DEMEUREZ EN CHRIST
Rev. Murray Andrew
DEMEUREZ
EN CHRIST
Quelques
pensées sur les bienfaits de la communion permanente avec le Fils de Dieu
PAR
LE REV. ANDREW MURRAY
« Demeurez en moi et je demeurerai en
vous. »
Traduit librement de l'anglais
DELATTRE ÉDITEUR PRIVAS (Ardèche) 1935
Edition Numérique Yves PETRAKIAN –
France 2011 –
Diffusion gratuite uniquement en indiquant la source : http://456-bible.123-bible.com/
DEMEUREZ
EN CHRIST
2.
Et, vous trouverez le repos de vos âmes.
3.
Vous confiant en Lui pour vous garder.
4.
Comme le sarment est uni au cep.
5.
Comme vous êtes venus à Lui, par la foi.
6.
Car Dieu lui-même vous a unis à Lui.
11.
Crucifié.
12.
Dieu lui-même vous
affermira en Lui.
13.
Dans une communion de tous
les instants.
14.
Jour par jour.
15.
Maintenant.
16.
Renonçant à tout pour
lui.
17.
Par la puissance du
Saint-Esprit.
19.
Dans l'affliction et
dans l'épreuve.
20.
Afin de porter beaucoup
de fruits.
21.
Et vous serez
puissants dans la prière.
23.
Comme Christ
demeure dans le Père.
24.
En obéissant à
ses commandements.
25.
Afin que votre joie
soit parfaite.
26.
Vous aimant les uns
les autres.
27.
Afin que vous ne
péchiez pas.
28.
Votre force.
31.
Glorifié. . . . 195
Pendant son séjour sur la terre, Jésus indiquait
les relations que ses disciples devaient avoir avec lui, par ces mots : « Suis-moi!
» Quand l'heure de les quitter pour monter au ciel fut venue, il se servit
d'une autre expression révélant l'union plus intime et plus spirituelle qui
allait s'établir entre eux et lui. « Demeurez en moi ! » leur dit-il.
Le sens profond de ces mots et les promesses qu'ils
renferment, restent malheureusement cachés à bien des disciples sincères de
Jésus. Tout en se confiant en leur Sauveur pour le pardon de leurs péchés et
pour le secours dont ils ont besoin, et tout en cherchant à lui obéir dans une
certaine mesure ils ne font pas l'expérience de l'intimité, de la merveilleuse
communion de vie et d'intérêt à laquelle Jésus les invite en leur disant «
Demeurez en moi. » Ils perdent ainsi un bien inappréciable; et la perte n'est
pas seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour l'Eglise et pour le monde.
L'ignorance est souvent la source de leur incrédulité et la raison pour
laquelle ils jouissent si peu du salut complet préparé pour eux.
Qu'on prêche dans nos Eglises la vie en Christ, la
communion vivante avec lui, l'expérience de sa présence et de son secours
journalier, avec autant de zèle et de clarté que son expiation et son pardon,
on verra bon nombre de croyants accueillir avec joie cette nouvelle vie ; et
les fruits ne se feront pas attendre.
C'est dans le désir d'aider ceux qui n'ont pas
encore compris ce que le Sauveur a voulu dire par ce commandement, ou qui
n'osent pas croire que cette vie leur soit accessible, que ces méditations sont
publiées. L'enfant apprend sa leçon par de fréquentes répétitions. En fixant
son attention tour à tour sur chacune des faces de la foi, le croyant est amené
à se les approprier toutes. Nous avons l'espoir qu'il sera utile à plusieurs de
méditer avec nous, jour après jour, pendant un mois, à la lumière de la parabole
du cep et des sarments, ces mots précieux : Demeurez en moi ». L'expérience de
cette communion avec Christ nous apparaîtra comme indispensable à toute vie
vraiment chrétienne : nous découvrirons les bénédictions immenses qui en
découlent. Méditons avec prière et acceptons dans la foi Jésus tout entier, tel
qu'il s'offre à nous, et le Saint-Esprit rendra cette parole esprit et vie ;
elle deviendra pour nous puissance de Dieu à salut.
Le Seigneur veuille, dans sa miséricorde, bénir ce
petit livre pour ceux qui cherchent à le mieux connaître. Qu'il montre à ceux
de ses enfants qui veulent encore vivre par eux-mêmes, comment il les veut
entièrement à lui, recherchant uniquement dans une communion entière avec lui,
la joie ineffable et glorieuse après laquelle ils soupirent. Et nous qui déjà
goûtons les douceurs de cette vie, soyons des témoins toujours plus fidèles de
la puissance de notre Seigneur pour nous garder en lui afin d'en amener un
grand nombre dans cette voie.
En terminant, qu'il nous soit permis de donner un
conseil à nos lecteurs. Il faut du temps pour croître en Jésus, le cep :
n'espérez pas demeurer en lui sans y consacrer le temps nécessaire. Il ne
suffit pas de lire les Ecritures ou des méditations comme celles-ci ; de
croire en saisir la pensée de demander à Dieu sa bénédiction pour reprendre
ensuite le train de vie avec l'assurance que tette bénédiction viendra. Non il
faut chaque jour des moments de communion directe avec Jésus et avec Dieu. Nous
reconnaissons bien la nécessité de consacrer chaque jour certains moments à nos
repas ; l'ouvrier réclame une heure pour son dîner. Prendre à la hâte une
certaine quantité de nourriture est de peu de profit. De même pour vivre par
Jésus, nous devons nous nourrir de lui (Jean VI. 57) ; nous devons prendre et
nous assimiler le pain céleste que le Père nous a donné dans son Fils. Ayez
donc soin chaque jour, avant, pendant et après la lecture de votre Bible, de
vous mettre en contact avec la personne vivante de Jésus, pour vous placer
d'une manière directe sous sa divine influence; alors vous lui donnerez
l'occasion de prendre possession de vous, et de vous garder en sûreté dans sa
puissante communion.
Que le bienfait de demeurer en Christ avec les
riches bénédictions qui en découlent, soit accordé à tous les lecteurs de ce
volume. Que la grâce de Jésus, l'amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit
soient leur portion journalière. Amen.
« Je suis le vrai cep, et mon Père est le vigneron.
Tout sarment qui est en moi et qui ne porte pas de fruit, il le retranche ; et
tout sarment qui porte du fruit, il l'émonde, afin qu'il porte encore plus de
fruit. Déjà vous êtes purs, à cause de la parole que je vous ai annoncée. Demeurez-en moi, et je demeurerai en vous. Comme le sarment
ne peut de lui-même porter du fruit, s'il ne demeure attaché au cep, ainsi vous
ne le pouvez non plus, si vous ne demeurez en moi. Je suis le cep, vous êtes
les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure porte beaucoup de
fruit, car sans moi vous ne pouvez rien faire. Si quelqu'un ne demeure pas en
moi, il est jeté dehors comme le sarment, et il sèche puis on ramasse les
sarments, on les jette au feu, et ils brûlent. Si vous demeurez en moi, et que
mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez et cela vous sera
accordé. Si vous portez beaucoup de fruit, c'est ainsi que mon Père sera
glorifié, et que vous serez mes disciples.»
« Comme le Père m'a aimé, je vous ai aussi
aimé. Demeurez dans mon amour. Si vous gardez Mes commandements, vous
demeurerez dans mon amour, de même que j'ai gardé les commandements de mon
Père, et que je demeure dans son amour. Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit en vous, et que votre
joie soit parfaite. »
« C’est ici mon commandement : Aimez-vous les
uns les autres, comme je vous ai aimés.
». Jean XV : 1-12.
Demeurez
en Christ
vous qui êtes venus à lui.
«
Venez à moi. » (Math. XI, 28.) « Demeurez en moi. » (Jean XV, 4.)
C'est à tous ceux qui ont entendu le premier appel
de Jésus : « Venez à moi », et y ont prêté l'oreille, que s'adresse cette
nouvelle invitation du Sauveur : « Demeurez en moi ». Jamais nous ne nous
sommes repentis d'être venus à Jésus; nous avons éprouvé qu'il est fidèle dans
ses promesses; il nous a accordé un pardon complet et gratuit : il nous a
rendus participants de la joie et des bénédictions de son amour et nous avons
trouvé auprès de lui beaucoup plus que nous ne l'espérions.
Néanmoins, avec le temps, les désappointements sont
venus; les bénédictions dont nous avions tant joui d'abord n'ont pas duré ; la
joie et l'amour qui avaient rempli nos coeurs à notre première rencontre avec
le Sauveur, loin d'augmenter, ont peu à peu disparu. Et nous nous sommes
demandé pourquoi.
La réponse est simple : nous nous sommes éloignés
de Christ. Les bénédictions qu'il promet sont étroitement liées à ce « venez à
moi », et ne peuvent être goûtées que dans une communion intime avec lui. S'il
nous a dit de venir à lui, ce n'était pas pour nous
faire éprouver pendant quelques courts instants après notre conversion la joie
du pardon, et nous laisser ensuite retrouver notre tristesse et notre péché en
retournant à notre vie ordinaire. Il nous destinait à quelque chose de mieux ;
il voulait nous faire demeurer en lui et nous faire jouir de sa communion
permanente au milieu de nos occupations journalières. Ne l'ayant pas compris,
nous n'avons pas conservé la paix trouvée en venant à lui. Cependant, c'est
l'amour puissant avec lequel il nous avait dit « Venez » qui lui fait, ajouter
: « Demeurez en moi ». Les bénédictions attachées à ce second appel,
dépassent de beaucoup celles qui accompagnent le premier; nous ne pouvons
réaliser d'avance les richesses que ces mots tiennent en réserve pour quiconque
les accepte.
« Demeurez en moi », dit Jésus, et non avec moi. Il
veut établir entre lui et nous des rapports de la nature la plus intime; il
veut nous rendre participants de sa vie divine.
Venus à lui, nous devons demeurer en lui. Les mêmes motifs qui nous ont poussés à nous approcher,
nous pressent de demeurer. La crainte du péché et de la malédiction qu'il
entraîne, le sentiment de lassitude et le désir d'être libérés des liens du
péché pour être rendus saints et purs et trouver le repos de nos âmes, le
besoin de connaître l'amour infini, l'espoir d'un héritage glorieux et éternel
: toutes ces choses qui nous ont amenés à Jésus doivent nous retenir auprès de
lui; car ce n'est qu'en demeurant en lui que nous conservons le pardon reçu et
que nos âmes altérées seront rassasiées.
Nous avons été heureux en venant à Jésus, combien
plus le serons-nous en demeurant en lui ! Qui voudrait se contenter de rester à
la porte d'un palais, lorsque le roi l'invite à entrer pour partager sa gloire?
Et pourtant, beaucoup de ceux qui sont venus à Jésus confessent qu'ils ne
savent pas ce que c'est que de demeurer en lui. Les uns ne comprennent pas
quelle est la pensée du Sauveur en les appelant; d'autres comprennent, mais ne
croient pas qu'une telle communion soit possible possible pour eux. D'autres
croient qu’elle est possible, mais ils n'en peuvent découvrir le secret;
d'autres enfin confessent que leur infidélité les a empêchés de jouir de cette
grâce, ils n'étaient pas prêts à tout sacrifier pour demeurer toujours et
complètement en lui.
A tous ceux-là nous apportons ce message de Jésus :
« Demeurez en moi, » les invitant à en approfondir le sens avec nous. Nous ne
prétendons pas résoudre toutes les questions qu'il soulève, Jésus-Christ, seul,
doit le faire par son Saint-Esprit. Nous désirons simplement montrer les
grâces attachées à ce commandement béni, et chercher ce qui nous en tient
éloignés.
Plaçons-nous aux pieds du Sauveur pour méditer
cette parole ; serrons-la, dans notre coeur, attendant de LUI SEUL, la force de
répondre et de retenir la bénédiction qui nous est offerte.
Demeurez
en Christ,
et vous trouverez le repos de vos âmes.
«
Venez à moi et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes
instructions, et vous trouverez du repos pour vos âmes. » (Math. XI :
28, 29.)
Le repos de l'âme. Voilà ce que le Sauveur offre au
pécheur fatigué et chargé, pour l'attirer à lui. Malgré son apparente simplicité,
cette promesse est aussi ample et complète que possible. Le repos de l'âme,
n'est-ce pas la délivrance de toute crainte, la satisfaction de tout besoin,
l'accomplissement de tout désir? Le Sauveur n'offre rien moins pour ramener
celui qui s'est éloigné; et il répète par deux fois cette promesse, mais avec
des conditions assez différentes pour nous faire comprendre que le repos promis
ne peut être réalisé et conservé que dans une communion permanente, en sorte
que si nous le perdons, c'est que nous ne sommes pas demeurés en lui. D'abord il
dit : Venez à moi et je vous donnerai du repos. Au moment même où vous viendrez
et où vous croirez, je vous donnerai du repos, le repos du pardon et de la
réconciliation. Mais il faut du temps pour vous approprier pleinement ce que
Dieu nous donne ; aussi le Sauveur répète-t-il sa promesse dans les termes qui
n'expriment plus seulement ce premier repos qu'il donne à l'âme fatiguée quand
elle vient à lui, mais le repos plus solide et plus profond que possède l'âme
demeurant en lui, le repos, fruit d'une connaissance plus complète, d'une
union plus intime et de l'entier abandon de soi. Prenez mon joug, recevez mes
instructions, dit-il, mettez-vous à mon école, pliez-vous à ma discipline,
soumettez-vous en toutes choses à ma volonté, que votre vie ne fasse qu'un avec
ma vie, en un mot : « Demeurez en moi, et vous trouverez du repos pour vos
âmes! »
Ces paroles de Jésus, ne nous font-elles pas
découvrir la raison pour laquelle nous perdons si souvent, le repos de nos
âmes? Le secret d'un repos parfait et durable, c'est de se livrer complètement
à Jésus, de lui abandonner sa vie pour que lui seul la dirige, se laisser
enseigner par lui, être et faire uniquement ce qu'il veut ; hors de ces
conditions, inutile d'espérer conserver la paix que Jésus nous a une fois
donnée. Le repos est en Christ, l'âme ne peut en jouir qu'en étant elle-même en
lui.
Faute de saisir cette vérité, beaucoup de croyants
perdent vite la paix. Les uns ignorent que Jésus veut une consécration complète,
qu'il n'y a pas un détail de notre vie sur lequel il ne veuille régner et dans
lequel nous ne devions chercher à lui plaire. D'autres regardent cet état de
l'âme qui demeure constamment en Jésus, comme le couronnement d'une vie entière
de sainteté et de progrès, mais non comme le point de départ pour un faible
commençant. Prendre le joug de Jésus et le porter sans le poser un seul
instant, semble demander un déploiement d'efforts, un degré de sagesse tout à
fait au- dessus de leur portée. Ceux qui pensent ainsi ne savent pas combien «
son joug est doux », combien son joug même donne le repos: car, du moment où
l'âme se plie à ce joug, le Seigneur donne la force et la joie pour obéir. Ils
ne remarquent pas non plus que lorsque Jésus dit : « Recevez mes
instructions, » il ajoute « Je suis humble de coeur », nous donnant,
ainsi l'assurance qu'il ira au-devant de notre faiblesse et nous portera comme
une mère porte dans ses bras son petit enfant. Ils ne voient pas enfin que
lorsqu'il dit : « Demeurez en moi, » il demande
simplement que nous nous livrions à lui, son amour tout-puissant se chargeant
de nous garder et de nous bénir. Ainsi, les uns s'égarent faute d'une
consécration entière, les autres faiblissent par manque de confiance.
Consécration et foi sont les deux éléments essentiels de la vie chrétienne.
Tout donner à Jésus, tout recevoir de Jésus. L'un implique l'autre, et les deux
sont réunis dans cette expression : se livrer. Se livrer complètement ou s'abandonner,
c'est obéir aussi bien que se confier, se confier aussi bien qu'obéir.
Avec un tel malentendu au point de départ, il
n'est pas étonnant que la vie chrétienne ne soit pas la vie de joie et de
force que nous espérions. Ignorant d'un côté que nous ne pouvons absolument
rien faire en dehors de Christ, et de l'autre que Christ veut se charger de
nous pour nous garder et nous conduire dans les moindres détails de notre vie,
nous comptons sur nos propres forces, et nous tombons constamment dans le
pêché. Notre sentier au lieu de devenir de plus en plus lumineux comme le
sentier du juste jusqu'à la parfaite lumière, devient comme le chemin d'Israël
errant dans le désert : toujours en route pour le repos promis, souvent près
de l'atteindre et n'arrivant jamais.
Ames fatiguées, qui cherchez ce repos, apprenez
aujourd'hui à connaître la retraite où la paix vous est assurée.
Mais, direz-vous, c'est précisément de demeurer en
Jésus, de porter toujours son joug, de recevoir ses instructions qui est difficile;
l'effort même, pour y parvenir, trouble souvent plus encore que le péché ou le
monde! L'erreur est précisément de croire qu'il faille un effort. Est-ce une
fatigue pour le voyageur de se reposer sur le lit qui lui a été préparé? Est-ce
un labeur pour le petit enfant de reposer dans les bras de sa mère? N'est-ce
pas le lit qui soutient le voyageur? N'est-ce pas les bras de la mère qui
portent l'enfant ? Il en est de même de Jésus. L'âme n'a qu'à se livrer à lui
et se tenir en repos. La grandeur même de la bénédiction nous empêche de la
saisir. Nous n'osons pas croire que Jésus veuille et puisse nous instruire et
nous garder tout le jour durant. C'est là, cependant, ce qu'il a promis ;
et, dans la mesure où nous le croirons, nous trouverons la paix. La difficulté
ne vient pas du joug à prendre, mais de notre résistance à prendre le joug,
puisque c'est notre complet abandon à Jésus, comme à notre Maître et notre
Gardien, qui nous assure le repos de nos âmes.
Acceptez dès ce jour, en toute simplicité, la
parole de Jésus. L'ordre est positif : « Prenez mon joug, recevez mes
instructions, demeurez en moi ». Nous n'avons pas la liberté d'hésiter. Le
soldat docile, sans demander pourquoi ni comment, obéit, se confiant en la
sagesse de son supérieur pour pourvoir à tout. A nous donc d'obéir ; à Christ
notre Sauveur de nous rendre capables de demeurer dans le repos et d'y
persévérer; à lui de nous faire goûter les bienfaits de ce repos. Et si, par
moments, nous faiblissons, que ce soit une nouvelle raison pour nous confier
plus résolument en l'amour tout-puissant de Jésus.
Heureux repos, avant-goût du ciel! Quand nous le
possédons nous trouvons la force pour tout devoir, le courage pour tout combat,
une bénédiction dans chaque croix, la joie de la vie éternelle dans la mort,
même.
« Demeurez en moi. Prenez mon joug et recevez
mes instructions, et vous trouverez du repos pour vos âmes. »
TROISIÈME JOUR
Demeurez
en Christ,
vous confiant à lui pour vous garder.
« Je
cours pour tâcher de saisir le prix, puisque moi aussi, j'ai été saisi par
Jésus-Christ. (Philip. III : 12)
Parmi ceux qui reconnaissent que c'est un devoir et
un privilège de demeurer constamment en Christ, il en est qui considèrent cette
grâce comme réservée à une élite de chrétiens favorisés par les circonstances,
et non à la majorité des disciples, dont la vie est remplie, par la volonté
même de Dieu, d'occupations terrestres. Dans leur faiblesse, ils n'oseraient
prétendre à cette vie de communion permanente. Mais c'est à eux qu'elle
convient précisément; car il ne s'agit pas d'accomplir quelque chose de grand,
ni même de débuter par une vie de sainteté et de dévouement : il s'agit, pour
le faible, de se confier au Tout-Puissant pour être gardé ; pour l'infidèle de
s'appuyer sur Celui qui est parfaitement fidèle et vrai. Consentir à laisser
Jésus tout faire pour nous, en nous et par nous, attendant avec confiance ce
qu'il a promis d'accomplir, c'est là simplement demeurer en Christ.
Beaucoup de personnes qui savent que la conversion
et le pardon viennent de Dieu, font dépendre de leurs efforts et de leur fidélité
ce qui reste encore à faire pour le perfectionnement de leur salut. Alors les
chutes sont fréquentes, le découragement survient et ne fait qu'augmenter leur
incapacité. Elles n'ont pas fait cette expérience que Jésus, en disant : «
Demeurez en moi! » s'offre lui-même, lui, le gardien d'Israël, qui ne sommeille
ni ne dort, comme la demeure vivante de l'âme, où les influences pénétrantes de
sa grâce triompheront de leur faiblesse.
Demeurer en Christ est, aussi bien que la
conversion et le pardon, une grâce qui vient de lui seul. Si nous avons senti
qu'il nous a attirés à lui en nous appelant à venir, nous devons compter sur
lui quand il dit : « Demeurez en moi, » pour retenir dans sa communion
quiconque répond à son appel.
Demeurez en moi, n'est point une loi du Sinaï réclamant
du pécheur ce qu'il ne peut accomplir ; c'est un commandement d'amour, par
conséquent une promesse sous une autre forme. Nous ne sommes pas sous la loi
avec son inexorable : Fais ceci ; mais, sous la grâce, qui dit: « Crois » ce que
Jésus veut faire pour toi. Si donc la pensée de faire nous-mêmes encore quelque
chose nous préoccupe, disons-nous que notre oeuvre n'est que le fruit de
l'oeuvre de Christ en nous. Quand notre âme abdique complètement et attend tout
de Christ, elle voit ses forces s'éveiller et déployer toutes leurs ressources;
alors nous travaillons avec succès, parce que nous sentons Christ opérer en
nous.
Cette relation entre l'oeuvre de Christ et la nôtre
est admirablement exprimée dans ces paroles de Paul « Je cours pour tâcher de
saisir (le prix), puisque moi aussi j’ai été saisi par Jésus-Christ! » La
pleine assurance en Christ qui l'avait saisi, le portait en avant, en lui
donnant le courage et la force pour atteindre le but pour lequel il avait été
saisi.
Une comparaison nous fera mieux comprendre
l'expression de Paul et son application à la vie chrétienne. Représentons-nous
un père aidant son enfant à gravir un roc escarpé. Le père, se tenant au-dessus
de son fils, l'attire à lui, lui montrant la place où il doit mettre son pied.
Le saut serait trop élevé pour l'enfant laissé à lui-même; mais se confiant en
la main du père, il s'élance pour parvenir là où le père le veut. C'est la
force du père qui est son salut, qui le soulève et l'excite à user de ses
propres forces.
Telle est la relation entre Christ et le faible
croyant. Notre union avec lui et, par lui, avec le Père, voilà son but
glorieux. Cherchez à vous en rendre compte et en même temps à faire
l'expérience que vous avez été saisis pour ce but par Jésus-Christ, afin de
vous confier en sa toute-puissance pour achever l'oeuvre qu'il a commencée.
Tout ce que vous avez déjà reçu, le pardon et la paix, le Saint-Esprit et sa
grâce, ne sont que les premiers pas vers cette vie de communion. Tout ce qui
vous est encore promis, sainteté, oeuvres à faire et gloire éternelle, n'en
sont que les résultats naturels.
Fixez constamment vos regards sur ce but que Jésus
vous propose. Toute vérité de Dieu qui se fait connaître à nous, demande de
devenir aussitôt un principe de vie. C'est pourquoi, cédez dès aujourd'hui au
Sauveur dans ce qu'il demande de vous; renoncez à vous-même pour demeurer en
lui, et il entretiendra lui même votre confiance. Si le découragement vient après quelque chute, que
cette parole où Paul puisait sa force : « j’ai été saisi par
Jésus-Christ » vous relève aussi et vous redonne confiance. Ainsi vous
arriverez à dire tous les jours avec plus d'assurance : « Je cours pour tâcher
de saisir le prix, puisque moi aussi j'ai été saisi par Jésus-Christ ».
QUATRIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
comme le sarment est uni au cep.
« Je
suis le cep, vous êtes les sarments. » (Jean XV : 5)
Jésus employa cette expression « demeurez en moi, »
après avoir prononcé la parabole du cep et des sarments. Cette admirable
parabole nous donne la meilleure illustration de l'union que le Seigneur nous
propose.
Elle nous montre la nature de cette union. Le cep
et le sarment sont unis par une vie commune, non par une union simplement
extérieure, temporaire, résultant du travail de l'homme. Le sarment naturel ou
greffé n'existe que par l'intervention directe du Créateur qui fait circuler
dans le sarment la vie, la sève, la vigueur du cep. De même, l’union du croyant
avec son Sauveur n'est pas le résultat de la sagesse ni de la volonté humaine,
mais d'un acte de Dieu qui établit la communauté de vie la plus intime et la
plus complète entre son Fils et le pécheur. Dieu a envoyé dans nos coeurs
l'Esprit de son Fils! Le même Esprit qui a demeuré et qui demeure dans le Fils,
devient le principe vital du croyant. Dans la communion de ce même Esprit, le
croyant est un avec lui.
La parabole nous enseigne aussi la perfection de
cette union. Entre le cep et le sarment, elle est si complète que l'un n'est
rien sans l'autre et n'existe même qu'en vue de l'autre.
Sans le cep, le sarment
ne peut rien.
C'est au cep qu'il doit sa place dans la vigne, sa vie et sa fécondité. Aussi
le Seigneur dit-il « Sans moi vous ne pouvez rien faire. » Le croyant ne peut
plaire à son Dieu que dans ce qu'il fait par la puissance de Christ habitant en
lui. La sève du Saint-Esprit, qui lui est journellement communiquée, est sa
seule force pour vivre et pour produire quelque fruit.
