causes au moins modifient la premire volont de Dieu notre gard:

    En premier lieu, notre consentement plus ou moins grand Le laisser agir librement.

    En second lieu, les circonstances particulires de la vie de chacun de nous. Chaque homme est le centre dun cercle de personnes, cercle toujours changeant; si donc nous sommes unis Dieu, Il peut parler, pour chacun de nous, ce cercle qui nous entoure. Nos expriences avec Dieu, et Sa manire dagir notre gard dans toutes les circonstances de la vie, sont un message de Sa part ceux qui sont autour de nous. Leffort de Dieu porte sur ce point: gagner des mes. Diplomate hors ligne, tacticien admirable, il a nanmoins besoin de nous pour Laider dans Son uvre. Nous devons consentir pleinement ce que Sa volont soit faite; mieux encore, nous devons tre persuads quil sait ce quil doit faire en nous et par nous dans les circonstances o nous nous trouvons, Dieu est conome; Il ne dilapide pas ses forces; Il les conserve pour le grand but quil a en vue.

    Dans certains cas daffliction, il peut y avoir de notre part une fausse soumission ce que nous supposons tre sa volont; il arrive que nous nacceptions pas tout ce quil a en vue pour nous. Dun autre ct, nous pouvons adresser Dieu, pour une chose dsirable, une prire raisonne, sur le conseil dun ami. Et par prire raisonne, jentends ltude dune dclaration de Dieu, son explication probable par un frre plus expriment, la connaissance de certains cas o un exaucement a t rclam en sappuyant sur cette dclaration, et enfin la conclusion que nous devrions faire la mme chose. Le malheur, cest que cette prire sarrte moiti chemin.

    Prier par lEsprit, au lieu de prier par le raisonnement, cest sans doute faire cette dduction logique; mais cest ensuite remettre tranquillement tout Dieu pour savoir quelle est Sa volont notre gard dans telle ou telle, circonstance et au milieu des gens quil veut atteindre par nous.

    3. LEsprit dadoption

    Il y a dans lptre aux Ro 8:26-28, un passage remarquable sur la prire et la volont de Dieu: De mme aussi lEsprit nous aide dans notre faiblesse, car nous ne savons pas ce quil nous convient de demander dans nos prires. Mais lEsprit lui-mme intercde par des soupirs inexprimables, et Celui qui sonde les curs, connat quelle est la pense de lEsprit, parce que cest selon Dieu quil intercde en faveur des saints.

    Rapprocher ces mots de ceux qui terminent le verset 15 (les versets 18 25 sont une parenthse): Vous avez reu un Esprit dadoption par lequel nous crions: Abba! Pre! Cest lEsprit qui nous fait dire: Pre; Pre, cest le cri de lenfant, cest aussi le cri de la prire: lEsprit nous aide donc prier. Notre faiblesse consiste ne pas savoir prier comme nous le devrions. Nous voulons bien prier, il nous tarde mme de le faire, cela est hors de doute, mais nous ne savons pas comment prier, lEsprit, lui le sait; il connat parfaitement la volont de Dieu; il sait ce que nous devons demander dans toutes les circonstances, et il est dans chacun de nous. Demeurant chez nous en qualit dEsprit de prire, il nous incite prier. Il nous conduit dans la solitude o nous pourrons plier les genoux dans le calme et la tranquillit. O que nous soyons, il nous pousse prier. Ses penses ne peuvent tre exprimes par nos lvres, car elles ne correspondent pas notre manire de penser. LEsprit prie avec une intensit quaucun langage ne peut exprimer. Et Celui qui sonde les curs sait parfaitement ce que pense cet Esprit qui est en nous; Il comprend sa prire silencieuse, car Lui et lEsprit sont un. Il reconnat Ses propres intentions et Ses propres plans quand ils sont exprims sur la terre, dans un homme et par Son propre Esprit.

    LEsprit dadoption, qui habite en nous, exprime dans ses prires la volont de Dieu. Il nous enseigne la volont de Dieu; il nous apprend la formuler; il formule en nous cette volont divine. Il cherche exprimer en nous la volont de Dieu, cest--dire prier pour le plan que Dieu a conu, avant que nous ayons clairement compris nous-mmes quelle est cette volont.

    Il faut veiller ce que notre me soit sensible aux directions de lEsprit qui rside en nous; et quand vient cet appel intrieur la prire, lui obir avec fidlit. Que nous sachions ou non ce que notre demande doit tre, prions sans cesse, pendant que lEsprit se sert de nous pour prsenter sa propre prire.

    La meilleure prire que nous puissions souvent prsenter pour un de nos amis ou pour un sujet qui nous proccupe, est de dire, aprs avoir expos le cas aussi bien que nous le pouvons: Saint-Esprit, formule en moi ce que le Pre dsire voir saccomplir. Pre, ce que lEsprit formule en moi, cest l ma prire au nom de Jsus.

    Que ta volont, ce que Tu dsires, ce que Tu penses, puisse tre fait compltement ici-bas.

    4. Comment connatre la volont de Dieu

    Nous devrions faire une tude de la volont de Dieu; nous devrions nous rendre habiles la connatre. Plus nous connatrons notre Pre et plus aussi nous aurons lintelligence de Sa volont.

    On peut dire que Dieu a deux volonts pour chacun dentre nous, ou mieux que sa volont se compose de deux parties; il veut, dune part, nous sauver; de lautre, diriger notre vie. La Bible nous montre quil veut notre salut: que nous serons sauvs, sanctifis, purifis, et que bientt nous serons glorifis en Sa prsence. Dautre part, pour y parvenir, Il a conu un plan particulier pour chacun dentre nous. Il a trac le plan de chacune de nos vies; aussi lambition la plus haute que nous puissions avoir est datteindre, de saisir ce plan. Il nous le rvle petit petit, au fur et mesure de nos; besoins. Lorsquon Lui consacre sa vie, Il! rvle quel service Il attend, o et quand Il lattend; dans la suite, Il rend facile chaque pas en avant.

    La connaissance de Sa volont repose sur trois conditions, simples, il est vrai, mais essentielles. Nous devons tre en communion avec Lui pour que nous soyons prts Lentendre. Nous devons nous rjouir de faire Sa volont, parce que cest Sa volont. Il faut insister surtout sur la dernire condition. Aprs avoir observ les deux premires, beaucoup sont arrts par la troisime. La voici: Sa parole doit avoir la libert de discipliner le jugement que nous portons sur Lui et sur Sa volont.

    Plusieurs hsitent devant les deux premires conditions; mais un plus grand nombre encore, malgr leur bonne volont, sont arrts et dmonts par la troisime: cest quils nont pas un jugement disciplin sur Dieu et Sa volont. Si nous nous imprgnions, de la Bible dans un esprit de prire, notre jugement en ressortirait plus lucide. Il nous faut acqurir une ide gnrale de la pense de Dieu, respirer Dieu Lui-mme en lisant Sa parole. Dieu gurira dans son jugement et dans ses penses lhomme faible, cest--dire celui qui consent abdiquer devant une volont plus forte. {Ps 25:9}

    Cest le point de vue de Jean dans le passage fameux de la premire ptre: {1Jn 5:14-15} Nous avons auprs de lui cette assurance que, si nous demandons quelque chose selon Sa volont, Il nous coute. Et, si nous savons quil nous coute, quelque chose que nous demandions, nous le savons, parce que nous obtenons ce que nous lui avons demand. Ces mots concordent absolument avec ceux de lptre aux Romains que nous citions plus haut.

    La premire condition est donc dapprendre connatre la volont du Crateur sur le sujet qui nous occupe. Ceci obtenu, nous allons de lavant et prions avec hardiesse; car, si Dieu dsire quelque chose et que nous le dsirions aussi, notre union est assure dun complet succs.

CHAPITRE V

Pouvons-nous prier avec assurance pour la conversion de ceux que nous aimons?

    1. Comment Dieu pntre dans une demeure

    Dieu dsire ardemment racheter le monde. Dans ce but, Il a donn son propre Fils, Son unique, quoique le traitement subi par ce dernier dchirt son cur de Pre. Dans ce but galement, Il a envoy le Saint-Esprit pour accomplir dans les hommes ce que le Fils avait fait pour eux. Dans ce but encore, Il a confi lhomme la plus grande de toutes les forces, la prire, pour que nous puissions devenir ses associs.

    Toujours dans le mme but, Il a tabli les liens de parent et damiti. Il gagne des hommes par les hommes. Lhomme est le point darrive et il est aussi le chemin; il est le but vis et il est le moyen dapproche, soit du ct de Dieu, soit du ct de Satan. Dieu ne veut pas pntrer dans le cur de lhomme sans son consentement et Satan ne le peut pas, comme nous lavons dit plus haut. Dieu dsirerait atteindre les hommes par les hommes et Satan ne peut pas les atteindre autrement. Ainsi Dieu nous a unis par le lien le plus fort qui unisse les hommes, le lien de lamour, afin que nous puissions exercer une influence rciproque les uns sur les autres. La parent nous lie particulirement lhomme et la terre.

    Quelques personnes srieuses et particulirement dlicates mont demand parfois sil ntait pas gostes de sinquiter spcialement de ses propres parents, ceux pour lesquels le cur smeut le plus vite de tendresse et pour lesquels les prires montent plus tendres, plus ardentes et plus frquentes.Mais si vous ne priez pas pour eux, qui donc le fera? Qui peut prier pour eux avec une ferveur aussi convaincue, aussi persistante que vous?Cest justement dans ce but que Dieu nous a tablis dans des relations daffection personnelle et de parent. Il nous unit les uns aux autres par les liens de lamour pour que nous puissions nous proccuper les uns des autres. Ny et-il quune seule personne dans une demeure en contact avec Dieu, cette seule personne devient la porte par laquelle Il pntrera dans la famille entire.

    Toute relation cre une possibilit, et toute possibilit implique une responsabilit. Plus troites sont les relations, plus grandes sont aussi les possibilits et partant la responsabilit.

    Le dsintressement nexige pas que lon sexclue du salut soi-mme et sa parent; il demande que lon se mette sa vraie place. Lhumilit ne consiste pas se torturer, mais soublier en pensant aux autres. Non seulement il nest pas goste de prier pour les siens, mais encore cette prire fait partie du plan de Dieu. Nous sommes responsables surtout de ceux qui nous tiennent de prs.

    2. Lesclavage dun homme libre

    La question de savoir si nous pouvons prier avec assurance pour la conversion de ceux que nous aimons est une de celles que lon pose le plus souvent; il ny en a pas de plus capable de nous mouvoir. Je me souviens davoir parl un jour dans une glise, sur ce sujet, de faon plutt affirmative. A la fin de la runion, une dame que je savais tre instruite et cultive, et qui tait de plus une chrtienne, vint vers moi et me dit: Je ne crois pas que nous puissions prier de cette manire.Et pourquoi? lui rpondis-je. Elle se tut un instant, et lagitation quelle rprimait, mais que ses yeux et ses lvres nanmoins rvlaient, me disait quelle lutte se livrait en elle; puis, tranquillement, elle me dit: Jai un frre, ce nest pas un chrtien. Le thtre, le vin, le club, les cartes, voil sa vie. Et il se moque de moi. Je dsirerais tellement le voir se convertir, maiset ici on reconnaissait son esprit dcid et son ducation premireje ne crois pas que je puisse prier pour lui en toute franchise, car il est libre et Dieu ne veut pas sauver lhomme contre sa volont.

    Voici ce que je lui rpondis: Lhomme est libre autant quil sagit de Dieu; il est tout fait libre, voil ce quon ne cesse de rpter. Mais il est le plus esclave des tres ds quil sagit de lgosme et de lopinion. Le but de notre prire nest pas de forcer ou de restreindre la volont de lhomme; cela, jamais; mais bien plutt de laffranchir des influences dltres qui le tiraillent en tous sens. Il faut enlever de ses yeux la poussire qui les aveugle et lui rendre la vue. Une fois quil sera libre, capable de bien juger, de peser les choses sans parti pris, il est fort probable quil se servira de son jugement pour choisir le droit chemin.

    Voici quelle est la prire idale que jadresserais dans un tel cas; cest une adaptation des propres paroles de Jsus, et chacun peut loffrir Dieu en lui ajoutant les dtails quil dsire:

    Dlivre-le du mal et opre en lui Ta volont pour lui, par Ton pouvoir et pour Ta gloire, au nom de Jsus le Vainqueur.

    Cette prire sappuie sur trois passages. Tout dabord, 1Ti 2:4: Dieu notre Sauveur qui veut que tous les hommes soient sauvs. Cest l la volont de Dieu pour ceux que vous aimez. Deuximement, 2Pi 3:9: Ne voulant pas quaucun prisse, mais voulant que tous arrivent la repentance. Telle est la volont ou le dsir de Dieu pour le cas qui nous occupe en ce moment. Le troisime passage se rapporte nous qui prions; il nous dit qui peut adresser cette prire avec persvrance: Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez, et cela vous sera accord. {Jn 15:7}

    Il y a dans la deuxime ptre de Paul Timothe {2Ti 2:24-20} une dclaration qui illustre cette ide: Or il ne faut pas quun serviteur de Dieu ait des querelles; ne pas discuter, ne pas combattreil doit avoir au contraire de la condescendance pour tous, tre propre enseigner; prt et habile donner des explications, aideril doit redresser avec douceur (ou instruire) les adversaires, dans lesprance que Dieu leur donnera de se convertir la connaissance de la vrit, de revenir leur bon sens, dchapper aux piges du diable, qui sest empar deux pour les soumettre sa volont.

    Le mot dlivre, tel quil est employ par Jsus dans la prire, cache un sens des plus saisissants. Il signifie proprement arrache. Voici par exemple un homme quon emmne captif et enchan. Il aime nanmoins son ravisseur et ne se soucie nullement de sa condition. Notre prire pour lui sera ds lors: Arrache-le au Malin, et ce sauvetage aura lieu, car dj Jsus a vaincu le ravisseur.

    Il est absolument certain que nous pouvons assurer la conversion de ceux qui nous tiennent de prs, par cette prire. Faite au nom de Jsus, elle chasse lennemi du champ de bataille quoffre la volont de lhomme et elle laisse celui-ci libre de choisir sa voie.

    Notons une exception, une seule. Dans certains cas extrmes, il arrive que nous ne puissions nous servir dune telle prire; mais cest qualors lesprit de prire sest retir. De tels cas, il est vrai, sont rares; ce sont des cas extrmes, et, quand ils se prsentent, il ny a aucun doute avoir leur gard; la situation est claire.

    Je ne puis mempcher dexprimer enfin la convictionje le fais contre mon gr et prfrerais pouvoir me tairequil y a des gens sur cette pauvre terre qui sont en tat de pch, parce que quelquun a nglig de mettre sa vie en contact avec Dieu et de prier.

