155 - UN SERMON POUR TOUT LE MONDE.

Je multiplierai les visions et je proposerai des similitudes
(Osée 12:11).

       Lorsque le Seigneur voulait amener son peuple d’Israël à la repentance, il ne négligeait aucun moyen propre à le faire réfléchir. Selon l’expression d’un prophète, il lui donnait précepte après précepte, et ligne après ligne, un peu ici et un peu là. Tantôt c’était la verge à la main qu’il instruisait ses enfants rebelles, et alors il les visitait par la peste, la guerre ou la disette. D’autres fois, au contraire, il semblait vouloir les gagner à force de bienfaits ; car il multipliait extrêmement leur froment, leur huile et leur vin, et ne leur envoyait plus la famine. Mais le plus souvent, hélas, les enseignements de sa providence restaient sans effet, et alors même que sa main était étendue, soit pour châtier soit pour bénir, Israël continuait à se révolter contre le Très-Haut. En vain leur envoyait-il messager sur messager ; en vain leur parlait-il tour à tour par le sublime Ésaïe, par le plaintif Jérémie et par cette rapide succession de prophètes au coup d’œil inspiré, à la voix de tonnerre, qui répétaient à l’envi les brûlants appels de Jéhovah : tout était inutile : le peuple refusait d’écouter ces répréhensions ; il endurcissait son cœur et persévérait dans ses iniquités. Parmi les nombreux moyens que Dieu employait pour captiver son attention et toucher sa conscience, l’usage des similitudes doit être mis au premier rang. Souvent les prophètes étaient appelés non seulement à prêcher, mais à être eux-mêmes des signes et comme de vivantes paraboles au milieu de leur génération. C’est ainsi, par exemple, que l’Éternel commanda à Ésaïe d’appeler son fils Maher-Sçalal-Hascbaz, c’est-à-dire : « Qu’on se dépêche de butiner », car avant que l’enfant sache crier : mon père et ma mère, on enlèvera la puissance de Damas et le butin de Samarie, en la présence du roi d’Assyrie (#Esa 8:3,4). C’est ainsi encore que, dans une autre occasion, le Seigneur dit au même prophète : « Va, et délie le sac de dessus tes reins, et déchausse les souliers de tes pieds » ; ce qu’il fit, allant nu et déchaussé. Puis l’Éternel dit : « Comme mon serviteur Ésaïe a marché nu et déchaussé, ce qui est un signe et un prodige contre l’Égypte et contre Cus pour trois années ; ainsi le roi d’Assyrie amènera d’Égypte et de Cus, prisonniers et captifs, les jeunes et les vieux, nus et déchaussés, ce qui sera l’opprobre de l’Égypte » (#Esa 20:2-4). Osée, le prophète aux écrits duquel j’ai emprunté mon texte, eut également à enseigner le peuple par plusieurs similitudes remarquables. Les noms de ses enfants avaient un sens emblématique. L’Éternel lui ordonna d’appeler son fils Jizréhel, car dans peu de temps, lui dit-il, je ferai venir sur la maison de Jéhu la punition du sang de Jizréhel, et quant à sa fille, le prophète dut la nommer Lo-ruhama, car, lui dit le Seigneur, je ne continuerai plus à faire miséricorde à la maison d’Israël (#Os 1:4-6). Ainsi, par diverses images significatives, Dieu contraignait son peuple à entendre sa voix. Les prophètes devaient faire des choses étranges, afin que leurs contemporains étonnés s’entretinssent de ce qu’ils avaient fait, et afin que l’enseignement divin qui ressortait de ces signes s’emparât avec plus de force de leurs consciences et de leurs cœurs.

       Une pensée m’a frappé ces jours derniers, mes chers auditeurs, et cette pensée, la voici : c’est que Dieu nous parle encore en similitudes.

       Lorsque le Seigneur Jésus était sur la terre, il se plaisait à enseigner le peuple par des paraboles, et maintenant qu’il est au ciel, il fait de même. La Providence est le sermon de Dieu. Les objets qui nous environnent, les événements qui se passent autour de nous, sont comme autant de voix par lesquelles Dieu cherche à nous instruire, et pour peu que nous fussions sages, nous trouverions à chaque pas des leçons pleines d’importance. Ô fils des hommes ! Le Seigneur vous avertit chaque jour par sa Parole ; il s’adresse à vous par la bouche de ses serviteurs, de ses ministres ; mais outre cela, sachez-le, il vous parle sans cesse en similitudes. Il ne néglige aucun moyen pour ramener ses enfants coupables, pour faire retourner à la bergerie les brebis perdues de la maison d’Israël. Je me propose aujourd’hui, mes bien-aimés, de vous démontrer successivement que le Seigneur vous instruit par des similitudes, TOUS LES JOURS, EN TOUTES SAISONS, EN TOUS LIEUX, et QUELLE QUE SOIT VOTRE VOCATION.

I.