D'autre part, sans
le sarment, le cep ne peut rien non plus. Il ne peut produire son fruit. Le
sarment n'est donc pas moins indispensable au cep que le cep au sarment ; et là
se manifeste la merveilleuse condescendance de la grâce de Jésus, qu'il se soit
fait lui-même dépendant de ses disciples, comme ses disciples le sont de lui.
Il a besoin d'eux pour dispenser ses bénédictions au monde. Il leur est
indispensable dans le ciel pour produire leur fruit ; mais ils lui sont aussi
indispensables sur la terre pour l'accomplissement de son oeuvre.
Il y a plus encore, avons-nous dit : comme l'un
n'est rien sans l'autre, l'un n'existe qu'en vue de l'autre.
Tout ce que le cep
possède appartient au sarment. Il tire du sol sa nourriture et sa saveur en vue
du sarment. Jésus dit : « Je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée...
Celui qui croit en moi fera aussi les oeuvres que je fais, et il en fera de
plus grandes... Je me sanctifie moi-même, afin qu'eux aussi soient sanctifiés.
» Toute sa plénitude et ses richesses sont au croyant. Tout ce qu'il est dans
le ciel, il l'est pour le croyant. Il se tient comme son représentant devant le
Père.
Enfin tout ce qui est au
sarment appartient au cep. Le seul mérite du sarment est d'être au service du cep, de porter des
fruits qui témoignent de l'excellence du cep. Magnifique image de la vocation
du croyant et de son entière consécration au service de son Seigneur. Il doit
se sentir pressé de se donner complètement à Celui qui s'est donné le premier
Son être entier, ses moindres pensées, tous ses sentiments appartiennent à son
Sauveur, afin que, par lui et pour lui, il puisse produire ses fruits.
Quand on a sondé le sens de cette parabole, on
saisit la vraie force de ce commandement d'amour :
« Demeurez en moi. » Jésus, par cette image, nous
donne à entendre par quels liens indissolubles et vivants il veut nous unir à
lui. Il veut nous faire réaliser notre entière dépendance à son égard, et, en
même temps, la richesse de vie qu'il met à notre disposition. Une fois à lui,
tout ce qu'il possède nous appartient, et nous n'avons qu'à puiser abondamment.
Son intérêt, sa gloire, est que nous soyons des sarments productifs. Nous
sommes incapables, mais il est Tout-Puissant ; nous sommes pauvres, mais il
est riche. C'est pourquoi nous devons demeurer en lui, recevoir ses
instructions, nous soumettre à sa lui, en nous confiant dans sa grâce, et en
ses promesses; croire qu'il est le cep et nous ses sarments.
Comment hésiter encore et ne pas accepter comme une
bénédiction cette communion qui vous est offerte? Jésus ne vous demande que
cela. Croyez qu'une fois à lui, il vous portera comme le cep vigoureux porte le
faible sarment.
Si vous demeurez en lui, il fortifiera votre foi en
vous faisant pénétrer de jour en jour plus avant dans ce mystère de notre union
avec lui, et il vous la rendra toujours plus facile.
CINQUIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
comme vous êtes venus à lui, par la foi.
«
Comme vous avez reçu le Seigneur Jésus-Christ, marchez en lui, étant enracinés et
fondés en lui, et affermis dans la foi, y faisant des progrès » (Col. 2 :
6, 7)
Ces paroles nous montrent que la foi est aussi
indispensable pour progresser dans la vie chrétienne que pour y entrer.
De sincères chrétiens ne le comprennent pas, ou,
s'ils l'admettent en principe, le nient en pratique. Pour eux, l'homme est bien
justifié par la foi, mais ils négligent cette autre vérité : « Le juste
vivra par la foi. » Ils n'ont jamais compris quel Sauveur parfait nous avons
en Jésus. Sauveur qui veut faire chaque jour, pour le pécheur, autant qu'au
premier jour où il est venu à lui. Ils semblent ignorer que la vie de la grâce
est toujours et uniquement une vie de foi, et que le devoir constant du
disciple dans ses relations avec Jésus, est de croire, la foi étant le canal
par lequel la grâce et la force divines parviennent au coeur de l'homme. Le
vieil homme reste mauvais et pécheur jusqu'à la fin chez le croyant; et ce
n'est qu'autant que celui-ci vient chaque jour, vide de lui-même et impuissant,
à son Sauveur pour recevoir de sa vie et de sa force, qu'il peut produire des
fruits de justice à la gloire de Dieu. Aussi est-il dit : « Comme vous avez
reçu le Seigneur Jésus-Christ, marchez en lui, affermis dans la foi, y faisant
des progrès. »
Reportons-nous au moment où, pour la première fois,
nous avons reçu Jésus. Que d'obstacles se présentaient à nous pour nous
empêcher de croire : notre indignité, notre culpabilité. Il semblait impossible
que la promesse de pardon et d'amour s'adressât à d'aussi grands pécheurs que
nous. La conscience de notre faiblesse et de notre état de mort nous rendait
incapables de la confiance et de l'abandon qui nous étaient demandés; la
prévision de l'avenir nous empêchait d'entrer dans une voie où il nous semblait
impossible de persévérer. Ces difficultés se dressaient comme des montagnes sur
notre chemin; mais ces montagnes ont été transformées par la foi à
Cette expérience, nous devons la renouveler pour ce
qui concerne notre habitation en Christ. Maintenant, comme alors, les
tentations qui nous empêchent de croire sont nombreuses. En présence des péchés
commis depuis que nous sommes disciples, il nous semble qu'il est présomptueux
de croire que Jésus nous reçoive dans son intimité et dans la pleine jouissance
de son saint amour. Devant notre incapacité à tenir la résolution la plus
sacrée, nous tremblons à la seule pensée de répondre affirmativement au
commandement du Sauveur de demeurer en lui. Enfin la pensée de la vie d'amour
et de joie, de sainteté et de bonnes oeuvres qui découlerait de notre
habitation en lui nous décourage par sa beauté même: et il nous semble que
prétendre à un tel bonheur, c'est marcher au-devant d'une déception.
Eh bien ! profitons de
notre expérience; et rappelons-nous comment nous avons été conduits à prendre
les promesses de Jésus à la lettre, contrairement à nos sentiments à notre
jugement même, et combien nous avons été bénis. Il nous a reçus et pardonnés;
il nous a aimés et sauvés; et s'il a fait cela pour nous lorsque nous étions
ennemis, étrangers, que ne fera-t-il pas maintenant que nous sommes à lui? Si,
par sa grâce toute-puissante, nous sommes à lui, ne serons-nous pas, par cette
même grâce toute puissante, capables de demeurer en lui?
Et que faut-il croire, demanderez-vous, pour
demeurer en Christ? Croyez d'abord cette Parole de Jésus : « Je suis le cep. »
La vigueur et la fertilité du sarment dépendent de la force du cep. Ne pensez
pas tant à vous-mêmes, mais commencez par nourrir votre foi de tout ce que
Christ est comme cep, et de ce qu'il est pour nous, ses sarments. Il nous
porte, nous nourrit. Il se charge de notre croissance et de nous faire produire
des fruits. Les sarments, même les plus faibles, sont portés par le cep; ils ne
le portent pas. Demandez au Père qu'il vous révèle par son Saint-Esprit l'amour
et la puissance de ce Christ duquel nous tirons notre vie ; car c'est la
connaissance de tout ce que nous avons en Christ et la foi basée sur cette
connaissance, qui nous feront demeurer en lui et produire des fruits.
Nous ne pouvons trop rappeler aux disciples de
Christ l'importance qu'il y a à exercer leur foi en affirmant qu'ils sont en
lui.
Cette affirmation rend si simple de demeurer en
Jésus! Je suis en Christ : cette simple pensée, nourrie avec soin dans la
prière et dans la foi, dissipe toute difficulté et fait cesser tout effort inutile.
Je suis en Christ je n'ai donc plus qu'à en rendre grâce à mon Sauveur et me
remettre à sa puissance miséricordieuse.
Et cette foi, chose étonnante, produira d'elle-même
tout ce qu'implique cette vie en Christ. La vie chrétienne demande beaucoup de
vigilance et de prière, de renoncement et de combat, d'obéissance et
d'activité; mais tout est possible à celui qui croit. « La victoire qui a
triomphé du monde c'est notre foi. » Cette foi, qui ne regarde pas à la faiblesse
de la créature, mais se réjouit dans la force du Sauveur rend l'âme forte et
joyeuse. Elle se nourrit de toutes les révélations des saintes Ecritures sur la
personne et les promesses de Jésus et, se fiant à cette parole : « Si ce que
vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous demeurerez aussi
dans le Fils et dans le Père ; »
elle vit de toute Parole qui sort de la bouche de Dieu. Ainsi l'âme est
rendue propre à être et à faire tout ce
qu'il faut pour demeurer en Christ.
Croire, croire toujours, croire d'une
foi enfantine et inébranlable à Jésus-Christ comme au cep dont nous sommes les
sarments, voilà la source de notre communion permanente avec lui.
SIXIEME JOUR
Demeurez
en Christ;
car Dieu lui-même vous a unis à lui.
« C'est
par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ. » (1 Cor. 1 : 30)
«
Mon Père est le vigneron. » (Jean XV : 1)
« Vous êtes en Jésus-Christ, » disait Paul aux
disciples de Corinthe. Ils étaient encore bien faibles et charnels, des enfants
en Christ ; néanmoins, Paul, avant de leur adresser ses enseignements, veut
qu'ils sachent qu'ils sont en Jésus-Christ. Notre vie chrétienne tout entière
dépend du témoignage intérieur que nous avons de notre position en Christ: pour
demeurer en lui, il faut que nous nous sachions en lui. Toute exhortation
adressée à des croyants, doit, pour porter du fruit, avoir comme point de
départ le fait qu'ils sont en Christ.
Mais l'apôtre ajoute une chose non moins importante
: « C'est par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ. » Nous devons nous
rappeler, non seulement que nous sommes unis à Christ, mais surtout que cette
union est l'oeuvre de Dieu et non la nôtre, ce qui est une source d'assurance
et de force.
Dans notre union avec Christ, il y a une oeuvre de
Dieu et il doit y en avoir une de nous; celle de Dieu consiste à nous faire
faire la nôtre. La sienne est cachée et s'accomplit dans le silence; la nôtre
est apparente. La conversion et la foi, la prière et l'obéissance sont des
actes dont nous pouvons nous rendre compte, tandis que le principe spirituel et
vivifiant qui nous vient d'en haut, l'oeil ne le distingue pas. Aussi le
disciple qui en vient à dire : Je suis en Christ, peut-il être tenté de
considérer plutôt ce qu'il a fait, que cette oeuvre merveilleuse et invisible
de Dieu qui l'a uni à son Fils. Il est nécessaire cependant de savoir que, lors
de notre conversion, quand nous avons cru et accepté Jésus, c'est la
toute-puissance de Dieu qui agissait en nous, sanctifiant notre volonté,
prenant possession de nous, et accomplissant son plan d'amour en nous plaçant
en Jésus-Christ. Quand le disciple discerne ce côté divin de l'oeuvre de son
salut, il ne peut qu'adorer avec actions de grâce et se réjouir, En repassant
le chemin parcouru, il reconnaît à chaque pas l'oeuvre de Dieu et se dit :
C'est par Dieu que je suis en Jésus-Christ !
Cette expérience le conduira plus loin; elle le
mettra en présence des profondeurs infinies de l'éternité. « Ceux qu'il a
prédestinés, il les a aussi appelés. » Il découvrira que cet appel réalisé dans
le temps présent, découle d'un plan éternel. Avant que le monde fût, Dieu
l'avait choisi en Christ. Avec le prophète il pourra dire : « L'Eternel m'est
apparu depuis longtemps et m'a dit : Je t'ai aimé d'un amour éternel, c'est
pourquoi je t'ai attiré par ma miséricorde. » Il reconnaîtra que son propre
salut fait partie du « mystère de sa volonté, selon le bienveillant dessein
qu'il avait formé en lui-même pour le mettre à exécution lorsque les temps
seraient accomplis » ; et se joignant au corps entier des croyants, il dira
avec eux « En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés
suivant la résolution de celui qui opère toutes choses d'après le conseil de sa
volonté. » Rien ne donne un sentiment plus vif de l'immensité de la grâce
et ne porte davantage l'homme à s'incliner devant elle que la connaissance de
ce mystère. « C'est par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ.
Cette conviction exerce sur le croyant qui cherche
à demeurer en Christ, une influence puissante. Quel fondement sûr pour sa foi,
si tout ce qu'il se sent en droit d'attendre de Christ et de sa plénitude
repose sur le dessein et l'oeuvre du Père ; s'il voit dans le Père, le
Vigneron qui veille avec le même amour sur le Cep, son Fils bien-aimé, et sur
lui, son sarment! Quelle source de paix et de confiance de pouvoir se dire : Si
Dieu, qui a choisi Christ pour être le Cep, l'a formé pour accomplir
parfaitement son oeuvre, Dieu, qui m'a choisi pour m'enter en Christ, s'est
engagé par là même à me garder en lui et à me rendre en tous
points semblable à son Fils, pourvu que je me soumette à son action !
Si vous arriviez à cette conviction, avec quelle
joie et quelle assurance vous feriez monter vos prières vers le Dieu et Père de
Jésus-Christ. Le sentiment de votre dépendance absolue vous ferait découvrir
que votre salut est de vous attendre constamment à Celui qui vous a unis à
Christ, pour qu'il perfectionne son oeuvre et produise en vous le vouloir et le
faire selon son bon plaisir.
Vous trouveriez là un mobile puissant pour
entretenir une vie abondante en fruits. « Nous sommes son ouvrage, ayant
été créés en Jésus-Christ pour de bonnes oeuvres, pour lesquelles Dieu nous a
préparés d'avance, afin que nous les pratiquions. »
Oh! que les croyants
cessent de regarder à eux-mêmes pour se plaindre de leur faiblesse, comme si
Dieu les appelait à une oeuvre pour laquelle il ne les a pas préparés! Qu'ils
acceptent joyeusement et avec foi le fait merveilleux qu'en les unissant à
Christ, Dieu se charge de leur développement spirituel et des fruits qui en
découlent! Alors, toute paresse, toute hésitation malsaine disparaîtront. Sous
l'influence bénie de la foi en la fidélité de Celui par qui ils sont en Christ,
ils se lèveront, pour accomplir leur glorieuse destinée.
Cédez à l'influence puissante de cette parole : «
C'est par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ ! » Méditez-la dans l'adoration
jusqu'à ce que la lumière d'en haut ait brillé dans vos coeurs et vous fasse
reconnaître dans votre union à Christ un effet de la volonté du Père qui est
fidèle pour achever l'oeuvre qu'il a commencée.
SEPTIEME JOUR
Demeurez
en Christ votre sagesse.
«
C'est par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ, lequel est devenu pour nous sagesse
par la volonté de Dieu, et justice et sanctification et rédemption. » (1
Cor. 1 : 30)
Jésus-Christ n'est pas seulement sacrificateur pour
nous obtenir le salut que Dieu a préparé à ceux qu'il aime, et roi pour nous
l'assurer ; il est aussi prophète pour nous le révéler. Comme au jour de la
création, la lumière fut créée en premier lieu, afin qu'en elle toutes les
autres oeuvres de Dieu eussent la vie et la beauté, de même, de tous les dons
qui nous sont réservés en Jésus-Christ, la sagesse est mentionnée en premier
dans notre texte, comme renfermant les trois autres dons qui suivent. La vie
est la lumière de l'homme. En nous faisant connaître le Père, Christ nous fait participants de la vie éternelle. « Il est devenu pour nous
sagesse. » En lui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science.
Pour en jouir, nous devons demeurer en lui; voilà ce qu'il nous faut mieux
saisir. Les bénédictions que Dieu nous a préparées en son Fils, ne peuvent nous
être accordées hors de Christ ou indépendamment de lui; l'exaucement de chacune
de nos prières relativement à ces dons, ne peut nous venir que d'une union
toujours plus intime avec lui.
Si vous soupirez après cette connaissance de Dieu
qui donne la vie éternelle, demeurez en Jésus ; la vie dans le Fils conduit à
cette communion avec le Père, qui, seule, nous le fait réellement connaître et
nous révèle son amour, sa puissance, sa gloire infinie. Votre intelligence
pourra peut-être ne pas tout saisir et vous ne saurez exprimer tout ce qui vous
sera donné; mais vous aurez cette connaissance intime et profonde qui vient de
ce que « nous sommes connus de lui. »
Vous aimeriez arriver, comme Paul, à regarder
toutes choses comme une perte à cause de l'excellence de la connaissance de
Jésus-Christ. Demeurez eu Jésus et « soyez trouvés en lui, » c'est ainsi que
nous connaissons Christ et la puissance de sa résurrection et la communion de
ses souffrances. » En le suivant nous ne marchons pas dans les ténèbres, mais
dans la lumière de la vie.
Vous voudriez comprendre l'oeuvre de Jésus telle
qu'il l'a accomplie sur la terre ou la poursuit du ciel par son esprit; vous
voudriez savoir comment il peut devenir notre justice, notre sanctification et
notre rédemption. C'est précisément en devenant votre sagesse qu'il vous le
révélera. Aussi, lorsqu'il vous arrive d'être troublés
par des questions sans nombre auxquelles vous ne trouvez pas de réponses,
dites-vous bien que cela vient de ce que vous ne regardez pas à lui comme à
votre sagesse. Que votre premier soin soit donc de demeurer en lui de tout
votre coeur; la connaissance viendra dans la mesure où Christ votre sagesse le
jugera bon. Sans cette union intime, la connaissance n'est d'aucun profit elle
est même dangereuse. L'âme se contente de pensées qui ne sont que l'image de la
vérité, sans recevoir la vérité elle-même. Dieu donne Christ, et cachés en lui,
les trésors de la sagesse et de la connaissance, tandis que l'homme cherche la
connaissance d'abord et souvent hélas! s'en tient là.
Appliquez-vous seulement à posséder Christ, à demeurer en lui, à faire de lui
votre vie ne cherchant la connaissance que dans une communion toujours plus
intime avec lui, et vous aurez la science qui donne la vraie vie.
Voir en Jésus votre sagesse, et attendre avec
confiance de lui toute instruction nécessaire pour vivre à la gloire du Père,
quelle bénédiction! Aussi, pour tout ce qui concerne notre vie spirituelle,
demeurez en lui comme étant votre sagesse. Vivre en Christ est quelque chose
de trop sacré pour que nous puissions nous en charger. Lui seul peut nous
guider et nous donner, par son Esprit, le discernement, non seulement de ce qui
convient à notre dignité d'enfants de Dieu, mais surtout de ce qui peut aider
ou nuire à notre union avec lui.
Et quand vous ouvrez
Pour tout ce qui concerne votre vie journalière,
enfin, demeurez encore en Jésus votre sagesse. Notre corps est son temple, et
notre vie de chaque jour, la sphère qui nous est assignée pour le glorifier. Si
vous croyez à sa présence et à son amour, il vous dirigera dans vos affaires
terrestres de sorte qu'elles tourneront à sa gloire. L'abandon de vous-mêmes à
sa direction vous donnera un esprit calme, libre de toute passion, et un
jugement sûr. Votre prière pour obtenir la sagesse, comme celle de Salomon,
sera exaucée au delà de ce que vous aurez demandé ou pensé.
De même, pour tout travail entrepris pour le
service de Dieu, reposez-vous sur Jésus comme étant votre sagesse. « Nous avons
été créés en Jésus-Christ pour de bonnes oeuvres pour lesquelles Dieu nous a
préparés d'avance afin que nous les pratiquions. » Ainsi, bannissez toute crainte de ne pas
discerner ces oeuvres. « Nous avons été créés en Christ pour elles. » Il vous
les désignera lui-même et vous montrera comment les accomplir. Apprenez à être
joyeux dans la confiance qu'il vous conduit en toute sûreté, même là où vous ne
pouvez voir l'issue du chemin qu'il vous fait parcourir. Il sait toutes choses;
et quiconque marche en lui, n'ignore rien de ce qu'il doit savoir.
Oui, demeurez en Christ, votre sagesse. Cultivez en
vous cet esprit d'attente et de dépendance qui ne veut agir que sous la direction
d'en haut. Toujours plus convaincus de l'incapacité du coeur naturel pour comprendre
les choses de Dieu, renoncez à votre propre sagesse, ne comptant que sur celle
de Jésus pour vous enseigner et vous diriger, même dans ce que vous avez à
croire et à faire. Seulement, souvenez-vous que la sagesse divine n'enseigne
ni ne dirige du dehors, mais en vivant en vous. Qu'elle habite donc abondamment
en vous et vous serez conduits en tonte connaissance et en toute sagesse.
HUITIÈME JOUR
Demeurez
en Christ votre justice.
«
C'est par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ, lequel est devenu pour nous,
sagesse par la volonté de Dieu, et justice, et sanctification et rédemption. »
(1Cor. 1 : 30)
La justice est la première bénédiction que Christ,
notre sagesse, nous révèle comme nous étant préparée en lui. Il est facile de
comprendre pourquoi elle vient en premier. Il ne peut y avoir de prospérité et
de progrès que dans la paix, et il n'y a de paix que là où règnent le droit et
la justice. Or, le péché avait troublé toutes nos relations, nous étions en
guerre avec nous-mêmes, avec les hommes et avec Dieu. Pour que le salut que
Jésus nous apportait pût nous être en bénédiction, il fallait tout d'abord
qu'il nous procurât la paix comme hase de notre développement moral et
spirituel. Jésus-Christ est venu rétablir l'harmonie sur la terre et dans notre
âme par la justice, en accomplissant pour nous la volonté de Dieu. Parce qu'il
est Melchisédec, roi de justice, il est roi de Salem, c'est-à-dire roi de paix.
(Heb VII : 2) Ainsi s'accomplit ce que les prophètes ont annoncé : « Alors
le roi règnera selon la justice. L'oeuvre de la justice sera la paix et le
fruit de la justice, le repos et la sécurité pour toujours. » (Esa. XXXII :
1, 17.) « Christ est devenu pour nous, justice par la volonté de Dieu; » — «
par Dieu nous sommes en lui, devenu notre justice » et « nous sommes devenus
en lui justice de Dieu. » Ici encore ce n'est que par notre union avec la
personne de Christ que nous pouvons être au bénéfice de cette justice.
Le pécheur, amené à se confier en Jésus pour son
salut, commence en général par regarder plus à l'oeuvre qu'à la personne de
Jésus-Christ, En contemplant la croix où Christ, meurt, lui juste pour les
injustes, il voit dans cette mort expiatoire le fondement unique, mais
suffisant de sa foi au pardon miséricordieux de Dieu. La pensée que la justice
de Jésus le rend juste aux yeux de Dieu, suffit pour lui donner la paix. «
Etant Justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu, » et il s'efforce de
revêtir cette robe de justice par la foi en ce don précieux.
Mais en avançant, il éprouve le besoin de mieux
comprendre comment Dieu peut ainsi justifier l'impie par la justice d'un autre.
L'Ecriture lui répond alors par cette admirable description de l'union du
fidèle avec Christ, second Adam. Christ s'étant fait un avec les siens, les
siens ne forment qu'un même corps avec lui. D'accord avec la loi de la nature,
en vertu de laquelle les membres du corps participent à l'activité, aux
souffrances, en un mot, à la vie de la tête, le fidèle uni à Christ est
pleinement participant de sa justice. Le croyant est ainsi amené à sentir que
ce n'est que dans une union personnelle avec Christ, la tête, qu'il peut être
au bénéfice de la puissance de la justice pour placer son âme dans la faveur et
la communion parfaite du Dieu saint. L'oeuvre de Christ ne lui est pas moins
précieuse, mais sa personne le devient davantage : l'oeuvre le conduit à la
personne.
Cette expérience, à son tour, jette un nouveau
jour sur plusieurs passages de l'Ecriture dont il n'avait pas jusque-là saisi
la portée, passages qui montrent clairement combien la justice de Dieu, en
devenant nôtre, est liée à la personne même du Rédempteur.
« Voici le nom dont on l'appellera l'Eternel notre
justice. En l'Eternel seul résident la justice et la force. — Il est devenu pour nous justice par la
volonté de Dieu. » - « Afin que nous devenions en lui justice de Dieu. » « Afin
d'être trouvés en lui avec la justice qui vient de Dieu. Il voit que sa justice
et la vie en Christ sont inséparables : « Par un seul acte de justice, la
justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes. — Ceux qui reçoivent
le don de la justice règneront dans la vie par Jésus-Christ lui seul. » Et il
entrevoit le sens profond de cette parole qui est la clef de l'épître aux
Romains : « Le juste vivra par la foi. » Il ne lui suffit plus alors de
considérer cette justice qui lui est imputée comme un manteau qu'il doit
revêtir ; mais s'enveloppant de la personne même de Jésus, il sent combien la
justice de Dieu n'est la sienne qu'en tant qu'il est en Christ. Avant d'en
arriver là, il trouvait difficile de vivre habituellement sous le couvert de
cette justice ; mais maintenant que c'est le Christ lui-même qui est sa
justice, ce Christ qui veille sur lui, le garde et l'aime comme membre de son
propre corps, il lui devient aisé de marcher tout le jour revêtu de sa présence
bénie. Ce nouveau pas le conduit encore plus loin. La vie et la justice étant
indissolublement unies, le croyant, par son union à Christ, acquiert la
conscience d'une nature juste enracinée en lui. « L'homme nouveau créé en
Jésus-Christ, est créé dans une justice et une sainteté véritables. » — «
Celui qui pratique la justice est juste comme lui-même est juste. » Son union
avec Jésus a effectué un changement, non seulement dans ses rapports avec Dieu,
mais aussi dans son état personnel devant lui. Et si cette union est maintenue,
la justice devient peu à peu sa propre nature par le renouvellement progressif
de l'être tout entier ; sa vie témoigne de cette union avec le juste.