    3. Lendroit o Dieu nest pas

    Cela dit, je continue mon expos pour en arriver cette triste affirmation: Il y a un enfer. Il doit y avoir un enfer. Cette dclaration, du reste, na besoin daucun passage biblique pour ltayer. Philosophiquement, il doit y avoir un endroit mritant cette appellation qui voque de si tristes associations dides. Cest le nom qui dsigne lendroit o Dieu nest pas, lendroit o Il rassemblera ceux qui persistent Lexclure de leur vie. Exclure Dieu! Il ne peut pas y avoir de pire enfer que celui-l! Dieu parti! Lhomme livr tous ses penchants!

    Je suis persuad que lenfer nest pas ce que certains hommes ont reprsent. Ce nest pas ce tableau que je vis, enfant, et devant lequel je reculais terrifi. Soyons prudents son gard et nen disposons pas, en pense ou en parole, pour telle ou telle personne que nous jugeons perdue. Quand elle est morte, le plus que nous puissions faire est de la remettre Dieu qui est infiniment juste et personnifie lamour.

    Certaines sectes ont inconsidrment dispos de lenfer, et, de nos jours, il sest produit une raction exagre. Les deux extrmes sont viter. Agissons avec bienveillance et nanmoins avec franchise. Nous devons avertir les hommes en toute sincrit. Nous connaissons les claires dclarations de la Bible daprs lesquelles ceux qui prfrent ignorer Dieu seront perdus. Ce sont eux qui, de leur plein gr, ont choisi leur situation. Quant nous, ne faisons pas de personnalits, gardons le silence devant la tombe et occupons-nous des vivants.

    Un jour, la fin dune matine o nous avions entretenu nos auditeurs de la Bible, une jeune femme vint me prier de lui accorder quelques instants. Elle me parla dun ami, chrtien non pratiquant, pour qui elle avait beaucoup pri et qui tait mort subitement. Pendant les instants qui prcdrent sa mort, il tait inconscient et ainsi personne navait pu recevoir ses dernires confidences. Cette femme tait trs mue en me racontant cela, et, pour finir, elle me dit: Il est perdu! Il est en enfer, et je ne pourrai plus jamais prier.

    Nous causmes quelques instants et voici les renseignements quelle me donna. Son ami appartenait une famille chrtienne, chez qui la Bible tait en grand honneur. Lui-mme tait un homme qui rflchissait et qui menait une vie droite. Il parlait loccasion de questions religieuses, mais jamais sa conversation navait trahi une foi personnelle en Christ. Sa sant tait chancelante... Tout coup vint la fin. Jappris encore que, des annes durant, cette femme avait pri pour sa conversion, quelle tait une chrtienne convaincue et soucieuse du salut de ses frres.

    Dans ce rcit, nous nous trouvons en face de quatre faits: Cet homme savait comment aller Dieu; il rflchissait; il navait jamais confess ouvertement le christianisme; enfin quelquun avait pri pour lui.

    Peut-on savoir quelque chose de sr touchant cet homme? Il y a deux sortes de connaissances: directe ou dductive. Je sais quil y a une ville qui sappelle Londres, car jen ai parcouru les rues. Voil la connaissance directe. Je sais quil existe une ville du nom de Saint-Ptersbourg, car, quoique je ny aie jamais t, je suis persuad de son existence par mes lectures, par les photographies que jen ai vues, et par mes amis qui y ont t. Voil la connaissance dductive.

    Pour ce qui est de la destine de cet homme aprs quil a t arrach ltreinte de ses amis, je nai pas de connaissance directe; par contre, jai une connaissance dductive trs forte, parce que base sur quatre faits. Trois de ces faits, savoir le premier, le deuxime et le quatrime, sont en faveur de lide quil a d tre sauv; le troisime nest une preuve dans aucun sens. Le facteur dominant est le quatrime fait; cest lui qui a le plus de poids dans le jugement. Ce qui influe le plus, cest la communion persistante avec Dieu de cette personne qui pria avec foi jusquau moment o lhomme fut emport subitement. Ce fait, sajoutant aux autres, nous donne une ferme connaissance dductive touchant cet homme, et cela suffit pour rconforter et renouveler la foi dans la prire pour autrui.

    4. Lhomme agent du salut des siens

    Nous ne pouvons pas lire dans la pense dun homme. Il est bien certain que, si, dans la dernire minute de sa vie, une crature regarde en suppliant vers Dieu, ce seul regard prouve que sa volont est dirige vers Dieu. Et cela est parfaitement suffisant. Dieu attend impatiemment ce dernier regard; il est avide de le voir. Il est hors de doute que plus dune personne, au seuil de la mort, a lev les yeux vers Dieu, alors que nous ne pensions pas quelle avait sa connaissance et que, la voyant extrieurement inconsciente, les mouvements de son tre subconscient nous chappaient. On peut tre inconscient lgard de la vie extrieure et tre nanmoins intimement conscient de la prsence de Dieu.

    Lors dune autre runion, je fus lobjet dune autre confidence. Un homme desprit mr et de jugement avis me parla dun de ses amis. Cet ami ntait pas un chrtien pratiquant. Or, un jour, il tomba dun bateau; il plongea deux ou peut-tre trois fois; il fut pourtant sauv et ramen la vie. Il racontait dans la suite avec quelle rapidit mille penses, sa vie tout entire, se prsentrent son esprit. Il eut nettement limpression quil tait perdu, mais il resta calme; il pensa Dieu, il saccusa de ne pas stre confi en Lui, et en pense il implora Son pardon. Lavenir montra en lui un chrtien pratiquant et convaincu. Ce simple exemple met en lumire toutes les possibilits de salut que Dieu offre lhomme, et souvent sans que dautres puissent sen douter.

    Ces paroles suffiront certainement rconforter plus dun cur attrist, et de plus elles nous inciteront prier incessamment et avec foi pour ceux que nous aimons, car le pouvoir de la prire est incommensurable. Dans tous les cas semblables, soyez persuads que la prire est toute puissante.

    Mais soyons prudents, trs prudents. Ne nous laissons pas entraner trop loin, car ce serait folie que de sappuyer sur de telles affirmations pour rsister un appel misricordieux. Nous ne devons pas perdre une occasion davertir nos frres, en toute charit, avec amour, mais nanmoins avec franchise, du danger terrible de toujours renvoyer au lendemain quand il sagit de Dieu. Telle personne pourra tre enleve si subitement quelle naura pas le temps de lancer un dernier regard vers les cieux, et mme, si elle est sauve, elle sera responsable de sa vie devant Dieu. Il nous faut des hommes qui vivent pour Jsus et gagnent des mes Sa cause; les rcompenses, les prfrences, les honneurs dans le royaume des cieux dpendront de la fidlit que nous lui aurons tmoigne sur la terre. Qui donc dsirerait tre sauv in extremis? Le fait important que nous devons sans cesse avoir devant les yeux, cest que nous pouvons ouvrir nos bien-aims laccs auprs de Dieu si seulement nous redoublons defforts dans la bataille.

    5. Prparant les voies du Seigneur

    Voyageant une fois dans les Etats qui se trouvent au del du Mississipi, je fus mis en prsence dune illustration du pouvoir de la prire si typique, quelle me frappa immdiatement et me fut dans la suite dun grand secours pour comprendre la prire.

    Les faits parlent plus que les images. Si on pouvait savoir ce qui se passe autour de soi, que de surprises on aurait! Si nous pouvions saisir tous les faits dont se compose un vnement, les avoir dans leur puret, et possder le jugement capable de les passer au crible et de les analyser, quels exemples stupfiants du pouvoir de la prire nous seraient rvls!

    Lhistoire que je vais vous raconter a deux faces; nous tudierons tour tour lhomme qui fut transform et la femme qui pria.

    Lhomme, amricain de naissance et dducation, vivait dans louest des Etats-Unis. La nature lavait pour ainsi dire gratifi dun corps de gant et dune intelligence spcialement brillante. Il exerait la profession davocat. Encore enfant, il avait dcid, sil devenait chrtien, de se vouer la prdication. Hlas! il tourna au scepticisme; ses lectures furent toutes diriges de ce ct, et ce fut dans cet esprit quil exera sa profession. Il reprsentait au Congrs un des districts de son dpartement, et le Congrs, ce que je crois, tait sa quatrime priode.

    Lexprience que je raconte ici se produisit durant le Congrs o eut lieu le grand dbat Hayes-Tilden {1}, le Congrs le plus passionnant quil y ait eu Washington depuis la guerre civile. Ce ntait pas l un moment bien choisi pour penser Dieu. Lui-mme me dit quil connaissait plus ou moins tous les incrdules qui faisaient partie de la Chambre des reprsentants, dite Chambre basse, quils se voyaient beaucoup et se fortifiaient rciproquement dans leurs ides par leurs conversations.

    Un jour quil tait en sance la Chambre des reprsentants, au milieu de la discussion il eut la conviction que Dieuce Dieu en qui il ne croyait pas et dont il niait lexistencetait tout prs de lui, pensait lui et dsapprouvait sa conduite Son gard. Il se dit: Voil qui est absurde, parfaitement ridicule. Jai trop travaill; je ne suis pas assez sorti; jai la tte fatigue. Je men vais faire quelques pas, prendre un peu le frais, et tout de suite je retrouverai mes esprits.

    Ce quil fit. Mais la conviction de la prsence de Dieu ne fit que devenir plus intense; chaque jour elle simposait lui avec une force plus grande. Des semaines passrent. Il dcida de rentrer chez lui pour soccuper daffaires particulires et prendre quelques mesures en vue de sa candidature comme gouverneur de son dpartement. Et, autant que je puis le savoir ou juger de ces matires, les affaires marchaient merveille; sa candidature prenait corps. Le parti auquel il appartenait avait la majorit, et en gnral le candidat quil choisissait tait agr par le peuple.

    Il rentra donc chez lui. A peine eut-il pntr dans la maison quil apprit que sa femme et deux de ses amies staient unies dans la prire pendant des mois et que leur but avait t sa conversion. Immdiatement il pensa la curieuse exprience quil avait faite Washington et son intrt fut veill. Dsirant toutefois ne pas rvler cet intrt, il demanda ngligemment quand avaient commenc ces runions quotidiennes. Sa femme lui donna la date. Il fit alors un rapide calcul. Jeus alors, me dit-il, lintuition immdiate que la date quon me donnait devait saccorder exactement avec le jour o cette conviction de la prsence de Dieu se produisit en moi.

    Cette concidence le frappa vivement. Homme loyal envers lui-mme, il savait que la seule preuve dun fait de ce genre, la seule preuve dun tel rsultat obtenu par la prire, devait entraner en lui un changement complet. Do une lutte intrieure terrible. Avait-il t dans lerreur durant toute sa vie? Il retournait la question en tous sens, lexaminant comme un avocat qui veut tablir une preuve.

    Comme honnte homme, me dit-il, jtais oblig dadmettre les faits, aussi aurais-je pu me donner Christ ce soir mme.

    Quelques jours plus tard, il sagenouillait dans une runion tenue lEglise mthodiste et abdiquait sa forte volont devant celle de Dieu. Le dsir de son enfance rapparut. Chrtien, il devait prcher lEvangile. Et comme Paul, il transforma compltement sa vie. Depuis cette poque, il na cess de prcher Christ ressuscit.

    Voyons maintenant la deuxime phase de cette histoire, le ct intrieur. Nous y trouvons une leon admirable.

    Sa femme tait chrtienne depuis des annes dj; sa conversion datait davant son mariage. Quelques confrences auxquelles elle assista dans son Eglise lamenrent se donner plus compltement encore Jsus-Christ et elle retira de cette conscration une nouvelle exprience de la prsence et du pouvoir du Saint-Esprit. Elle fut prise dun intense dsir de voir son mari se convertir, et ce dsir, elle en fit part deux amies qui se joignirent elle dans une prire journalire et persvrante.

    Comme elle priait dans sa chambre, ce fameux soir, elle fut prise dune grande dtresse en pensant son mari et en priant pour lui. Elle tait si trouble quelle ne trouvait aucun repos; enfin elle se leva, sagenouilla prs de son lit et pria. Comme elle tait genoux, plonge dans la prire, elle entendit en elle une voix qui disait: Veux-tu en supporter les consquences? Elle tressaillit. Une telle chose tait nouvelle pour elle. Elle ne savait ce que cela signifiait. Sans y faire attention, elle se remit prier. Mais de nouveau la mme voix tranquille chuchota son oreille: Veux-tu en supporter les consquences? Effraye, elle se remit au lit pour dormir, mais le sommeil ne vint pas. Et de nouveau elle se mit genoux, et de nouveau elle entendit cette voix calme et tranquille.

    Alors, avec un srieux qui rvlait lagonie quelle traversait, elle scria: Seigneur, je veux supporter toutes les consquences qui peuvent survenir, si seulement mon mari peut tre amen Toi. Aussitt langoisse disparut; une douce paix lenvahit et le sommeil ferma ses paupires. Elle pria des semaines, elle pria des mois, patiemment, incessamment, jour aprs jour. Langoisse avait disparu et une douce paix remplissait son me; elle avait lassurance que sa supplication serait exauce.

    Quelles furent pour elles les consquences de cette conversion? Elle tait femme de dput; elle allait tre, autant quon peut en juger, la femme du gouverneur du dpartement, atteindre le haut de lchelle sociale. Elle est maintenant lpouse dun pasteur mthodiste, force de changer de demeure tous les trois ou quatre ans, suivant que son mari est appel dans telle ou telle localit. Quelle diffrence de situation! Aucune femme nest insensible aux diffrences sociales; toutefois, jai rarement vu femme plus belle et plus heureuse, de cette beaut et de ce bonheur que procure la paix de Dieu.

    Sentez-vous la simple conclusion qui se dgage de ce rcit? Le consentement de la femme donna Dieu loccasion de pntrer la volont du mari. Quand le chemin fut libre, sa prire fut une force spirituelle traversant instantanment des centaines de kilomtres et modifiant par sa prsence latmosphre spirituelle.

    Et nous, ne mettrons-nous pas notre volont en contact avec celle de Dieu? ne plaiderons-nous pas sans cesse pour ceux que nous aimons? Dlivre-le du mal, accomplis en lui Ta volont pour lui, par Ton pouvoir et pour Ta gloire, au nom de Jsus le Vainqueur. Puis disons: Amen, ainsi soit-il. Non pas: que cela puisse tre ainsi; ce nest pas un dsir, mais ainsi soit-il, cest--dire confiance absolue dans le pouvoir de Jsus-Christ. Et ces vies seront gagnes, ces mes seront sauves.

{1} Hayes tait candidat rpublicain la prsidence de 1876; Tilden tait candidat dmocrate. Une commission lectorale nomme ce sujet eut trancher le conflit. Hayes fut nomm. Note du traducteur.)