Et d’abord, ai-je dit, il vous instruit TOUS LES JOURS par des similitudes. Commençons aux premières heures de la journée. Vous vous êtes réveillés ce matin, et en vous levant, votre premier soin, n’est-il pas vrai, a été de couvrir votre corps, de vous vêtir de vos habits. Est-ce que la voix de Dieu ne vous a point alors parlé ? Est-ce qu’elle n’a pas dit à chacun de vous, si du moins vous avez voulu l’écouter : « Pécheur ! Quand les vains songes de la vie auront pris fin, quand le grand jour de l’éternité aura lui pour toi, que sera-ce si tu n’as rien pour te couvrir ? Avec quoi cacheras-tu la nudité de ton âme ? Si pendant cette vie tu méprises la robe de noce, la justice parfaite de Jésus-Christ, que feras-tu, je te le demande, quand la trompette de l’archange, pénétrant jusqu’aux profondeurs du sépulcre, te réveillera soudain dans ta couche glacée, quand les cieux embrasés seront dissous et que les colonnes du globe trembleront de terreur au son du tonnerre de Jéhovah ? Où trouveras-tu alors de quoi te vêtir ?

       Pourras-tu aller à la rencontre de ton Créateur sans une couverture pour voiler la honte ? Adam ne l’osa point : et toi, l’oseras-tu ? Mais en admettant même que tu aies cette audace, le Seigneur ne te repoussera-t-il pas dans sa juste colère ? Ne t’enverra-t-il pas dans le séjour de tourments, afin que tu sois brûlé au feu qui ne s’éteint point, parce que tu auras négligé de vêtir ton âme, tandis que tu étais encore dans ce lieu de préparation ? »

       Mais vous voilà habillés ; vous vous réunissez avec les divers membres de vos familles ; vos enfants s’assemblent autour de votre table ; ils prennent part au repas du matin. — Si vous avez été intelligents, mes chers auditeurs, en ce moment encore, vous avez sûrement entendu la voix de Dieu. « Pécheur, semblait vous dire ce Dieu de miséricorde, pécheur ! À qui un enfant irait-il, si ce n’est à l’auteur de ses jours ? Où pourrait-il chercher son pain quotidien, si ce n’est à la table de son père ? » Et tandis que vous donniez à vos enfants la nourriture dont ils avaient besoin, le Seigneur ne vous apparaissait-il pas sous les traits touchants d’un père de famille et ne murmurait-il pas dans le silence de votre cœur : « Mon enfant, combien je serais heureux de nourrir ton âme ! Combien je prendrais plaisir à te donner le pain du ciel et à te rassasier de la nourriture des anges ! Mais tu as dépensé ton argent pour ce qui ne nourrit point et ton travail pour ce qui ne rassasie point. Écoute-moi attentivement et tu mangeras ce qui est bon et ton âme jouira de ce qu’il y a de meilleur. Viens, mon enfant, viens à ma table. Le précieux sang de mon Fils a été versé pour être ton breuvage, et sa chair a été rompue pour te servir d’aliment. Pour quoi donc errerais-tu toujours loin de moi, affamé et altéré ? Viens à ma table, ô mon enfant, car j’aime que mes fils et mes filles s’y assoient sans crainte et y savourent les choses excellentes que je leur ai préparées. »

       Ensuite, mes chers amis vous avez sans doute quitté votre demeure et vous êtes allés au travail jusqu’au soir. J’ignore quelle est votre profession ou comment votre temps est employé : d’ailleurs, je me réserve de revenir plus tard sur ce point. Mais quelles que puissent être vos occupations, sûrement, bien-aimés, tandis que vos doigts travaillaient, Dieu parlait à vos cœurs ; et à moins que les oreilles de vos âmes n’aient été complètement bouchées, à moins que vos esprits n’aient été pesants et engourdis, vous avez dû discerner ses appels. Quand, par exemple, le soleil brillait au-dessus de vos têtes et que l’heure de midi avait sonné, le Seigneur ne vous rappelait-il point que le sentier du juste est comme la lumière resplendissante qui augmente son éclat jusqu’à ce que le jour soit en sa perfection ? Ne vous disait-il point : « Voilà, j’ai tiré le soleil des ténèbres de l’orient ; je l’ai conduit par ma puissance ; je l’ai aidé à gravir les incommensurables hauteurs des cieux ; et maintenant, comme un homme vaillant qui a fait sa course, comme un géant qui a atteint le but, il est parvenu à son zénith. Ce que je fais pour le soleil, je suis prêt, ô pécheur, à le faire pour toi, remets ta voie à l’Éternel et il éclairera ton sentier. Ta vie sera comme la lumière et ton chemin comme le midi, ton soleil ne se couchera point pendant qu’il est encore jour, mais les jours de ton deuil seront finis ; car l’Éternel sera pour toi une lumière éternelle et ton Dieu sera ta gloire. »

       Mais le soleil s’est abaissé vers l’occident, ses rayons ont perdu de leur vif éclat, et à mesure que les ombres du soir enveloppaient la nature, le Seigneur ne te parlait-il point, ô mon frère, de la fin qui avance à grands pas ? « Les soleils ont leurs couchers et les hommes ont leurs tombeaux », semblait te dire la sagesse éternelle.