Une fois que le chrétien a pénétré le sens profond
de ces mots : « Christ est devenu pour nous justice, » il est à peine
nécessaire de lui recommander de demeurer en lui. Aussi longtemps qu'il ne se
regardait que judiciairement juste à cause de l'expiation de Jésus-Christ, la
nécessité de demeurer en lui n'était pas évidente pour lui; mais à mesure que
la gloire de l'Eternel, sa justice se dévoile à ses yeux, il comprend de
lui-même que le seul moyen de se maintenir en tout temps parfait et acceptable
devant Dieu, c'est de demeurer personnellement en Christ, en qui se fortifie sa
nouvelle nature de juste. La pensée principale du pécheur repentant était la
justice qui vient par Jésus mourant pour le péché; pour le croyant intelligent
et avancé. Jésus, personne vivante, par qui vient la justice est tout ;
car en le possédant, il possède aussi la justice.
Demeurons fermes en Christ devenu notre justice;
car nous portons en nous une nature entièrement vile et corrompue qui se relève
toujours pour étouffer le sentiment de notre acceptation devant Dieu et
contester le droit que nous avons à une communion permanente avec le Père.
Cette habitation constante en Jésus, notre justice, nous rend seuls capables de
marcher tous les jours, sans être ébranlés, dans la lumière et dans la paix;
seule, elle nous permet de jouir des dons réservés pour nous en Christ, et
d'entrer dans le repos de Dieu où règnent la joie et le bonheur.
NEUVIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
votre sanctification.
« C'est
par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ lequel est devenu pour vous sagesse par
la volonté de Dieu, et justice, et sanctification, et rédemption. » (1
Cor. 1 : 30)
« Paul à l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe, à
ceux qui ont été sanctifiés en Jésus-Christ, appelés à être saints. Ainsi commence
le chapitre dans lequel Christ est présenté comme notre sanctification. Dans
l’Ancien Testament, les croyants sont appelés les « justes » ; dans le
Nouveau, « les saints sanctifiés en Jésus-Christ ». Saint est plus
que juste (1). Par rapport à Dieu, saint, s'applique
à sa personne; juste, à la manière dont il agit envers ses créatures. Chez
l'homme la justice n'est que le premier pas vers la sainteté. C'est par elle
qu'il peut s'approcher le plus de la perfection de Dieu. (Comp. Math. V, 48 ; 1
Pierre I, 16). La justice se trouvait sous l'ancienne Alliance, tandis que la
sainteté n'y est que figurée, en attendant d'être réalisée en Jésus-Christ, le
Saint, puis dans ses disciples, les saints.
Dans notre texte, ainsi que dans l'Ecriture en
général, la justice précède la sainteté ; il en est de même dans l'expérience
personnelle. Lorsque le croyant trouve en Christ sa justice, il en éprouve une si grande joie, qu'il se préoccupe peu de sainteté. Le
besoin, cependant, s'en fait bientôt sentir, et il cherche le moyen de
l'obtenir. Il arrive souvent alors que le croyant poursuit en vain, pendant
des années, la sanctification, comme si elle devait être le fruit de sa
reconnaissance et de ses efforts personnels, jusqu'à ce qu'enfin il écoute
l'enseignement de l'Esprit qui, encore ici, donne gloire à Christ en le révélant
comme étant, lui-même notre sanctification, que nous devons nous approprier par
la foi seule.
La sainteté est la nature même de Dieu elle a été
manifestée en la chair et mise à la portée de l'homme en Christ, le Saint de
Dieu. Celui-là seul est saint qui est uni Dieu par Christ, et il le deviendra
dans la mesure où il demeurera en lui.
Nous avons dans l'arbre greffé une vivante
illustration de cette oeuvre de sanctification proportionnée à l'union du
fidèle avec son Sauveur. On peut greffer un arbre de manière à ce qu'une
branche seule porte de bons fruits, tandis que d'autres branches naturelles
portent encore leurs fruits sauvages. Vrai type de ces chrétiens chez lesquels
une faible partie de la vie est sanctifiée, mais en qui, par ignorance ou pour
d'autres raisons, la vie charnelle a gardé, sur bien des points, toute sa puissance.
On peut encore greffer un arbre en coupant toutes les branches, de sorte qu'il
soit entièrement renouvelé pour porter de bons fruits; toutefois, si on ne
veille pas à la tendance du tronc à produire des pousses naturelles, celles-ci
peuvent croître et affaiblir la nouvelle greffe en absorbant toute la sève.
Tels sont les chrétiens qui à leur conversion avaient tout abandonné pour
suivre Jésus et semblaient fermes en la foi, mais qui ont laissé, par manque de
vigilance, d'anciennes habitudes reprendre peu à peu le dessus; ils végètent
dans leur vie chrétienne et portent peu de fruits.
Mais pour changer radicalement la nature d'un
arbre, il faut le prendre jeune encore, couper la tige à fleur de terre et le
greffer à l'endroit même où il sort du sol ; puis veiller sur le moindre
rejeton de l'arbre sauvage, qui pourrait paraître, pour l'enlever, jusqu'à ce
que la sève soit concentrée sur la branche greffée, qu'elle y coule librement
et que la nature sauvage soit entièrement vaincue. Cet arbre nouveau, produisant
des fruits succulents, est un emblème du chrétien qui a appris, par une pleine
consécration, à tout abandonner pour Christ et à demeurer constamment en lui
dans une foi vivante.
Ce chrétien-là a compris que, par lui-même, il est
enclin au mal, incapable d'aucun bien, — « ce qui est bon n'habite pas en moi,
» — que l'oeuvre de la sanctification peut seulement s'accomplir en lui par le
don d'une nouvelle nature en Christ, et par l'intervention constante de Dieu
pour détruire impitoyablement tout ce qui tient à sa propre nature, afin de
favoriser le développement de la vie sainte de Jésus-Christ en lui. Il sait
même s'associer à cette oeuvre de sanctification en priant Dieu de la
poursuivre, et en se livrant volontairement à l'action divine. Il produit ainsi
des fruits de sainteté à la gloire de Dieu.
Dieu a promis de nous rendre saints; ne craignons
pas de réclamer l'accomplissement de ses promesses. N'écoutons pas la voix qui
prétend que la corruption du vieil homme est trop grande pour que la sainteté
puisse s'établir en nous.
« Ce qui est bon n'habite pas en moi, »
c'est-à-dire dans notre chair, et cette chair quoique crucifiée avec Christ,
n'est pas encore morte; elle cherchera continuellement à se relever pour nous
induire au mal. Mais « c'est par Dieu que nous sommes en Christ », et la vie
sainte et puissante de Jésus triomphera de notre nature corrompue. Le vieil
homme subsiste avec ses penchants; mais le nouvel homme est là aussi. Christ,
notre sanctification est vivant ; et, en lui, toutes nos pensées, nos
sentiments, nos désirs, peuvent être sanctifiés à mesure qu'ils naissent, et
tourner à la gloire du Père.
Vous qui avez soif d'une vie sainte, demeurez en
Christ, votre sanctification. Regardez à lui comme le saint de Dieu. Ne
considérez pas la vie de sainteté comme un travail et un effort constant, mais
comme le fruit naturel de la vie de Christ en vous. Abandonnez toute confiance
en vous-mêmes et ne regardez qu'à la présence de Jésus votre force et votre
sanctification ; reposez-vous dans la ferme et paisible assurance que tout ce
qui vous est nécessaire pour vivre dans la sainteté, vous sera communiqué de la
sainteté même de Jésus. Vous connaîtrez ainsi réellement ce que c'est que de
demeurer en Christ votre sanctification.
(1)
DIXIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
votre rédemption.
«
C'est par Dieu que vous êtes en Jésus-Christ, lequel est devenu pour nous sagesse
par la volonté de Dieu, et justice et sanctification et rédemption. » (1
Cor 1:30.)
Nous arrivons ici au haut de l'échelle qui atteint,
dans le ciel, le but auquel doit nous conduire la vie en Christ. Le mot
rédemption, quoique appliqué parfois à la délivrance de la condamnation du
péché se rapporte ici à la délivrance complète et finale de toutes ses
conséquences, quand l'oeuvre du Rédempteur sera pleinement manifestée,
délivrance qui s'étendra même à la rédemption du corps. Ce mot rédemption dirige
nos regards vers la plus grande gloire à venir, et par là même aussi, vers la
plus grande bénédiction dont nous puissions jouir dès maintenant en Christ.
Nous avons vu que Christ, comme prophète, est notre sagesse, nous révélant Dieu
et son amour, ainsi que la nature et les conditions du salut que cet amour nous
a préparé. Comme sacrificateur, il est notre justice, rétablissant nos
relations avec Dieu et nous assurant la faveur divine. Comme roi, il est notre
sanctification, nous formant et nous conduisant dans l'obéissance à la sainte
volonté du Père. Quand il aura, par ces trois offices, accompli le grand
dessein de Dieu, le salut sera consommé ; la délivrance complète du péché et de
toutes ses conséquences sera opérée; et l'humanité, rachetée, retrouvera en
Christ tout ce qu'elle avait perdu.
Ainsi, nous sommes, non seulement appelés à
contempler Jésus sur la terre, nous enseignant par ses paroles et son exemple,
sur la croix, nous réconciliant avec Dieu, dans sa résurrection, Roi victorieux
recevant sa couronne, mais encore nous avons à le chercher à la droite de Dieu,
rentré dans « la gloire qu'il avait eue auprès du Père avant que le monde fût
fait, » et tenant, cette gloire-là en réserve pour nous. Sa nature
humaine, affranchie de toutes les conséquences du péché auxquelles il s'est,
pour un temps assujetti, est unie à la majesté divine. Comme Fils de l'homme,
il demeure sur le trône et dans le sein du Père. La délivrance est complète,
éternelle. Il est devenu rédemption.
Il l'est devenu pour nous : croyons-le; et mieux
nous le réaliserons, mieux nous ferons l'expérience déjà ici-bas des «
puissances du monde à venir. » A mesure que notre communion gagnera en
intensité avec lui, et que nous laisserons l'Esprit saint nous le révéler dans
sa gloire céleste, nous sentirons davantage la puissance d'une vie divine agir
en nous; nous aurons un avant-goût de la vie et de la gloire
éternelles.
Par cette communion, l'âme est délivrée de la
crainte de la mort, crainte que le Sauveur lui-même a connue. Mais il a
triomphé de la mort, son corps même est entré dans la gloire, et le fidèle uni
à Christ sa parfaite rédemption, remporte spirituellement, déjà maintenant, sa
propre victoire sur la mort. Il ne voit plus en elle que l'acte qui le délivre
des derniers lambeaux de son vêtement charnel avant d'entrer dans la gloire où
il sera revêtu du corps glorifié. La tombe est pour lui le champ où la semence
est déposée corruptible pour en sortir incorruptible. La résurrection du corps
n'est plus une doctrine stérile ; elle devient une espérance vive même une
réalité anticipée; car « l'Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d'entre
les morts habite en nous » comme le gage de la vie qui sera rendue aussi à nos
corps mortels. (Rom. VIII, 11-23). Cette espérance exerce une influence
sanctifiante et nous porte à livrer volontairement nos membres souillés pour
être mortifiés et mis au service de l'Esprit, en attendant le temps où notre
corps tout entier sera changé et rendu semblable au corps glorieux de Christ.
Il est difficile de faire saisir la portée de cette
parfaite rédemption de Christ s'étendant aussi au corps. C'est de l'homme
complet, âme et corps, qu'il est dit qu'il fut « fait à l'image et à la
ressemblance de Dieu. »
Dieu avait créé les anges, esprits sans corps matériels; et, d'autre part, la
matière existait sans l'esprit dans la création. L'homme devait être l'oeuvre
la plus parfaite de l'art divin, la combinaison de la matière et de l'esprit
dans une complète harmonie, comme symbole de l'union de Dieu avec sa propre
création. Le péché survint dans le monde et parut devoir entraver le plan de
Dieu : la matière acquit sur l'esprit
une effrayante suprématie. Il fallut encore que
En attendant, notre devoir est de nous appuyer sur
cette parole : « Par Dieu vous êtes en Christ, votre rédemption. » Ce n'est
point une révélation à laisser pour les temps futurs. Pour le plein
développement de notre vie chrétienne, nous devons, dès à présent, chercher, en
demeurant en Christ, à la pénétrer, à la saisir, et à nous l'approprier. Pour
cela, apprenons à triompher de la mort, à regarder Christ comme le Chef de
notre corps, réclamant son entière consécration, et nous assurant même ici-bas,
(si notre foi sait aller jusque-là), la victoire sur la puissance du péché dans
le corps (Marc XVI : 17, 18). Habituons-nous à considérer la nature
entière comme faisant partie du royaume de Christ et destinée à participer à la
rédemption. Laissons les puissances du siècle à venir agir en nous pour nous
faire goûter par anticipation ces choses qui ne sont point montées au coeur de
l'homme.
Demeurez en Christ, votre rédemption que ce soit le
couronnement de notre vie chrétienne. Mais ne cherchez pas à y parvenir tout
d'abord et indépendamment de la connaissance de Christ dans ses autres
relations. Il ne peut être notre rédemption que si nous sommes fidèles à
demeurer en lui, comme notre sagesse, notre justice, notre sanctification.
L'expérience que nous aurons faite de l'étendue et de la puissance de l'oeuvre
de Christ nous amènera à attendre, à réaliser par la foi sa parfaite rédemption
; et nous vivrons, dès ici-bas, en Jésus notre rédemption, en étant affranchis
de la domination de la chair, et comme les héritiers de la gloire à venir ;
ayant enfin compris la place assignée à l'homme par Dieu dans l'univers, à
savoir que « toutes choses lui sont assujetties, » nous serons rendus capables
de répondre à cette vocation céleste.
ONZIÈME
JOUR
Demeurez
en Christ crucifié.
« Je
suis crucifié avec Christ et je vis, non plus moi-même, mais Christ vit en
moi! » (Gal. 2:20)
«
Nous avons été faits une même plante avec lui par la conformité à sa
mort. » (Rom 6 : 5)
L'apôtre disait : « Je suis crucifié avec
Christ ; » il réalisait donc pleinement sa communion aux souffrances et à
la mort de Christ, et il faisait également l'expérience des bénédictions de
cette communion, puisqu'il pouvait ajouter avec autant d'assurance « Je vis,
non plus moi-même, mais Christ vit en moi ». Cette expérience de la
solidarité avec Jésus dans sa mort, est d'une grande efficacité. Pouvoir se
considérer comme personnellement mort dans la mort de Christ, parfaitement
obéissant dans son obéissance, victorieux sur le péché dans sa victoire, et
entièrement délivré de sa domination dans sa délivrance; reconnaître par expérience
que la puissance de cette mort agit par la foi constamment en nous pour
mortifier la chair, voilà la source de cette vie nouvelle qui nous fait être
une même plante par la conformité à sa résurrection. La communion habituelle
avec Jésus crucifié, fortifie et développe en nous cette nouvelle vie qui naît
toujours de la mort de la vieille nature.
L'expression de Paul : « Faits une même plante avec
lui par la conformité à sa mort », nous aide à comprendre ce que signifie :
demeurer en Christ crucifié. La greffe introduite dans l'arbre dont elle doit
tirer sa vie, doit y rester; elle est fixée dans le tronc à la place où
l'incision a été pratiquée pour la recevoir. Pas de greffe sans meurtrissure,
pour atteindre les sources même de la vie de l'arbre. Il en est de même du
pécheur à l'égard de Jésus. Pour participer à la vie de Christ et à la
puissance qui est en lui, pour être conforme à lui dans sa résurrection, il
nous faut d'abord être faits une même plante avec lui
par la conformité à sa mort, être entrés dans sa meurtrissure; et, comme la
greffe, y demeurer pour recevoir en nous la vie de Jésus.
Mais la greffe, pour être unie à l'arbre, doit être
séparée de son propre tronc ; elle aussi doit être taillée pour pouvoir
s'adapter à la place qui lui est préparée dans le nouveau tronc. De même, pour
le fidèle, il faut qu'il meure à sa vieille nature et soit rendu conforme à
Christ par la mort, pour trouver la vie en lui.
S'il y a communion de souffrances avec Christ, si
nous sommes animés des mêmes dispositions que Christ a manifestées en se
chargeant de sa croix, si nous reconnaissons, comme lui, la justice du jugement
et de la malédiction prononcés sur le péché par un Dieu saint, si nous livrons
à la mort avec lui notre vie chargée de péché et de malédiction, la clouant,
par la foi, sur la croix, pour arriver à la vie nouvelle, nous ferons avec lui
l'expérience que le renoncement à soi-même, le sacrifice de Gethsémané et de
Golgotha, est le chemin de la joie et de la vie de résurrection.
Par notre communion avec Jésus crucifié, nous
apprendrons à voir dans la croix, non seulement notre expiation devant Dieu,
mais aussi notre victoire sur Satan ; non seulement notre délivrance de la
condamnation, mais encore notre affranchissement de la puissance du péché ; non
seulement le tribut payé à la mort, mais en même temps le gage d'une vie
nouvelle.
La croix est le point de réunion entre Christ et
l'homme. Pourquoi? Parce que, pur la croix, le Fils de Dieu partage le sort de
l'humanité maudite, et associe l'homme pécheur à sa vie divine. Sa
participation à la mort nous donne la communion à sa vie. Par la mort, le
prince de la vie a triomphé de la puissance de la mort; et, là seulement, il
peut nous rendre participants de cette victoire. La vie, pour nous, naît de la
mort. Nous ne pouvons avoir communion avec Celui qui nous a rachetés de la
malédiction, que par la communion avec Celui qui est « maudit pour nous et
pendu au bois. » Il est venu nous chercher sur la croix, nous devons le
rencontrer là; car sur la croix est notre place plus que la sienne ; il y est
par son libre choix, nous y sommes de droit. Mais là il y a échange ; tandis
qu'il prend sur lui notre corruption, nous revêtons sa vie. Ainsi, de la croix
de malédiction, il a fait une croix de bénédiction. C'est par la communion
intime et journalière avec Christ crucifié, que nous goûterons la grandeur de
son amour, la puissance de sa vie, et la plénitude de son salut.
Il est profond le mystère de la croix de Christ.
Beaucoup de chrétiens se contentent de contempler Christ, mourant pour nos
péchés et se soucient, peu d'entrer en communion avec ses souffrances. Beaucoup
n’ont aucune idée de ce que c'est que d'être crucifié avec Christ ; ils
considèrent les afflictions ordinaires de la vie qu'ils ont en commun avec
les enfants du monde, comme leur participation à la croix de Christ. Mais se
charger de la croix de Christ, c'est être animés des
mêmes sentiments qui ont conduit Jésus dans le sentier de l'obéissance. Nul ne
peut dire : « Je suis crucifié avec Christ, » je demeure en Christ
crucifié, sans connaître l'abandon de sa volonté propre, le renoncement à tout
désir de la chair, la séparation complète d'avec le monde, d'avec sa manière de
penser et d'agir, sans savoir perdre et haïr sa propre vie, et s'oublier dans
l'intérêt des autres. Voilà les dispositions de celui qui s'est chargé de la
croix de Christ.
Demandez à Dieu qu'il vous rende, par son
Saint-Esprit, participants de la croix de Christ, en vous apprenant, non
seulement à croire en Christ crucifié, mais encore à demeurer en lui, afin
qu'étant « une même plante avec lui par la conformité à sa mort, vous le soyez
aussi par la conformité à sa résurrection. »
DOUZIÈME JOUR
Demeurez
en Christ.
Dieu
lui-même vous affermira en lui.
«
Celui qui nous affermit avec vous en Christ, c'est Dieu. » (2 Cor. 1 : 21)
Il
est bon de nous rappeler que notre affermissement en Christ est l'oeuvre du
Père aussi bien que notre union à lui.
« L'Eternel achèvera de pourvoir à ce qui me
concerne. » — « Celui qui a commencé en vous cette bonne oeuvre, la rendra
parfaite pour le jour de Christ. » Celui qui nous affermit avec vous en Christ,
c'est Dieu. » Voilà autant de promesses dont nous devrions nous nourrir; car
elles sont propres à nous garder du découragement, et nous montrent le vrai
chemin du progrès dans la vie en Christ. Combien de chrétiens se plaignent des
fluctuations continuelles de leur vie spirituelle. Un jour, ils sont pleins
d'amour et de zèle pour Dieu; le lendemain, tout est perdu. Prières, efforts,
résolutions, rien ne leur fait retrouver la communion de Dieu. Et leur foi en
est ébranlée. Tout cela vient de ce qu'ils ne comprennent pas que Dieu seul
peut nous affermir en Christ. Leurs efforts sont la cause même de leurs chutes
; de même que, pour leur justification, ils ont dû y renoncer et saisir par la
foi les promesses de vie, de même pour l'oeuvre de la sanctification, ils ont
besoin d'apprendre à ne s'assurer qu'en Dieu seul; et ils recevront de lui, en
abondance, ce qu'ils cherchent vainement par eux-mêmes. « Dieu est fidèle, lui
qui nous a appelés à la communion de son fils Jésus-Christ. »
Quelle source de paix, de savoir que Dieu veille à
notre croissance, qu'il travaille lui-même à rendre parfaite notre union avec Christ,
éloignant ce qui peut nuire à cette union, pourvoyant à ce qui peut la
favoriser. Quel repos de remettre enfin et complètement à ses soins notre vie
en Christ, et de sentir que tout ce que nous faisons pour demeurer plus
fidèlement en son fils, nos désirs, nos pensées, nos prières, ne sont que la
manifestation de son oeuvre en nous; car c'est lui qui nous affermit, en nous
portant, à veiller, à attendre, à travailler. Mais il ne peut accomplir cette
oeuvre avec puissance que lorsque nous
cessons de l’entraver par nos propres efforts, et
acceptons par la foi la position
dépendante qui, en même temps qu'elle l'honore, ouvre le coeur à son action.
Alors, au milieu de la vie bruyante et agitée du monde, des tentations subtiles
et incessantes du péché, au milieu des soucis journaliers et des épreuves, même
les plus grandes, l'âme, confiante, conserve la paix, sachant que Dieu
l'affermit en Christ.
Cette bénédiction est à la portée de tous ceux qui
ont cru. Et la foi à cette parole « Celui qui vous affermit avec nous en
Christ, c'est Dieu, » ne nous donnera pas seulement la paix, mais sera le
moyen de réaliser les progrès que nous désirons. L'Ecriture nous enseigne que
dans toute la conduite de Dieu envers son peuple, la foi a toujours été la condition
de la manifestation de sa puissance; elle met un terme à tous les efforts de la
nature, elle affranchit de tout joug; la foi, c'est la faiblesse qui s'avoue et
saisit la promesse de Dieu en réclamant son accomplissement elle consiste à
nous remettre tranquillement entre les mains de Dieu pour qu'il fasse lui-même
son oeuvre.
Voyez ce que dit l'Ecriture :
« C'est le Très Haut qui l'affermit »
(Ps. 87: 3) —
« A Celui qui peut vous affermir... soit la
gloire aux siècles des siècles. » (Rom. 16 : 25)
« Il se tiendra debout, car le Seigneur a le pouvoir
de l'affermir. » (Rom. 14 : 4)
« Il vous affermira aussi jusqu'à la fin, pour que
vous soyez irréprochables au jour de notre Seigneur Jésus-Christ. » (1Cor. 1 :
8) —
« Afin d'affermir vos coeurs pour qu'ils soient
d'une sainteté irréprochable devant Dieu. » (1Th. 3 : 13)
« Le Seigneur est fidèle, il vous affermira et vous
préservera du malin. » (2Th. 3 : 37) —
« Le Dieu de toute grâce qui vous a appelés en
Jésus-Christ à sa gloire éternelle... vous perfectionnera lui-même, vous
affermira, vous fortifiera, vous rendra inébranlables. » (1Pi 5 : 10).
Nous avons là suffisamment de promesses pour nous
permettre de croire que, nous aussi, quelque vacillante qu'ait été jusqu'ici
notre vie spirituelle, quelque défavorables que puissent nous paraître nos
circonstances ou notre caractère naturel, nous pouvons devenir des chrétiens
affermis.
Commençons par recevoir avec simplicité ces
promesses comme venant de Dieu ; peu à peu la confiance naîtra, et nous en verrons
l'accomplissement en nous. La chose est si simple ; Pourquoi faut-il tant de
temps pour la comprendre? N'est-ce pas peut-être que la grâce offerte est si
divinement grande, tellement au-dessus de nos pensées, que nous n'en comprenons
pas toute la portée? Le chrétien qui a découvert ce qu'elle renferme et en a
fait l'expérience, subit une véritable transformation dans sa vie spirituelle.