QUATRIEME PARTIE

COMMENT JSUS PRIAIT

CHAPITRE PREMIER

Simple Esquisse

    Quand Dieu voulut regagner le monde prodigue, Il envoya un Homme. Cet Homme, quoique plus quun homme, affirmait quil tait vraiment homme. Sur chaque point, il tait en contact avec la vie humaine, et aucun homme ne semble avoir mieux compris la prire, ni avoir pri comme il fit. Comment donc pourrions-nous mieux conclure ces entretiens sur la prire quen nous groupant autour de sa personne et en tudiant sa manire habituelle de prier?

    Une habitude est un acte rpt si souvent quon laccomplit inconsciemment, cest--dire sans quune nouvelle dcision de lesprit ait intervenir.

    Jsus priait, il aimait prier. La prire, parfois, tait pour lui un repos. Il priait tellement et si souvent que cet acte devint une partie de sa vie; il priait en quelque sorte comme il respirait.

    Il ny a rien qui nous importe plus que de savoir prier. Nous pouvons nous instruire de deux manires: ou par lenseignement dautrui, ou par lobservation. La dernier moyen est le plus simple et le plus sr. Comment pouvons-nous mieux apprendre prier quen observant Jsus et en essayant de limiter? Non pas en tudiant ce quil disait de la prire, si importantes que soient ses dclarations ce sujet; ni en considrant comment il recevait les requtes des hommes pendant quil tait sur la terre, malgr les enseignements que nous pouvons en tirer touchant Son attitude actuelle en face de nos prires; mais en observant comment Lui-mme priait, quand il tait dans les mmes circonstances entour par les mmes tentations que nous.

    Les Evangiles et les Psaumes sont les deux parties de la Bible auxquelles nous nous adresserons immdiatement pour obtenir la lumire. Dans les Evangiles, nous sommes mis en prsence du ct extrieur des habitudes de prire de Jsus, et, dans certains Psaumes, nous avons quelques aperus du ct intrieur;  ils sont peu nombreux, mais positifs.

    Si nous prenons dabord les Evangiles, nous y trouvons comme une esquisse de la manire de prier de Jsus. Cette esquisse est faite en quelques coups de plume, une ligne ici, une ligne l; il suffit parfois dun seul mot ajout par un crivain au rcit des autres pour mettre graduellement en lumire les traits dune personne solitaire, les yeux levs au Ciel.

    Parmi les quinze mentions que les Evangiles font de la prire de Jsus, il est intressant de noter que Matthieu en donne trois, Marc et Jean chacun quatre; cest Luc, le compagnon et lami de Paul qui nous fournit les plus nombreux renseignements.

    Pour le dire en passant, cela nexplique-t-il pas cette autre esquisse que nous distinguons nettement dans les ptres de Paul et o laptre nous rvle sa magnifique vie de prire?

    Matthieu, plong dans les textes hbreux, parle aux Juifs du roi davidique qui leur a t promis. Marc, la plume rapide, transmet lactivit incessante du Christ, cet admirable serviteur du Pre. Jean dpeint le Fils de Dieu venant porter la terre un message dEn-Haut; puis il nous Le montre quittant la terre et retournant dans la demeure paternelle. Luc, par contre, insiste sur le ct humain de Jsus-Homme, Jsus, un des ntres. Et le Saint-Esprit, au travers de tout le rcit de Luc, nous fait sentir que lHomme-Jsus priait, quil priait beaucoup, quil avait besoin de prier, quil aimait prier.

    Et nous, vivant sur la terre, envoys dans le monde avec la mme mission que celle quil reut de son Pre, dans le mme champ dactivit, pour combattre le mme ennemi, dots de la mme force que donne le Saint-Esprit, ne comprendrons-nous pas que notre force consiste vivre dans le plus troit contact avec Celui qui nous a envoys, et compltement lcart du monde?

CHAPITRE II

Coup dil rvlateur sur la vie de prire de Jsus

    Examinons rapidement, dans lordre chronologique, ces quinze mentions fournies par les vanglistes.

    La premire se trouve dans Luc III Les trois autres Evangiles nous parlent du baptme de Jsus, mais cest Luc qui ajoute pendant quil priait. Ce fut pendant quil priait quil reut le don du Saint-Esprit. Il nosait pas commencer sa mission publique sans cette onction qui avait t promise dans les crits prophtiques. Maintenant il est dans les eaux du Jourdain; il attend et il prie jusqu ce que le ciel souvre et que lEsprit descende sur lui, sous forme dune colombe, pour habiter en lui. La prire est une source de pouvoir;  elle est elle-mme une puissance. Lorsquon prie, on est fort. Prier, cest entrer dans une telle union avec le Divin, que sa puissance, comme un courant lectrique, puisse arriver jusqu nous sans perte et sans interruption.

    La deuxime mention est faite par Marc, au chapitre premier. Luc au chapitre quatre, fait allusion au mme fait. Ds que le jour parut, il sortit et alla dans un lieu dsert. Marc, plus explicite, nous dit au verset 35: Vers le matin, pendant quil faisait encore trs sombre, il se leva, et sortit pour aller dans un lieu dsert, o il pria. Il avait pass toute la journe prcdente dans la ville quil affectionnait particulirement, Capernam. Il avait t occup tout le jour au service de son Pre, enseignant dans la synagogue et gurissant un dmoniaque qui lavait interrompu; puis il avait guri la belle-mre de Pierre, et le soir on lui avait amen tous les malades et les dmoniaques. Pendant une partie de la nuit, en passant au milieu deux, en les touchant simplement, il avait guri ceux qui souffraient et dlivr les possds. Journe remplie et harassante sil en fut.

    A sa place, aprs une pareille journe, nous aurions ressenti le besoin de prolonger notre sommeil, car enfin il faut se reposer. Mais Jsus semble avoir eu, en plus du sommeil, un autre moyen de se reposer. Cette; nuit-l, il occupait probablement la chambre dami dans la demeure de Pierre et la maison se rveilla lheure habituelle. Le djeuner fut prpar, mais on attendit pour se mettre table que le Matre part. Au bout de quelques minutes, la servante se rendit la chambre de lhte et heurta lgrement. Pas de rponse. Elle heurta de nouveau et enfin entrouvrit la porte... et trouva la chambre inoccupe, O est donc le Matre? dit-elle.Je crois que je le sais, rpondit Pierre. Jai remarqu que souvent il sortait le matin pour gagner quelque endroit tranquille o il peut tre seul. Pierre et ceux qui taient avec lui se mirent alors sa recherche, car dj toute une foule affame de miracles remplissait la rue. Ils le cherchrent donc ici et l, au flanc des collines, dans les bosquets darbres, et finirent par le dcouvrir priant avec calme dans la tranquillit. Ecoutez alors le cri impatient de Pierre: Matre, la foule est grande, et tous te rclament, et mettez en opposition la rponse nette et calme du Matre: Allons ailleurs, dans les bourgades voisines, afin que jy prche aussi; car cest pour cela que je suis venu. Il et t plus facile de retourner Capernam et davoir de nouveau affaire la foule du jour prcdent, que daffronter le scepticisme de localits nouvelles; mais, pour Jsus, il ny a aucun doute sur ce qui doit tre fait. La prire claircit merveilleusement la vision; elle raffermit les nerfs; elle dfinit le devoir; elle renforce la volont; elle assouplit et fortifie lesprit. Plus ses journes taient charges, et plus il tait fidle au rendez-vous quil avait avec Dieu le jour suivant; plus son dpart pour cette rencontre avec son Pre tait matinal, {Esa 50:4} plus il dpensait de force, plus il laissait rayonner de puissance, et plus aussi il devait passer de temps seul seul avec Celui de qui dcoule toute puissance.

    Nous trouvons la troisime mention de la vie de prire de Jsus dans Luc V Cest peu de temps aprs la scne que nous venons de dcrire, et peut-tre lors de ce voyage dont Jsus parlait Pierre. Dans une de ces nombreuses bourgades galilennes, mu de cette compassion qui remplissait toujours son cur, il avait guri un cas avanc de lpre, et le malade, sans soccuper de lordre exprs quil avait reu de Jsus, avait si largement publi sa gurison miraculeuse, que de grandes foules barraient le chemin Jsus. Il rsolut alors de se rendre dans la campagne. La multitude qui remplissait le village ly suivit. Voyez maintenant ce que le Matre faisait: il se retirait dans les dserts et priait. Cette parole nindique pas un acte isol, mais une action habituelle, pratique des jours et des semaines durant. Oblig cause de limmensit de la foule de se retirer dans la solitude et, malgr ses efforts, poursuivi jusque dans sa retraite, il avait moins loccasion dtre seul; il en ressentait toutefois un imprieux besoin; aussi, pendant que patiemment il continue son admirable travail, il recherche chaque occasion dchapper de temps autre la foule et de prier.

    Comme sa vie ressemblait la ntre! Sollicits par nos devoirs, par notre activit, par les besoins de ceux qui nous entourent, nous sommes fortement tents de consacrer peu de temps la mditation. Cet ouvrage doit tre fait, pensons-nous, bien que parfois il trouble et agite les minutes que nous donnons la prire.Non! proclame lexprience du Matre. Non, ne mettez pas le travail la premire place, comptant sur la prire pour le bnir mais placez dabord la prire: notre activit bnie davance par la prire nen acquerra que plus de force. Plus le monde extrieur cherchait envahir sa vie prive, et plus Jsus dfendait lheure de sa prire et le calme de son me. Plus son esprit tait tendu, et plus il donnait de temps une prire que rien ne venait troubler.

    Luc nous fournit la quatrime allusion; au chapitre VI, verset 12: En ce temps-l, Jsus se rendit sur la montagne pour prier, et il passa toute la nuit prier Dieu. Ceci se passe environ au milieu de la seconde anne de son ministre. Il venait de faire des expriences dcevantes avec les chefs spirituels de la Jude qui piaient ses pas, critiquaient ses actes et jetaient des semences de scepticisme chez les Galilens, gens lesprit simple et absolu. Cest le jour qui prcde le choix des douze disciples et le Sermon sur la montagne. Luc ne nous dit pas que Jsus avait lintention de passer toute la nuit en prire. Lesprit fatigu par les traits incessants et la haine infatigable de ses ennemis, pensant au travail si srieux qui lattendait le jour suivant, il sentit quil navait quune chose faire. Il savait o trouver le repos, une douce compagnie, une prsence apaisante et un sage conseil. Dirigeant ses pas vers le nord, il rechercha la solitude de la montagne pour y mditer et pour prier. Et comme il priait, comme il coutait et parlait sans mme ouvrir les lvres, la lumire du jour fit place au crpuscule et bientt les toiles brillantes de lOrient sallumrent. Et toujours il priait, pendant qu ses pieds lombre spaississait et quau-dessus de sa tte le bleu du ciel devenait plus intense; le calme bienfaisant de Dieu enveloppa la nature et remplit lme du Christ dune paix profonde. Fascin par la prsence adorable de son Pre, il perdit toute notion de la fuite des heures, mais pria, pria jusqu ce que peu peu la nuit ft coule. LOrient sempourpra, le sol de la Palestine, parfum de la rose dune nuit orientale, se rchauffa au soleil renaissant. Et alors quand le jour parutcest ainsi que continue le rcitIl appela ses disciples et il en choisit douze; il descendit avec eux et sarrta dans une plaine o se trouvait une foule dautres disciples et une multitude de gens... et il les gurissait... et il les enseignait... car une force,sortait de lui. Y a-t-il l quelque chose dtonnant aprs cette veille darmes? Si nos motions, si nos inquitudes taient suivies de prire, si nos dcisions et nos paroles taient prcdes dune calme prire, quel pouvoir sortirait galement de nous! Car il ny a pas de diffrence entre ce quil tait dans ce monde et ce que nous sommes.

    La cinquime mention dune prire de Jsus se trouve dans Matthieu IV et Marc VI Jean y fait allusion au chapitre sixime de son Evangile. Ctait au dbut de la dernire aime de son ministre. Lui et ses disciples avaient t trs occups par les foules incessantes qui se groupaient autour deux. Ils venaient dapprendre la fin tragique du Prcurseur. Un repos physique simposait dans ces circonstances, aussi bien quun temps de calme, pour rflchir aux obstacles que dressait lopposition, alors son apoge. Montant dans un bateau, ils se dirigrent vers la rive est du lac. Mais la foule avide surveillait leurs mouvements et reconnaissant la direction quils avaient prise, ils contournrent le lac, coururent littralement aprs eux et mme les devancrent. Quand Jsus sortit de la barque, comptant prendre ce repos si ncessaire, il y avait l sur la rive des milliers dhommes qui lattendaient.

    Les disciples manifestrent-ils quelque impatience en voyant quils ne pouvaient pas mme avoir un moment de repos? Cest fort probable et nous pouvons le prsumer. Mais Jsus fut mu de compassion et, tout fatigu quil ft, il passa patiemment toute la journe enseigner, et le soir, quand les disciples proposrent de renvoyer la foule cause du manque de nourriture, laide de quelques pains et de quelques poissons il rassasia cette foule de cinq mille personnes et plus.

    Il ny a rien qui ait frapp davantage les peuples de tout temps et de tout pays que cette puissance de fournir des vivres en abondance. Des milliers de gens sendorment chaque soir ayant faim; ctait le cas ce jour-l. Aussitt un fort courant populaire se dessina dans cette multitude; ils voulaient mettre leur tte ce chef admirable et secouer le joug des Romains. Ils pensaient que si seulement Jsus consentait, le succs tait sr.

    Cette manifestation ne se rapproche-t-elle pas tonnamment des propositions que Satan lui avait faites dans le dsert? Ctait bien une tentation, alors mme quelle ne trouvait aucun cho en lui. Avec linfluence tonnante que sa prsence exerait parfois, il calma le mouvement et fora {1} les disciples monter dans la barque et passer avant lui de lautre ct pendant quil renvoyait la foule.

    Quand il leut renvoye, il sen alla sur la montagne et continua de prier jusquau matin. Une seconde nuit passe en prire! Fatigu physiquement, lesprit frmissant lapproche dun vnement quil pressentait dj, sa mort tragique, il a de nouveau recours au remde infaillible: la solitude et la prire. Cest par elles en effet quil surmonte toutes les difficults, triomphe des tentations et pare tous les besoins. Combien nous, ses disciples daujourdhui nous nous rendons peu compte du temps que consacrait la prire cet Homme qui la comprenait et la pratiquait si bien!