       « Prends garde, ô mortel, de bien employer le soir de ta vie, car la lumière du soleil ne subsistera point à jamais. Il y a douze heures au jour, mais dans la nuit du sépulcre où tu vas, il n’y a ni œuvre, ni discours, ni science, ni sagesse. Hâte-toi donc ; fais selon ton pouvoir tout ce que tu auras moyen de faire, travaille pendant qu’il fait jour, car la nuit vient dans laquelle personne ne peut travailler. » — Et lorsque le soleil se couche dans sa gloire, admire, ô homme, les teintes splendides dont il revêt l’étendue des cieux ; observe combien son disque paraît grandir à mesure qu’il s’approche de l’horizon ; et en contemplant ce sublime spectacle, fléchis le genou devant ton Dieu et fais monter vers lui cette humble prière : « Seigneur, que ma mort soit semblable au coucher du soleil ! Si à cette heure suprême, je suis environné de nuages ou de ténèbres, aide-moi à les dissiper par la splendeur de ma foi. Entoure-moi, ô mon Dieu, de plus de lumière sur mon lit de mort que je n’en ai eu pendant toute ma vie. Si un grabat doit être ma couche funèbre, si je dois expirer dans quelque réduit solitaire, que du moins, ô mon Dieu, ma pauvreté soit illuminée par l’éclat que tu me donneras, en sorte que mon exemple fasse briller à tous les yeux la grandeur d’une mort chrétienne. » — C’est ainsi, ô homme, que Dieu te parle en similitudes depuis le lever jusqu’au coucher du soleil.

       Et maintenant la nuit est venue ; tu allumes ton flambeau ; tu t’assieds entouré de tes enfants, et le Seigneur t’envoie un petit prédicateur qui à sa manière te prêche un solennel sermon. Ce prédicateur, c’est un moucheron qui tournoie et tournoie autour de ta chandelle. Il se délecte à sa clarté, il se baigne dans sa lumière, jusqu’a ce qu’enfin ébloui, fasciné, saisi de vertige, il brûle ses ailes délicates. Tu cherches à le sauver, mais vaines tentatives ! Immobile un moment, le fol insecte rassemble bientôt ses forces ; il se précipite tête baissée dans la flamme et trouve ainsi la mort et la destruction. Est-ce que le Seigneur ne t’a point dit alors : « Pécheur, voilà ton image ! Tu aimes l’éclat fascinateur des folies du siècle. Oh ! Que n’es-tu assez sage pour craindre et pour fuir le péché, car celui qui prend plaisir à sa lumière, sera consumé par ses flammes ! » Est-ce que ta main ne te paraissait pas comme l’image de la main du Tout-Puissant, qui voudrait t’éloigner de ta propre ruine, qui te reprend par sa providence, qui semble te crier continuellement : « Pauvre insensé ! Ne te perds pas toi-même ! » Et tandis que la mort du chétif insecte te faisait peut-être éprouver quelque tristesse, une voix solennelle ne se faisait-elle pas entendre au fond de ton cœur, t’avertissant du sort terrible qui deviendra ton partage, quand, après t’être laissé emporter par le tourbillon étourdissant des joies du monde, tu tomberas, à la fin, dans le feu éternel, — ayant sacrifié ton âme (ô comble de la folie !) pour des jouissances aussi trompeuses qu’éphémères ! …  ne te rappelle-t-il pas cette parole du Maître : quand le père de famille sera entré et qu’il aura fermé la porte, et que vous étant dehors, vous vous mettrez à frapper à la porte et à dire : Seigneur, Seigneur, ouvre-nous, il vous répondra : je ne sais d’où vous êtes ? Ah ! Pécheur, vains seront tes coups, lorsque les verrous de l’éternelle justice auront irrévocablement fermé pour le genre humain les portes de la grâce ; lorsque la main du Père tout-puissant aura recueilli ses enfants bien-aimés dans l’heureuse enceinte du paradis, laissant les ouvriers d’iniquité dans les ténèbres glacées du dehors, dans ces ténèbres où il y a des pleurs et des grincements de dents … 

       Dis, pécheur, Dieu ne t’a-t-il point parlé de cette manière ? Et lorsque ton doigt était sur la serrure de ta porte, le sien n’était-il pas sur ton cœur ? Tu t’es endormi, mais bientôt tu as été réveillé en sursaut. La voix lugubre du garde de nuit répétant les heures, ou son pas lourd et mesuré retentissant sous ta fenêtre, t’on fait tressaillir. Ô homme ! Si tu as eu alors des oreilles pour ouïr, n’as-tu pas entendu dans ton âme ce cri saisissant : « Voici l’époux qui vient ; sortez au devant de lui ! » Et chaque son qui à l’heure de minuit a interrompu ton sommeil n’aurait-il pas dû te faire ressouvenir de la trompette de l’archange qui annoncera la venue du Fils de l’homme, au jour où il jugera les vivants et les morts selon mon Évangile ? — Oh ! Mes chers auditeurs, si vous étiez sages ! Si vous compreniez ces choses ! Si vous vouliez prêter l’oreille à la voix de Dieu ! Car, en vérité, je vous le dis, tous les jours et à chaque heure du jour, depuis les premières lueurs de l’aurore jusqu’aux ombres du crépuscule et aux profondes ténèbres de minuit, Dieu parle à l’homme : il lui parle en similitudes.

II.