Jusque-là il s'était chargé de son propre bonheur ; maintenant Dieu en prend
soin. Il ne demande plus qu'une chose : se sentir continuellement entre les
mains de Dieu et le suivre sans hâte ni retard, attendant qu'il produise en lui
le vouloir et le faire selon son bon plaisir.
Quelle vie bénie qu'une vie de confiance comme
celle-là! Mais, direz-vous peut-être, nous avons essayé d'abandonner ainsi le
soin de notre vie intérieure à Dieu, mais nous ne pouvons le faire d'une
manière suivie; nous oublions, nous nous relâchons; et, au lieu de commencer
chacune de nos journées en nous déchargeant joyeusement des besoins et des
soucis de notre vie spirituelle sur le Père, nous nous sentons de nouveau inquiets et languissants. Vous n'avez sans doute pas
remis au Père le soin mène de vous rappeler votre privilège de pouvoir, chaque
jour, renouveler votre abandon entre ses mains. La mémoire est une grande
puissance de notre nature. Par elle, un jour se lie à l'autre, l'unité de la
vie est conservée à travers nos années, et nous nous reconnaissons nous-mêmes.
Dans la vie spirituelle aussi, le souvenir est d'un grand prix, et Dieu a
pourvu à la sanctification de notre mémoire. Le Saint-Esprit a pour mission de
nous en tenir lieu. Jésus dit « Il vous rappellera tout ce que je vous ai dit.
» Il nous est donné pour nous affermir. « Celui qui nous a affermis en Christ
avec vous, c'est Dieu, lequel nous a aussi marqués d'un sceau, et a mi» dans
nos coeurs les arrhes de l'Esprit. » Il vous rappellera non seulement les
promesses de Dieu, mais les actes de foi qu'elles ont provoqués en vous, et les
bénédictions que vous en avez reçues; et il vous portera ainsi à renouveler vos
expériences. Abandonnez donc, dès maintenant, à Dieu, le souci de vos progrès,
avec le soin de vous rappeler, jour après jour, la nécessité de ne compter que
sur lui seul pour être affermis en Christ. Il le fera, et votre foi grandira
journellement et deviendra toujours plus joyeuse.
TREIZIÉME JOUR
Demeurez
en Christ dans une communion de tous les instants.
« En
ce jour-là, chantez un cantique sur la vigne. Moi, l'Eternel, j'en suis le
gardien, je l'arrose à chaque instant ; de peur qu'on ne l'attaque, nuit et
jour, je la garde. » (Esa. 27 : 2, 3)
La vigne était le symbole du peuple d'Israël, au
milieu duquel devait se trouver le vrai cep, le sarment étant le type du fidèle
individuellement uni au cep. Ce cantique sur la vigne s'applique aussi au cep
et à chacun des sarments; et le devoir des gardiens de la vigne est encore de
répéter à chaque sarment : « Moi, l'Eternel, j'en suis le gardien, je l'arrose
à chaque instant; de peur qu'on ne l'attaque, nuit et jour je la garde. »
Nous avons là, semble-t-il, la réponse de la bouche
même de Dieu à cette question si souvent posée : Est-il vraiment possible au
croyant de demeurer sur cette terre dans une communion ininterrompue avec Jésus
? « Non, sûrement pas par ses propres forces. » Mais « ce qui est
impossible aux hommes est possible à Dieu. » Si le Seigneur lui-même veut
garder l'âme nuit et jour, veiller sur elle et l'arroser à chaque instant, la
communion constante avec Jésus devient une possibilité à ceux qui peuvent se
confier à la fidélité de Dieu pour accomplir ce qu'il a promis. L'union du
sarment au cep subsiste jour et nuit, été et hiver, communiquant constamment la
vie du cep au sarment, et la communion du fidèle avec son Sauveur est
permanente.
Dans un sens, on peut dire qu'il n'y a pas de
fidèle qui ne demeure toujours en Jésus. « Si quelqu'un ne demeure pas en moi,
il est jeté dehors. » Mais quand Jésus dit : « Demeurez
en moi, » en ajoutant « Celui qui demeure en moi porte beaucoup de
fruits, » il parle de cet acte conscient, de libre abandon du coeur qui ne
veut plus vivre qu'en lui.
Il y a deux objections principales qu'on oppose à
la possibilité de demeurer toujours en Jésus, volontairement consciemment.
L'une est tirée de la faiblesse de la nature humaine. Nous n'avons pas la
faculté de faire deux choses à la fois, dit-on; et le chrétien, obligé de
donner à ses affaires une attention soutenue, ne peut en même temps se
maintenir en communion active avec Christ. Cette communion est considérée comme
exigeant un tel effort et une telle tension de l'esprit, que, pour pouvoir en
jouir, il faudrait sortir de la vie ordinaire. Nous reconnaissons là l'erreur
qui a entraîné les premiers moines au désert.
Mais il n'y a heureusement aucune nécessité à se
retirer du monde. Demeurer en Jésus, ce n'est pas un travail qui absorbe à
chaque instant les facultés de l'esprit et du coeur ; c'est se confier à la
garde de son amour, dans l'assurance qu'il se tiendra près de nous, nous préservera
de tout mal et nous dirigera, tandis que nous serons engagés dans les affaires
de la vie, de sorte que le coeur est en repos, se sentant gardé quand il ne
peut se garder lui-même.
Nous avons autour de nous de nombreux exemples de
fortes affections exerçant leur empire sur l'âme, tandis que l'esprit est
absorbé par des travaux divers. Le mari occupé tout le jour à son bureau, loin
de sa femme, est de coeur et d'esprit avec elle: quoi qu'il se passe des heures
où il ne peut pas même lui accorder une pensée, tout ce qu'il fait, il le fait
en vue d'elle et sous son influence. Ne peut-il pas en être de même avec Jésus?
Et mieux encore; car il habite lui-même en nous. Ne peut-il pas prendre
possession de notre esprit et de notre coeur, tellement que nous ayons
constamment conscience de sa présence? Sa communion est une communion de vie ;
et, au travail comme au repos, nous pouvons sentir sa vie agissant en nous.
L'autre objection se base sur notre état de péché.
Les chrétiens sont si accoutumés à considérer le péché journalier comme inévitable,
que, pour eux, c'est chose admise que personne ne peut demeurer dans une communion
permanente avec le Sauveur. Mais n'est-ce pas précisément parce que nous avons
une nature entièrement corrompue, que Dieu nous a préparé une union avec
Christ, le saint, comme notre unique délivrance? Comment nous donnerait-il ce
commandement : « Demeurez en moi, » sans nous assurer la grâce et la
puissance de le faire?
Ayez recours à Dieu comme au gardien d'Israël dont
il est dit « L'Eternel te gardera de tout mal, il gardera ton âme ; » et vous
apprendrez à croire que Dieu a bien réellement préparé une communion de chaque
instant à tous ceux qui l'aiment.
Poursuivez ce but. Avant de l'atteindre vous
rencontrerez peut-être bien des difficultés, d'autant plus que vous pouvez
être entourés de chrétiens en grand nombre qui sont loin d'être des témoins de
la fidélité de Dieu, comme Caleb et Josué, encourageant leurs frères à monter
pour posséder le pays et leur disant : « Nous y serons vainqueurs. »
« Si l'Eternel nous est favorable, il nous mènera
dans ce pays. » Que ces difficultés ne vous arrêtent pas, qu'elles vous portent
au contraire à vous appuyer davantage sur la parole de Dieu lui-même.
Tous n'arriveront pas de la même manière à cette
communion. Les uns la recevront subitement comme un don; en temps de réveil,
quand l'Esprit agit sur un grand nombre d'âmes à la fois, ou dans la solitude,
la lumière peut se faire tout à coup, et cette vie de communion se révéler
comme une chose toute simple qu'on s'étonne de ne pas avoir comprise plus tôt.
D'autres y arriveront plus difficilement, à travers les chutes et les
découragements par une lutte de chaque jour ; que ceux-là ne craignent pas ;
ce chemin conduit aussi sûrement au repos ; qu’ils serrent dans leur coeur
cette promesse : « Moi, l'Eternel, je la garde huit et jour, je l'arrose à
chaque instant » qu’ils voient là
le gage de l'amour de Dieu qui les y
fera parvenir.
Qui que vous soyez, ne doutez plus de la
possibilité de demeurer en Christ chaque instant de votre vie; ne pensez plus
que les devoirs et les soucis, que les chagrins et les péchés doivent réussir à
nous en priver ; mais prenez plutôt, avec l'apôtre, le langage de la foi : «
J'ai l'assurance que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les dominations,
ni les choses présentes, ni les choses à venir, ni les puissances, ni la
hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature, ne pourra me séparer de
l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ, notre Seigneur. » Et chaque
fois que votre foi chancelle, fortifiez-vous par ces paroles « Moi, l'Eternel,
j'en suis le gardien, je l'arrose à chaque instant ; de peur qu'on ne
l'attaque, nuit et jour je la garde. »
QUATORZIÈME JOUR
Demeurez
en Christ jour après jour.
« Le
peuple sortira et ramassera jour après jour la quantité nécessaire. » (Ex.
16 : 4)
Jour après jour la
quantité nécessaire :
telle était la règle pour la manne; telle est encore la loi pour toutes les
dispensations de la grâce de Dieu envers ses enfants. Ce principe, bien
compris dans toutes ses applications, est d'un grand secours. Le plus faible
peut ainsi parcourir joyeusement, presque sans s'en douter, sa carrière
terrestre. Un malade, gravement atteint, demandait à son médecin « Combien de
temps aurai-je à souffrir? » — Seulement un jour à la fois, fut la
réponse. Dieu enseigna cette leçon à son peuple dans tous les âges. C'est déjà,
sans doute, dans cette pensée d'amour et de compassion pour la faiblesse de
l'homme, qu'il fit succéder la nuit au jour, le jour à la nuit. Le repos de la
nuit prépare au lendemain et permet de reprendre chaque jour la vie comme tout
à nouveau; l'expérience porte son fruit, les fautes de la veille sont évitées.
Dieu ne nous demande d'être fidèle qu'un jour à la fois, mais un jour s'ajoute
à l'autre, une année à une autre année; ainsi la vie a soin d'elle-même et se
passe sans que le sentiment de sa longueur et de son poids devienne un fardeau.
Cette pensée est des plus encourageantes pour notre
vie spirituelle. Que d'âmes s'inquiètent de savoir comment elles pourront
ramasser la quantité de manne nécessaire à leur long voyage, au travers du
désert aride de la vie! Ce grand principe : jour après jour, enlève tout souci
du lendemain. Aujourd'hui seul nous appartient ; demain est au Père. Inutile
alors de nous demander quelle garantie nous avons de pouvoir demeurer en Jésus
toute notre vie au milieu des rigueurs, des tentations et des épreuves du
monde. La nourriture et la force, comme la manne, ne sont accordées qu'au jour
le jour. La fidélité dans le présent est notre seule garantie pour le futur.
Acceptons et jouissons, accomplissons de tout notre coeur ce que nous avons
faire aujourd'hui, et l'expérience du secours de Dieu aujourd'hui nous ôtera
toute crainte de manquer de confiance demain.
Nous voyons par là le prix que nous devons attacher
à chacune de nos journées. Nous sommes facilement portés à considérer la vie
comme un tout et à négliger le court espace d'un jour ; nous oublions que les
jours font les années, que la valeur d'un jour dépend de son influence sur tout
l'ensemble de la vie. Un jour perdu est un anneau brisé de la chaîne et en
demande souvent plus d'un pour être réparé ; il déteint sur le suivant et le
rend plus difficile à passer: il peut même rendre inutile le travail de mois et
d'années.
Voulons-nous demeurer en Jésus? Faisons-le jour
après jour. C'est autre chose encore que de demeurer en lui à chaque instant.
Il y a beaucoup de moments dans notre vie où nous demeurons en Jésus en nous
reposant simplement sur l'assurance qu'il nous garde; mais pour nous assurer
cette communion de tous les instants, nous devons renouveler chaque jour notre
acte d'abandon et de confiance. C'est là demeurer en Christ jour après jour.
Dieu a groupé en quelque sorte nos moments en journées afin que nous apprenions
à les compter. Si nous les considérons d'avance le matin ou les repassons le
soir en pesant chaque moment séparément. Nous apprenons à les employer avec
sagesse. Puisque Dieu se présente à nous chaque matin, nous offrant la
bénédiction de la journée pour nous et les nôtres, acceptons-la, reconnaissant
chaque jour à nouveau avec actions de grâce la position qui nous est faite en
son Fils bien-aimé. Comprenons la valeur de chaque jour en vue de notre
vocation à demeurer en Christ. Accueillons-le avec gratitude quel qu'il soit,
jour de santé ou de maladie, de joie ou de tristesse, de repos ou de travail,
de combat ou de victoire, comme un don de Dieu, par lequel nous pouvons être
unis plus Intimement à lui.
La provision de manne pour Israël devait durer tout
le jour, mais la récolte se faisait de bonne heure, le matin. Ceci nous révèle
l'influence qu'a, sur la journée entière, l'emploi de la première heure. « Si
les prémices sont saintes, la manne l'est aussi. » Pendant la journée viennent
les heures de travail et les distractions de tout genre, le Père seul peut nous
garder dans une communion non interrompue avec Jésus. Le fidèle doit s'assurer
dès le matin la provision pour la journée en renouvelant, directement sa
communion avec le Sauveur par un moment de prière et de méditation intime ; et
cette communion l'accompagnera tout le jour.
Quelle bénédiction mise à notre portée !
Pouvoir, dans le silence et la paix du matin, faire
une revue anticipée des différents devoirs et des tentations qui nous
attendent, les traverser pour ainsi dire d'avance avec notre Sauveur, remettant
tout entre ses mains ; puis aller au-devant de la journée dans l'assurance
qu'elle sera une journée de bénédiction et de progrès !
Et quand nous avons appris comment Jésus peut, de
jour en jour, nous garder pour la journée, nous avons trouvé, sans nous en
douter, le secret de cette règle : « Chaque jour, à perpétuité. » (Ex.
XXIX : 38) La fidélité d'un jour prépare celle du lendemain, et rend la
confiance et l'abandon toujours plus faciles. Ce qui paraissait impossible à
atteindre est rendu possible à celui qui se contente d'offrir, jour après jour
selon ce qui est ordonné pour chaque jour. (Esdr. III : 4) Déjà
maintenant, nous pouvons entendre ce témoignage : C'est bien, bon et fidèle
serviteur ; tu as été fidèle en peu de chose, je te confierai beaucoup. Notre
vie devient alors un échange journalier de grâces et de louanges. Nous arrivons
à comprendre pourquoi Dieu ne nous pourvoit que pour un jour à la fois mais
suffisamment pour chaque jour ; et entrant nous mêmes dans cette voie, nous
demandons chaque jour la portion de la journée. La vie spirituelle devient
ainsi continue comme la vie terrestre, et la vie en Christ nous apporte jour après
jour sa bénédiction quotidienne.
QUINZIÈME JOUR
Demeurez
en Christ maintenant.
«
Voici maintenant le temps favorable, voici le jour du salut. » (2 Cor. 6 :
2)
Dans la vie en Christ, l'habitude de vivre d'heure
en heure est d'une importance si capitale, surtout au point de vue de la part
que nous devons prendre dans cette vie de communion, que nous ne saurions trop
y revenir; et à tous ceux qui désirent apprendre ce mode de vivre si béni, nous
leur dirons d'emblée : le meilleur moyen d'y parvenir est de ne s'inquiéter que
du moment présent. Chaque fois que votre attention est libre de se tourner vers
Jésus, soit avec du temps pour réfléchir ou pour prier, soit seulement pour
quelques secondes, que votre première pensée soit : Je suis maintenant en
Jésus.
Ne perdez pas cet instant en vains regrets sur le
passé ou en craintes pour l'avenir ; mais persuadez-vous que, pour le moment
présent, vous êtes en Christ, non parce que vous le sentez, mais parce que vous
le voulez. Ce n'est pas une question de sentiment, ni de progrès ou de force
dans la vie chrétienne; il s'agit simplement de savoir si votre volonté est,
pour le moment, de reconnaître la place qui vous est faite comme croyant, dans
le Sauveur ; car si vous êtes un croyant, vous êtes en Christ, et c'est votre
devoir de vous en rendre compte.
Une des forces de la vie de la foi est renfermée
dans ce mot maintenant. Savoir faire
l'expérience que maintenant, quelles que soient nos circonstances, l'oeuvre du
salut s'accomplit en nous, que maintenant Jésus nous appartient et toutes
choses en lui, que nous pouvons en disposer maintenant, tel est le secret du
repos et de la victoire. Au lieu de chercher en vain à entrer dans un état
d'âme durable qui vous permette de demeurer en Christ d'une manière permanente,
commencez, par la foi, à y demeurer dans le moment présent. Jésus vous gardera
pour le moment suivant, et vous arriverez par ce chemin à la communion de tous
les instants.
La vie de communion permanente n'est pas un don qui
nous soit fait en bloc ; il nous est accordé au fur et à mesure. C'est pourquoi
saisissez toutes les occasions d'exercer votre foi à vous confier pour le
moment présent. Même quand vous êtes surpris par le péché et que votre coeur
est troublé, confessez votre péché comme demeurant néanmoins en Christ,
implorant, malgré tout, les fruits de la communion. Et pourquoi ne pas entrer
dans cette vie de communion constante à cet instant, tandis que vous lisez ces
lignes?
Il y a dans la vie de David un trait qui peut
servir à rendre cette pensée plus claire. (2 Sam. III : 17, 18). David
avait été oint roi en Juda ; les autres tribus suivaient encore Isçbosceth,
fils de Saül. Abner, chef de l'armée de Saül résolut de les amener à se
soumettre à David, le roi donné par Dieu à toute la nation. « Vous désiriez
autrefois avoir David pour roi, dit-il aux anciens; établissez-le maintenant,
car l'Eternel a dit de lui : C'est par David, mon serviteur, que je
délivrerai mon peuple d'Israël de la main des Philistins et de la main de tous
ses ennemis. Ils le firent et oignirent David, une seconde fois pour être roi
sur tout Israël comme ils l'avaient fait une première fois, sur Juda
seulement. » (2 Sam. V : 3)
L’âme suit souvent le même chemin qu’Israël. Elle
ne reconnaît d’abord que partiellement Jésus pour roi; or, le coeur partagé ne
peut vaincre ses ennemis. Jésus est établi roi en Juda, l'endroit de la
montagne sainte, c'est-à-dire dans l'intimité de l'âme; mais le territoire
environnant, la vie journalière, est encore dirigé par la volonté propre et par
d'autres puissances; aussi pas de vraie paix intérieure, ni de victoire sur des
ennemis. Au début, le croyant, comme Israël, a bien désiré que Jésus régnât sur
la vie entière; mais l'incrédulité l'a détourné et l'a privé de la puissance de
Jésus pour l'affranchir de ses ennemis. Il a soif, cependant, de quelque chose
de meilleur, mais sans plus oser l'espérer. La promesse se présente alors de
nouveau avec le maintenant libérateur. « Etablissez-le maintenant ; car
l’Eternel a dit de lui : C'est par David, mon serviteur, que je délivrerai mon
peuple d'Israël de la main des Philistins et de la main de tous ses
ennemis. » Magnifique type de la promesse par laquelle l'âme est invitée à
se confier en Jésus pour obtenir la victoire sur le péché, et une vie de
complète communion. Le triomphe est certain ; car la promesse était de Dieu «
L'Eternel a dit. » Pour nous aussi le triomphe était, certain. (Lu I :
70-75.) « Il a suscité, comme il l'avait annoncé, un Sauveur qui nous
délivre de nos ennemis et de la main de tous ceux qui nous haïssent,... selon
le serment par lequel il avait juré de nous permettre, après que nous serions
délivrés de la main de nos ennemis, de le servir sans crainte, en marchant
devant lui dans la sainteté et dans la justice, tous les jours de notre vie. »
David régnant sur toute l'étendue du pays, conduisant un peuple uni et éclairé,
de victoire en victoire, telle est l'image de ce que Jésus peut faire pour
nous, dès que, par la foi dans la promesse de Dieu, tout lui est assujetti,
qui; notre vie entière lui est abandonnée pour être gardée dans sa communion. «
Etablissez-le maintenant ? » dit Abner. « Voici maintenant le temps favorable,
voici le jour du salut, » dit aussi l'apôtre. Quel que soit le moment présent
que nous soyons préparés ou pris par surprise, maintenant est le temps
favorable pour reconnaître Jésus roi sur notre vie, dans tous ses domaines.
Il faudra sans doute du temps pour que le Seigneur
établisse son règne et mette tout en nous d'accord avec sa volonté, pour qu'il
vainque les ennemis et tourne toutes nos forces à son service. Ce n'est pas
l'oeuvre d’un instant. L'oeuvre d'un instant, de l'instant présent, c'est
l'abandon de tout à Jésus, de notre être entier pour ne vivre qu'en lui. A
mesure que la foi sera rendue, par l'exercice, plus forte et
plus joyeuse, cette consécration peut devenir plus précise et plus
éclairée; mais, en vain, attendrions-nous qu'elle le devint sans la pratique de
la foi. Le seul moyen d'y arriver jamais est d'entrer immédiatement dans cette
voie de complet abandon. « Etablissez-le maintenant, » Jésus est toujours prêt
à répondre à tout acte de foi.
Commencez, et vous expérimenterez bien vite combien
la bénédiction du moment présent se reporte sur le suivant. Quelque insignifiant
qu'il paraisse, le moment présent n'est cependant rien moins que le commencement
du moment toujours présent qui est le mystère et la gloire de l'éternité.
SEIZIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
renonçant à tout pour lui.
«
J'ai renoncé à tout et je regarde toutes choses comme de la boue, afin de
gagner Christ et d'être trouvé en lui. » (Philip. III : 8, 9.)
Partout où il y a vie, il y a échange, et la
faculté de recevoir s'accroit à proportion de ce qu'on donne.
Certains chrétiens font consister les bienfaits de
la vie spirituelle dans le privilège de toujours recevoir; et cependant le
renoncement continuel à tout ce que nous avons peut seul faire abonder en nous
les richesses divines. Jésus insistait beaucoup sur cette vérité. Quand il
parlait de vendre tout pour s'assurer un trésor de perdre sa vie pour la
retrouver, quand il promettait à ses disciples le centuple de ce qu'ils
abandonnaient, il indiquait le sacrifice de soi-même comme la loi du royaume
des cieux, pour lui-même aussi bien que pour tout croyant. En effet, « pour
gagner Christ et être trouvé en lui, » il faut pouvoir dire avec Paul : « Je
regarde toutes choses comme une perte à cause de l'excellence de la
connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur. »
Essayons de découvrir à quoi nous devons renoncer.
Tout d'abord au péché. Il ne peut y avoir de vraie conversion sans l'abandon du
péché. Néanmoins, chez le nouveau converti, soit qu'il ignore ce qui est
réellement péché, ou quelles sont les exigences de la sainteté de Dieu, soit
qu'il ne connaisse pas encore la puissance de Jésus pour nous faire triompher
du mal, la rupture n'est que partielle et superficielle. Mais avec le
développement de la vie chrétienne, le besoin de se séparer toujours plus de
tout ce qui est impur se fait sentir ; et il vient un moment où l'âme, désirant
la communion de Jésus, voit la nécessité d'un nouvel acte de consécration, par
lequel elle ratifie sa mort au péché en Christ, et rompt définitivement avec
tout ce qui est péché pour ne plus servir que la justice. Elle le fait
joyeusement ; car elle a pu constater que chaque péché abandonné favorise la
présence de Christ en elle.
Après le péché vient la propre justice. Quoique
nous nous défendions en toute sincérité du mérite des oeuvres, nous sommes
longtemps avant de savoir ce que c’est que de ne pas s’attribuer la moindre
place et le moindre droit devant Dieu. Sans nous en douter, nous laissons
souvent libre cours aux impulsions de notre esprit, de notre coeur et de notre
volonté. Au lieu de tout attendre du Saint-Esprit, dans tout ce que nous
faisons pour le service de Dieu dans la prière, dans l'adoration, dans la
lecture de
Viennent ensuite les facultés et les dons naturels
que nous tenons de notre Créateur ainsi que les occupations et les intérêts
dont sa providence nous a entourés. C'est une erreur de croire qu'une fois
convertis ces choses sont naturellement au service du Seigneur. Il faut pour
cela une grâce toute particulière. Lors même que nous sommes enfants de Dieu,
nos dons et nos facultés sont encore souillés par le péché et sous la
domination de la chair ; ils me peuvent être employés tels quels à la gloire de
Dieu, et nous sommes par nous-mêmes totalement incapables d'en user
convenablement. Ils sont même dangereux pour nous, parce que, par leur moyen,
la vieille mature, le moi reprend facilement sa puissance. Cette conviction
doit nous amener à y renoncer et à les apporter à Christ pour qu'il en prenne
possession et les purifie; quand il les a acceptés et marqués de son sceau, ils
nous sont rendus, mais pour les considérer dorénavant comme la propriété de
Jésus et attendre de lui seul la grâce d'en user sainement et uniquement sous
son influence. Ici encore, l'entière consécration est le chemin du salut
parfait. Non seulement ce que nous avons abandonné nous est rendu pour être
doublement à nous, mais en renonçant à tout, nous recouvrons tout.