{1} Ce mot nergique nindiquerait-il pas quil y a peut-tre eu une entente entre les disciples et les chefs rvolutionnaires

CHAPITRE III

Dans lombre grandissante

    Nous comprendrons probablement mieux les autres exemples de prire que nous allons citer, si nous nous souvenons que Jsus est maintenant dans la deuxime anne de son ministre, et que ses rapports avec les chefs du peuple ont atteint cet tat aigu qui prcde la rupture finale. Lombre terrible de la croix assombrit toujours plus son chemin; la haine du diable crot, elle aussi, de plus en plus en intensit. Les qualits ncessaires pour tre un de ses disciples sont mises en relief par les circonstances; lincapacit de la foule, de ses disciples et dautres gens encore, le comprendre, apparat clairement. Beaucoup de ceux qui staient donns lui reculent maintenant, et Jsus sefforce de trouver plus de temps pour entretenir les douze. Nous le voyons se rendre dans des lieux loigns du centre de la vie juive et mme franchir les frontires du pays avoisinant. Les preuves et les expriences veniret spcialement la scne qui aura pour thtre une petite colline hors des murs de Jrusalemsemblent ne pas quitter ses penses.

    Le sixime passage nous est fourni par Luc IX Jsus et ses disciples sont dans le nord du pays, dans les environs de la ville romaine de Csare. Un jour que Jsus priait lcart, ayant avec lui ses disciples... A lcart, cest--dire loin de la foule curieuse. Il semble que Jsus veuille rendre plus intime le contact entre sa vie intrieure et celle des douze. Il semble aussi quil ait voulu essayer de leur communiquer ce mme amour pour la solitude et la prire qui remplissait son cur. Peut-tre aussi quil voulait simplement accrotre cette belle et profonde camaraderie quil avait inaugure avec ses disciples. Il prenait plaisir lamiti sincre, telle que la pratiquaient Pierre, Jacques et Jean, Marthe et Marie, et dautres encore. Or, il ny a pas damiti qui puisse se comparer lunion dans la prire.

    Il est une place o les esprits sunissent,O lami sunit son ami; Une place plus que tout autre propice.Cest le jardin de la misricordeQui fut achet au prix du sang.

    La septime allusion se trouve au mme chapitre IX et mentionne une troisime nuit de prire. Matthieu et Marc parlent aussi de la transfiguration, mais cest Luc qui nous dclare que Jsus monta sur la montagne pour prier et que ce fut comme il priait que laspect de son visage changea. Sans nous arrter tudier le but de cette merveilleuse manifestation de sa gloire divine ces trois disciples seuls, lheure o labandon et la haine se faisaient le plus sentir, quil nous suffise de noter que ce changement se produisit pendant quil priait. Transfigur pendant quil priait. Et, ses cts, se tenaient Mose et Elie, qui, des sicles auparavant, avaient pass des heures nombreuses seuls avec Dieu. La glorieuse lumire qui manait de la prsence de Dieu transfigurait son visage, sans quil en ft conscient. Transfigur par le contact avec Dieu! Nous, qui le Matre a dit: Suis-moi, nirons-nous pas aussi avec Lui et Sa divine parole, le visage dcouvert, cest--dire lesprit dgag des prjugs et de lgosme, pour que, contemplant dans un miroir la gloire de Sa face, nous soyons de plus en plus transforms en la mme image. {2Co 3:18}

    Nous trouvons la huitime mention dans Luc X Jsus avait choisi un certain nombre de disciples et les avait envoys deux deux dans tous les lieux o lui-mme devait aller. Ils taient revenus avec de joyeuses nouvelles, parlant du pouvoir qui les avait assists dans leur travail. Se tenant au milieu deux, le cur dbordant de joie, il leva les yeux comme sil voyait la face du Pre et il manifesta lallgresse qui remplissait son me. Il paraissait tre toujours conscient de la prsence paternelle et pour lui ctait chose toute naturelle que de Lui parler. Ils taient toujours assez proches pour sentretenir et leur entretien navait pas de fin.

    La neuvime mention est contenue dans le onzime chapitre de Luc; elle ressemble beaucoup la sixime: Jsus priait un jour en un certain lieu. Lorsquil eut achev, un de ses disciples lui dit: Seigneur, enseigne-nous prier. Ses disciples, sans doute taient des hommes de prire, et Jsus avait d les en entretenir souvent. Mais, remarquant quelle place considrable la mditation occupait dans la vie de leur Matre et quels merveilleux rsultats en taient la consquence, le fait quil y avait dans la prire un pouvoir extraordinaire, un secret important dont ils taient ignorants, simposa eux avec force. Ils pensrent quils ne savaient vraiment pas comment il fallait prier; do leur demande. Cette requte, plus que toute autre, dut rjouir Jsus. Enfin, ils prenaient conscience du pouvoir secret cach dans la prire.

    Puisse cette simple revue des prires de Jsus avoir le mme effet sur chacun de nous, nous pousser rechercher la solitude avec Dieu et Lui faire cette mme srieuse demande. Le premier pas pour apprendre prier est de scrier: Seigneur, enseigne-moi prier. Et qui mieux que Lui pourra nous lenseigner?

    Le dixime passage se trouve dans Jean XI; cest la deuxime des quatre supplications instantes de Jsus. Toute une socit est runie prs du village de Bthanie, au bord dune tombe dans laquelle, depuis quatre jours, repose le corps dun jeune homme. Marie est prsente; elle pleure. Marthe est l aussi, matrisant son motion. Elles sont entoures de quelques amis personnels, dhabitants du village et de connaissances venues de Jrusalem. Sur lordre de Jsus, aprs quelques hsitations, la pierre de la tombe est roule de ct. Et Jsus, levant les yeux, scrie: Pre, je te rends grce de ce que tu mas exauc. Pour moi, je savais que tu mexauces toujours; mais je parle ainsi cause de la foule qui mentoure, afin quils croient que cest toi qui mas envoy. Avant de se rendre la tombe, Jsus, videmment, avait pri en secret pour la rsurrection de Lazare, et ce qui suivit lut la rponse sa supplication.

    Comme ce fait rend manifeste que le merveilleux pouvoir rvl dans la brve carrire du Christ eut pour source la prire!

    Quelle liaison extraordinaire entre sa vie active, universellement admire, alors et depuis, et sa vie intrieure dont nous navons que des lueurs passagres! Le plus grand pouvoir confi lhomme est sans contredit celui de la prire. Mais combien parmi nous sont infidles la confiance qui leur est tmoigne, en nutilisant pas ce pouvoir trange plac entre leurs mains.

    Remarquez aussi lentire confiance de Jsus en Dieu qui coute sa prire: Je te rends grces de ce que tu mas exauc. Rien de visible ntayait cette certitude. Au contraire, car le corps tait dans la tombe depuis quatre jours dj. Mais Jsus tait confiant, comme voyant Celui qui est invisible. La foi est aveugle aux choses de la terre; elle ne peut voir que le ciel. Elle est aveugle aux impossibilits et sourde au paroles de doute. Elle ncoute que Dieu; elle ne voit que Sa puissance et agit en consquence. La foi ne consiste pas croire que Dieu peut, mais quil veut. Une telle foi ne peut rsulter que dune union constante avec le Pre, et sa source cest la chambre close, le temps mis part, la Bible; de plus, il faut une oreille attentive et un cur apais pour lamener son dveloppement.

    Le douzime chapitre de Jean nous donne la onzime mention. Deux ou trois jours avant le fatal vendredi, quelques Grecs, venus pour assister la Pque juive, recherchrent une entrevue avec Jsus. Cette dmarche semble avoir voqu en lui une vision du monde des Gentils pour lequel son cur brlait si vivement et qui venaient lui pour obtenir ce que lui seul, pouvait donner. Au mme instant, une autre vision, lugubre celle-l, traversa la premire, une vision qui ntait jamais absente de ses penses, celle de la croix. Reculant dhorreur devant elle, sachant toutefois que la premire ne pouvait se raliser que grce cette suprme preuve, il scrie, oubliant pour un moment ceux qui lentouraient, se parlant lui-mme: Maintenant mon me est trouble. Et que dirai-je?... Pre, dlivre-moi de cette heure!... Mais cest pour cela que je suis venu jusqu cette heure; voici ce que je diraiet ici le conflit intense qui se livrait dans son me se termine par la complte victoire de sa volont soumisePre, glorifie ton nom! Et aussitt que la prire fut prononce, une voix vint du ciel: Je lai glorifi et le glorifierai encore. Comme le Ciel doit tre prs de nous! Comme le Pre entend rapidement! Il doit tre sans cesse attentif nos prires, impatient de saisir ft-ce le plus faible murmure qui schappe de nos lvres.

    Les spectateurs de cette scne, assourdis par les bruits de la terre, inaccoutums entendre les voix clestes, ne purent rien comprendre du tout, mais Lui avait une oreille exerce.

    Esa 50:4 (passage minemment prophtique) nous suggre comment il se fait que Jsus pouvait comprendre cette voix si facilement et si rapidement: Il veille, chaque matin, Il veille mon oreille, pour que jcoute comme coutent les disciples.

    Pour prier, il est aussi ncessaire de savoir entendre que de savoir parler. Pour lun comme pour lautre, lentretien matinal avec Dieu est chose essentielle.

CHAPITRE IV

Sous les oliviers

    Le douzime passage se trouve dans Luc XII Cest le jeudi soir de la semaine de la Passion.. Jsus et ses disciples sont runis Jrusalem, dans la chambre haute, et l, ils clbrent la vieille fte de Pque, instituant en mme temps la nouvelle Pque chrtienne. Mais cette heure consacre elle-mme est trouble par lgosme des disciples. Jsus, avec la patience et lamour qui le caractrisent, leur donne cet admirable exemple dhumilit que relate le treizime chapitre de Jean. Il leur explique avec douceur ce quil attend de ses disciples et, se tournant vers Pierre, quil interpelle par son ancien nom, il lui dit: Simon, Simon, Satan vous a rclams pour vous cribler comme le froment. Mais jai pri pour toi, afin que ta foi ne dfaille point. Il avait pri spcialement pour Pierre. Voici aussi une de ses habitudes de prire: prier pour les autres, et cette habitude bnie, il ne sen est pas dparti. Il est capable de sauver jusqu la fin ceux qui sapprochent de Dieu par son intermdiaire, car il vit toujours pour intercder pour eux. Assis maintenant la droite du Pre, dans la gloire, il prie pour chacun de ceux qui se confient en lui.

    La treizime mention est bien connue. Elle est contenue dans le chapitre XVII de Jean. Ce chapitre renferme les dernires paroles de Jsus au monde. Du chapitre XIII la fin du dix-septime, nous trouvons Jsus seul avec ses disciples. Lorsquon lit cette prire avec attention, on dcouvre que Jsus sappuie sur la certitude que son uvre sur la terre est termine (quoique la scne principale soit encore venir); dsormais il va rentrer en la prsence de Son Pre et tre rinstall nouveau dans Sa gloire. Cette prire nous donne une ide de la prire quil adresse maintenant pour nous, de sa prire en qualit dIntercesseur ou de Grand-Prtre. Pendant trente ans, il a vcu une vie de perfection; pendant trois ans et demi, il a parl aux hommes de la part de Dieu; depuis dix-neuf sicles, il est un Grand-Prtre parlant Dieu au nom de lhumanit. Lorsquil reviendra, il sera Roi et gouvernera les hommes au nom de Dieu.

    Le quatorzime texte nous amne dans les limites sacres du jardin de Gethsman, un des endroits que Jsus affectionnait tout particulirement pour prier. Cette scne est relate dans Matthieu XXVI, Marc XIV et Luc XXI

    Approchons-nous avec le plus profond respect de cet endroit, car cest un lieu saint. La scne se passe galement le jeudi, mais un peu plus tard; cette journe avait t extraordinairement remplie et pourtant elle devait tre encore fertile en incidents. Aprs lentretien de la chambre haute et la prire si simple et si magnifique que Jsus y pronona, le Matre conduit ses disciples hors de la ville; ils passent le Cdron rapide et boueux et pntrent dans le bosquet doliviers qui le domine. Jsus ne devait pas dormir cette -nuit-l. Dans une heure ou deux, les soldats romains et la populace juive, conduits par le tratre, allaient venir le chercher. Jsus entendait donc passer dans la prire les instants qui lui restaient.

    A cause de ce besoin de sympathie qui apparat si fort durant ces derniers mois, il prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et se retire dans la partie la plus sombre du jardin; et cest l queut lieu ce combat intrieur trange et terrible. Il semble que ce soit le renouvellement du conflit quil eut subir {Jn 12} lorsque les Grecs vinrent le trouver; mais ce fut infiniment plus douloureux. Lui qui se savait sans tache, il commenait maintenant prouver dans son esprit ce quil allait prouver en fait dans quelques heures, savoir quil allait tre fait pch pour nous. Et cette effrayante vision sempare de lui avec une force si terrible quil semble que son corps ne supportera pas leffort de cette agonie mentale. Lpreuve, quil subit rellement le jour suivant, produisit une agonie telle que ses forces physiques labandonnrent. En effet, il ne mourut pas des souffrances physiques quil endura, si atroces fussent-elles; mais son cur se brisa sous leffet de sa souffrance intrieure. Il nest pas possible une me pcheresse de juger avec quelle crainte et avec quelle horreur lme pure de Jsus vit sapprocher le moment o il allait entrer en contact avec le pch dun monde entier. Silencieusement, pleins dun saint respect, nous suivons cette forme solitaire travers les arbres; tantt il est genoux; par moments, il se jette la face contre terre et reste tendu sur le sol. Il priait, demandant que, si ctait possible, cette heure pt passer loin de lui. Un fragment de cette prire parvient nos oreilles: Abba, Pre, toutes choses Te sont possibles. Sil est possible que cette coupe sloigne de moi! Toutefois, non pas ce que je veux, mais ce que Tu veux. Nous ne savons combien de temps il resta en prire, mais la tension de son esprit tait si grande quun ange lui apparut pour le fortifier. Ensuite, tant en agonie, il priait instamment, et la sueur devint comme des grumeaux de sang, qui tombaient en terre. Quand, enfin, il se relve, aprs ces instants de lutte et de prire si intense, la victoire semble tre remporte, et quelque chose du calme dautrefois rapparat sur ses traits. Il se rend vers les disciples endormis; soucieux de les prparer lpreuve suprme, il leur recommande de prier; puis il retourne dans la solitude, toujours pour prier; mais le changement qui sopre dans sa prire nous rvle quil a remport la victoire intrieure: Mon Pre, sil nest pas possible que cette coupe sloigne sans que je la boive, que Ta volont soit faite! La victoire est complte; la crise est passe. Il sabandonne cette preuve terrible qui, seule, peut faire aboutir ladorable plan de rdemption de Dieu pour un monde qui, sans cela, prirait. De nouveau Jsus retourne vers ses pauvres disciples si faibles; puis il regagne encore la solitude pour se fortifier davantage dans la communion avec son Pre. Voici maintenant les torches qui brillent dans les tnbres et qui lui disent: Lheure est venue! Le pas ferme, une paix merveilleuse illuminant son visage, il va au-devant de ses ennemis.