Changeons maintenant le cours de nos pensées, et observons que le Seigneur nous parle en similitudes non seulement tous les jours, mais EN TOUTES SAISONS.

       Il n’y a que peu de temps que nous ensemencions nos jardins et que nous répandions le froment dans nos larges sillons. Dieu nous a donné le temps des semailles, pour nous rappeler que nous sommes comme la terre, et qu’il répand sans cesse du bon grain dans nos cœurs. « Prends garde, ô homme, semble-t-il nous dire, prends garde de ne pas ressembler à ce chemin sur lequel la semence étant tombée, les oiseaux du ciel vinrent et la mangèrent toute. Prends garde de ne pas ressembler non plus à un endroit aride et pierreux, de peur que la semence ne germe incontinent, et que le soleil étant levé, elle ne soit brûlée, parce qu’elle n’entrait point profondément dans la terre. Et prends garde aussi, ô fils de l’homme, de ne pas être comme ce terrain où les épines crûrent et étouffèrent la semence, mais efforce-toi plutôt d’être semblable à la bonne terre dans laquelle la semence porte du fruit, un grain trente, un autre soixante, et un autre cent. »

       Mais ce n’est pas tout. En déposant notre semence dans la terre, nous savions qu’elle germerait et croîtrait. N’y a-t-il pas là une leçon pour nous ? Est-ce que toutes nos actions ne sont pas comme autant de grains de semence ? Nos moindres paroles elles-mêmes ne sont-elles pas comme des graines de sénevé ? Et ne pourrait-on pas comparer nos conversations journalières à une poignée de semence que nous répandrions sur le sol ? Oh ! Qu’elle est sérieuse la pensée que chaque mot qui sort de notre bouche vivra indéfiniment, que nos actes sont immortels comme nous-mêmes, et qu’après être restés quelque temps ensevelis dans la poussière pour être mûris, ils reparaîtront infailliblement sur la scène du monde ! Les semences amères du péché auront pour fruit terrible la mort éternelle ; et le bien que la grâce de Dieu nous aura permis de faire, portera, par sa pure miséricorde et non par aucun mérite qui nous soit propre, une abondante moisson de gloire, en ce jour béni où ceux qui auront semé avec larmes moissonneront avec chants de triomphe.

       Écoute donc le temps des semailles qui te crie, ô mon frère : « Prends garde de semer la bonne semence dans ton champ ».

       Mais lorsque cette saison de l’année a fait place à une autre, Dieu a-t-il pour cela cessé de parler ? Oh ! Non. Premièrement l’herbe, ensuite l’épi, et puis le grain tout formé dans l’épi t’adressent tour à tour une homélie. Quelle puissante prédication en particulier le Seigneur ne nous fait-il pas entendre au temps de la moisson ! « Ô Israël, nous crie-t-il, souviens-toi que l’éternelle moisson approche ! Ce que l’homme aura semé, c’est ce qu’il moissonnera aussi. Celui qui sème pour sa chair moissonnera de la chair la corruption, mais celui qui sème pour l’esprit moissonnera de l’esprit la vie éternelle. » Allez, mes bien-aimés, allez parcourir nos campagnes alors que le soleil d’été a doré nos guérets, et pour peu que vos cœurs soient susceptibles d’impressions sérieuses, vous trouverez dans ce spectacle une source intarissable d’instructions. En vérité, je n’oserais essayer d’explorer les riches mines de sagesse renfermées dans un champ de blé. Pensez, mes chers amis, aux sentiments de joie avec lesquels on salue l’époque de la moisson : n’est-ce pas là un emblème de la joie qu’il y aura dans le ciel lorsque les rachetés seront recueillis, comme des épis mûrs, dans le céleste grenier ? Puis considérez l’épi de blé quand il a atteint une parfaite maturité : voyez comme sa tête se penche vers le sol. Autrefois, il la tenait droite et fière, mais maintenant, comme il paraît humble ! Est-ce que le Seigneur ne te dit rien par cette similitude, ô chrétien ? Est-ce qu’il ne dit pas à tous les pécheurs sans distinction que s’ils veulent être prêts pour le jour de la grande moisson, ils doivent eux aussi courber le front jusque dans la poudre, en criant comme le péager : « Ô Dieu, sois apaisé envers moi, qui suis pécheur » ? Et lorsque nous voyons les mauvaises herbes croître parmi le froment, ne semble-t-il pas que nous entendions notre Maître redire la parabole de l’ivraie ? Ne sommes-nous pas comme transportés par la pensée au jour du grand triage, alors que le Père de famille dira aux moissonneurs : cueillez premièrement l’ivraie et liez-la en faisceaux pour la brûler, mais assemblez le froment dans mon grenier ? Et à moi en particulier, ministre de l’Évangile, tu prêches à ta manière, ô moisson jaunissante ! J’entends ta voix qui me crie : « lève tes yeux et regarde les campagnes, voici, elles sont déjà blanches et prêtes à être moissonnées. Travaille donc toi même et prie le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson. » — Elle te parle aussi, ô homme chargé d’années ! Elle te rappelle que la faucille de la mort est déjà aiguisée et que tu seras bientôt retranché ; mais en même temps, elle te console par la douce pensée que le froment sera mis en sûreté, et que, si tu es chrétien, tu seras recueilli dans le grenier de ton Maître, pour faire sa joie et ses délices pendant toute l’éternité. — Écoutez donc, ô fils des hommes, le bruissement harmonieux des épis qui se balancent dans la plaine, et comprenez les sérieuses leçons qu’il vous donne !