Il en est de même pour toutes les occupations et
les biens légitimes que Dieu nous a confiés, pour le filet des pêcheurs de
Galilée comme pour les devoirs domestiques de Marthe, pour les affections
naturelles : la famille et les amis. Jésus exerçait ses disciples à renoncer à
tout pour lui. C'est, la loi du royaume de sa grâce, que toutes choses sont
faites nouvelles pour nous dans la mesure où les choses anciennes sont passées
ou rejetées.
Ce principe a une application plus profonde encore
: les dons purement spirituels, qui sont l'oeuvre directe de l'Esprit de Dieu
au dedans de nous, ces dons mêmes doivent être remis entre les mains de Dieu.
L'échange continuel, qui est le principe fondamental de la vie, ne peut cesser
un instant. Aussitôt que le croyant commence à se complaire dans la jouissance
de ce qu'il a, la communication de grâces nouvelles est retardée et menace
d'être arrêtée ; les flots de l'eau vive ne peuvent couler que dans l'âme
altérée. Chaque bénédiction doit retourner à Dieu de qui nous la tenons, pour
être mise à sa disposition; alors elle nous apporte le parfum du ciel, et nous
pouvons en recueillir tout le fruit. N'est-ce pas là ce que nous enseigne Isaac
sur Morija ? N'était-il pas le fils de la promesse le don miraculeux de la toute
puissance de Celui qui fait revivre les morts? (Rom. IV : 17). Et pourtant
il a fallu qu'il fût immolé pour pouvoir être recouvré et devenir mille fois
plus précieux qu'auparavant.
Ce renoncement à tout pour Christ est-il un acte
unique dans la vie ou bien une marche à poursuivre de jour en jour? L'un et
l'autre. Lorsque le croyant ouvre les yeux à cette vérité, il peut arriver qu'à
un moment donné, disposé par la puissance de
Dieu, il s'offre tout entier et pour la vie sur l'autel en sacrifice vivant et
agréable. Des moments comme ceux-ci ont
souvent marqué la transition bénie d'une vie d'errements et de chutes à une vie
en Dieu dans laquelle se manifeste la puissance divine ; mais encore faut-il
que ce sacrifice soit continu et
journellement renouvelé dans tous les détails de la vie, et qu'une prière incessante monte du coeur pour obtenir une
intelligence toujours plus grande de cet abandon parfait et de cette
consécration constante de toutes choses à Dieu.
La
nature recule devant l'application rigide à tous les détails de la vie d'un tel
renoncement; mais ce que la nature n'aime pas, ce qu'elle ne peut faire, la
grâce l'accomplit ; et elle fait même de cette vie de sacrifices une vie
de joie et de gloire. Ayez recours à cette grâce et vous recevrez le centuple
de tout ce que vous aurez sacrifié. Se donner tout entier à Christ pour le
posséder tout entier, tel est le secret de la vie en Christ.
DIX-SEPTIÈME JOUR
Demeurez en Christ
par la puissance du Saint-Esprit.
« L'onction que vous avez reçue de lui demeure en vous,... comme
cette onction vous enseigne toutes choses,... vous demeurerez en lui, selon
qu'elle vous a enseignés. » (1 Jean II : 27)
Vivre toujours en Christ ! N'est-ce pas là le but de nos désirs ? Néanmoins beaucoup
de chrétiens croient la chose impossible et accueillent avec un soupir cette
invitation de Jésus : « Demeurez en moi. » Nous voudrions leur rendre la
joie et l'espérance en leur rappelant cette parole de Jean qui nous sert de
texte ; car elle affirme que ceux qui ont cru ont reçu l'onction du
Saint-Esprit pour leur enseigner toutes choses, par conséquent aussi
pour leur apprendre comment ils peuvent demeurer en Christ.
Plusieurs, malheureusement, répondront que cette
promesse ne leur est d'aucun secours, n'ayant jamais pu discerner la voix du
Saint-Esprit.
Des pensées comme celle-ci viennent de l'erreur,
très commune, qui consiste à croire que le Saint-Esprit révèle les mystères de
la vie spirituelle à l'intelligence d'abord, et, ensuite seulement, à
l'expérience. Les voies de Dieu suivent une marche exactement inverse. Nous
devons pratiquer la vérité et en faire l'expérience pour la connaître. « Ce que
je fais, tu ne le comprends pas maintenant, mais tu le comprendras bientôt, »
est une règle du royaume des cieux. Accepter ce qu'on ne comprend pas, se
soumettre à ce qu'on ne s'explique pas, croire ce qui paraît impossible,
marcher dans un chemin dont l'issue vous est cachée; voilà les premières leçons
qu'il faut apprendre à l'école de Dieu. « Si vous persistez dans ma doctrine,
vous connaîtrez la vérité. » Le vrai disciple commence par suivre le Seigneur,
et la connaissance vient par sa communion avec lui.
L'enseignement, du Saint-Esprit consiste à diriger
notre vie spirituelle, sans que nous sachions toujours comment, en vue des
choses que Dieu a préparées pour nous. Fort de la promesse de Dieu, et
s'appuyant sur sa fidélité, le croyant, se place sous la direction du
Saint-Esprit, consentant à le laisser faire son oeuvre dans son âme sans toujours s’expliquer ce qu’il fait.
Par la foi, il croit à l'action cachée de l'Esprit dans les retraites profondes
de sa vie intérieure, en sorte que la parole de Jésus-Christ et le don du
Saint-Esprit lui sont une garantie suffisante que l'Esprit lui enseignera comment
demeurer en Christ et l'amènera à la communion constante. Le Saint-Esprit est
l'Esprit de vie en Jésus-Christ ; et son oeuvre n'est pas seulement de produire
la vie nouvelle, mais aussi de l'entretenir de la fortifier et de l'amener à la
perfection. Dans la mesure où le croyant se soumettra sans réserve à la loi de
l'Esprit de vie, sa foi se changera en connaissance, l'Esprit lui révélant dans
Cette expression des Ecritures « la communion de
l'Esprit » nous donne une idée de l'oeuvre immense confiée au
Saint-Esprit. Il est le lien qui unit le Père et le Fils, qui unit les croyants
entre eux, par-dessus tout qui unit Christ et les croyants; il est la sève qui
fait du cep et des sarments une seule et même plante ; si nous croyons à sa
présence en nous et si nous veillons à ne pas le contrister, si nous demandons
sans cesse qu'il nous remplisse, il nous enseigne à demeurer en Christ presque
sans que nous sachions comment, d'abord amenant notre volonté à nous attacher à
Christ de tout notre coeur ; puis animant notre foi d'une confiance et d'une
attente toujours plus grandes; enfin répandant dans notre coeur une paix et une
joie qui surpassent toute intelligence. Passant ainsi par le coeur et la vie à
l'intelligence, il nous fait connaître la vérité, non comme une chose
abstraite, mais comme la réalité qui est en Christ.
Pour être mis en possession de la vie en Christ par
cet enseignement de l'Esprit, nous avons, avant tout, besoin d'une foi calme et
confiante. Au milieu de toutes les questions et les difficultés que peuvent
faire surgir nos propres efforts, quand il nous arrive d'éprouver un ardent
désir d'être aidé par un chrétien d'expérience, ou que nous sommes accablé par
le sentiment pénible de nos chutes, de notre ignorance, de notre faiblesse,
tenons-nous fermes à cette bienheureuse confiance : Nous avons reçu l'onction
du Saint-Esprit pour nous enseigner à demeurer en lui. « L'onction que
vous avez reçue de lui, demeure en vous ; vous demeurerez en lui, selon qu'elle
vous a enseignés. » (1 Jean 2 : 27). Faites de cet enseignement de
l'Esprit concernant la vie en Christ, un
objet spécial de foi. Croyez que si vous l'avez demandé et le demandez encore
au Père, déjà vous avez l'Esprit en vous, qu'il travaille lors même que vous ne
pouvez vous en douter, et qu'il fera son oeuvre avec puissance si vous ne
l'empêchez pas. Il est impossible de vivre une pleine communion avec Christ sans être rempli
du Saint-Esprit. Ayez donc soin de vous placer fréquemment par la prière au
pied du trône de Dieu et de l'Agneau, d'où découlent des flots d'eau vive ; car
c'est là, là seulement que vous pourrez être rempli de l'Esprit. Alimentez
votre foi par
Acceptée ainsi, la vie en Christ peut-elle être
encore un sujet de tristesse et d'effroi? Non, assurément. Si nous connaissions
l'excellence de notre Consolateur et les bénédictions qui découlent d’une
pleine soumission à sa volonté, nous apprécierions mieux le privilège d'avoir
un tel guide pour nous amener à la vie en Christ. Sa mission est de nous faire
réaliser constamment la présence en nous du Sauveur vivant dans toute sa puissance
rédemptrice et la plénitude de sa victoire sur le péché. Il est appelé, à
cause de cela, le Consolateur. Avec lui, nous ne devons jamais pleurer un Jésus
absent.
Ayez donc l'assurance que le Saint-Esprit, qui est
en vous, vous enseignera toutes choses, et qu'il vous fera vivre toujours en
Christ, si vous ne résistez pas à son influence par votre incrédulité.
DIX-HUITIÈME JOUR
Demeurez en Christ en vous tenant en
repos.
«
C'est dans la tranquillité et le repos que sera votre salut, c'est dans le
calme et la confiance que sera votre force. » (Esa. XXX : 15)
« Garde le silence devant l'Eternel
et espère en lui. » (Ps. XXXVII : 7)
« Oui, c'est en Dieu que mon âme se
confie. » (Ps. LXII : 2)
Nous sommes facilement portés à considérer la vie
chrétienne comme une association entre Dieu et l'homme, admettant bien que la
part de l'homme dans cette association est petite et entachée de péché mais que
s'il ne la fait de son mieux, il ne peut attendre de Dieu qu'il fasse la
sienne. Dès lors, nous avons peine à comprendre ce que les Ecritures
entendent, lorsqu'elles parlent de se tenir en repos et d'attendre de voir le
salut de Dieu, lorsqu'elles présentent cette tranquillité et
cette absence de tout effort comme le secret de la force et de la plus grande
activité de l'homme. Voici comment s'explique cette
apparente contradiction. Lorsqu'il est parlé de
Dieu et de l'homme comme travaillant ensemble, il n'est pas question d'une alliance
entre deux associés faisant chacun sa part d'un même travail, mais plutôt d'une coopération
basée sur le principe de la subordination. Comme Jésus était entièrement
dépendant du Père pour toutes ses paroles et ses oeuvres, de même le croyant ne peut rien
faire de lui-même. Il faut qu'il y renonce et attende l'oeuvre de Dieu en lui. Quand il
fait trève à tout effort, la foi lui donne l'assurance que Dieu accomplit ce dont il
s'est chargé, et l'oeuvre de Dieu consiste à
renouveler, sanctifier, stimuler toutes ses
forces, en sorte que selon la mesure où le croyant se
constituera réellement un instrument passif dans sa main, Dieu fera de lui l'instrument
actif de sa toute-puissance. (Jean 5 : 19-28)
L'expérience de la vie
chrétienne sera d'autant plus grande chez le
croyant, qu'il réalisera mieux cette merveilleuse
combinaison d'une entière passivité avec la plus grande activité.
Rien n'est
plus favorable à la communion avec Jésus, que la tranquillité d'âme. Dans cet état seulement, nous pouvons
obtenir la, docilité qui permet au Seigneur de nous révéler ses secrets et de nous montrer
notre chemin.
C'est cette disposition d'esprit que nous voyons se
manifester, dans toute sa beauté, chez ces trois femmes dont parle l'Evangile ; d'abord
Marie qui a pu dire : « Voici la servante du Seigneur, qu'il m'arrive selon que tu m'as dit
; » et dont il est écrit qu'elle « conservait toutes ces choses et les
repassait dans son coeur. » Puis cette autre Marie qui restait
assise aux pieds de Jésus, l'écoutant parler, et qui
montra, en oignant le Seigneur pour sa sépulture, combien elle avait pénétré dans
le mystère de sa mort, plus profondément même que le disciple bien-aimé. Enfin cette
grande pécheresse cherchant son Sauveur jusque dans la maison du pharisien,
avec des larmes qui en disaient plus que des paroles.
Quand l'âme se tient silencieuse en la sainte
présence de Dieu, elle reçoit des enseignements que ses propres efforts et l'agitation de
ses pensées ne lui avaient jamais laissé entendre auparavant ; et elle comprend toujours mieux que son salut est dans ce repos intime : écouter, croire, veiller, attendre pour voir ce que Dieu fera ;
puis, dans la
foi et l'obéissance, se soumettre à l'action de Celui qui opère avec puissance.
Il semble qu'aucun message ne devrait nous être
plus doux et plus précieux que le commandement de rester tranquilles et de nous
tenir en repos, Dieu se chargeant de travailler pour nous et en nous. Pourquoi
avons-nous tant de peine à l'accepter? Pourquoi sommes-nous si lents à
comprendre que la tranquillité de l'âme est une bénédiction, une force, une
source de grande activité, le secret de toute véritable vie en Christ? Cherchons
ensemble ce qui nous prive de ce repos de l'âme. Nombreux sont les dangers qui
le menacent.
Il y a d'abord la dissipation de l'âme, provenant
d'une préoccupation inutile ou trop grande des intérêts de ce monde. Chacun de
nous a sa vocation terrestre; et, dans le cercle prescrit par Dieu, l'intérêt
pour notre travail et pour ce qui le concerne est un devoir. Mais, même en
ceci, le chrétien a besoin de vigilance et de modération. Nous devons encore
plus veiller à une sainte réserve dans les choses qui ne nous sont pas
absolument imposées par Dieu. Si demeurer en Christ, est réellement notre
premier but, prenons garde à cette excitation inutile ; prenons garde même dans
les choses nécessaires et légitimes, au pouvoir extraordinaire qu'elles ont
d'absorber tellement l'âme, qu'il lui reste peu de force et peu de goût pour la
communion avec Dieu. L'inquiétude et les soucis au sujet des choses terrestres,
tendent constamment à détruire la vie confiante, et rendent l'âme semblable à
une mer agitée. Dans cet état, il est impossible d'entendre le son doux et
subtil de l'Esprit.
L'esprit de crainte et de méfiance dans les choses
spirituelles, n'est pas moins nuisible; de même le trouble provenant de ce que
nous cherchons dans nos propres efforts et dans nos propres forces, les
bénédictions spirituelles qui ne viennent que d'en haut.
Enfin, même lorsque l'âme cherche sincèrement à
entrer dans le chemin de la foi, il y a le danger de l'impatience de la chair
qui juge de la vie et des progrès de l'âme au point de vue humain et non divin.
En face de ces dangers et de tant d'autres encore,
heureux celui qui apprend à tenir son âme en repos, selon cette parole : «
C'est dans le calme et la confiance que sera votre force! »
Que personne ne s'imagine pouvoir demeurer en
Christ avec une âme agitée et sans avoir chaque jour son moment de tranquillité,
son heure de méditation, où il écoute son Dieu. Dans ces moments, nous devons
chercher à entrer dans un état d'âme qui nous permette de passer au milieu du
monde et de ses distractions, le coeur et l'esprit remplis de cette paix de
Dieu, qui surpasse toute connaissance et nous garde de tout mal. Ce silence de
l'âme fortifie la foi, permet au Saint-Esprit de se faire entendre et au Père
d'accomplir son oeuvre glorieuse.
Recherchez auprès de Dieu, qui seul peut la donner,
cette disposition d'esprit ; cultivez-la comme un moyen de vivre en Christ et
attendez-vous à la recevoir comme fruit de sa communion.
DIX-NEUVIÈME JOUR
Demeurez
en Christ dans l'affliction et dans l'épreuve.
«
Tout sarment qui porte du fruit, il l'émonde afin qu'il porte encore plus de
fruit. » (Jean XV : 1)
Aucune plante ne donne une plus fidèle image des
relations de l'homme avec Dieu que le cep de vigne. Aucune ne produit un fruit
aussi savoureux, aussi fortifiant tout en ayant une tendance naturelle si
prononcée à pousser des jets sauvages et inutiles. Aucune ne réclame autant de
soins et de culture et ne demande à être taillée aussi souvent et
impitoyablement mais aussi aucune plante ne récompense plus richement de ses
peines le cultivateur. Le Sauveur signale par un seul mot, la nécessité
d'émonder la vigne et le résultat merveilleux qu'on obtient par ce moyen. Mais
quelle lumière ce seul mot jette sur les souffrances des croyants! Quels
trésors de consolations il renferme pour les heures d'épreuves « Tout sarment
qui porte du fruit, il l'émonde afin qu'il porte plus de fruit. » Par ces
paroles Jésus a préparé ses disciples, si facilement ébranlés dans leur
confiance, à voir dans chaque affliction un message qui les sollicite à
demeurer encore plus intimement en lui.
Nous faire demeurer en Christ, tel est, en effet,
le but du Père en envoyant l'épreuve. L'arbre tourmenté par l'orage plonge ses
racines plus profondément dans le sol ; par la souffrance, le Père veut nous
faire pénétrer plus avant dans l'amour du Sauveur. Nos coeurs sont enclins à
s'éloigner constamment de lui ; la prospérité et les jouissances nous satisfont
trop aisément et nous rendent impropres à sa communion. C'est une grâce du Père
de semer des tristesses sur notre route, de nous priver momentanément de joies
devenues dangereuses pour nous. Il le fait pour nous amener à sentir plus vivement
notre état de péché, pour nous pousser à chercher notre repos en Christ, afin
que, lorsque l'affliction sera ôtée, nous soyons tellement affermis en lui, que
dans la prospérité, il soit encore notre seule joie. Quoi qu'il lui en coûte
d'affliger, il n'épargnera pas les châtiments les plus douloureux si, par là,
peut ramener son enfant à demeurer en son Fils bien-aimé.
Appliquons-nous à voir dans toute épreuve, grande
ou petite, un témoignage de son amour.
Demeurons en Christ ; et nous aurons part à toutes les riches bénédictions que Dieu nous destine
dans l'affliction. Notre assurance en son fidèle amour s'affermira, et la
puissance de son Esprit accomplira en nous cette promesse: « Dieu nous châtie pour
notre profit, afin de nous rendre participants de sa sainteté. » Notre croix
deviendra un moyen de communion avec sa croix ; rendus semblables à notre
Sauveur dans ses souffrances, nous aurons une expérience plus intime de son
amour. Nous serons purifiés de toute souillure et affinés comme de l'or pur de
telle sorte que l'image même de Christ se reflétera en nous ; la puissance de
la chair sera détruite, l'impatience et la volonté propre seront domptées et
remplacées par la douceur et l'humilité de Jésus. «Un croyant peut passer sans
profit par beaucoup d'afflictions mais s'il demeure en Christ, il en retire la
bénédiction.
Demeurons en Christ; et nous trouverons en lui une abondante consolation. Dans l'affliction
nous cherchons souvent la consolation d'abord, le fruit seulement ensuite. Le
Père céleste n'oublie pas de nous consoler ; mais il nous aime d'un amour tel
que, pour lui, notre progrès spirituel est son premier objet. S'il console,
c'est pour induire le coeur meurtri à se tourner vers lui ; s'il refuse la
consolation, son but est le même. C'est en nous rendant participants de sa
sainteté qu'il nous donne la vraie consolation. Le Saint-Esprit est le
Consolateur, non seulement parce qu'il nous parle de l'amour de Dieu, mais
surtout parce qu'il nous sanctifie et nous met en communion intime avec Christ,
et, par lui, avec Dieu. En Christ, le coeur du Père se révèle à nous. Où
pourrions-nous être mieux consolés que dans le sein du Père? En lui, nous
trouvons la plénitude de l'amour divin, la tendre sollicitude d'une mère. Que
demander de plus? En lui, nous recevons le centuple de ce que nous perdons, et
nous voyons que Dieu ne nous dépouille que pour nous enrichir. En lui, la
souffrance est sanctifiée et devient le gage que l'Esprit de Dieu repose sur
nous et nous prépare pour la gloire éternelle.
Demeurons en Christ au temps de l'affliction, et nous porterons beaucoup de fruit. L'expérience
que nous ferons alors de sa tendresse et de l'amour du Père, nous amènera à ne
plus vivre que pour sa gloire et pour faire connaître à d'autres ce merveilleux
amour. Ayant appris le renoncement à nous-mêmes et à notre propre volonté, nous
saurons sympathiser avec la misère des autres ; assouplis par l'épreuve,
nous serons préparés à devenir, suivant l'exemple de Jésus, serviteurs de
tous. Déjà pendant l'affliction, nous profiterons de notre retraite forcée pour
intercéder en faveur de nos semblables. La pensée que le Père nous afflige
pour nous faire porter plus de fruit, nous disposera à nous soumettre, afin
que son désir, devenu le nôtre, soit accompli « Tout sarment qui porte du
fruit, il l'émonde, afin qu'il porte encore plus de fruit. »
Le temps de l'affliction sera ainsi un temps béni
qui fera de nous des vaisseaux sanctifiés, propres au service du Maître et
préparés pour toutes sortes de bonnes oeuvres. Rappelons-nous seulement que,
dans l'affliction, la seule chose à faire est de demeurer en Christ.
Tenons-nous en garde contre les consolations et les distractions que trop souvent
nos amis veulent nous apporter; et que Jésus seul soit notre consolateur.
Réjouissons-nous enfin dans la pensée qu'une communion plus intime et un
fruit abondant seront certainement l'issue de l'épreuve, puisque c'est le
Vigneron lui-même qui émonde.
VINGTIÈME JOUR
Demeurez
en Christ,
afin de porter beaucoup de fruit.
« Celui
qui demeure en moi et en qui je demeure porte beaucoup de fruit. — Si vous
portez beaucoup de fruit, c'est en ceci que mon Père sera glorifié. » (Jean
XV : 5, 8.)
Le
sarment est destiné à produire un fruit qui rafraîchit et nourrit l'homme ;
aussitôt mûr, le sarment l'abandonne pour recommencer son travail
d'approvisionnement et préparer un nouveau fruit pour la saison suivante. Mais
il n'opère ce travail qu'en demeurant attaché au cep.
Ainsi
le chrétien, en resserrant son union avec le Cep divin, non seulement accroît
sa force, mais porte du fruit, beaucoup de fruit même et devient pour son
entourage une source de vie.
Notre
parabole jette une nouvelle lumière sur cette parole : « C'est de moi que tu
recevras ton fruit. » (Osée XIV : 8). L'âme ne doit avoir d'autre souci
que de demeurer intimement en Christ; lui-même produira le fruit et se chargera
de faire du croyant une bénédiction pour tous ceux qui l'entourent.
En
demeurant en lui, nous recevons son Esprit d'amour et de compassion pour les
pécheurs. Le coeur naturel est plein d'égoïsme ; même chez le croyant, son
propre salut et son propre bonheur restent, trop souvent, le but exclusif ;
mais au contact de l'amour infini de Jésus, son coeur se réchauffe à l'égard de
ses semblables. Nous apprenons à souffrir et de la misère du pécheur et de
l'injure qu'il fait à Dieu par son impénitence. Avec Christ, nous commençons à
porter le fardeau des âmes, le poids de péchés qui ne sont pas les nôtres; et
plus notre union devient intime, plus nous sentons s'éveiller en nous quelque
chose de cette passion pour les âmes qui a conduit Jésus au Calvaire; nous
sommes prêts à suivre ses pas, à sacrifier notre propre bonheur pour gagner ces
âmes que nous avons appris à aimer. L'Esprit du Cep est amour, et il remplit le
sarment qui y est attaché.
Ce
désir d'être en bénédiction n'est encore qu'un commencement. A peine à
l’oeuvre, nous nous apercevons de notre faiblesse et des difficultés qui sont
sur notre chemin. Les âmes ne sont pas sauvées à notre commandement, et nous
sommes tentés de nous décourager, de ralentir nos efforts. Mais si nous
persistons à demeurer en Christ, nous recevons sans cesse une force et un
courage nouveaux pour notre travail. Toujours plus convaincus que nous ne
sommes que l'instrument indigne par lequel la puissance invisible de Christ
accomplit son oeuvre dans le monde, nous comprenons combien sa force peut être
rendue parfaite et glorieuse dans notre faiblesse. Et c'est déjà un grand point
pour le croyant d'avoir conscience de sa faiblesse, tout en persévérant à
travailler fidèlement, dans l'assurance que le Seigneur opère par son moyen.
Cette conviction même qu'il n'est rien, que Jésus est tout, sert à le faire
demeurer en Christ et devient une force. Il ne considère plus sa propre
faiblesse; mais se sentant un avec son Seigneur il compte sur sa puissance. Il
va de l'avant, sûr de la victoire car « la victoire qui a triomphé du monde,
c'est notre foi. » Pour lui, ce n'est plus faire acte d'humilité que de
prétendre que Dieu ne peut bénir ses efforts indignes: au contraire il réclame
la bénédiction et l'attend, parce que ce n'est plus lui, mais Christ en lui qui
agit. Il demande sans crainte d'être présomptueux, sa part de cette étonnante
promesse : « Celui qui croit en moi fera aussi les oeuvres que je fais, et il
en fera de plus grandes, parce que je m'en vais au Père. » La pensée que
l'absence de fruit et de bénédiction dans son travail, sont nécessaire pour le
garder dans l'humilité, ne l'aborde plus : n'est-ce pas le sarment le plus
chargé de fruit qui est le plus courbé, et n'a-t-il pas reconnu, en demeurant
en Christ, que son fruit est tout à la gloire du Père; qui est le Vigneron.