    Cest ainsi quil surmonta la plus grande crise de sa vie de prire.

    Vient enfin la quinzime et dernire mention. Des sept paroles que Jsus pronona sur la croix, trois sont des prires. Luc nous dit que, pendant que les soldats enfonaient les clous dans ses mains et ses pieds et pendant quils dressaient la croix, lui, le Christ, ne pensant mme pas lui, mais aux autres, scria: Pre, pardonne-leur, car ils ne savent ce quils font.

    Ctait lheure du sacrifice du soir, la fin de cette trange priode de tnbres qui jetrent leur voile sur la nature entire, aprs un silence de trois heures, quil jeta ce cri dchirant: Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi mas-Tu abandonn? Un peu plus tard, un cri triomphant montra que sa tche tait accomplie, et ses dernires paroles furent une prire quil pronona dans la paix, avant de rendre lme: Je remets mon esprit entre Tes mains.

Ainsi son dernier souffle fut encore une prire.

CHAPITRE V

Dernier coup dil sur la vie de prire de Jsus

    Pour clore cette tude, je pense quil sera utile au lecteur davoir un tableau densemble de ces diffrents passages.

    1. Heures de prire de Jsus.

    Il semble quil ait consacr habituellement les heures du matin la mditation et la prire; cest alors quil venait chercher la volont de Son Pre. Cette ide est suggre par Mr 1:35 Esa 50:4-6; rapprocher de Jn 7:16 8:28 12:49.

    Outre ces heures rgulires, il recherchait toutes les occasions de prier et priait chaque fois quil en sentait particulirement le besoin, jusque tard dans la nuit quand tous dormaient. Trois fois il resta en prire toute la nuit. Remarquez quil choisissait un moment tranquille, lheure o les voix de la terre se taisaient. Il passait aussi dans la prire les heures qui prcdaient ou qui suivaient des vnements importants.

    (Voir mentions 1, 2, 3, 4, 5, 10 et 14).

    2. Lieux de prire.

    Celui qui disait: Entre dans ta chambre, ferme ta porte et prie ton Pre en secret navait lui-mme pas de chambre o il pt se retirer pour prier. Sans foyer pendant les trois ans et demi de ses courses incessantes, sa place favorite tait un lieu abandonn, le dsert, les montagnes, un endroit solitaire. Il aimait la nature. Le sommet de la colline qui dominait le village de Nazareth, les coteaux qui stageaient au-dessus du lac de Galile taient des endroits quil affectionnait particulirement. Et remarquez que ctait toujours un lieu tranquille, labri des sons discordants de la terre.

    3. Il tait toujours en prire.

    Son esprit tait sans cesse plong dans la mditation. Il pouvait tre seul au milieu dune foule.

    On a dit quil y a trois sortes de solitudes: celle due au temps: les premires heures du matin ou toutes celles de la nuit; celle due au lieu: un sommet, une fort, une chambre close; et enfin la solitude desprit, grce laquelle un homme, entour dune foule, peut se sentir seul et rester plong dans sa mditation. Jsus recherchait et trouvait ces trois solitudes, pour parler avec son Pre.

    (Voir mentions 8, 10, 11 et 15).

    4. Il priait dans les grandes crises de sa vie.

    Cinq exemples nous en sont donns: 1 Avant la terrible bataille que Satan lui livre dans le dsert; 2 avant de choisir les douze chefs qui poursuivraient son uvre; 3 au moment o la Galile se dtache de lui; 4 avant son dpart de la Galile pour la Jude et Jrusalem, et enfin 5 Gethsman, la plus grande crise de toutes. (Voir mentions 1, 4, 5, 7 et 14).

    5. Il priait pour dautres

    Il priait opur dautres par leur nom, et il continue de le faire. (Voir mention 18).

    6. Il priait avec dautres.

    Cest une habitude dont nous devrions nous inspirer davantage. Quelques minutes consacres la prire avec des amis, des collgues, calment tonnamment lesprit, cimentent les amitis, aplanissent les difficults et facilitent la solution des problmes les plus ardus. (Voir mentions 7, 9, 12).

    7. Les plus grandes bndictions de sa vie vinrent pendant la prire.

    Les Evangiles nous fournissent six faits ce sujet: Pendant quil priait, 1 le Saint-Esprit descendit sur lui; 2 Il fut transfigur; 3, 4, 5 par trois fois une voix du Ciel se fit entendre pour lapprouver, et enfin, dans son heure de plus grande dtresse, un messager du Ciel vint pour le fortifier. (Voir mentions 1, 7, 11 et 14).

    Quelle puissance la prire tait pour Jsus! Non seulement ctait une habitude rgulire mais ctait sa ressource toutes les fois quil avait une dcision prendre, importante ou non. Quand il tait proccup, il priait;  quand le travail laccablait, il priait. Quand il avait besoin de compagnie, il la trouvait dans la prire. Il choisissait ses aides genoux. Etait-il tent, il priait;  critiqu, il priait. Etait-il fatigu de corps ou desprit, il avait encore recours son remde infaillible, la prire. Elle lui donnait un pouvoir sans bornes et maintenait cette puissance intacte durant toute son activit. Il ny avait pas dvnement, de difficult, de ncessit, de tentation quil ne surmontt grce la prire, telle quil la pratiquait.

    Et nous, qui avons ainsi suivi pas pas sa vie de prire, ne voulons-nous pas mditer ces passages nouveau jusqu ce que nous respirions lesprit de prire qui sen dgage et ne lui demanderons-nous pas, nous aussi, de nous enseigner jour aprs jour comment prier? Et enfin nessaierons-nous pas dtre seuls avec lui, heures rgulires, pour lui donner loccasion de nous enseigner et pour avoir ainsi loccasion de mettre en pratique son enseignement?

Dieu veuille que tel soit le dsir de chacun de nous!

UNE DLIVRANCE MIRACULEUSE {1}

    Dieu nest jamais la cause daucune de nos dceptions. Il ne la jamais t; Il ne le sera jamais; Il ne peut pas ltre. Cela ne veut pas dire que nous nayons jamais de dceptions. Nous connaissons trop la vie pour nous faire des illusions ce sujet. Mais cela veut dire que nos dceptions ne viennent pas de Dieu; au contraire, elles viennent malgr Lui. Et Il en souffre autant que nous, plus peut-tre.

    Dieu ne manque jamais sa Parole; Il y est absolument fidle. La promesse dun banquier est loin doffrir autant de garanties, car une banque peut faire faillite, mais Dieu pas. LEcriture ne peut tre anantie. {Jn 10:35} Jusquici rien na pu lbranler. Dieu veille attentivement sur sa Parole et nen laisse pas effacer un iota. {Jer 1:12 Mt 5:18 24:35}

    La vraie prire est toujours efficace. Elle ne peut pas chouer, parce quelle sappuie sur Dieu et sur sa Parole. Je parle ici, notez-le bien, de la vraie prire, car on emploie trop souvent le mot prire dune faon superficielle et on lui fait dsigner bien des choses qui ne sont pas vraiment des prires.

    La prire est en elle-mme une chose fort simple. Cest la demande de quelque chose dont on a besoin, demande faite par un cur sincre, sappuyant sur les promesses de la Parole de Dieu et se rclamant du sang de Jsus. {Ap 12:11} Cest l une chose toute simple. Sa puissance, pour autant quelle dpend de lhomme, rside dans sa simplicit mme. Cette prire-l ne demeure jamais sans rponse. Elle est toujours exauce; elle ne peut pas ne pas ltre. Le ciel et la terre passeraient avant quune vraie prire reste sans effet.

    On ne peut gure se reprsenter qu la suite dun vnement extraordinaire et vraiment invraisemblable, la Banque dAngleterre soit oblige un jour de suspendre ses paiements, ou que le gouvernement de Washington ne puisse plus faire face ses engagements. Et, pourtant, des catastrophes analogues se sont dj produites. Mais que Dieu permette quun de ses enfants, aprs avoir plac sa confiance en Lui, soit du, cela est impossible, pour autant du moins que cela dpend de Lui. Sa Parole est sre et ne peut faillir.

    Le jour o se produiront les tremblements de terre prdits dans lApocalypse, les chques, les billets de banque, les actions garanties par lEtat, les valeurs de toute scurit nauront pas plus de valeur que le papier sur lequel ils sont imprims. Tandis que pas une lettre de ce vieux Livre quon nomme la Bible ne sera atteinte, pas une parcelle de la puissance de Dieu ne sera amoindrie. Il ny aura pas de baisse dans ses trsors, ses actions seront plus haut que jamais.

    La vie de tous les jours se charge dillustrer cette vrit. Il arrive encore notre poque des histoires aussi frappantes que celle de la veuve de Sarepta dont la provision de farine ne spuisait jamais. {1Ro 17:8-16} En maint endroit ignor de la terre, Dieu montre sa fidlit ceux qui ont la fois assez de simplicit et assez de force pour se confier en Lui et pour gravir lpre sentier de la foi.

    Jai appris dernirement un fait de ce genre; je veux le raconter ici, tout simplement, tel quil ma t rvl. Je ne le considre pas, dailleurs, comme un fait exceptionnel; il me semble plutt quil est conforme la manire dont Dieu agit lgard de ceux qui mettent leur confiance en Lui. {Ge 22:16-18 Jn 2:24,25}

    Bien des fleurs cachent modestement leur beaut et leur suave parfum sous un pais feuillage. Le muguet recherche les coins ombrags. Les fleurs les plus belles ne se trouvent pas dans les vitrines des magasins; elles ne sont dcouvertes que par ceux qui les cherchent dans la douce retraite des valles ou dans la solitude de la montagne. La vrit, elle aussi, est modeste et rserve. Et il y a, si jose dire, une exquise modestie en Dieu. Il parle lhumanit par le soleil radieux, par le ciel toile, par la pluie bienfaisante et la frache rose. Mais il ne se rvle vraiment qu ceux qui sortent de la foule et qui sapprochent de Lui. Cest ceux qui cherchent la communion du cur avec Lui et ceux-l seuls quil fait connatre les profondeurs de son amour. {Ps 25:14 Jn 15:15}

    Lhistoire que je vais raconter est celle dune femme qui menait une existence tranquille dans un coin retir du monde. Nous y verrons la pauvret spirituelle du milieu dans lequel elle vivait; le courage avec lequel elle seffora de remdier cette misre; la dtresse par laquelle elle passa lorsque lAdversaire harcelait et torturait son me; enfin, linbranlable fidlit de Dieu. Car tout lenseignement de ce simple rcit est l: Dieu est fidle. {1Co 10:13} Il ne peut pas manquer sa Parole. La prire est toujours exauce.

    Je vous rapporte cette histoire comme elle sest prsente moi, car je vois, dans les circonstances mmes travers lesquelles elle mest parvenue, une action directe de Dieu. Jai t conduit, nettement conduit la dcouvrir. Cela fait comme une introduction mon rcit.

    Je me trouvais Stockholm, un soir dhiver, parmi tout un cercle de chrtiens runis table. Nous revenions dune runion et, pendant le repas, nous nous faisions part de nos expriences touchant la bont du Seigneur. Une dame de la socit en vint raconter, en se faisant traduire, une exprience peu commune faite par une de ses amies en Finlande.

    Il sagissait dune femme qui avait payer une traite faussement surcharge, pour des bois de charpente employs la construction dune petite chapelle. Elle navait pas assez dargent, et tous ses efforts pour se procurer la somme ncessaire avaient chou; la justice allait intervenir; tout coup, pendant quelle priait, la somme, contenue dans une petite bote, se mit augmenter et devint suffisante pour payer la traite. Telle tait lhistoire, en rsum. Elle frappa vivement tous les auditeurs. Un tel fait, de nos jours, paraissait chose inoue. Aussi les plus srieux et les plus aviss parmi nous ne craignirent-ils pas dexprimer quelque doute. On doutait, non pas que Dieu puisse faire une chose pareille, mais que lhistoire ft exactement rapporte. On se demandait si, dans sa joie, cette femme ne se serait pas trompe; si un ami ne lui serait pas venu en aide son insu; si elle avait lhabitude de tenir des comptes; si la bote tait bien ferme. Il sagissait sans doute dune femme sincre, mais trs impressionnable. Cest ainsi que questions et remarques allaient leur train.

    En entendant ce rcit, puis les commentaires, je me dis que, si lhistoire tait vraieet lamie qui nous la racontait et qui connaissait personnellement la femme en question, en semblait absolument convaincueon devait la garder secrte jusquau jour o lon aurait les moyens den vrifier lexactitude, mais que lorsquon pourrait en faire la preuve, il y aurait lieu de la publier, et de la publier hautement. Depuis lors, ma femme et moi, nous nous mmes prsenter chaque jour la chose Dieu, lui demandant, si le fait tait exact, de nous permettre de visiter un jour cet humble village de Finlande et de maccorder le privilge de prcher dans la petite chapelle.

    Plusieurs mois scoulrent; la fin du mme hiver, je reus un appel de Finlande, mais ne pus laccepter, tant dj engag ailleurs pour la date quon me fixait. Un peu plus tard, on me demanda, de faon pressante, de me rendre lt en Finlande, et cette fois jeus la joie de pouvoir accepter. Mais ctait sur la cte sud de la Finlande, une longue distancedouze heures de trajetdu village o la chose stait passe. Cependant ma prire quotidienne permit Dieu daccomplir son plan.

    Peu de temps aprs, me trouvant Christiania pour des runions, je fus invit la Confrence annuelle des Eglises libres de Finlande. Le nom de la localit o elle devait se tenir mtait totalement inconnu. Aussi nous nous htmes, ma femme et moi, de nous rendre un bureau de renseignements et de consulter une carte. Nous vmes avec une relle motion, que ctait tout au nord de la Finlande et que nous devrions juste passer par le village que nous dsirions tant connatre. Comme la date de cette confrence suivait de prs celle des runions que je devais avoir en Finlande, il nous sembla que nous tions dirigs par une main invisible, que lhistoire devait tre vraie et que Dieu dsirait le faire connatre, nous et dautres. Mais je persistai garder le secret le plus absolu.

    Cest alors que je reus une lettre de la personne qui avait fait cette remarquable exprience et avec laquelle javais correspondu pendant lhiver. Elle me disait quelle tait dlgue cette confrence des Eglises libres et minvitait prendre part des confrences rgionales qui devaient avoir lieu la semaine daprs dans le village quelle habitait. Enfin je fus invit des cours de vacances dune Universit finlandaise, cours qui avaient lieu deux heures de ce mme village.