       Dans peu de temps, mes bien-aimés, vous verrez des nuées d’oiseaux s’assembler sur les toits de nos demeures. Ils s’élèveront dans les airs en tournant, tournant, tournant toujours, comme pour dire un dernier adieu à notre vieille Europe ; puis ils se formeront en colonnes serrées, ayant chacune un chef à sa tête ; et tandis que l’hiver, de sa main glacée, s’apprêtera à dépouiller les bois qui les ont vus naître, ils s’élanceront au-dessus des vagues bleues de l’Océan pour aller au loin chercher des cieux plus doux. Est-ce que le Tout-Puissant ne t’enseigne rien par là, ô pécheur ? Ne te souviens-tu pas qu’il ait dit dans sa Parole : la cigogne même a connu dans les cieux ses saisons ; la tourterelle, l’hirondelle et la grue observent le temps où elles doivent venir, mais mon peuple n’a point connu le droit de l’Éternel ? Ne semble-t-il pas aussi nous avertir tous qu’un froid et sombre hiver va venir sur le monde ; un temps de détresse tel qu’il n’y en a point eu et qu’il n’y en aura jamais de semblable ; un temps où toutes les joies du péché se flétriront comme se flétrissent les fleurs à l’approche des frimas ; un temps où le beau soleil de la prospérité sera remplacé pour le pécheur par les tristes nuages du désenchantement ? « Mortels, mortels, hâtez-vous ! » semble nous dire la voix de Dieu. « Prenez votre essor vers ce pays fortuné où Jésus habite ! Fuyez le péché qui est en vous et le péché qui vous entoure ! Fuyez la ville de la destruction ! Fuyez le tourbillon des plaisirs et les orages des passions ! Envolez-vous comme des oiseaux à leurs nids ! Traversez sans crainte l’océan de la repentance et de la foi, pour aller chercher un refuge dans la terre de la miséricorde, afin que lorsque le grand jour de la vengeance divine passera sur le monde, vous soyez à l’abri dans les fentes du rocher. »

       Je me souviens d’une circonstance de ma vie où Dieu parla à ma conscience d’une manière bien frappante, au moyen d’une similitude. On était en plein hiver. La campagne était noire et désolée ; à peine pouvait-on découvrir le moindre vestige de verdure. Des haies dégarnies, des arbres dépouillés, et puis la terre, sombre et froide, qui s’étendait jusqu’à l’horizon : voilà tout ce que l’œil rencontrait. Mais tout à coup Dieu parla ; il ouvrit les trésors de la neige, et des flocons éblouissants descendirent des cieux, jusqu’à ce qu’enfin toute la nature fût devenue une masse d’étincelante blancheur. Depuis quelque temps je cherchais mon Sauveur, et ce fut justement vers cette époque que je le trouvai ; aussi n’oublierai-je jamais avec quelle force ces paroles se présentèrent à mon esprit : venez maintenant, dit l’Éternel, et débattons nos droits. Quand vos péchés seraient comme le cramoisi, ils seront blanchis comme la neige, et quand ils seraient rouges comme le vermillon, ils deviendront blancs comme la laine. « Pécheur, sembla me dire une voix divine, pécheur ! Tu es semblable à cette terre noire et aride. Ton âme est pareille à ces arbres desséchés, à ces buissons sans fleurs ni feuillage. Mais la grâce de Dieu est comme la neige : elle tombera sur toi jusqu’à ce que ton cœur incrédule resplendisse de la blancheur du pardon, jusqu’à ce que ta pauvre âme souillée soit entièrement couverte de la pureté sans tache du Fils de Dieu. » Et à chacun de vous, mes bien-aimés, le Seigneur tient le même langage. Il vous crie en cet instant même : « Pécheur ! Tu es noir, mais je suis prêt à te blanchir. J’envelopperai ton cœur dans la justice immaculée de mon Fils, et revêtu des vêtements de ce Fils de mon amour, tu seras saint comme je suis saint. »

       Et quand le vent mugit à travers les arbres, quand il renverse tout sur son passage, souvenons-nous de l’Esprit du Seigneur qui souffle où il veut et quand il lui plaît. Soupirons avec plus d’ardeur après cette divine et mystérieuse influence qui peut seule nous faire avancer dans notre voyage vers les cieux, renverser les cimes altières de notre orgueil naturel, déraciner les cèdres magnifiques de notre justice propre, et ébranler jusque dans ses fondements les refuges de néant où nous nous croyons en sûreté, pour nous faire regarder à Celui qui est le seul abri contre la tempête, le seul refuge assuré quand le souffle des vents impétueux est comme un tourbillon qui abattrait une muraille.