De
là découle un premier enseignement: Si nous demeurons en Christ, mettons-nous à
l'oeuvre, afin que Jésus puisse produire des fruits abondants par nous'
Acceptons franchement et joyeusement notre sainte vocation d'être, dès
maintenant, les instruments de l'amour de Jésus vis-à-vis de notre prochain. Comme
le sarment ressemble au cep, que quelque chose de la sainteté et de la douceur
de Jésus se réflète en nous; que notre vie journalière soit, comme la sienne,
une prédication; car l'Eglise et le monde ont besoin d'hommes et de femmes
remplis du Saint-Esprit et d'amour, qui soient les témoins vivants de la
puissance de Christ et de sa grâce en faveur de ceux qui croient. Possédés par
le désir de voir Jésus glorifié dans les âmes, offrons-nous aussi à lui pour un
travail positif, dans notre propre maison
auprès des pauvres, des malades, des délaissés. Il y a à faire pour nous de
mille manières différentes que l'Esprit de Christ indique à ceux qui se
laissent conduire par lui; peut-être même devrons-nous servir Jésus par des
moyens nouveaux qui n'ont pas encore été employés, et qui nous seront révélés;
travaillons, travaillons, non pas en nous contentant de prendre part à quelques
oeuvres religieuses, mais en devenant toujours plus semblables à Christ, et en
voyant, comme lui, dans l'oeuvre de gagner des âmes au Père, le commencement,
sur la terre, de la joie et de la gloire du ciel.
Et
voici un second enseignement Si nous travaillons demeurons en Christ. Une des
bénédictions du travail, s'il est fait dans un bon esprit, sera d'affermir
notre union avec notre Sauveur. En constatant notre faiblesse, nous
rechercherons sa force; en priant pour les autres, notre âme s'unira plus intimement
à la sienne. Nous demeurerons en Christ, sentant que les tentations et les dangers
abondent. L'activité, même au nom de Christ, a souvent éloigné de lui et a pris
la place de sa communion ! Elle peut donner les apparences de la piété à qui
n'en a pas la force. Qu'une foi vivante en sa puissance soit le ressort caché
de tout notre travail, et nous serons remplis en même temps d'humilité et de
courage. Encore une fois, pour que Jésus travaille réellement par nous, il faut
une consécration de nous-mêmes entière et de jour en jour renouvelée. Mais nous
comprenons maintenant que c'est justement là demeurer en lui; c'est là ce qui
constitue notre privilège et notre bonheur : être un sarment portant beaucoup
de fruits, rien de plus, rien de moins.
VINGT-UNIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
et vous serez puissant dans la prière.
« Si
vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que
vous voudrez, et cela vous sera accordé. » (Jean XV : 7)
La prière est à la fois un moyen de s'unir à Christ
et un fruit de l'union avec lui. Comme moyen de s'unir à Christ, elle est d'une
importance infinie. Tous les mouvements de l'âme, tous les élans de la foi, ses
désirs, ses aspirations, trouvent leur expression dans la prière. Le croyant
qui prie, entre en contact avec Jésus; et celui qui persévère dans ses
supplications jusqu'à ce qu'il soit exaucé, jusqu'à ce qu'il soit mis en
possession de la bénédiction après laquelle il soupire, trouve dans ses prières
un moyen puissant de demeurer plus complètement en lui.
Mais ce n'est pas tant comme moyen que comme fruit
de la vie en lui, que le Sauveur parle de la prière dans la parabole du cep et
des sarments. Il ne voit pas seulement dans la prière un moyen d'obtenir des
bénédictions personnelles, il y voit une des principales forces dont nous
disposons pour mettre le monde entier au bénéfice de la rédemption; et il nous
assure que si nous demeurons en lui, nous serons autant d'Israël, vainqueurs de
Dieu et des hommes. Nos prières seront l'intercession du juste, fervente,
efficace, puissante comme celle d'Elie en faveur du peuple idolâtre. De telles
prières seront le résultat de notre vie en Christ et produiront beaucoup de
fruits.
Pour le chrétien qui ne demeure pas pleinement en
Christ, la prière rencontre parfois des difficultés assez grandes pour le
priver de la consolation et de la force qu'il devait en retirer. Sous prétexte
d'humilité, il se demande comment une créature aussi indigne que lui pourrait
influencer le Dieu tout-puissant et sage. Ces questions angoissantes sont épargnées à celui qui demeure véritablement en Christ ; il
fait de plus en plus l'expérience que ses prières ne sont entendues et exaucées
que grâce à son union avec le Christ. Parce que nous sommes un avec lui, nos
prières montent à Dieu comme ses propres prières.
En effet, en demeurant en Christ et en gardant sa
Parole, nous apprenons à prier selon la volonté de Dieu. Notre volonté propre
étant domptée, nos pensées, nos désirs naturels s'effacent devant les pensées
et les désirs de Christ ; son Saint-Esprit pénètre tout notre être ; et, sans
que nous sachions comment, nos voeux rendus conformes à la volonté de Dieu
grâce au souffle divin, peuvent recevoir leur accomplissement; notre volonté
étant renouvelée et sanctifiée, nous pouvons demander librement ce que nous
voulons, et cela nous est accordé.
Puis la communion de Christ nous enseigne à ne rechercher
que la gloire de Dieu dans nos prières. Jésus promettait d'exaucer ses
disciples, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. (Voy. Jean XIV :
13) Dans sa prière sacerdotale, nous voyons que cette gloire a été son but sur
la terre (Jean XVII) ; dans le ciel, c'est encore sa grande préoccupation. Celui qui demeure en lui est gagné par ce désir, et la
gloire de Dieu devient sa pensée dominante. D'abord, cette pensée, en
maîtrisant l'âme, la porte presque à craindre de nourrir un désir de peur qu'il
ne se trouve pas être à la gloire du Père. Mais une fois cette suprématie
acceptée, elle devient une puissance qui élève le coeur, l'élargit, le rend
capable d'embrasser le vaste horizon de cette gloire, et de dire avec le Fils :
« Père, glorifie ton nom. »
De plus, si nous demeurons en Christ, nous pouvons
nous prévaloir avec assurance du nom de Christ. Souvent les croyants essaient,
en priant, de penser au nom de Jésus et à ses mérites, cherchant à se persuader
qu'à cause de lui, ils seront exaucés, bien qu'ils sentent péniblement leur peu
de foi en ce nom. Ils n'agissent pas au nom de Jésus et ne veulent s'en servir
que pour prier ; mais la promesse : « Tout ce que vous demanderez en mon nom »,
ne peut être séparé du commandement : « Tout ce que vous faites, faites-le au
nom du Seigneur Jésus. » Si le nom de Christ doit être entièrement à notre
disposition, de telle sorte que nous puissions en user librement, cela fie se
peut que si nous-mêmes, tout d'abord, nous nous sommes entièrement livrés à
lui, et qu'il dispose librement de nous. C'est la vie en Christ qui donne le
droit et la possibilité d'user de son nom avec assurance. Le Père ne refuse
rien au Fils. Si nous demeurons dans le Fils, nous venons au Père, comme ne
faisant qu'un avec lui; sa justice nous couvre, son Esprit est en nous, le Père
nous voit dans le Fils et nous accorde notre requête. Ce n'est point par une
sorte de compromis que le Père nous considère comme étant en Christ, sans que
nous y soyons réellement. Il faut que le Père nous voie vivre en lui, pour que
nos prières le fléchissent. Non seulement la vie en Christ transforme notre
volonté de manière à ce que nos prières soient conformes à l'esprit de Dieu,
mais encore elle nous impute la vertu toute-puissante des mérites de Christ.
Demeurer en Christ produit aussi en nous la foi qui
seule obtient l'exaucement. Selon la règle du royaume des cieux, il nous est
fait selon notre foi. « Croyez que vous recevrez et il vous sera accordé.
» Cette foi a ses racines dans
Enfin, en Christ, nous sommes à la seule place où
la réponse peut nous être accordée. Que de chrétiens implorent ardemment la
bénédiction de Dieu; et quand Dieu vient a eux pour les bénir, il ne sait pour
ainsi dire pas où les prendre ; ces chrétiens-là ne se doutent pas que la
réponse aussi doit être attendue et reçue dans la prière' C'est en Christ
qu'elle nous est donnée; hors de lui, l'exaucement risquerait d'être mis au
service de nos voluptés. (Jacq. IV : 3) Les meilleurs exaucements du
reste, comme le don de la grâce ou de la force pour travailler et faire le
bien, ne nous viennent que sous la forme d'une expérience croissante de ce que
Christ peut être fait pour nous de la part de Dieu.
Demeurons en Christ, et nous apprendrons, ce que
tant d'âmes ignorent, que le secret de la prière de la foi est la vie de la
foi, la vie en Christ seul.
VINGT-DEUXIÈME JOUR
Demeurez
en Christ et dans son amour.
« Comme le Père m'a aimé, je vous ai aussi aimés.
Demeurez dans mon amour. » (Jean XV : 9)
Avant de nous inviter à demeurer dans son amour, le
Sauveur nous enseigne ce qu'est cet amour. Ce qu'il nous en dit est bien propre
à gagner nos coeurs et à éloigner toute pensée de résistance.
« Comme le Père m'a aimé, je vous ai aussi
aimés. » Dieu est amour. L'amour n'est pas un de ses attributs, il est
l'essence même de sa nature le centre de toutes ses perfections. L’amour a
besoin d'un objet sur lequel il puisse s'exercer ; c'est pourquoi Dieu a un
Fils, et au sujet de ce Fils, il dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé
en qui j'ai mis toute mon affection. » Cet amour du Père est une divine
passion, un feu brûlant, intense, éternel, n'ayant qu'un objet, qu'une joie :
le Fils unique. Quand nous considérons tous les attributs de Dieu, son
éternité, sa perfection, son immensité, sa majesté, sa toute-puissance, qui
sont le rayonnement de la gloire de son amour, nous n'avons encore qu'une idée
bien faible de cet « amour qui surpasse toute connaissance. » Et pourtant
l'amour de Dieu pour son Fils est placé devant nous comme le miroir où nous
pouvons contempler celui de Jésus pour le pécheur. Jésus, lui aussi, met toute
son affection dans ses rachetés.
Son amour est éternel. Déjà avant la fondation du monde, nous
dit
Son amour est parfait. « Le Père aime le Fils et lui a remis
toutes choses. » Jésus aime les
siens de la même manière; tout ce qu'il a nous appartient. Il a sacrifié son
trône et sa couronne ; il a donné sa vie et son sang; sa justice, son Esprit,
sa gloire, son trône même, tout, tout est à nous. Et c'est dans cet amour sans
réserve qu'il nous invite à demeurer tous les jours de notre vie.
Son amour est doux et
tendre.
L'amour du Père pour le Fils se comprend ; car, dans le Fils, tout en est
digne. Mais nous ne pouvons nous expliquer celui de Christ pour nous quand nous
ne voyons en nous que péché et que nous nous sentons indignes même de
rencontrer son regard. Comment l'amour du Père, exercé dans le sein de la vie
divine et de ses perfections, peut-il être comparé à celui qui a pour objet des
pécheurs? Peut-il lui être semblable? Oui, la nature de l'amour est toujours la
même, quoique son objet diffère. Christ ne peut aimer autrement que son Père,
et notre misère ne sert qu'à manifester avec plus d'éclat la beauté de cet
amour. Il s'abaisse jusqu'à notre faiblesse, il supporte nos lenteurs, nos
craintes et nos folies, avec une patience et une douceur infinies. C'est
l'amour du Père pour le Fils, embelli, glorifié par la miséricorde et la
compassion.
Son amour enfin est
invariable.
« Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde il manifesta son amour
jusqu'à la fin. » — « Quand les montagnes s'éloigneraient, quand les
collines chancelleraient, mon amour ne s'éloignera point de toi. » (Esaie 54 :
10)
« Je ne t'abandonnerai point que je n'aie fait ce
que je t'ai dit, » (Genèse 28 : 15) telles sont les promesses avec lesquelles
il entreprend son oeuvre dans notre âme. Et puisque notre misère est
précisément ce qui nous a d'abord valu cet amour, le péché par lequel nous
l'affligeons constamment, qui pourrait nous rendre craintifs et nous faire
douter, n'est qu'une raison de plus pour lui de nous aimer.
Et maintenant cet amour nous donne le motif, la
mesure et le moyen de l'abandon de nous-mêmes à Christ.
Le motif : Cet amour ne nous presse-t-il pas de
rendre enfin les armes et de demeurer en Celui qui nous a aimés de toute
éternité, qui a quitté la gloire éternelle pour s'offrir sur la croix, et qui,
dans le ciel, intercède, plaide et prie constamment pour nous?
La mesure :
Jésus s'est donné tout entier ; pouvons-nous hésiter à nous livrer entièrement?
quel sacrifice pourrait nous coûter en face de son
grand sacrifice? S'il nous réclame tout, entiers, c'est pour nous remplir plus
complètement de son amour ; tout ce que nous abandonnons nous est compensé au
centuple déjà dans cet te vie. Oh puissions-nous comprendre les richesses
infinies et les trésors de joie que tient en réserve pour nous cet « amour dont
la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur surpassent toute
connaissance, » afin de profiter du privilège qui nous est offert !
Le moyen : Si
nous avons encore des doutes sur la possibilité de demeurer dans cet amour,
cet amour même nous fournit le moyen de le faire; la foi en cet amour suffit
pour nous en rendre capables. Si nous le croyons réellement divin, puissant,
intense comme celui du Père pour le Fils, nous compterons sur son efficacité
pour nous garder, pour triompher de notre faiblesse et de notre péché. C'est là
tout ce que Dieu demande de nous ; il nous a créés libres et ne veut pas nous
imposer ses bénédictions ; il n'attend que notre consentement et, pour gage de
notre acquiescement, il se contente, dans sa bonté de la foi par laquelle nous
nous remettons à son amour.
VINGT-TROISIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
comme Christ demeure dans le Père.
« Comme le Père m'a aimé, je vous ai aussi aimés.
Demeurez dans mon amour... de même que je demeure dans son amour ! » (Jean
XV : 9,10).
Tandis qu'il était sur la terre, Jésus avait
enseigné à ses disciples que demeurer en lui, c'est demeurer dans son amour ;
sur le point de les quitter il leur donne pour commentaire de son commandement sa propre vie. Qu'ils le contemplent,
lui, demeurant dans l'amour du Père, et ils sauront comment demeurer dans son
amour. Sa vie dans le Père sera le modèle de leur vie en lui.
Cette pensée est si profonde, que nous pouvons à
peine la concevoir; elle est cependant exprimée d'une manière assez positive
pour que nous n'osions pas la négliger. Ne lisons-nous pas dans Jean VI :57 : « Comme je vis par le Père, ainsi celui qui me mange,
vivra par moi, » et n'entendons-nous pas le Fils demander à son Père : « Qu'ils
soient un comme nous sommes un? » — « Je suis en eux et tu es en moi. »
Examinons donc sa vie dans le Père et nous comprendrons ce que doit être la
nôtre en lui.
Considérons d'abord l'origine de cette vie de
Christ dans le Père. Elle avait ses racines dans une double union de vie et
d'amour. Quoique demeurant sur terre, Jésus savait qu'il était un avec le Père,
que la vie du Père était en lui, et que son amour reposait sur lui. Sans cette
certitude, il lui eût été impossible de demeurer dans le Père et dans son
amour. De même, nous ne pouvons demeurer en Christ et dans son amour, qu'en
croyant que nous sommes un avec lui. Un par nature ; car il a revêtu notre
humanité ; et, par notre nouvelle naissance, nous sommes faits participants de
sa nature divine. Un dans l'amour ; car le lien de la vie divine, est celui
d'un amour infini. Dans la vie d'humiliation sur la terre, Jésus a goûté le
bienfait de cet amour divin, la force que donne la conviction d'en être
l'objet et de pouvoir y demeurer constamment. Par son exemple, il nous invite à
faire la même expérience. Puisque nous sommes un avec lui, confions-nous en son
amour qui nous presse; laissons-le pénétrer dans nos coeurs.
Et quel est le moyen par lequel le Fils demeure
dans le Père et dans son amour? « J'ai gardé les commandements de mon Père, et
je demeure dans son amour. » Sa vie a été une vie de soumission et de dépendance.
Pour notre nature orgueilleuse, dépendance et soumission signifient humiliation
et servitude; mais dans la vie d'amour dont le Fils de Dieu vécut et à laquelle
il nous invite, ces deux conditions sont le secret du bonheur. Que pouvait
perdre le Fils en se soumettant? Le Père l'aime et n'a aucun intérêt qui ne
soit le sien; si le Fils donne quelque chose au Père, le Père met à sa
disposition tout ce qu'il a. Aussi, quand Jésus dit : « Le Fils ne peut rien
faire de lui-même, il ne fait que ce qu'il voit faire au Père, » il ajoute
aussitôt : « Tout ce que le Père fait, le Fils aussi le fait pareillement. Car
le Père aime le Fils et lui montre ce qu'il fait. » Quand nous étudions la
vie de Christ comme le modèle et le gage de ce que peut être la nôtre, nous
comprenons que si Jésus nous dit : « Hors de moi vous ne pouvez rien
faire. » c'est qu'il nous permet d'ajouter :
« Je puis tout par Christ qui me fortifie » Nous apprenons à nous
plaire dans les faiblesses, dans les calamités, dans les détresses à cause de
Christ ; car nous pouvons dire : « Quand je suis faible, c'est alors que
je suis fort. » Dépendance, soumission, sacrifice personnel, sont, pour le
chrétien comme pour Christ, le chemin de la vie et du bonheur.
Contemplons aussi la gloire de cette vie de Christ
dans l'amour du Père. Parce qu'il s'est consacré à la volonté et à la gloire du
Père, le Père l'a couronné de gloire et d'honneur. Il l'a établi comme son seul
représentant, l'a fait participant de sa puissance, et l'a élevé jusqu'à lui faire
partager son trône divin. Il en est de même pour nous. Si Christ nous trouve
disposés à remettre notre personne et nos intérêts à son amour, à renoncer à
toute satisfaction de notre propre volonté pour ne trouver notre gloire que
dans une absolue dépendance de lui en toutes choses, à accepter de n'avoir de
vie qu'en lui, il fait pour nous ce que le Père a fait pour lui. Il fait
reposer sa gloire sur nous « Comme
le nom de notre Seigneur Jésus-Christ est glorifié en nous, nous sommes
glorifiés en lui. » (Voyez 2Th. 1 : 12.) Il nous reconnaît comme ses
représentants ; nous pouvons disposer de sa puissance ; il permet que notre
intercession ait une part dans le gouvernement de son Eglise et du monde ;
il se sert de notre intermédiaire pour exercer son autorité et son influence
sur les hommes, pour accomplir son oeuvre divine. Quelle vie bénie que celle de
l'âme qui demeure dans l'amour de Christ comme Christ demeure dans celui du
Père!
Faisons des relations du Fils avec le Père, un
objet constant d'étude pour connaître ce que doivent être les nôtres avec
Christ. Notre vie en lui peut être aussi féconde, puissante, glorieuse qu'était
la sienne dans le Père. Acceptons cette vérité dans la foi, et, loin de nous
paraître encore un joug et un travail, la vie dans l'amour de Christ deviendra
pour nous, au contraire, une source de repos, de force et de joie. Demeurer
dans cet amour tout-puissant, qui sauve, qui garde, qui rassasie, comme Jésus a
demeuré dans l'amour du Père, ne peut être notre oeuvre, la grandeur même de la
vocation nous le fait sentir ; il faut pour nous, comme pour lui, que ce soit
le fruit d'une vie intérieure sanctifiée et le résultat du travail profond de
l'amour divin. Ce que nous avons à faire, nous, c'est d'étudier avec soin et de
contempler en Christ le modèle de cette vie d'amour, jusqu'à ce que nous
entendions Jésus dire à chacun de nous par son Esprit : « Comme le Père
m'a aimé, je vous ai aussi aimés. Demeurez dans mon amour, de même que je
demeure dans l’amour du Père. »
Si cette grâce nous paraît trop élevée, trop
sublime, rappelons-nous que la grandeur du privilège est justifiée par le but
que Dieu a en vue. Comme le Fils était la révélation du Père, le croyant est
appelé à être la révélation de Christ; il ne peut l'être que s'il est uni d'une
union parfaite avec Christ, comme Christ l'est avec le Père, afin de posséder
en lui la plénitude de sa grâce ; il ne peut l'être que s'il croit à son amour
comme Christ croyait à l'amour du Père.
VINGT-QUATRIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
en obéissant à ses commandements.
« Si vous gardez mes commandements, vous
demeurerez dans mon amour ; de même que j'ai gardé les commandements de mon
Père et que je demeure dans son amour. » (Jean XV : 10)
Ces paroles nous montrent la place que doivent
occuper les oeuvres dans la vie du croyant. Christ, comme Fils bien-aimé, était
dans l'amour du Père; il y demeura en gardant ses commandements. De même, le
croyant admis par grâce, sans oeuvres, dans l'amour de Christ, y demeurera s'il
garde ses commandements. Quand nous cherchons à venir à Jésus par nos oeuvres,
l'Esprit nous répète sans cesse : Ce n'est point par les oeuvres; mais une fois
à lui, de peur que la chair n'abuse de
cette parole, il nous dit aussi clairement : « Vous êtes créés en Jésus-Christ
pour de bonnes oeuvres. » (Eph. II : 9, 10). Les oeuvres peuvent être le
plus grand obstacle qui retienne le pécheur loin de son Sauveur, tandis
qu'elles sont une source de forces et de bénédictions pour le croyant, car par
elles « la foi est rendue parfaite » (Jacq. II : 22) ; l'union avec Christ
est cimentée, l'âme est enracinée dans son amour. « Si quelqu'un m'aime, il
gardera ma parole, et mon Père l'aimera. » — « Si vous gardez mes
commandements, vous demeurez dans mon amour. »
La relation entre l'observation des commandements
de Christ et la communion dans son amour, est facile à saisir. Notre union avec
Jésus-Christ n'est pas une affaire d'intelligence ou de sentiment, mais une
union vitale avec sa personne sainte. La vocation du chrétien est de penser,
de sentir, de vouloir exactement ce que Jésus a pensé, senti et voulu. Il
désire participer non seulement à la grâce, mais aussi à la sainteté de son Sauveur
; ou plutôt, il voit que la, sainteté est ce qu'il y a de plus beau dans la
grâce ; vivre (le la, vie de Christ, vouloir ce qu'il veut, c'est
l'affranchissement de l'esclavage de notre volonté corrompue, c'est le chemin
de la vraie liberté.
Le tiède ou l'ignorant font une grande distinction
entre les promesses et les commandements de l'Ecriture. Ils ne trouvent de
consolation et de nourriture que dans les premières; mais celui qui cherche
demeurer dans l'amour de Christ, discerne l'amour divin dans les commandements
aussi bien que dans les promesses ; car ils conduisent à une participation toujours
plus grande de la vie divine, à une union toujours plus intime avec le
Seigneur. L'harmonie entre notre volonté et la sienne est un des principaux
éléments de notre communion avec lui. Comment pourrait-il y avoir communion
sans un accord parfait avec sa volonté ? Car la volonté est la faculté centrale
chez l'Etre divin comme chez l'être humain. Tant que le salut n'est pour le
pécheur qu'une sécurité personnelle, il reste indifférent ou hostile à la
volonté de Dieu ; mais aussitôt qu'il comprend, par les Ecritures et par
l'enseignement de l'Esprit, ce qu'est le salut, c'est-à-dire le retour à la
communion et à la conformité, avec Jésus, il trouve naturelle, belle même,
cette loi qui fait de l'observation des commandements le moyen de demeurer dans
son amour (Jean XIV : 15, 16, 21, 23) : son être intérieur se réjouit de
ce que Jésus en a fait la condition d'une plus abondante communication de
l'Esprit.
Du reste, Christ lui-même n'est demeuré dans l'amour
du Père que par cette loi. L'obéissance a été une solennelle réalité pour lui
durant sa vie terrestre. La puissance redoutable qui a poussé l'homme à la
révolte contre son Dieu, s'est aussi attaquée à lui et l'a tenté. Pour Jésus
homme, les séductions dont le tentateur usa, ne pouvaient le laisser
indifférent. Il ne put résister que par le jeûne et la prière. « Il a souffert,
étant tenté. » Le sacrifice de sa volonté a été pour lui aussi un renoncement
continuel. S'il est demeuré dans l'amour du Père, c'est qu'il a fait de
l'obéissance à son commandement le but de sa vie. « Je ne fais rien de
moi-même, dit-il, mais je parle selon ce que le Père m'a enseigné. Celui qui
m'a envoyé est avec moi, il ne m'a pas laissé seul, parce que je fais toujours
ce qui lui est agréable. » (Jean 8 : 28) Il nous a ainsi ouvert la voie d'une
vie sur la terre passée dans l'amour du ciel ; et quand son Esprit pénètre en
nous comme la sève du cep dans le sarment, cette obéissance aux commandements
devient un des éléments les plus sûrs et les plus élevés de la vie qu'il nous
communique.
Si vous désirez demeurer en Jésus, observez ses
commandements. Ne vous contentez pas de les posséder dans
Gardons ces commandements dans l'obéissance.