    Lieux et dates, tout saccordait merveille. Mon motion saccrut. Je sentais quil y avait l un plan de Dieu et que jtais dans la main dun Guide invisible. Il allait me faire rencontrer cette femme, mamener dans son village, dans sa maison, et jusque dans la petite chapelle qui tait comme un tmoin et un monument de cette merveilleuse dlivrance. Javais demand Dieu que, si ce voyage en Finlande et en Norvge tait conforme sa volont, il le montrt en en rglant lui-mme le cours. Or, aucun itinraire navait jamais t aussi satisfaisant que celui-l. Tout y concordait merveille, lheure des trains et lheure des runions, comme si tout avait t arrang davance. En trois semaines, je pus ainsi assister cinq congrs annuels, runissant des chrtiens de toutes les parties de la Finlande et des auditoires trs diffrents. Jappris dans la suite que lamie laquelle la chose tait arrive avait, de son ct, demand Dieu de faire connatre au loin la dlivrance quil lui avait accorde, afin que sa fidlit ft glorifie. Puis, lorsquelle apprit que je venais en Finlande, elle pria pour que les portes me fussent largement ouvertes, mais vita de faire quoi que ce soit elle-mme, pour que la volont de Dieu et sa puissance en fussent plus manifestes. On voit que nos prires furent admirablement exauces.

    Nous avions galement demand Dieu de nous faire trouver un bon interprte. En effet, je ne pouvais arriver une claire intelligence de lvnement que si javais, pour me lexpliquer, une personne parlant la perfection langlais et le sudois. Or, ctait trs difficile. Dabord, parce que les bons interprtes sont trs rares; ensuite, parce que les habitants de cette rgion ne parlent que le finnois, qui est la langue des sept huitimes des Finlandais environ. Il fallait donc trouver un interprte capable de parler couramment le finnois et langlais pour nos runions et, de plus, pour notre histoire, le sudois, langue maternelle de la personne que nous allions visiter.

    Tout sarrangea de telle sorte que la rponse nos prires naurait pas pu tre plus satisfaisante. Lune des personnes qui mavait traduit la Confrence de lEglise libre se trouvait tre en relations avec notre amie. Ctait une matresse dcole de la capitale de la Finlande, et elle runissait un rare degr les qualits intellectuelles et spirituelles quil faut pour bien traduire. Le finnois tait sa langue maternelle; elle avait appris le sudois dans son enfance et parlait langlais avec toute la facilit dsirable. Jai appris dans la suite quelle tait bien connue pour ses aptitudes lenseignement, son habilet traduire, son srieux comme chrtienne. Quoique jaie eu dexcellents interprtes, je nai jamais t traduit avec autant de ferveur, damour et dintelligence. Cette dame tait en vacances et eut lamabilit de mettre ma disposition le temps dont elle disposait. Jai un peu anticip sur les vnements, afin de mettre en pleine lumire la faon dont Dieu ma guid dans toute cette affaire.

    Cest avec une singulire motion et un profond sentiment de la prsence de Dieu que nous nous rendmes en Finlande, aux diffrents endroits o nous tions attendus. Jamais je noublierai ces trois semaines passes en Finlande. Si jamais je me suis senti au pouvoir de la volont de Dieu, cest pendant ces jours-l. Il se dgageait des runions une calme et irrsistible puissance. Ctait comme un courant qui mentranait, et pour avoir de la puissance, je navais qu rester dans le courant.

    Nous trouvmes donc notre amie, et nous nous rendmes ensuite dans son village situ dans lintrieur du pays, deux heures de chemin de fer de la cte de la mer Baltique; nous arrivmes enfin dans sa modeste demeure et jusque dans la petite chapelle dont lhistoire nous parlait en termes si admirables de la fidlit de Dieu.

    Lendroit quelle habite nest pas proprement parler un village, cest un embranchement important de lignes de chemin de fer se rendant en Russie. Nous avions environ deux jours devant nous avant les runions suivantes, pour nous entretenir avec notre nouvelle amie et pour entendre son histoire Cest une directrice des postes, une femme dge moyen, dapparence modeste, dont le visage bon et patient racontait toute une vie de pnible labeur et de dvouement. Son frre tait un ministre de la vieille Eglise nationale, Abo, la vieille cit piscopale du centre de la Finlande. Elle y avait pass son enfance et sa jeunesse; le pre de sa mre tait mdecin. Elle-mme tait depuis plus de vingt ans dans les postes, et elle avait d passer un srieux examen pour y entrer.

    Cela a plus dimportance que chez nous, car, dans ces rgions recules de la Finlande, la poste est en ralit une sorte de banque dEtat, et la plupart des transactions, au lieu de se faire par chques, se font par mandats. En outre, le dveloppement du trafic par voie ferre avait augment limportance de son bureau, et elle avait toujours trois, parfois quatre ou cinq employs. Jai pu constater que, pendant le trimestre coul, il lui avait pass entre les mains, rien que comme valeurs recommandes, une somme denviron un million de marks finnois {2}, ce qui reprsente pour lanne entire peu prs quatre millions de francs. Je ne parle pas des sommes non recommandes, dont on ne peut savoir la valeur, mais cela suffit pour montrer limportance de son bureau et la responsabilits qui lui incombait.

    Ses livres taient parfaitement tenus, aussi bien tenus que ceux que jai pu voir lorsque jtais moi-mme dans une banque. Cela anantissait les objections que javais entendu faire Stockholm: cette femme tait habitue, depuis de longues annes, tenir une importante comptabilit. Lexactitude absolue dans les affaires dargent tait devenue comme inhrente sa nature.

    Par quelques questions, je me rendis compte des besoins qui avaient conduit la construction de cette chapelle. Il y a en Finlande une Eglise nationale, lEglise luthrienne, qui est en somme la seule Eglise du pays, lEglise libre tant dorigine relativement rcente et nayant pas encore dexistence lgale. Le territoire est divis en paroisses, la plupart trs tendues. En cet endroit, la paroisse, trs grande, navait quune seule glise pour une population de quatre mille habitants et un territoire de vingt-huit kilomtres de long. Cette glise se trouvait quatre kilomtres du village, et les glises les plus rapproches aprs elle se trouvaient six, seize et dix-neuf kilomtres. Grce linitiative de notre amie, des runions avaient t organises dans des salles dcole et dans des maisons particulires, et il en tait rsult de nombreuses conversions et beaucoup de bndictions; aussi le besoin dune petite chapelle se faisait-il grandement sentir. Lhistoire de sa construction est trs intressante, mais je dois en venir de suite celle de largent.

    Durant la construction de la chapelle, arriva tout coup une traite en paiement de bois qui avait t command et livr pour la charpente. Seulement, la somme tait plus grande que le prix convenu: 751 francs au lieu de 616. De plus, la traite tait accompagne dune lettre peu courtoise exigeant un paiement immdiat et menaant de poursuites judiciaires. Cela, contrairement aux usages commerciaux du pays qui accordent de longs crdits. Ainsi la somme tait malhonntement augmente; le dlai usuel ntait pas accord, et on menaait dune action judiciaire. Ctait un vnement aussi imprvu que dsagrable.

    Notre amie tait bien embarrasse par cette augmentation inattendue de la dette. Une diffrence de plus de 130 francs tait srieuse, vu les fonds limits dont on disposait et la difficult quil y avait trouver de largent pour lentreprise. Elle pouvait refuser de payer et aller en justice; mais ctaient des complications sans fin et de nouvelles dpenses, et dailleurs, notre amie ne pouvait, en bonne conscience, engager la cause de Dieu dans un procs. Les paroles de Jsus: Si quelquun veut plaider avec toi pour tenlever ta tunique, abandonne-lui aussi ton manteau {Mt 5:40} lui revenaient sans cesse en mmoire. Enfin, elle rsolut de payer la somme entire si elle y tait contrainte, mais non sans protester nergiquement contre cette injustice. Elle devait, par la suite, tre grandement fortifie dans ses prires par le sentiment quelle avait agi dune manire conforme aux enseignements du Matre.

    Les fonds pour la construction de la chapelle venaient uniquement de dons volontaires offerts par les fidles. Ceux-ci tant trs pauvres, les ressources taient des plus limites. Toute la responsabilit reposait sur notre amie qui avait, dautre part, rencontr beaucoup dopposition du ct des membres de lEglise nationale. Elle connut des jours de profonde dtresse.

    Mais elle cria Dieu, et une paix profonde finit par envahir son me et semblait planer sur elle. Elle commena alors prier pour cet argent. Cela se passait en mai 1908, et si laffaire allait en justice, elle avait jusquen octobre pour payer.

    Ce fut pour elle un temps inoubliable defforts incessants, de continuelles dceptions, de prire constante, de dtresse intrieure, et, alternant avec tout cela, de paix et de calme. Tous ses efforts pour obtenir de largent, sous forme de dons ou sous forme de prt, restaient vains. Elle semblait se heurter un mur. Elle rencontrait partout critiques, reproches et railleries, mais gure dargent. Son embarras fut bientt connu et comment par la petite communaut, surtout par ceux qui staient opposs la construction de la chapelle et qui annonaient maintenant quil faudrait la vendre pour payer la dette.

    Mais elle ne cessait pas de prier. Selon son expression, la lampe de la prire brillait jour et nuit. Son angoisse tait grande. Le dernier dlai approchait; il fallait agir. Lencaisseur tait bien dispos, mais naturellement il devait faire son devoir. Un dernier effort, un voyage une ville voisine demeura de mme sans rsultat. Lami quelle voulait voir tait absent, et sa femme exprima lavis quelle naurait pas d commencer btir avant davoir les fonds ncessaires. Elle reprit son train, plus embarrasse que jamais, et pourtant elle avait toujours cet trange sentiment de paix qui ne la quittait pas.

    Elle tait si mue en nous faisant ce rcit quelle dut sinterrompre un moment, pour reprendre possession delle-mme, elle toujours si calme. Et nous tions, de notre ct, saisis dune vive motion en face de cette me humaine qui nous rvlait le secret de sa vie intrieure et lintensit de ses luttes.

    Dans le train, au milieu du bruit, assise ct de gens indiffrents ses proccupations, elle eut conscience de la prsence de Jsus. Elle se sentit presse de prier et le fit avec plus de ferveur que jamais. Dans son angoisse extrme, elle sen remit entirement Dieu. Alors lui revint une pense quelle avait dj eue lors de la construction de la chapelle, mais qui prenait maintenant une porte toute nouvelle. Elle songeait au temps o les pains et les poissons avaient t multiplis dans le dsert, et se sentait pousse prier Dieu de bnir de mme la somme insuffisante dont elle disposait et de la rendre assez grande pour acquitter sa dette.

    De retour chez elle, elle alla chercher la petite bote o elle mettait largent pour la construction de la petite chapelle. La somme, quelle avait compte avant son dpart, ntait que de trois cent cinquante francs. Elle apporta la bote dans la chambre o elle se tenait. Elle avait la main quatre-vingt dix francs qui lui appartenaient. Elle les ajouta largent du Seigneur et posa le tout sur la table. Il tait midi. Le bureau de poste, attenant lappartement, tait ferm. Elle tait absolument seule.

    Elle se jeta genoux, joignit les mains au-dessus de la table o tait la somme et pria Dieu de raliser le dsir quil avait lui-mme mis dans son cur. Dans sa foi nave, elle disait: Seigneur Jsus; bnis ton argent, comme tu as bni les pains dans le dsert. Jy ajoute ma part aussi, je la mets avec la tienne, fais que cet argent suffise pour payer la dette. Et elle demeura ainsi quelque temps en prire.

    Alors elle compta cent francs, dont elle fit une pile part; puis elle fit de mme une seconde, une troisime fois, et ainsi de suite, jusqu ce quil y et sept piles de cent francs et une plus petite de cinquante et un. Elle constata quil y avait beaucoup de pices dor, alors quelles taient auparavant en petite proportion dans la bote. Et cela lui rappela les paroles de Esa 60:17. {3} Avec un profond sentiment de gratitude, elle se jeta genoux pour remercier le Seigneur, puis elle se releva et recompta soigneusement la somme. Elle tendit de nouveau les mains sur elle, et demanda Jsus, dont elle sentait la prsence, que la somme pt rester jusquau moment de payer.

    Nous lavons vue sortir cette bote dun tiroir pour nous la montrer. Personne, la vue du gros trousseau de clefs quelle avait toujours sur elle, et du soin avec lequel elle ouvrait et refermait les tiroirs contenant ses papiers et ses registres, naurait pu mettre en doute que cette petite bote de bois avait t soigneusement enferme et absolument hors datteinte. Elle se rendit chez lencaisseur et lui dit quil pouvait passer chez elle, quelle avait largent. Il ne pouvait pas le croire, connaissant sa dtresse, et lui demanda comment elle stait procur la somme. Elle rpondit tout simplement: Le Seigneur la envoye. Deux jours plus tard, il la prvint quil passerait le lendemain pour encaisser le montant de la traite.

    Ce jour-l, ds quelle eut fini son travail la poste, et se retrouva seule, elle alla chercher la bote et en vida de nouveau le contenu. Cette fois, elle se sentit pousse commencer par mettre part les quatre-vingt-dix francs qui lui appartenaient. Elle obit cette impulsion; puis elle tendit de nouveau les mains au-dessus de largent, elle pria et bnit Dieu, et lorsquelle compta, elle fut en prsence dune nouvelle preuve de la puissance de Dieu: la somme de sept cent cinquante et un francs tait intacte, et ct se trouvait son petit avoir, si pniblement amass.

    Le cur trop plein de reconnaissance pour pouvoir parler, elle tomba genoux, dans ladoration. Elle comprit mieux alors ce quavait fait le Seigneur; elle avait donn sans compter ses propres conomies, mais Dieu les lui rendait. Il voulait parfaire la somme sans les prendre. Elle Le pria encore de conserver la somme jusquau moment de payer.

    Enfin lencaisseur vint. Lorsquelle lui raconta lhistoire, il en fut fortement impressionn. Puis, comme elle avait fait les autres fois, elle versa largent sur la table, pria tranquillement et bnit Dieu, puis compta la somme et paya. Elle avait mis de ct son propre argent, et pourtant, aprs quelle eut pay, il restait quelques pices dargent. Elle avait demand souvent Dieu que sa petite bote pt ntre jamais compltement vide, et Il stait souvenu de cette prire. Lhuissier en fut profondment mu et y ajouta une pice de cinq francs, en disant: Je dsire ajouter mon offrande ce merveilleux argent.

    Cest ainsi que la dette fut paye, et que notre amie entra en possession dune quittance rgulire. Elle crivit alors une lettre qui devait tre envoye en mme temps que largent au marchand de bois. Elle lui disait que la traite tait inexacte, comme il le savait dailleurs, quelle la payait, nanmoins, en protestant nergiquement, pour mettre en pratique le prcepte damour du Sauveur: Si quelquun veut plaider contre toi pour tenlever ta tunique, laisse-lui encore le manteau. {Mt 5:40} Ainsi, tout en payant, elle rendait son tmoignage.