       Enfin, lorsqu’oppressé par la chaleur du jour, tu te mets à couvert à l’ombre d’un arbre, l’ange de l’Éternel, ô mon frère, ne se tient-il pas à côté de toi, murmurant à ton oreille : « Pécheur, élève tes yeux en haut. De même que cet arbre te garantit des rayons brûlants du soleil, de même il est un Être tout bon, qui est comme le pommier parmi les arbres des forêts et qui t’invite à venir t’asseoir sous son ombrage. Va donc à lui. Il te garantira de l’éternelle vengeance de son Père. Il te couvrira de son ombre, alors que les ardeurs dévorantes de la colère divine darderont en plein sur la tête des ouvriers d’iniquité. »

III.

Mais si le Seigneur nous parle en tout temps, observons qu’il nous parle aussi EN TOUS LIEUX. Où que nous allions et quelles que soient les scènes que nous ayons sous les yeux, il nous parle en similitudes. Va à ton étable, ô mon frère, et ton bœuf et ton âne t’instruiront : le bœuf connaît son possesseur et l’âne la crèche de son maître ; mais Israël n’a point de connaissance, mon peuple n’a point d’intelligence. Il n’est pas jusqu’au chien qui te suit comme ton ombre dont tu ne puisses recevoir de sérieux avertissements. Le chien suit son maître ; il ne suivra point un étranger, car il ne connaît point la voix de l’étranger ; mais toi, tu oublies ton Dieu et tu te détournes dans des sentiers obliques. — Regarde aussi ces poussins qui boivent dans la mare, et que leur exemple te reprenne à cause de ton ingratitude. Ils boivent, et à chaque gorgée, ils lèvent leurs petites têtes vers le ciel, comme pour remercier Celui qui envoie la pluie de la goutte d’eau qui les désaltère ; tandis que toi, créature intelligente, comblée des dons de Dieu, tu bois et tu manges sans penser à le bénir pour les aliments qu’il te donne, sans faire monter des actions de grâce vers le tendre Père qui te nourrit ! Le fouet est pour le cheval et le licol est pour l’âne, et tous les deux obéissent à leurs conducteurs ; mais c’est en vain, ô homme, que Dieu t’a châtié par sa providence et qu’il t’a bridé par ses commandements : tu es plus obstiné que l’âne ou que le mulet ; tu ne veux pas courir dans la voie de la justice ; tu te détournes pour suivre volontairement la perversité de ton méchant cœur. — Mes chers amis, ce que je dis n’est-il point vrai ? Si vous êtes encore sans Dieu et sans Christ, vos consciences ne sont-elles point forcées de reconnaître que ces choses s’appliquent à vous ? Ah ! Plaise à Dieu que quelqu’une de mes paroles pénétrant jusqu’au fond de vos âmes vous amène à trembler devant le Très-Haut, et à le supplier de vous accorder aujourd’hui même un nouveau cœur et un esprit droit, afin que vous ne soyez plus semblables aux bêtes des champs, mais que vous deveniez des hommes pleins du Saint-Esprit, vivant dans l’obéissance à leur Créateur !

       Mais poursuivons notre examen. — Si vous avez voyagé, vous avez certainement dû observer qu’en quelques endroits la route était jonchée de pierres ; peut-être même avez-vous murmuré parce que la voie que vous deviez suivre était rude et raboteuse. Mais, d’un autre côté, n’avez-vous point réfléchi que ces cailloux dont vous vous plaigniez, étaient destinés à améliorer la route, et qu’il n’est pas jusqu’aux chemins les plus impraticables qui ne deviennent à la longue faciles et pléniers si on a soin de les couvrir de pierres ? Or, ceci ne vous a-t-il point conduit à penser à tout ce que Dieu a fait pour amender vos âmes ? Que de fois n’a-t-il pas jeté sur vous les lourdes pierres de l’affliction ! Qui pourrait dire le nombre des avertissements qu’il a étendus sur vos consciences ? Et cependant, vous n’êtes pas meilleurs ; au contraire, vous empirez de jour en jour. Ah ! Prenez garde que lorsque le souverain Juge viendra constater par lui-même si le chemin de votre conduite morale est devenu, en quelque mesure, conforme au chemin royal de la sainteté, il n’ait lieu de s’écrier : « Hélas ! J’ai réparé cette route, mais elle ne vaut pas mieux. Qu’elle reste donc telle qu’elle est, couverte d’ornières et de fange, jusqu’à ce que celui qui l’entretient si mal, y trouve la mort. »

       Et quand tu es allé au bord de la mer, mon cher auditeur, la grande voix de l’Océan ne t’a-t-elle point parlé ? Inconstant comme les vagues, tu ne sais point obéir comme elles. Dieu tient en bride la vaste mer ; il a environné ses flots écumants d’une ceinture de sable ; il leur a assigné des limites qu’ils ne peuvent franchir. Ne me craindrez-vous point, dit l’Éternel, et ne serez-vous point épouvantés devant ma face ? Moi, qui ai mis le sable pour borne à la mer, par une ordonnance perpétuelle, et qu’elle ne passera point ; ses vagues s’émeuvent, mais elles ne seront pas les plus fortes ; et elles bruirent, mais elles ne la passeront point. Que ta conscience te reprenne, ô homme. D’un rivage à l’autre rivage, la mer obéit à son Créateur ; mais toi, tu ne veux point le reconnaître comme ton Dieu, et tu dis dans ton fol orgueil : « Qui est l’Éternel afin que je le craigne ? Qui est Jéhovah afin que je reconnaisse sa puissance ? »

       Écoute aussi les montagnes et les collines, car elles t’instruisent à leur tour. Tu vois en elles un emblème de la stabilité de Dieu. Il subsistera d’âge en âge. Ses attributs sont éternels, ses perfections immuables. Ne crois pas qu’il puisse changer.