N'avons-nous pas fait voeu de rejeter tout péché ? « Je jure et je le tiendrai,
d'observer les lois de ta justice. » (Ps. 119 : 106). Luttons donc dans la
prière pour devenir parfaits dans toute la volonté de Dieu, demandant ardemment
que tout péché secret, tout ce qui en nous n'est pas en harmonie avec sa
volonté, nous soit révélé. Marchons fidèlement, humblement, selon la lumière
que nous avons, résolus à obéir à toutes les ordonnances du Seigneur. Quand
Israël fit un voeu d'obéissance au désert (Ex. XIX : 8; XXIV : 7), ce
ne fut que pour le violer aussitôt ; mais la nouvelle alliance donne le vouloir
et le faire, le voeu et la force de l'accomplir (Jér. XXXI). Tenons-nous en
garde contre toute désobéissance, même dans les petites choses. La
désobéissance énerve la conscience, obscurcit, l'âme, tue les forces
spirituelles. Si parfois ces commandements nous semblent pénibles,
rappelons-nous qu'ils procèdent de Celui qui nous aime. Ils sont amour et nous
parlent de son amour. Chaque acte nouveau d'obéissance, chaque sacrifice
accompli pour garder ses commandements, resserre notre union avec la personne
du Sauveur, nous fait pénétrer plus avant dans son amour, et nous rend plus
conformes à sa vie sainte, en sorte que cette parole nous devient toujours plus
précieuse : « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour,
de même que j'ai gardé les commandements de mon Père et que je demeure dans son
amour. » (Jean 15 : 19).
VINGT-CINQUIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
afin que votre joie soit parfaite.
« Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit
en vous, et que votre joie soit parfaite. » (Jean XV : 11)
La vie en Christ est une source inépuisable de
bonheur. A mesure que Christ prend plus pleinement possession de l'âme, elle
entre dans la joie de son Sauveur qui devient la sienne à toujours. La joie est
un trait caractéristique de celui qui vit en Christ, et nous savons tous en
apprécier la valeur ; elle est la meilleure preuve que le coeur est réellement
satisfait. Aussi n'y a-t-il pas, chez le chrétien, d'attrait plus
irrésistible, de prédication plus persuasive et qui manifeste mieux au monde la
réalité de l'amour divin, que le rayonnement de cette joie, triomphant des
épreuves de la vie. Pour le bien même du croyant, elle est un élément
indispensable ; car la joie du Seigneur est sa force. En elle se retrempent sa
confiance, son courage et sa patience. Avec un coeur joyeux, aucun travail ne
lasse, aucun fardeau n'accable ; et Dieu lui-même est notre force et notre
chant de victoire.
Jésus promet sa joie à celui qui demeure en lui : «
ma joie, » dit-il. La parabole du cep et des sarments se rapportant toute à la
vie que ses disciples auraient en lui, quand il serait remonté au ciel; c'est
de la joie céleste et éternelle dont il s'agit, ce que montre également cette
autre promesse : « Je vous reverrai et votre coeur se réjouira, et nul ne vous
ravira votre joie. » (Jean XVI : 22). Ce fut seulement à la résurrection
que commença cette vie de joie, et c'est en la résurrection qu'elle a sa
source, alors que s'accomplit cette parole : « C'est pourquoi ton Dieu
t'a oint d'une huile de joie par-dessus tes semblables. » (Ps. 45 : 8.) Le jour
de son couronnement fut pour Jésus celui de la pleine satisfaction de son
coeur. Sa joie était celle d'une oeuvre parfaitement accomplie et pour
toujours, la joie de rentrer dans le sein du Père et, d'avoir racheté beaucoup
d'âmes. Celui qui est réellement uni à lui, participe à cette joie; il partage
si complètement la victoire et la parfaite rédemption de son Sauveur, qu'il
peut dire sans cesse, par la foi : « Grâce a Dieu qui me donne toujours la
victoire. » En Christ, il jouit de l'amour inaltérable du Père ; et, apprenant,
avec lui, à aimer les âmes, il se réjouit aussi de ce qu'elles sont rachetées.
Soit qu'il contemple l'oeuvre parfaite de Jésus ou la récompense que trouve le
Fils dans l'amour du Père, soit qu'il considère sa gloire croissant avec le
nombre des pécheurs qui se convertissent, toujours la joie du Seigneur est la
sienne.
Jésus parle encore de cette joie comme devant être permanente chez le croyant. « Afin que ma joie soit (ou
demeure) en vous. » — « Nul ne vous ravira votre joie. » Tant de chrétiens ne
le peuvent comprendre; ils se figurent que la vie chrétienne est une vie de
continuelles alternatives de joie et de tristesse, et ils vont jusqu'à en donner
comme preuve, les expériences de l'apôtre Paul. Mais la vie de Paul est
précisément, au contraire, l'exemple le plus frappant de cette joie
inaltérable. L'apôtre avait saisi le paradoxe de la vie chrétienne où se
trouvent à la fois, et souvent au même moment, toutes les amertumes de la terre
et toute la joie du ciel. « Comme attristés et nous sommes joyeux, » dit-il;
et, par ces mots admirables, il nous enseigne comment la joie de Christ peut
triompher de la tristesse du monde, comment elle peut nous faire chanter tout
en pleurant, et nous conserver, même dans l'épreuve, le sentiment d'une joie
inexprimable et glorieuse. La seule présence de Jésus suffit pour rendre cette
joie permanente « Je vous reverrai et votre coeur se réjouira, et nul ne vous
ravira votre joie. » Comment l'âme qui se sent en Christ ne serait-elle pas
satisfaite et joyeuse ? Même lorsqu'elle pleure sur ses péchés et sur le péché
de ses semblables, une source de bonheur jaillit de sa foi en la puissance et
l'amour du Christ pour sauver.
Jésus veut enfin que cette joie soit parfaite, Il
le dit à trois reprises durant la dernière nuit qu'il passe sur la terre.
D'abord dans la parabole du cep et des sarments : « Je vous ai dit ces choses
afin que votre joie soit parfaite; et cette parole se confirme, pour le
chrétien, à chaque nouvelle expérience qu'il fait du privilège de la communion
de Jésus. Puis à propos de l'exaucement de la prière (Jean XVI : 24) :
« Demandez et vous recevrez, afin que votre joie soit parfaite. » En
effet, pour celui qui juge spirituellement des choses, une prière exaucée n'est
pas seulement le don d'une bénédiction particulière il y voit infiniment plus :
c'est pour lui un gage de sa communion avec le Père et le Fils dans le ciel,
une preuve qu'il est admis dans leur conseil; et encore là, quelle source
d'ineffable joie! Jésus y revient en dernier lieu dans la prière sacerdotale
(Jean XVII : 13) : « Je dis ces choses afin qu'ils aient en eux ma joie
parfaite. » La contemplation de notre grand sacrificateur, se tenant en la
présence du Père pour intercéder continuellement en notre faveur et poursuivre
avec puissance son oeuvre bénie, nous donne l'assurance d'un salut complet, et
par conséquent une parfaite joie.
La joie de Christ lui-même, joie permanente,
parfaite, telle est la part du croyant qui demeure en lui. Pourquoi y en si peu
qui la désirent? C'est que peu, même parmi les enfants de Dieu, y croient. Au
lieu de considérer la vie en Christ comme le sort le plus heureux qu'il soit
donné à l'homme d'obtenir, ils l'envisagent comme une vie de tristesse et de
renoncement; mais s'ils n'y voient que cela, c'est qu'ils ne demeurent pas en
Christ. Ceux qui acceptent une fois pour toutes, sans réserve, la vie en Christ
comme une source de joie et de bénédiction, voient leur foi se changer en
réalité, et la joie du Seigneur devenir la leur.
C'est en terminant sa parabole du cep et du
sarment, que Jésus conclut par ces paroles : « Je vous ai dit ces
choses, afin que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. » Réclamons
donc la joie comme un élément de la vie du sarment, propre à rendre évidente à
nos yeux la suffisance de Christ pour répondre aux besoins de notre âme. S'il y
a des temps où cette joie du Sauveur abonde en nous, rendons-en grâce à Dieu;
mais si, par moment, nous la sentons moins vivement que nous le voudrions,
rendons également grâces pour la vie de bénédiction en vue de laquelle nous
avons été rachetés; car, là encore, « il nous sera fait selon notre foi. »
Réclamons cette joie, non pas en notre nom, mais au nom de Jésus qui l'a
promise, et pour la gloire du Père ; car il n'est pas possible d'accepter Jésus
dans son coeur, sans recevoir en même temps sa joie. C'est pourquoi, «
réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ; je le répète, réjouissez-vous. »
VINGT-SIXIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
vous aimant les uns les autres.
« C'est ici mon commandement : Aimez-vous tes uns
les autres, comme je vous ai aimés. » Jean XV : 12)
« Comme le Père m'a aimé, je vous ai aimés; comme je
vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. » Dieu s'étant fait homme,
l'amour divin a habité dans un coeur humain; dès lors, les hommes ont pu
s'aimer d'un amour divin, et goûter sur la terre l'amour du ciel.
« C'est ici mon commandement, dit le Sauveur
aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. » Voilà le commandement
par excellence, le résumé de tous les autres; aussi Jésus appelle-t-il « son commandement, le commandement
nouveau, » destiné à mettre en
évidence la réalité de la nouvelle alliance et la puissance de la vie nouvelle
révélée en Jésus-Christ, destiné à devenir le signe caractéristique et
irrécusable du disciple de Christ. « A ceci, tous les hommes connaîtront que
vous êtes mes disciples. » — « Qu'eux aussi soient un en nous pour que le monde
croie. « Qu'ils soient parfaitement un et que le monde connaisse que tu les a aimés, comme tu m'as aimé. » Et si l'obéissance à ce
commandement est pour le chrétien la preuve qu'il est uni à Christ, elle est
aussi pour lui le moyen d'arriver à rendre cette union toujours plus parfaite.
Dieu est amour, et Christ est venu pour nous le
révéler, non sous la forme d'une doctrine abstraite, mais par sa vie. En aimant
des êtres indignes et ingrats, en s'abaissant jusqu'à marcher parmi les hommes
comme un serviteur, en se livrant lui-même à la mort, Jésus a été la démonstration
vivante de l'amour de Dieu. Et maintenant ses disciples sont appelés, à leur
tour, à manifester au monde son amour en vivant, et en aimant comme lui. Par
leur ressemblance avec le Sauveur, il faut qu'ils prouvent qu'ils sont animés
de l'Esprit qui animait Christ, qu'ils sont les membres d'un même corps et unis
entre eux malgré les diversités de caractères ou de croyances, de langage ou de situations. Leur vie d'amour
est le témoignage essentiel du christianisme, la preuve donnée au monde que
Dieu a envoyé son Fils et qu'il a
répandu dans ses disciples le même amour dont il l'a aimé.
Cet amour des disciples de Christ les uns pour les
autres, occupe la place intermédiaire entre leur amour pour Dieu et leur amour
pour les hommes. L'amour pour un Etre invisible, qui pourrait aisément rester
une affaire de sentiment ou même d'imagination, a l'occasion de s'exercer dans
les rapports des disciples entre eux, et de prouver sa réalité par des actes
que le Père accepte comme étant faits à lui-même. Puis de cet amour fraternel
naît celui pour tous les hommes; car, en s'aimant les uns les autres, les
enfants de Dieu se forment à aimer leurs semblables encore éloignés de Christ,
non plus par sympathie naturelle, mais de cet amour sanctifié qui s'attache aux
plus indignes, au nom de Jésus, et supporte ceux qui ont le moins d'attraits.
Jésus nous présente, dans ses rapports avec ses
disciples, le modèle de cet amour fraternel. Si nous étudions son esprit de support
et de pardon, sa patience, son humilité, la douceur et la charité avec
lesquelles il se fait serviteur pour gagner à lui les pécheurs, nous
l'écouterons Volontiers quand il nous
dit : « je vous ai donné un exemple, afin que vous fassiez comme je vous ai
fait. » (Jean XIII : 15). En suivant ses traces, le disciple ne vit plus
pour lui-même, mais pour les autres; son langage respire la bonté; car l'amour
lui interdit toute parole contraire à la charité. Non seulement il ne sait pas
médire, mais, plus jaloux de la réputation de son frère que de la sienne, il
refuse même de supposer le mal ou d'y prêter l'oreille ; car, pour ce qui le
concerne, il peut s'en remettre au Père, tandis qu'il est responsable de son
frère devant le Père. L'amour divin, répandu dans son coeur, éclate dans sa vie
en douceur, en bonté, en affection, en générosité, en dévouement, en
bienfaisance, comme dans la vie de Jésus.
Aimer comme Christ a aimé! Notre coeur ne
s'émeut-il pas à la pensée du privilège immense auquel nous sommes appelés, de
refléter l'amour éternel? Ou bien serions-nous peut-être tentés de soupirer de
ce que Dieu nous propose un degré si élevé de perfection? Gardons-nous-en ; car
nous avons précisément, là un gage précieux de l'amour du Père, qu'il veuille
nous rendre semblables à Christ, comme Christ lui est, semblable. Et si Jésus a
rattaché si intimement le commandement de nous aimer les uns les autres, à sa
parabole du cep et des sarments, c'est pour nous donner à entendre qu'en
demeurant en lui, nous serons capables d'aimer comme lui. Ce commandement est
donc un nouveau motif pour nous de vivre en Christ et dans son amour infini,
afin de recevoir de sa plénitude la faculté d'aimer. Dans ces conditions, le
commandement qui nous était à charge devient une source de joie.
L'amour pour nos frères n'est-il pas un de ces
nombreux fruits que Jésus nous a promis, une grappe d'Escol par laquelle nous
pouvons prouver aux autres que le pays de la promesse est bien un bon pays?
Faisons passer dans la pratique de tous les jours, en toute honnêteté et
simplicité, les choses que nous professons par le langage de la foi et de
l'enthousiasme chrétien, afin que les hommes voient et croient. Apportons à
Jésus tout ce qui, dans nos caractères et dans nos vies, fait obstacle à cet
amour fraternel. Il peut nous rendre doux et patients, diriger nos paroles,
retenir nos lèvres, nous donner cette charité qui refuse de s'offenser, qui est
toujours prête à excuser, à supporter et à espérer le bien cet amour qui ne se
cherche pas lui-même, mais qui est toujours disposé à laver les pieds des
autres et à se donner pour eux. Plaçons-nous comme des écoliers dociles sous la
direction du Saint-Esprit : la vie la plus ordinaire peut être transfigurée par
l'éclat d'une beauté céleste, quand l'amour divin brille à travers notre frêle
humanité.
Loin de nous plaindre, rendons grâce à Dieu de ce
que nous sommes appelés à aimer comme Jésus aime, comme Dieu aime! Louons-le de
ce que nous le pouvons. Oui, la nouvelle nature, la nature sainte dont nous
sommes revêtus par notre union au divin Cep, peut
aimer comme il a aimé. Fortifions cette nouvelle nature en demeurant en Christ
et dans son amour.
VINGT-SEPTIEME JOUR
Demeurez
en Christ,
afin que vous ne péchiez pas.
« Il n'y a point en lui de péché. Quiconque demeure
en lui ne pèche point » (1 Jean III : 5, 6)
Lorsque l'apôtre prononça les paroles de notre
texte, il venait de dire : « Vous savez que Jésus a paru pour ôter les péchés.
Ce rapprochement montre que le but de l'incarnation du Fils était de délivrer,
non seulement du péché, mais aussi de la puissance du péché, en sorte que le
croyant ne pèche plus. C’est la sainteté personnelle de Christ qui lui permet
d'accomplir cette oeuvre; admettant les pécheurs dans une communion de vie avec
lui-même il rend, par cette union, leur vie semblable à la sienne. « Si la
racine est sainte, les branches le sont aussi. »
« En lui, il n'y a point de péché. Quiconque
demeure en lui ne pèche point. » Tant que le croyant
demeure en Christ, et dans la mesure où il y demeure, il ne pèche pas.
Mais aussitôt se pose la question : comment ceci
peut-il s'accorder avec l'enseignement de
Mais, dit-on, comment un croyant, ayant le péché
habitant en lui, peut-il ne pas pécher? La réponse à cette objection se trouve
dans ces paroles : « En lui, il n'y a point de péché. Quiconque demeure en lui ne pèche pas. » Quand le croyant demeure en
Christ dans une union constante, il est gardé par le Seigneur, qui tient en
échec la vieille nature, si bien qu'elle ne peut reprendre sa domination sur
l'âme. Malheureusement, la plupart des chrétiens demeurent en lui d’une manière
si incomplète et si intermittente, que le péché reprend constamment son
ascendant et assujettit l'âme tout à nouveau. La promesse faite à la foi est
bien : « Le péché n'aura point de pouvoir sur vous; » mais elle est accompagnée
du commandement « Que le péché ne règne point dans votre corps. » Le croyant
qui réclame la promesse avec une foi pleine et entière, est rendu capable
d'obéir au commandement, et le péché ne peut exercer son pouvoir sur lui.
L'ignorance de la promesse, l'incrédulité, ou encore l'absence de vigilance,
ouvrent la porte au péché; mais que le croyant recherche une communion
permanente avec Celui qui est saint, il le sauvera effectivement de toute
transgression, non pas assurément en le délivrant de sa nature pécheresse, mais
en l'empêchant de lui céder. « Quiconque demeure en lui ne pèche pas. »
On parle de jeunes lions que rien ne peut dompter,
si ce n'est l'oeil de leur gardien. En sa présence, malgré leur naturel féroce
et leur soif de sang, ils sont soumis et tremblants, au point qu'on peut
s'approcher d'eux sans crainte; mais loin de leur gardien, on n'ose les
aborder. Il en est de même du croyant ; il peut avoir le péché en lui, et
pourtant ne pas pécher. Sa nature corrompue, sa chair n'est pas changée dans
son inimitié contre Dieu; mais elle est domptée par la présence de Jésus,
auquel il se confie avec foi. L'union avec Christ est donc le secret de la vie
sans péché « En lui, il n'y a point de péché ».
Mais encore, en admettant en principe qu'on soit
gardé de péché par la communion constante et complète avec Jésus, cette
communion peut-elle se réaliser, pouvons-nous prétendre à la possibilité de
demeurer en Christ, même un seul jour, de telle sorte que nous puissions être
préservés de toute chute? Nous avons déjà répondu à cette objection; et, du
reste, la question, pour quiconque la pose et la considère avec droiture,
renferme elle-même la réponse. Quand Christ nous commande de demeurer en lui,
nous promettant des fruits abondants à la gloire du Père et l'exaucement de nos
prières, peut-il avoir autre chose en vue que l'union parfaite du sarment au
cep? Quand il promet de demeurer en nous, qu'entend-il, sinon que sa présence
en nous sera la présence même de la puissance et de l'amour divin Et cette
manière de délivrer du péché, n'est-elle pas tout à sa gloire, nous maintenant
toujours humbles et dépendants dans le sentiment de notre nature corrompue,
vigilants et actifs dans la crainte du pouvoir redoutable qu'elle exerce, et en
même temps confiants dans la pensée que la seule présence de Jésus peut la
tenir en échec?
Oui, n'en doutons plus : si nous ne pouvons être
affranchis du monde et de ses tribulations, de notre nature corrompue et de ses
tentations, Jésus nous assure du moins la grâce de pouvoir demeurer pleinement
en lui, pour être préservés de tout mal.
Nourrissez-vous de cette promesse, et croyez, sans
vous inquiéter de savoir s'il vous sera possible d'être à l'abri du péché votre
vie entière. La foi doit vivre au jour le jour et ne se préoccuper que du
moment présent. Si vous croyez que Jésus peut vous garder présentement de toute
transgression, cela suffit ; allez de l'avant avec une confiance toujours
renouvelée. Et qu'au lieu de vous décourager, les chutes et les péchés servent
à vous faire rechercher, avec plus d'ardeur, votre force et votre salut dans la
communion de l'Homme-Dieu. Vous pouvez faire des progrès étonnants dans cette
voie-là, pourvu que vous vous remettiez entièrement aux mains de Dieu pour être
gardés par lui de pécher, et que vous persévériez dans la foi.
Considérez la, nature sainte de Jésus homme, comme
la nature même dont il veut nous rendre participants avec lui, et vous
découvrirez qu'il y a quelque chose de mieux encore que d'être préservé de
pécher, de plus élevé que l'abstension du mal : c'est la bénédiction bien plus
grande d'être, dès maintenant, un vase purifié, sanctifié rempli de la
plénitude de Jésus, l'instrument par lequel il manifeste sa puissance et sa
gloire.
LE
PÉCHÉ JOURNALIER EST-IL INÉVITABLE?
(Fragment tiré de Christ
and the Church. Sermons de A. Saphir.)
Comment se fait-il que, possédant un Sauveur dont
l'amour et la puissance sont infinis, nous soyons si souvent remplis de crainte
et de désespoir, las et languissants dans nos esprits? Parce que nous ne
regardons pas fermement à Jésus, l'auteur et le consommateur de la foi, assis à
la droite de Dieu, dont la toute-puissance embrasse le ciel aussi bien que la
terre, et qui la déploie dans ses faibles enfants.
Nous nous rappelons notre faiblesse, et nous
oublions sa toute-puissance ; nous reconnaissons que sans Christ nous ne
pouvons rien, et nous ne sayons pas nous élever ou nous abaisser jusqu'à dire
dans l'humilité chrétienne : « Je puis tout par Christ qui me fortifie. »
Nous nous confions dans ni vertu de la mort de Jésus pour effacer notre
culpabilité et nous n'entretenons pas en nous une foi confiante, digne de la
toute-puissance du Sauveur vivant pour nous délivrer de l'esclavage et de la
puissance du péché dans notre vie journalière. Nous oublions que Christ
travaille puissamment en nous et que, étant un avec lui, nous possédons une force
suffisante pour surmonter toute tentation. Ou bien, perdant de vue notre néant,
nous avons la présomption de croire que, par nos propres forces, nous pouvons
vivre sans péché, accomplir nos devoirs, supporter nos épreuves; ou bien, nous
ne réclamons pas la toute-puissance de Jésus, qui seul peut s'assujettir toutes
choses, et nous garder des infirmités et des chutes journalières que nous
croyons être une nécessité. Si réellement nous nous appuyions en toutes choses
et en tout temps sur Christ, nous gagnerions aussi la victoire en toutes choses
et en tout temps, par Celui dont la puissance est infinie et qui est établi par
le Père pour être le Chef de notre salut. Alors, toutes nos actions se feraient
noie seulement devant Dieu, mais en la gloire du Père, et au nom de Jésus,
notre sanctification. Rappelons-nous que toute puissance lui est donnée dans le
ciel et sur la terre, et vivons dans un continuel exercice de foi en sa vertu
infinie. Travaillons à nous convaincre que nous n'avons rien et ne sommes rien;
qu'en lui-même l'homme n'a pas la vie pour porter du fruit, mais que Christ est
tout ; qu'en demeurant en lui et en gardant sa Parole, nous pouvons porter
beaucoup de fruits.
VINGT-HUITIÈME JOUR
Demeurez
en Christ votre force.
« Tout
pouvoir m'a été donné dans le ciel et sur la terre. » (Math. XXVIII : 18)
«
Fortifiez-vous dans le Seigneur, et par sa force toute-puissante. » (Eph.
VI : 10)
« Ma
puissance s'accomplit dans la faiblesse. » (2Cor XII : 9)
Nous reconnaissons aisément notre complète
faiblesse, mais nous ne comprenons pas toujours le rôle qu'elle doit jouer dans
notre vie. Ici, comme ailleurs, les pensées de Dieu sont élevées au-dessus des
pensées de l'homme, autant que les cieux sont élevés au-dessus de la terre.
Souvent le chrétien cherche à oublier sa faiblesse,
il veut la vaincre, en être délivré. Dieu veut, au contraire, que nous nous la
rappelions, que nous la sentions profondément ; il veut que nous y demeurions
et même que nous nous réjouissions en elle. Le chrétien gémit de sa faiblesse,
mais Christ enseigne à ses disciples à dire : « Je me plais dans les
faiblesses; je me glorifierai bien plus volontiers de mes faiblesses. » Le
chrétien la considère comme le plus grand obstacle qui l'empêche de vivre pour
son Dieu ; et Dieu nous dit qu'elle est le secret de la force et du succès.
C'est notre faiblesse, franchement reconnue, qui nous donne droit et accès à la
force de celui qui a dit : « Ma puissance s'accomplit dans la faiblesse. »
Une des dernières paroles de notre Seigneur, alors
qu'il allait prendre place sur le trône de Dieu, fut celle-ci : « Tout pouvoir
m'a été donné dans le ciel et sur la terre. » La toute-puissance allait être
conférée au Fils de l'homme, afin que, désormais, elle pût se manifester par l'intermédiaire
de la nature humaine ; c'est pourquoi Jésus rapproche ce fait de la promesse
qu'il fait à ses disciples de participer à cette toute-puissance « Quand je
serai monté au ciel, vous serez revêtus de la puissance d'En Haut. » (Luc
XXIV : 49; Actes I : 8.) C'est dans le Sauveur siégeant, à la droite
du Père que le croyant doit chercher sa force.
C'est là que les disciples la trouvèrent après dix
jours de prières et de consécration, pendant lesquels leurs âmes s'affermirent
dans une communion toujours plus intense avec Jésus assis sur le trône de Dieu,
ils furent revêtus de force, au dedans pour vaincre le péché, au dehors pour
annoncer Jésus-Christ.