    Rcapitulons lhistoire.

    Notre amie avait trois cent cinquante francs dans une petite bote quelle tenait sous clef. Elie y ajouta quatre-vingt dix francs lui appartenant, ce qui fit en tout quatre cent quarante francs. Cette somme arriva au total de sept cent cinquante et un francs; elle saccrut donc de trois cent onze francs. Une seconde fois, elle fut augmente de quatre-vingt dix francs, soit en tout une augmentation de quatre cent un francs, sans compter la petite somme qui resta dans la bote aprs le paiement.

    Cette augmentation a t produite par laction de la prire seule, sans aucun secours humain, quoique tout ait t mis en uvre pour obtenir ce secours humain. Cette femme ne pria ainsi que parce quelle sy sentait pousse intrieurement. Lintervention divine ne se produisit quaprs cinq mois de longs et rudes combats intrieurs, de continuelles prires, de cruelles preuves; enfin, aprs le sacrifice complet dconomies pniblement ralises. Ce sacrifice ntait dailleurs, comme je lappris par la suite, quun incident dans la vie de continuels renoncements que menait cette femme depuis que la chapelle tait en construction.

    Cest un miracle analogue celui qui se produisit pendant des mois pour la veuve de Sarepta. {1Ro 17:8-16} Il est identique celui qui arriva la veuve dun prophte dont les fils allaient tre vendus comme esclaves pour payer ses dettes; {2Ro 4:1-7} identique aussi la multiplication des pains dans un temps de famine. {2Ro 4:42-44} Il ne diffre quen degr des multiplications des pains et des poissons par lesquelles le Seigneur, deux reprises, nourrit les multitudes et dans lesquelles il y eut aussi un reste important de pain et de poisson, qui fut soigneusement recueilli et servit nourrir dautres affams {Mt 14:13-21; 15:32-39et parallles.}. Enfin on peut le placer dans le mme groupe de miracles que les deux pches miraculeuses {Lu 5:4-11 Jn 21:1-14} dont nous parlent les Evangiles et qui furent dues la prsence du Matre.

    Je dois avouer que linterprte, ma femme et moi, nous ne fmes pas toujours matres de nos larmes, lorsque, runis autour de notre amie, nous coutions son rcit. Elle consultait son journal intime, trs soigneusement tenu, pour faire revivre devant nous ces jours mmorables. Et nous avons revcu avec elle son angoisse et sa joie, nous arrtant avec elle lorsque lmotion lempchait de continuer, puis lcoutant attentivement, lui posant des questions et bnissant dans nos curs ce Sauveur, cet Ami, ce Matre si fidle.

    Lenseignement qui se dgage de cette mouvante histoire est fort simple. Je demande instamment mes diteurs de ne jamais sparer les lignes qui suivent du rcit lui-mme.

    Je ne conclus pas de ce miracle que nous devions demander Dieu daugmenter notre argent de cette manire. Je ne conclus mme pas que nous puissions le faire, Si jamais le Seigneur conduit quelquun de ses enfants prsenter une prire analogue et faire de semblables expriences, ce chrtien saura reconnatre la main de Dieu, sans avoir sappuyer sur ce qui est arriv dautres.

    Il est possible quune semblable intervention ne se produise pas de toute une gnration, ou mme de plusieurs gnrations. Je nai jamais entendu parler jusquici dun fait du mme genre, quoique je sois trs attentif, depuis des annes, enregistrer les preuves de laction de Dieu notre poque. Cest l une dlivrance particulire, accorde dans une crise spciale.

    Lenseignement que nous apporte ce rcit est le suivant: Dieu ne trompe jamais notre confiance. Il ne doit jamais personne. Sa Parole ne peut faillir. La vraie prire, inspire par le Saint-Esprit, pntre de lesprit de sacrifice, est toujours exauce et ne peut pas ne pas ltre. Dans une crise o les hommes refusent daider, Dieu accomplit un acte crateur, plutt que de laisser faillir sa Parole, ou de permettre que lun de ses enfants ne vienne tre du dans sa confiance en Lui. Dieu peut seul savoir quand des circonstances pareilles se produisent. Son Esprit dirige nos prires. Voil la pierre de touche de la vraie prire.

    Quelquun pourrait ne voir dans notre histoire quun moyen commode de sortir des embarras dargent. Mais il se pourrait quun pareil fait ne se reproduise pas, mme dans un cas de grande dtresse. Il y a lieu de noter, en particulier, quau moment o nous crivons ces lignes, la petite chapelle nest pas encore compltement paye. Cest mme une grosse proccupation et un continuel sujet de prire pour notre amie de Finlande. Il reste encore plus de quatre mille francs payer, ce qui est une grosse somme, vu lindigence de cette population pourtant gnreuse. Cependant notre amie na pas eu lide de demander Dieu de renouveler le miracle dont elle a t lobjet. Cette prire ne lui a pas encore t mise au cur; elle ne sait pas do lui viendra largent, mais elle continue prier avec confiance.

    Jy vois un second enseignement: la vraie prire est mise dans nos curs par le Saint-Esprit. Lorsque nos curs soupirent aprs Dieu, lorsquils intercdent pour des bien-aims ou pour un besoin spcial, ces prires ne sont quun cho. Ces sentiments sont dabord dans le cur de Dieu, et ils y sont avec plus dintensit que dans le ntre. Ils ne font que passer, comme un cho, de son me dans la ntre. Il dsire ardemment que nous soyons dans une telle communion spirituelle avec Lui, que notre coeur batte lunisson du sien.

    Lorsque, jour aprs jour, penchs en sa prsence sur les pages de sa Parole inspire, nous Le laissons parler notre me, Il nous attire Lui, Il lve notre jugement, Il forme notre intelligence, Il nous discipline pour son service, Il nous apprend ce quil faut demander, comment il faut le demander, et surtout avec quelle persvrance il faut le demander.

    Notre amie dut passer pendant cinq mois par lcole de la prire avant que Dieu lui mt au cur la requte quil attendait delle. Jusqu ce moment-l, elle ntait pas prte. Si elle lavait prsente plus tt, de son propre mouvement, elle naurait obtenu aucun rsultat. La vraie prire nest pas le produit dune dduction logique venant de ltude des promesses de la Parole de Dieu, cest quelque chose dinfiniment plus profond et pourtant de trs simple. On lapprend genoux, dans la communion du Saint-Esprit.

    Cest avec autant dmotion que dintrt que nous descendmes le chemin poudreux qui conduisait la petite chapelle. Cest une construction des plus modestes, mais bien comprise et amnage de faon trs pratique. La salie principale communique avec une salle plus petite et avec une pice pouvant servir de chambre coucher et de cuisine. En haut est ce quon appelle la chambre du prophte, la fois cabinet de travail et chambre coucher pour le prdicateur de passage, quand ils ont le bonheur den possder un.

    Le dimanche, dix heures, il y a une Ecole du Dimanche en finnois; midi, un culte, dont notre amie se charge quand il ny a pas de pasteur: enfin, quatre heures de laprs-midi, une Ecole du Dimanche en sudois. La concierge est une femme pratique: elle habite la pice du bas et soccupe de tout le service; elle est convertie et dirige lEcole du Dimanche finnoise.

    La chapelle, lorsquelle est bien remplie, peut contenir environ deux cents auditeurs. Mais nous en avons eu beaucoup plus pendant nos quelques jours de runions; tout lespace libre tait occup, et sur lestrade, orateur et interprte navaient que juste la place de se mouvoir. Lon voyait mme chaque fentre un groupe dauditeurs attentifs, coutant du dehors. Quoi dtonnant ce que, dans un btiment comme celui-l, lEsprit de Dieu agt sur les curs avec une puissance persuasive? Il semblait que les cieux taient ouverts et que les brises du Ciel soufflaient doucement sur la terre. Des curs ferms souvrirent ce contact, et dautres demi-ouverts spanouirent compltement la vie divine.

    Tout en causant avec notre amie dans la petite chapelle, en la questionnant, en rflchissant, il mapparut de plus en plus nettement que cette histoire ntait quun chapitre dune longue histoire. Ce miracle est le point culminant de toute une vie. Lhistoire qui le prcde parle de longues annes de luttes, de fidlit; de patience au milieu de difficults de toute sorte; elle parle de plans constamment renverss, comme si des esprits ou des forces invisibles taient ligus contre eux; elle parle de persvrance dans la prire et dans la lutte, persvrance toujours un peu plus prolonge que la rsistance de la force ennemie; elle parle par-dessus tout de la continuelle prsence de lAmi invisible. Cest l le facteur essentiel, le secret de la victoire. La persvrance la emport, et elle la emport parce quelle se prolongeait toujours un peu plus que la rsistance.

    En coutant ce rcit, les paroles du Matre: Il faut toujours prier et ne point se lasser {Lu 18:1-8} me revenaient la mmoire. La prire est larme essentielle contre les soucis du monde et pour le service de Dieu. Les grands dangers qui la menacent sont la lassitude et le dcouragement. Il semble quune puissance invisible essaie de nous abattre, dpuiser notre vigueur physique et notre persvrance. Une persvrance ferme, inlassable, inaccessible au dcouragement, mais nayant rien de commun avec lenttement, voil ce quil faut notre prire. Gardons-nous, en effet, de confondre la persvrance avec lenttement, qui na rien dintelligent ni de raisonnable. {Ps 32:9} On peut tre assez fort pour rsister, mais pas assez pour rsister avec bonne grce, pas assez pour cder sur les points secondaires. La force de persvrance qui vient du Saint-Esprit sait examiner, interroger, changer au besoin ses plans pour mieux affronter lobstacle; elle sait dployer un calme, une galit dhumeur, un aimable bon sens, qui nont aucun rapport avec lenttement. Cette persvrance, qui seule triomphe, ne peut venir que de lEsprit. Lui seul l donne, et il ne peut la donner qu ceux qui se mettent srieusement, jour aprs jour, son cole. Cest ce que le Matre veut dire par lexpression: Ne vous relchez point. Cette persvrance vaillante et joyeuse {Lu 11:8-9} est lun des caractres essentiels de la prire qui transforme le monde; un autre caractre est la prcision. {Mat 18:19 Mr 11:24}

    Telles sont les rflexions que minspirait lexprience de notre amie.

    Au dbut, elle navait trouv acheter aucun terrain convenable pour construire la chapelle. Peu peu les choses changrent. Le propritaire de lemplacement que lon dsirait vint de ltranger visiter ses proprits; on put lui parler directement, et finalement un beau terrain fut lgalement acquis. Mais ce navait pas t sans longues luttes; il avait fallu vaincre, pas pas, une pre opposition; elle durait toujours, mais lAmi invisible tait l avec sa force et son appui.

    Ensuite, lorsquil sagit de btir, il sembla impossible de se procurer le bois ncessaire. Toutes les rserves de la saison taient puises. Mais lAmi fidle permit notre amie de conserver lesprance au milieu des circonstances les plus dsespres. {Ro 4:17-21} Elle ne fut pas due. Un lot de poutres inattendu arriva par la rivire; il y eut une baisse de prix sur diverses marchandises; des ouvriers inconvertis vinrent offrir leurs services; on put engager le meilleur entrepreneur. A mesure que les difficults surgissaient, elles taient aplanies, et notre amie avanait ainsi, pas pas, de dlivrance en dlivrance. A la fin, mesure que la flche de la chapelle slevait, sa foi atteignit, elle aussi, son point culminant. Le miracle que nous avons racont nest que la dernire pierre dun difice; il est soutenu par des annes de luttes, de crises de prire et dinbranlable fidlit de la part de Dieu.

    Je lai rapport pour rendre gloire Dieu et pour que les hommes aient en Lui une confiance plus absolue et plus simple.

{1} The Finnish gold story, tir de The quiet lime, par S.-D. Gordon.)

{2} Le mark finnois vaut exactement 1 franc et ne doit pas tre confondu avec le mark allemand, qui vaut 1 fr. 25.

{3} Au lieu de lairain, je ferai venir de lor.

RECUEILLEMENT ET PRIRE

    Notre gnration est, plus quaucune autre, agite, haletante, fivreuse. Tout travaille nous distraire, nous dissiper, nous rendre superficiels: la multiplicit des dcouvertes, les nouvelles du monde entier, et mme les uvres religieuses et sociales.

    Et pourtant lexprience nous montre, et la Parole de Dieu nous dit que rien de grand, de fcond, de durable ne sest jamais accompli ici-bas sans recueillement. La rflexion a toujours prcd laction. Les individualits puissantes, les hommes aux convictions fortes et lumineuses se sont forms dans la solitude. Les Mose, les Elie, les Jean-Baptiste, les Paul, les Luther, les Calvin, les Wesley ont t des hommes puissants parce quils avaient commenc par se recueillir en prsence de Dieu. Cest l le secret de toute vie fconde. Pour apprendre nous connatre, pour nous voir tels que nous sommes, pour cesser de nous sduire par de faux raisonnements, pour arriver cette sincrit absolue qui permet lesprit de Dieu de nous juger, de nous dpouiller, de nous vider, il faut absolument que nous ayons des heures de solitude. Toi, quand tu pries, entre dans ton cabinet.

    La solitude, toutefois, peut ntre quapparente. On peut sisoler sans se recueillir, parce que le cur est rempli de proccupations mondaines. Cest pourquoi, aprs avoir dit: Entre dans ton cabinet, le Seigneur ajoute: ferme ta porte.

    Cest que la voix de Dieu a besoin de silence pour se faire entendre. Si le cur est rempli de convoitises charnelles, si le bruit des passions mondaines sy fait entendre, Dieu se tait. Larche de Dieu et Dagon, Jsus-Christ et Satan ne peuvent habiter ensemble. Pour rencontrer Dieu dans le sanctuaire de notre me et nous entretenir avec Lui, il faut en chasser le Diable.

    Ferme la porte de ton cur lincrdulit, aux penses mondaines, aux soucis; mets dehors ta sagesse propre, ta volont propre, tes ambitions charnelles. Dtourne-toi du monde et tourne-toi vers ton Pre.

    Ces heures de recueillement sont infiniment srieuses. Cest l que se remportent les victoires ou que se font les chutes; cest l quun Jacob devient Isral et quun Balaam se perd; cest l que les Abraham sont appels immoler leur Isaac; cest l que Dieu forge ses instruments dlite.

    Et mesure que le monde sloigne et que lme, penche sur les pages divines, se spare de tout ce qui la souille, Dieu sapproche.