       Et maintenant, pécheur, je t’en supplie, en retournant chez toi aujourd’hui, ouvre tes yeux, et si rien de ce que j’ai dit n’a atteint ta conscience, peut-être que Dieu placera sur ton chemin quelque objet qui te fournira un texte sur lequel tu te prêcheras à toi-même un sermon que tu n’oublieras jamais. Oh ! Si j’avais plus de temps, plus de pensées et plus de paroles, je ferais comparaître successivement en ta présence les choses qui sont là-haut au ciel, et ici-bas sur la terre et dans les eaux qui sont sous la terre ; et à mesure qu’elles défileraient devant toi, je sais qu’elles te diraient d’un commun accord : « Souviens-toi de l’Éternel, ton Créateur, pour le craindre et pour le servir, car c’est lui qui t’a fait et tu ne t’es point fait toi-même ». Nous lui obéissons, et notre obéissance fait notre gloire : obéis comme nous, et comme nous tu l’en trouveras bien. Ô homme, garde-toi de fermer l’oreille à cette voix d’exhortation qui t’arrive de toutes parts. Obéis tandis que tu le peux encore, de peur que lorsque ta vie sera terminée, toutes ces choses qui t’avertissent aujourd’hui ne s’élèvent alors en témoignage contre toi ; de peur que le caillou du chemin ou la pierre de la muraille ne prenne une voix pour te condamner ; que les vallées et les coteaux ne te maudissent et que les bêtes des champs ne soient tes accusateurs. Ô homme, sache-le, la création tout entière est ton censeur. Dieu désire que tu sois sauvé ; c’est pourquoi il a placé dans la nature et dans la providence des signaux indicateurs, afin de te montrer le chemin qui mène à la ville de refuge (#No 35:10-28). Pour peu que tu sois intelligent, tu ne saurais donc t’égarer, et si tu le fais, souviens-toi que ton ignorance volontaire ou ta coupable négligence seront la seule cause de ta perle, car Dieu a tracé ton chemin devant toi, et t’encourage de toutes manières à y demeurer.

IV.

Je crains de vous fatiguer, mes chers amis ; toutefois, je remarquerai, avant de terminer, que l’homme, quelle que soit SA VOCATION, peut recevoir instruction de cette vocation même.

       Et d’abord, l’agriculteur peut entendre chaque jour mille sermons. J’en ai déjà indiqué quelques-uns ; qu’il ouvre seulement les yeux, et il en découvrira d’autres. À chaque pas il peut discerner la voix des anges et le murmure des esprits célestes, l’invitant à se tourner vers Dieu, car pour qui sait écouter, la nature entière, je le répète, a une langue toujours prête à rendre hommage à son Créateur.

       Mais il est des hommes dont la vocation ne leur permet que rarement de contempler la nature, et pourtant à ceux-là même, Dieu parle constamment en similitudes. Voyez le boulanger qui nous fournit notre pain. Il remplit son four de combustible, il lui donne le degré de chaleur nécessaire ; après quoi, il y met sa pâte. Or, tandis qu’il est là, debout à l’entrée de son four, bien insensible serait sa conscience si elle ne tremblait pas, car il est un passage de l’Écriture qu’il doit comprendre mieux que personne : « Voici, un jour vient, embrasé comme une fournaise, et tous les orgueilleux, et tous ceux qui commettent la méchanceté seront comme du chaume, et ce jour-là qui vient les embrasera, a dit l’Éternel des armées, et ne leur laissera ni racine ni rameau ! » Oui, de la bouche du four sort un brûlant et terrible appel, et si l’homme inconverti voulait y prendre garde, sûrement son cœur fondrait comme de la cire au dedans de lui.

       Voyez encore le boucher : l’animal qu’il va égorger ne lui dit-il rien ? En voyant la brebis lécher, pour ainsi dire, son couteau, et le bœuf marcher à la tuerie sans se douter de ce qui l’attend, ne devrait-il pas faire un sérieux retour sur lui-même ? Vous tous qui êtes sans Christ, ne ressemblez-vous pas en effet à des bêtes qu’on engraisse pour la boucherie ? Bien plus vous êtes même plus insensés que le taureau, car vous courez au-devant de votre exécuteur, et vous suivez bénévolement le grand destructeur des âmes jusque dans les profondeurs de l’enfer. Est-ce que l’intempérant qui se plonge tête baissée dans ses honteux excès, ou le voluptueux qui se livre résolument à ses débauches, ne sont pas à la lettre comme le bœuf qui s’en va à la boucherie jusqu’à ce qu’un dard lui perce le cœur ? Dieu n’a-t-il point aiguisé son épée et préparé le glaive de sa justice afin de mettre à mort les bêtes grasses de la terre, au jour où il dira aux oiseaux de toutes espèces, et à toutes les bêtes des champs : « Assemblez-vous et venez ! Amassez-vous de toutes parts pour mon sacrifice, et vous mangerez de la chair, et vous boirez du sang jusqu’à en être ivres » ? Oui, boucher, ton métier te fournit de solennels enseignements : puisses-tu en profiter !