La puissance d'En Haut vint les qualifier en vue de
la mission qu'ils avaient acceptée, de rendre témoignage à leur Maître
ressuscité. Pour les uns, le témoignage consistait surtout en une vie sainte
révélant le ciel et le Christ d'où cette vie procédait, manifestant la
puissance de Jésus glorifié pour donner la victoire sur le péché et faire vivre
les hommes dans la sainteté au milieu du monde; d'autres devaient ajouter à ce
témoignage celui de la parole et consacrer leur vie à parler au nom de Jésus.
Mais aux uns et aux autres, cette vertu d'En Haut était indispensable pour
prouver au monde que Jésus avait bien reçu du Père tout pouvoir dans le ciel et
sur la terre, pour démontrer que le royaume de Dieu auquel ils professaient
d'appartenir, ne consiste pas en paroles seulement, mais en force. Et cette
force fut sentie même par ceux qui refusaient de s’y soumettre. (Actes
II : 43; IV : 13; V, 13)
Ce que Jésus fut pour ses premiers disciples, il
l'est pour nous aussi. Notre vie entière aussi bien que notre vocation comme
disciples, ont leur origine et leur garantie dans cette parole : « Tout pouvoir
m'a été donné dans le ciel et sur la terre. » Ce qu'il accomplit en nous et par
nous, doit porter le sceau de sa toute-puissance. Aussi, le croyant le plus
faible qui demande d'être gardé du péché, de croître dans la sainteté, de
porter beaucoup de fruits, peut avoir la confiance, comme membre du corps de
Christ, que ses requêtes seront exaucées avec une puissance toute divine.
Et si nous demandons comment la puissance nous est
donnée, la réponse est simple : Christ nous la donne, ainsi qu'aux premiers
disciples en établissant en nous sa propre vie par son Saint-Esprit, et non
pas, comme beaucoup le croient, en venant seulement en aide à nos faibles
efforts. Il ne supprime pas le sentiment de notre faiblesse ; au contraire,
chose merveilleuse, en laissant et même en développant en nous le sentiment
d'une totale impuissance, il nous donne, en même temps, conscience d'une
grande force en lui.
« Nous portons ce trésor dans des vases de
terre, afin que cette grande puissance soit attribuée à Dieu et non pas à nous.
» La faiblesse et, la force marchent de front ; si le sentiment de l'une
augmente, le sentiment de l'autre augmente aussi, jusqu'à ce qu'enfin nous
puissions dire avec saint Paul : « Lorsque je suis faible, c'est alors que
Je suis fort ; je me glorifierai bien plus volontiers de mes faiblesses, afin
que la puissance de Christ repose sur moi. »
Le chrétien vivant apprend à considérer en Christ
assis sur le trône de Dieu, la position qui lui est acquise à lui-même; il contemple
cette vie pure et sans tache dans sa puissance et dans sa gloire ; il y voit la
vie éternelle dans l'homme glorifié. Et si, faisant un retour sur lui-même, il
soupire après la sainteté, après la force d'être agréable à Dieu et de faire sa
volonté, il sait qu'il n'a qu'à lever les yeux sur Christ, sa vie, qui
accomplira en lui tout ce qui lui manque. C'est à Christ revêtu de force qu'il
s'attend en toute occasion, dans les petites choses comme dans les grandes,
pour être gardé du mal d'instant en instant, ou pour lutter contre une
difficulté contre une tentation particulière. Sa vie devient ainsi de plus en
plus paisible et joyeuse, non qu'il sente plus de force, mais parce qu'il a en
lui-même toujours la victoire en son Sauveur.
Oui, notre
force est en Christ, prête à nous être communiquée dans la mesure où nous
la réclamerons, et où elle trouvera notre foi disposée à la recevoir. Elle est
là, que nous en usions ou non. Le Père a donné à Jésus tout pouvoir dans le
ciel et sur la terre, par conséquent sur nos coeurs et sur nos vies, ainsi que
sur les puissances qui les assujettissent, afin qu'il soit pour nous un Sauveur
parfait.
Et cette puissance pénètre en nous par notre
communion avec lui. Si la communion est faible et peu goûtée, sa force ne sera communiquée
que dans une faible mesure ; mais si nous cultivons cette union avec joie,
comme notre plus grand bien, étant prêts à tout sacrifier pour la conserver, «
sa puissance s'accomplit dans notre faiblesse. » Notre unique soin doit donc
être de demeurer en Christ, notre force, de « nous fortifier dans le Seigneur
et par sa force toute-puissante. »
Cherchons, par la foi, à acquérir une connaissance
toujours plus claire et plus profonde, une expérience toujours plus parfaite de
l'infinie grandeur de la puissance de Dieu dans ceux qui croient, de cette
puissance du Christ ressuscité et glorifié, par laquelle il triomphe de tous
les ennemis. (Eph. I : 19-24). Acceptons, par la foi, ce plan admirable de
Dieu : en nous, rien que faiblesse, en Christ, la toute-puissance. Ne regardons
plus à nous-mêmes, mais seulement à Christ, et nous arriverons à dire : « Je
puis tout par Christ qui me fortifie. »
VINGT-NEUVIÈME JOUR
Demeurez
en Christ
et non en vous-mêmes,
« Ce
qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi. » (Rom. VII : 18)
Avoir la vie en soi, est le privilège de Dieu seul,
et du Fils à qui le Père l'a aussi donné. Quant à la créature, sa gloire est de
chercher sa vie en Dieu. Le crime et la folie de l'homme pécheur est de vivre
pour lui-même et en lui-même, tandis que le croyant trouve le bonheur en vivant
en Christ et pour Dieu. « Si je vis, ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ
qui vit en moi. Non pas moi toutefois, mais la grâce de Dieu qui est avec
moi. » Tel est le témoignage de tous ceux qui ont connu le bienfait de la
vie de la foi, qui ont su haïr, perdre leur vie, y renoncer pour recevoir à la
place la vie sainte de Christ. Il n'y a qu'un chemin pour arriver à la vraie
vie, à la vie en Christ, celui de la crucifixion, que notre Sauveur lui-même a
suivi.
Il est rare que nous le comprenions au début de
notre vie chrétienne. Dans la joie du pardon, nous nous sentons pressés de
vivre pour notre Sauveur ; et nous croyons qu'avec l'aide de Dieu, nous en
serons capables, ignorant encore la terrible inimitié de la chair contre Dieu
et sa résistance absolue, même chez le croyant, à se soumettre à sa loi;
ignorant aussi que la mort seulement, et la soumission implicite à la mort de
tout ce qui tient à notre nature, rend possible en nous la vie divine et la
manifestation de sa puissance. Mais les chutes douloureuses se chargent bientôt
de nous montrer combien la connaissance que nous avons de Christ pour le salut
est insuffisante; elles font naître en nous un ardent désir de mieux connaître
notre Sauveur. Quand Jésus voit paraître ce désir, il nous montre avec amour sa
croix nous avons reçu là notre titre à la vie par la foi à sa mort expiatoire;
c'est là aussi que nous devrons faire une expérience plus complète de cette
vie. Alors se pose pour nous la question de savoir si nous sommes réellement
décidés à boire la coupe que Jésus a bue, à être crucifiés avec lui. De fait,
nous sommes, en lui, déjà crucifiés et morts, c'est-à-dire que, sans en avoir
conscience, à partir de notre conversion, nous sommes devenus participants de
sa mort ; mais ce qu'il faut maintenant, c'est de donner à ce que nous avons
reçu sans le comprendre, notre libre et entier consentement par un acte
volontaire, reconnaissant vouloir mourir avec Christ au péché.
C'est un moment solennel pour le croyant que celui
où cette question s'impose à lui. Devant elle, plus d'un recule et souvent ne
la comprend pas. Nombre de chrétiens s'accoutument si bien à la médiocrité, à
une vie de chutes continuelles, qu'ils désirent à peine une délivrance; ils
n'osent même pas croire à la possibilité de la sainteté, de notre parfaite
conformité avec Jésus et de notre communion ininterrompue en son amour. Or, là
où il n'y a pas un besoin intense d'être préservé d'une manière absolue du
péché et d'entrer dans l'union la plus étroite avec le Sauveur, la pensée
d'être crucifié avec lui ne peut trouver accès. Ces chrétiens-là ne voient dans
la crucifixion que honte et souffrances, et il leur suffit que Jésus ait porté
la croix pour leur gagner la couronne qu'ils espèrent porter eux-mêmes un jour.
Le croyant, avide de sainteté, considère tout
autrement la crucifixion. Il sait, par d'amères expériences que son plus grand
obstacle pour la vie d'abandon et de confiance en Christ c'est lui-même, son
moi, qui tantôt refuse de se soumettre, tantôt entrave par ses vains efforts
l'oeuvre de Dieu en lui. Il sent que la vie en Christ lui restera inaccessible
tant que ce moi, cette volonté propre et ses oeuvres ne seront pas remplacées
par Christ, par sa volonté et par ses oeuvres ; et cette question : Veux-tu
mourir à toi-même? devient pour lui la question
vitale.
Etant nés de Dieu, vous êtes déjà en Christ morts
au péché et vivants à Dieu. Mais êtes-vous prêts par la puissance de cette
mort, à mortifier vos membres, à renoncer complètement à votre vieil homme, à
le clouer sur la croix jusqu'à son entière destruction? Vous demandez peut-être
si c'est réellement là ce qui est réclamé du croyant? Notre nature n'est-elle
pas l'oeuvre de Dieu, et nos forces naturelles ne peuvent-elles pas être sanctifiées
pour son service? Oui, elles le peuvent ; mais seulement en étant soustraites à
la domination du moi, pour être placées sous la puissance de la vie de Christ.
(Rom. VI : 18 ; XII : 1).
Ce n'est que par une mortification complète du moi
que les forces merveilleuses que Dieu nous a dispensées pour le servir, nos
dons, nos talents, tout en nous, peut lui être entièrement consacré. Lors même
qu'il est impossible, tant que nous sommes dans la chair, de dire que le moi
est mort, cependant, quand nous avons permis à la vie de Christ de prendre
pleine possession de nous, il peut être, par la toi, maintenu sur la croix et
subir sa sentence de mort si réellement, qu'il n'aura plus sur nous aucune
puissance, même momentanée. Jésus-Christ étant devenu notre second nous-mêmes,
ce n'est plus nous qui vivons, mais Christ en nous.
Cette rupture avec nous-mêmes qui est une condition
indispensable à notre communion avec Christ, Christ l'accomplit chez quiconque
lui permet de le faire, et il promet de remplir de sa présence celui qui est
disposé à le recevoir. Ne reculez donc plus devant le sacrifice, dans la
crainte de ne pouvoir y persévérer ; mais appuyez-vous sur la promesse qu'il
vous fait de vivre en vous à votre place. Faites cette expérience que vous êtes
morts à vous-mêmes : le moi subsiste encore, mais il n'a plus aucun pouvoir sur
vous, c'est-à-dire sur votre nature renouvelée, sur le nouvel homme né en
Christ, sauf lorsque dans l'ignorance, la négligence ou l'incrédulité, vous consentez
à céder à son autorité usurpée (Rom. VI : 11). Acceptez simplement, en
sincérité de coeur, par la foi, la glorieuse position qui vous est faite en
Christ, sachant que votre vieil homme a été crucifié avec lui, pour que vous ne
soyez plus esclaves du péché (Rom. VI : 6), et vivez comme ayant en vous
la vie en Christ qui est « un esprit vivifiant. » (Rom. VI : 7).
Demeurez en Christ dans cette conviction,
reposez-vous sur lui; mais aussi veillez constamment avec un saint tremblement
sur l'ennemi, le moi, qui cherche à reprendre vie et ne cesse de vous
solliciter de lui donner du relâche. Réfugiez-vous en Christ. Mettez votre être
tout entier à sa disposition, il vous enseignera à être humbles et vigilants,
heureux et confiants. Et dans la paix de cette nouvelle vie, vous éprouverez
une joie constante, sans cesse renouvelée en constatant la transformation
merveilleuse opérée en vous par ce renoncement à vous-mêmes pour ne vivre que
de Christ seul.
Demeurez
en Christ
le garant de l'alliance.
« Jésus est le garant d'une
alliance plus excellente. » (Heb VII : 22)
Les Ecritures parlent de l'ancienne alliance comme
n'étant pas sans défaut, et Dieu se plaint de ce qu'Israël n'y a pas persévéré,
en sorte qu'il a dû les rejeter (Heb VIII : 7-9). Le but de cette
alliance, qui était d'unir Israël à Dieu, n'avait pas été atteint. C'est
pourquoi Dieu promet de faire une nouvelle alliance, plus excellente que la
première et propre à accomplir son dessein, assurant la fidélité réciproque de
Dieu et de son peuple. D'une part il dit « Je mettrai mes lois dans leur
esprit, » ainsi la fidélité du
peuple est assurée pour toujours; et d'autre part « Je n e me souviendrai plus de leurs péchés, » la fidélité de Dieu
est garantie à perpétuité. (Voy. Heb VIII : 10-12) Un Dieu qui pardonne et
un peuple qui obéit, tels sont les deux éléments qui doivent se rencontrer et
s'unir éternellement dans l'alliance nouvelle. Ce qui en fait la valeur, c'est
que Jésus en est le garant : « Jésus est le garant d'une alliance plus
excellente. » Vis-à-vis de l'homme, il se fait, comme Fils de Dieu, garant de
la fidélité du Père à remplir ses engagements, en sorte que l'homme peut
compter sur le pardon de Dieu et accepter l'alliance -sans crainte de l'abandonner.
Comme Fils de l'homme, Jésus se fait, vis-à-vis de Dieu, garant de la fidélité
de l'homme à remplir son mandat, en sorte que Dieu peut répandre sur lui les
bénédictions de l'alliance. Etant un avec Dieu et un avec nous, Jésus,
l'Homme-Dieu, est doublement garant de cette alliance nouvelle. Il est dès lors
aisé de comprendre que c'est dans la mesure où nous demeurerons en Jésus,
garant de l'alliance, que les conditions et les bénédictions de cette alliance
se réaliseront en nous.
Nous le comprendrons encore mieux en considérant la
nouvelle alliance à la lumière d'une des promesses qui s'y rapportent, celle de
Jérémie XXXII : 40, par exemple : « Je traiterai avec une alliance
éternelle, je ne me détournerai plus d'eux, je leur ferai du bien, et je
mettrai ma crainte dans leur coeur, afin qu'ils ne s'éloignent pas de
moi. »
Avec quelle admirable condescendance Dieu infini
s'abaisse jusqu'à notre faiblesse! Lui, le Dieu fidèle, immuable, dont la
parole est la vérité, il donne aux héritiers de la promesse un gage de la
sûreté de son conseil, il s'engage lui-même à ne jamais varier : « Je traiterai
une alliance éternelle, je ne me détournerai plus d'eux. » Heureux celui qui
s'approprie Si complètement cette promesse, qu'il y trouve son repos!
Mais dans une alliance, il y a deux contractants;
et qu'en sera-t-il si l'homme est infidèle ou fait défaut? Par lui-même, il est
incapable de donner une garantie de sa fidélité; mais Dieu y pourvoit. Dans
cette nouvelle alliance, il s'engage, non seulement à ne pas se détourner de
son peuple, mais aussi à mettre sa crainte dans leur coeur, afin qu'ils ne
s'éloignent pas de lui : « Je ferai que vous suiviez mes ordonnances et que
vous observiez et pratiquiez mes lois. » (Eze XXXVI : 27). Heureux
encore celui qui comprend cette condition de l'alliance! Le salut de l'homme
est donc, non pas de faire avec son Dieu une alliance qu'il romprait
constamment, mais simplement d'entrer dans celle où Dieu s'engage à le
maintenir, en sorte qu'il n'a qu'à
accepter la promesse de Dieu et attendre en assurance son
accomplissement.
L'oeuvre de Jésus, donnée par le Père comme
garant, commence précisément là. C'est à lui que le Père a dit : « Je
t'établirai pour traiter une alliance avec le peuple. » Et le Saint-Esprit rend
d'autre part ce témoignage que « toutes les promesses de Dieu sont oui en lui
et amen en lui, afin que Dieu soit glorifié par nous. » (2 Cor. I : 29). Ainsi
le croyant, qui demeure en Christ, possède en lui l'assurance de
l'inviolabilité de cette alliance et de l'accomplissement de chacune des
promesses qu'elle renferme.
« Christ est le garant d'une alliance plus
excellente. » C'est comme notre Melchisédec que Christ est garant (voy. Heb
VII). Aaron et ses fils sont morts, mais de Christ il est dit qu'il est vivant,
Il est sacrificateur pour toujours « selon la puissance d'une vie impérissable.
» « Parce qu'il demeure éternellement, il possède un sacerdoce qui n'est pas
transmissible. C'est aussi pour cela qu'il peut sauver parfaitement étant
toujours vivant pour intercéder. » Voilà ce qui rend sa garantie efficace. Sa
sainte présence devant le Père et son intercession permanente nous rendent
participants de la vie céleste avec ses bénédictions et ses puissances. Comme
garant de la faveur du Père à notre égard, il ne cesse de prier pour nous;
comme notre garant devant le Père, il ne cesse de travailler en nous et de
nous révéler le Père.
Le mystère de la sacrificature selon l'ordre de
Melchisédec, que les Hébreux ne pouvaient saisir, est le mystère de la vie de
résurrection (Heb V : 10-14). La nature même de cette sacrificature
éternelle de Jésus notre garant, explique comment nous pouvons demeurer en lui
d'une manière constante. S'il plaide sans cesse pour nous. l'exaucement
de ces intercessions descend continuellement sur nous; et comme il est répondant
de l'accomplissement de cette promesse de l'alliance : « Je mettrai ma crainte
dans leur coeur, afin qu'ils ne s'éloignent pas de moi, » il ne peut nous
abandonner un seul instant à nous-mêmes sans manquer à son mandat. Notre
incrédulité peut mettre obstacle pour nous à la réalisation de la promesse;
mais lui ne peut être infidèle. Contemplons-le dans la gloire de cette vie
éternelle qui lui a valu son titre de souverain sacrificateur, et notre foi se
fortifiera, et nous croirons que nous sommes bien réellement appelés à vivre
constamment en lui.
Quand nous saisissons parfaitement ce qu'est Jésus
et ce qu'il est pour nous, il nous devient naturel et simple de demeurer en lui
dans tous les moments et toutes les circontances de la vie; quelle que soit
notre disposition, nous trouvons en lui ce qu'il nous faut. Dans les moments de
communion directe, nous nous reposons sur lui comme notre Sauveur, notre
garant, vivant éternellement. Dans nos moments de faiblesse, d'obscurité, de
crainte, nous regardons à lui comme à notre Souverain sacrificateur, revêtu de
la puissance d'une vie qui n'a ni fin ni variation. Et quand la communion
directe doit faire place aux occupations indispensables de la vie, nous pouvons
encore nous reposer sur lui pour nous représenter devant le Père, et compter
sur sa puissance pour nous garder en lui.
TRENTE-UNIEME JOUR
Demeurez
en Christ glorifié.
«
Votre vie est cachée avec Christ en Dieu. Quand, Christ votre vie paraîtra, alors
vous paraîtrez aussi avec lui dans la gloire. » (Col. III : 3, 4)
La communion avec Christ crucifié nous apprend à
être crucifiés avec lui et réellement morts au péché. La communion avec Christ
ressuscité et glorifié nous rend de même participants de sa vie de résurrection
et de la gloire dont il a été couronné dans le ciel. Les bienfaits que l'âme
retire de cette vie en Christ glorifié sont immenses.
Vie de
victoire et de paix. Sur la terre, le Fils de Dieu avait à souffrir, à
lutter : il pouvait être tenté, assailli par le péché; ressuscité, il est
victorieux du péché glorifié, il est revêtu dans son humanité, de la gloire
divine. En demeurant en Jésus comme étant glorifiés avec lui, nous savons par
expérience que la puissance du péché est bien réellement détruite; l'assurance
que notre délivrance complète, éternelle, est un fait accompli, s'empare de
notre âme et la remplit d'une paix toujours croissante.
Vie aussi de pleine
communion avec l'amour et la sainteté du Père. Jésus considérait sa mort
comme un retour au Père : « Je m'en vais au Père, » disait-il. « Glorifie-moi
auprès de toi-même de la gloire que j'avais auprès de toi ». Si nous cherchons
quel avantage nous retirons de notre union avec Christ glorifié, nous voyons
que la gloire et la joie du Fils sont dans la présence lumineuse du Père où
tout est sainteté, parfaite harmonie; et le croyant, sanctifié par cette sainte
communion, connaît, par expérience, la présence de Dieu; il sent l'accord
s'établir de plus en plus entre la volonté du Père et la sienne; car la vie de
Jésus ressuscité est la puissance qui détruit en nous le péché.
Vie d'activité,
d'amour et de bienfaisance. Du trône où il est assis, Jésus dispense ses
dons, répand son Esprit, travaille avec les siens et ne cesse de veiller avec
amour sur eux. Nous ne pouvons être unis à lui dans sa gloire sans nous sentir
nous-mêmes remplis de zèle et fortifiés pour accomplir son oeuvre, son Esprit
et son amour nous communiquant la volonté ci la force d'être en bénédiction aux
autres; car Jésus est monté au ciel dans le dessein même d'obtenir la puissance
de bénir abondamment ; et, comme le Cep divin, il bénit par le moyen de
ses disciples, les sarments.
Vie, enfin, d'attente
et d'espérance glorieuses. Jésus est assis à la droite de Dieu, attendant
que ses ennemis soient mis sous ses pieds, le regard fixé vers le temps où il
recevra sa pleine récompense, quand sa gloire sera manifestée et que son peuple
sera pour toujours avec lui dans cette gloire. L'espérance de Christ est celle
de ses rachetés. « Je reviendrai et je vous prendrai avec moi, afin que là où
je suis vous y soyez aussi. » (Jean
14 : 3). Cette promesse est aussi précieuse à Jésus qu'à nous: la joie de la
rencontre est aussi grande pour l'époux qui vient que pour l'épouse qui attend.
Et le croyant, intimement uni à Christ, s'en réjouit, non pas tant en vue de
son bonheur personnel, que comme un sujet fidèle à son roi qu'il lui tarde de
voir venir dans la gloire, victorieux de ses ennemis, alors que l'amour éternel
du Père sera pleinement révélé. « Jusqu'à ce qu'il vienne » est le mot
d'ordre du croyant sincère. « Quand Christ votre vie, paraîtra, alors vous
paraîtrez aussi avec lui dans la gloire. » (Col. 3 :4)
Cette attente est un sujet de joie et de force.
Jésus revenant, nous prenant à lui ; Jésus adoré comme le Seigneur de tous, est
le résumé et le centre de l'espérance de l'Eglise entière.
C'est en contemplant Jésus glorifié et en demeurant
en lui comme tel, que le croyant parviendra à cette conception vraiment spirituelle
de sa venue, qui seule apporte à l'âme une vraie bénédiction.
Il y a souvent dans l'étude des choses à venir un
intérêt plus intellectuel que spirituel, qui se complait dans les discussions
plus que dans la contemplation de la gloire promise. Ce qui nous préparera à
la rencontre avec Jésus et ce qui convaincra l'Eglise et le monde que notre
espérance est selon la puissance de Dieu et non selon la sagesse humaine, ce
n'est pas la justesse de nos vues ni le zèle avec lequel nous les défendons ;
mais c'est un esprit d'humilité et d'amour qui témoigne que Celui qui vient
est déjà en vérité notre vie ; c'est cette communion avec lui qui, faisant
pénétrer en nous sa gloire, nous donne de refléter en nos personnes l'image du
Christ glorifié.
Qu'elle est bénie, la vie cachée avec Christ en
Dieu! Demeurer en Christ glorifié, être assis avec lui dans les lieux célestes
! Mais, encore une fois, de misérables créatures, nées de la poudre,
peuvent-elles réellement demeurer dans la communion du Roi de gloire? Oui, grâces
à Dieu; et l'oeuvre même de Christ est de maintenir cette union. Il dispose
pour cela de la toute-puissance dans le ciel et sur la terre en faveur de
quiconque s'en remet à lui et persévère dans la foi. Par un simple acte de foi,
l'âme s'est d'abord abandonnée au Sauveur ; par un simple acte de foi encore,
mais d'une foi devenue puissante en grandissant, l'âme reçoit le Christ
glorifié et la plénitude de grâce qu'il apporte avec lui. Saisissant toujours
mieux la réalité de cette gloire, elle y participe par sa communion, si bien
que la vie du croyant commence à reluire, comme la face de Moïse, d'un éclat
qui n'est pas de ce monde.
Vie glorieuse ! et qui
nous appartient puisque nous possédons Christ. Sa puissance cachée agit déjà
en nous, en attendant son épanouissement complet dans la gloire. Puissent la
joie et la paix, dans notre vie journalière, en être une preuve éclatante
Puisse notre communion avec Christ glorifié être notre force pour vivre à la
gloire du Père et nous rendre participants de la gloire du Fils!
ET
MAINTENANT PETITS ENFANTS
DEMEUREZ
EN LUI,
AFIN
QUE
LORSQU'IL
PARAITRA NOUS AYONS DE L'ASSURANCE,
ET QU'A SON AVÈNEMENT
NOUS
NE SOYONS PAS CONFUS ET ÉLOIGNÉS DE LUI.
1
JEAN 2 :28
Edition Numérique Yves PETRAKIAN – France
2011 –
Diffusion gratuite uniquement en
indiquant la source : http://456-bible.123-bible.com/