    Le cur, en effet, ne peut rester vide. Sloigner du monde, cest sapprocher de Dieu. Comme une biche altre soupire aprs des courants deau, ainsi mon me soupire aprs toi, Dieu! Mon me a soif de Dieu, du Dieu vivant. Lme se retrouve et se reconnat; elle nest pas sourde, ni muette; elle entend la voix divine et elle y rpond; elle apprend se connatre et connatre Dieu. Un dialogue sublime a lieu entre le Pre cleste et son enfant; Dieu se rvle et se communique. Des vrits cent fois entendues froidement deviennent esprit et vie en nous. Dans ces entretiens bnis, des impressions qui jadis navaient fait que nous effleurer, des vrits qui taient restes mortes en nous, nous sont rappeles par le Saint-Esprit et rendues vivantes. Toute la volont de Dieu nous est rvle la lumire de son amour. Ses compassions et notre misre, sa misricorde et notre gosme, sa puissance et notre faiblesse, sa sagesse et notre folie, sa grandeur et notre petitesse, notre origine, notre vocation, notre destine, le don de Dieu en Jsus-Christ, tout cela nous humilie, nous subjugue et nous remplit de reconnaissance.

    Et quand ces tte--tte se prolongent avec notre conscience et Dieu, qui nous instruit par sa Parole et son Esprit, nous sommes amens toujours plus rechercher nos voies et les sonder. Que de dcouvertes pnibles! Que de racines damertume, que de restes dorgueil, dgosme, de volont propre, de timidit nous sont rvls! Nous commenons seulement nous prendre en dgot, har notre vie propre. Nous avions cru tre consacrs au Seigneur, et voici, nous dcouvrons que dans mille circonstances, cest notre volont que nous avons faite, ce sont nos dcisions que nous avons prises, ce sont nos paroles que nous avons prononces, cest lesprit du monde qui nous a inspirs.

    Et la strilit de nos uvres nous est rvle. Il ny avait pas entre le Seigneur et nous une communion profonde et permanente; notre foi tait plus une conviction de lintelligence quune confiance, quun abandon de nous-mmes Lui. Ce ntait pas Lui qui portait des fruits par notre moyen. Nous avions oubli que, hors de Lui nous ne pouvions rien faire, que Lui seul doit tre linspirateur de toutes nos penses, de tous nos actes, que son Esprit doit tre le mobile de toute notre vie. Notre strilit nous tonnait; maintenant nous en dcouvrons la source.

    Et la strilit de nos prires, que de fois ne nous a-t-elle pas angoisss, tourments, dcourags. Jsus a dit: Demandez et vous recevrez; or, nous demandions et nous ne recevions pas. Et voici, dans le silence du recueillement, lEsprit de Dieu nous rvle la duplicit de notre cur. Les lvres formulaient certaines demandes, tandis que le cur soupirait aprs dautres biens. Entre nos prires et nos sentiments, entre nos prires et notre vie, il y avait contradiction. Nous disions Dieu: Donne-moi, pardonne-moi, et nous ne donnions pas, et nous ne pardonnions pas. Nous lui demandions son Saint-Esprit, cest--dire lhumilit, le renoncement, la gnrosit, le zle, la fidlit, lamour, et nous gardions de lorgueil, de lavarice, de lgosme, de la paresse nous dpenser pour autrui. Nous manquions donc de conscience dans nos prires; elles ntaient pas suffisamment srieuses: elles consistaient le Saint-Esprit parce quelles renfermaient du mensonge.

    Oh! rvlations bnies, continuez votre uvre de lumire et de purification! Pntrez dans tous les recoins de notre me jusqu ce que tout en nous soit esprit et vie.

    Maintenant lenfant; de Dieu peut prier. Dans la solitude du cabinet, il a contempl laveuglement et la surdit de lEglise. Ses yeux, lui ont t ouverts. La vision dune humanit certainement coupable, mais aussi victime dune Eglise trop sourde et trop aveugle, le hante. Ses oreilles entendent des cris de dtresse ses yeux contemplent partout la souffrance, le pch, des enfers corrupteurs. En regardant notre monde comme Jsus le regardait, en voyant les hommes assis dans les tnbres et lombre de la mort comme saint Paul et le Christ, il prouve une grande tristesse et il a dans le cur un chagrin continuel. Comme le voyant de Patmos, il est hant par de douloureux problmes jusqu ce que le plan damour de Dieu lui ait t dvoil et quil entende la voix de Jsus lui dire: Prie ton Pre l dans le secret, et ton Pre, qui te voit dans le secret, te le rendra publiquement.

    Lhistoire de lEglise est une merveilleuse illustration de cette vrit. Les dix jours de retraite dans la chambre haute ont produit la Pentecte avec ses 3.000 convertis; les prires incessantes de lEglise ont arrach Pierre sa prison et la mort; les prires constantes de Paul ont enfant une lgion de croyants. Suivez les vanglistes des premiers sicles ou les missionnaires du moyen ge, tudiez la vie intime des grands remueurs de consciences, suivez dans leurs retraites les croyants qui ont port des fruits qui demeurent, songez aux grands rveils de lEglise, et vous verrez que, partout et toujours, les effusions du Saint-Esprit ont t la rcompense publique de ceux qui avaient lutt avec Dieu dans le secret.

    Essayez par la pense de supprimer nos hautes montagnes couvertes de glaciers et de neiges ternelles. A quoi servent-elles? Nest-ce pas du terrain perdu? dites-vous peut-tre. Ne vaudrait-il pas mieux voir leur place de magnifiques vignobles ou de beaux champs de bl?

    Malheureux! lignorance vous fait draisonner. Si votre vu se ralisait, notre monde ne serait bientt plus quun dsert. Savez-vous do viennent les fleuves qui fertilisent nos campagnes et qui alimentent nos industries? Ils jaillissent de ces montagnes, qui vous paraissent inutiles. Cest l quils ont leurs sources.

    De mme, interrogeons les hommes de foi et de dvouement, demandons-leur quelle est la source de leur vie fconde, comment sont ns en eux ces fleuves deau vive qui arroseront ternellement le monde. Ils nous diront qu genoux devant Dieu, ils ont appris connatre la communion des souffrances de Christ. Ils ont entendu les blasphmes, les sanglots, les cris de dtresse de lhumanit paenne et civilise; ils ont vu les existences qui se perdent dans le pch et la souffrance, les bastilles qui doivent disparatre. Puis leurs regards se sont tourns vers Celui qui fait surabonder la grce l o le pch abonde. Dans sa communion, ils ont trouv le secret de la prire victorieuse et de laction efficace.

ENCORE LE RECUEILLEMENT

    Il ny a pas dinimiti avec Jsus-Christ et de foi vivante sans recueillement.

    Si nous sommes striles, cest plutt faute de repos que de travail, a dit le pre Gratry. Il faut ajouter que Gratry appelait repos lactivit intrieure, le recueillement. Notre faiblesse vient donc de notre dissipation. Avant de pouvoir parler aux hommes avec puissance, il faut avoir pris le temps dcouter Dieu.

    Toutes les erreurs, les prjugs, les traditions, les mensonges que nous gardons dans nos habitudes, dans nos vies, dans nos Eglises ont leur source dans labsence de recueillement.

    Cest encore la mme cause quil faut attribuer le vague des convictions, la peur de ltroitesse, le manque de connaissances bibliques, les grands mots et les grandes phrases sans signification prcise. On est assez fort pour dtruire; on ne lest pas assez pour difier. Les vastes horizons, les lumineuses visions des prophtes et des aptres nont gure t contempls; le plan de Dieu na pas t compris. De l, labsence de penses fortes.

    Hors de moi, vous ne pouvez rien faire {s} dit Jsus. Nous ne pouvons rien sans lui; Il ne peut rien sans nous. Hors de nous, sans sincarner dans nos vies, Il est rendu absolument impuissant. Le monde, qui vivrait de sa prsence, meurt de son absence. Le mal social et tous les autres maux ne sont que les rsultats de labsence de Dieu, manifest en chair, a dit W. Stead. La vie de Dieu est descendue sur la terre. La vie a t manifeste et nous lavons vue, dit Jean. La parole a t faite chair, elle a habit parmi nous, elle a t et elle est le Pain de vie qui nourrit les mes repentantes et croyantes. Nous vivons lorsque nous contemplons avec foi la vie sainte du Sauveur et sa mort expiatoire. Et nous donnons Jsus-Christ manger au monde quand nous, les membres du corps de Christ, nous sommes la lumire du monde, le sel de la terre, en laissant le Sauveur sincarner dans nos vies. Car le monde vit de la foi, de la patience, de la charit, de lintercession des chrtiens, cest--dire de Jsus vivant dans ses rachets. Dans lexacte mesure o nous incarnons le Christ, nous sommes des paroles vivantes de Dieu, nous clairons et rveillons les consciences, nous touchons les curs, nous agissons sur les volonts. Ce qui laisse le ciel sourd nos prires et le monde indiffrent, cest labsence de Dieu dans nos vies.

    Ne cherchons pas ailleurs la cause de ltat de corruption du monde. Que deviendrait lOcan si ses eaux, perdant leur puissante saveur, devenaient fades et insipides? Il se corromprait et empesterait lhumanit. Et que deviendra la socit humaine si lEglise ne devient pas plus rellement le sel de la terre, la lumire du monde? Si nous prenons la parole de Dieu au rabais, comment le monde la prendrait-il au srieux? Avant de nous affliger du peu de fruits quelle porte chez les mondains, affligeons-nous du peu de fruits quelle porte en nous. Sondons nos curs, examinons nos mobiles, descendons au fond de notre me, visitons-en tous les recoins avec sincrit, la lumire de la parole de Dieu et du Saint-Esprit. Demandons-nous si nous voulons rellement, sincrement mourir nous-mmes, toute rputation, toute recherche de la gloire qui vient des hommes, nos penses propres.

    Si nous sommes purs de cur devant Dieu, cet examen nous amnera sans doute oprer bien des rformes dans nos vies.

    A lheure actuelle, en pensant au monde perdu, mille questions angoissantes nous oppressent. Le danger est dessayer de les rsoudre avec notre sagesse. Les rponses nos douloureux pourquoi se trouvent dans le cur de Dieu. Cest l quil faut aller les chercher. Il faut que nous pensions ses penses, que nous voulions sa volont, que nous disions ses paroles, que nous fassions son uvre par le Saint-Esprit. Je ne puis rien faire de moi-mme, dit le Sauveur.

    Cest genoux, dans le recueillement, en face de la parole sainte srieusement consulte, seul seul avec Dieu, que nous pouvons rentrer en nous-mmes et arriver une sincrit absolue, une situation vraie vis--vis de nous, du monde et de Dieu. L seulement Dieu peut nous montrer et nous faire sentir le nant des choses den bas, la valeur des mes, le prix de la grce, limmensit de son amour, lhorreur du pch. L, il nous humilie. L nous sommes amens nous interroger: Est-ce que jexprimente la vrit des promesses divines? Est-ce que jobis tous les ordres de Dieu? Cet vangile de la rgnration, de la libert, de la saintet, de la perfection, lai-je pris au srieux?

    Quand nous avons des oreilles pour entendre ce que Dieu nous dit, nous avons des curs et des bouches pour prier. Et la prire humble, intense, persvrante nous donne une oue toujours plus fine, elle brise nos chanes, elle nous apporte la lumire, elle nous spare du monde pour nous unir Dieu, elle est notre rponse la volont rvle de Dieu, elle nous apprend recueillir les cris de dtresse de la terre comme les paroles de misricorde du ciel.

    Et alors, dans cet intense recueillement aux pieds du Seigneur, nous avons de saintes visions. Tout dabord la rvlation de ce que nous sommes, de notre pass coupable, de tout ce qui na pas t jug et abandonn, de tout ce qui reste en nous de charnel. A cette vue, nous nous prenons toujours plus en dgot et nous appelons dans notre me les puissances divines.

    Nous avons aussi une rvlation de la gloire de Dieu. Le Saint-Esprit nous rvle le caractre de Dieu en illuminant pour nous la croix de Jsus-Christ.

    Nous avons encore une rvlation de ltat du monde. Dieu nous montre notre pauvre humanit plonge dans les tnbres et la souffrance, il nous donne les yeux de Christ pour sonder toutes les plaies et son cur pour les sentir; il met en nous dimmenses compassions. Souvenons-nous de Mose, de Daniel et de Paul. Comme ils se solidarisaient avec leur peuple coupable, prenant sur eux ses pchs, les confessant, sen repentant, sunissant leur nation pcheresse par un lien dune puissance indestructible.

    Sommes-nous incapables de possder un pareil amour et dprouver une telle douleur? Prostern devant Dieu, Paul ne peut prendre son parti de possder Jsus-Christ et den voir sa nation prive. Il souffre, il pleure, il prie. Et quelles souffrances, quelles larmes, quelles prires! Il contemple la situation de son peuple et du monde, et, en face de tant dexistences qui se perdent, tant de souillures qui ravagent lme humaine, tant de folies et de souffrances, tant daveuglement et de ruines, ses larmes coulent brlantes et son cur se brise. Il connat la communion des souffrances de Christ. Sil ntait rempli desprance, il mourrait de douleur. Mais Paul sait que sil y a sur la terre une abondance diniquits, de souffrances, desprit dgarement, il y a dans le ciel une surabondance de pardon et de vie capable de dtruire tous les maux dici-bas.

    Pour devenir des tmoins et des intercesseurs puissants, il nous faut cette double vision: la vision de luvre de Satan dtruisant sant, bonheur, puret, cur, conscience, intelligence, esprance, ne laissant que des ruines, puis la vision de luvre du Christ, de tout ce quil peut et veut recrer dans les cratures humaines en se servant de nous comme dinstruments. Et cest dans le recueillement que nous laurons. Si nous voulons entrer et demeurer dans le sanctuaire de la prsence de Dieu, recueillis ses pieds, il nous dpouillera de toute impuret et de toute inintelligence, il nous rendra semblables Jsus-Christ. Alors nos vies sanctifies raconteront la gloire de Dieu.

    Il va sans dire que tout cela ne se ralisera pas en un jour. Dieu ne fait rien magiquement. Cest en contemplant la gloire du Seigneur que nous sommes transforms de gloire en gloire. Dune rvlation obtenue dans le silence du recueillement nat dans notre me une prire plus pure, et de cette nouvelle prire une rvlation plus haute et des grces nouvelles. Prosterns devant Dieu, la lumire et la vie grandissent sans cesse dans notre me, Dieu peut nous associer son uvre, mettre entre nos mains les rnes du gouvernement du monde, raliser ses promesses, exercer par nous la toute puissance au ciel et sur la terre.

    Que lEglise coute ainsi Dieu dans un intense recueillement, et elle sera le canal bni par le moyen duquel toutes les richesses du ciel descendront sur la terre.

 

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