       Et vous dont l’art consiste à confectionner des chaussures pour nos pieds, vous avez aussi une sérieuse leçon à apprendre. La pierre sur laquelle vous battez votre cuir vous accuse, car votre âme est peut-être aussi dure qu’elle. Le Seigneur ne vous a-t-il pas frappé presque aussi souvent que vous frappiez cette pierre ? Et pourtant votre cœur n’est ni brisé ni attendri. Oh ! Que ferez-vous, je vous le demande, lorsque au dernier jour le souverain Juge, voyant que vous portez encore au dedans de vous un cœur de pierre, vous jettera dans les ténèbres du dehors, parce que vous aurez méprisé ses répréhensions et fermé l’oreille à la voix de ses châtiments ? … 

       Que le brasseur n’oublie point que s’il prépare de la boisson pour les outres, l’Éternel prépare aussi une coupe mixtionnée, dont tous les méchants suceront les lies. — Que le potier tremble, de peur qu’il ne soit trouvé semblable à un vase gâté. — Que l’imprimeur veille à ce que sa vie soit composée de types célestes, et non des noirs caractères du péché. — Peintre, prends garde ! Celui qui sonde les cœurs et les reins ne se contentera pas de la plus belle peinture ; des réalités sans apprêt ni vernis, voilà ce qu’il exigera de toi.

       D’autres parmi vous se livrent à un commerce qui les oblige à faire usage de poids et de mesures. Qu’ils n’oublient pas, en pesant leurs marchandises, de se peser aussi eux-mêmes. Qu’ils se représentent le grand Juge la balance de l’éternelle justice à la main, plaçant son Évangile dans un plateau et leurs âmes dans l’autre, puis prononçant ces solennelles paroles : « Mene, Mene, Tekel : tu as été pesé dans la balance et tu as été trouvé léger » (#Da 5:25-27). Et quand vous mesurez vos étoffes et que vous coupez la quantité dont vos chalands ont besoin, pensez à la mesure de vos jours ; réfléchissez de combien petite durée vous êtes. Votre vie, vous le savez, ne doit pas dépasser une certaine longueur, et chaque année la mesure avance, elle avance toujours, jusqu’à ce qu’enfin les ciseaux de la mort en trancheront le fil. Et que sais-tu, ô pécheur, si le temps qui te reste à vivre n’est pas réduit à la mesure de quatre doigts ? Qu’est ce que ce malaise qui te mine, si ce n’est le premier coup de ciseau ? Qu’est ce que ce tremblement dans tes membres, cet affaiblissement de ta vue, cette perte de ta mémoire, ce déclin de ta vigueur, si ce n’est la première déchirure ? Ah ! Souviens-toi que bientôt, oui, bientôt, le fragile tissu de ta vie sera déchiré en deux, que le nombre de tes jours sera accompli, que tes années seront dissipées, finies, perdues sans retour !

       Mais peut-être, mon frère, es-tu en service et tes occupations sont-elles de nature très diverse. Dans ce cas, diverses également sont les instructions que Dieu te donne. L’ouvrier attend son salaire et le mercenaire achève sa journée : voilà une similitude qui s’adresse tout particulièrement à toi. Lorsque tu auras achevé ta journée ici-bas, toi aussi tu recevras ton salaire. Qui donc est ton Maître ? Sers-tu Satan, le monde, les convoitises de la chair, et tes gages te seront-ils comptés dans la monnaie brûlante de l’enfer ? Ou bien es-tu au service du Prince de la paix, du doux Emmanuel, et recevras-tu pour prix de ta journée une couronne d’or dans le ciel ? Oh ! Bienheureux es-tu si tu sers un bon maître ! Car tel qu’est ton maître, tel sera ton salaire, et tel qu’est ton travail, telle sera ta récompense.

       Ou bien es-tu de ceux qui travaillent avec la plume, qui jour après jour écrivent sans relâche ? S’il en est ainsi, rappelle-toi, ô homme, que ta vie tout entière est une écriture. Même lorsque ta main ne manie pas la plume, tu écris : tu enregistres sur les pages de l’éternité, soit tes péchés, soit ta sainte confiance en Celui qui t’a aimé. Heureux seras-tu, ô écrivain, si au dernier jour ton nom se trouve inscrit sur le livre de vie de l’agneau, si les sombres caractères qui retracent l’histoire de ton pèlerinage ici-bas, sont effacés par le sang de Jésus, et si tu portes gravé sur ton front, en traits indélébiles, le saint nom de Jéhovah.

       Ou bien, tu es peut-être médecin ou pharmacien ; tu prescris ou tu prépares des remèdes pour guérir le corps de l’homme. Dans l’un et l’autre cas, Dieu te parle en similitudes. Il se tient à côté du mortier où tu mélanges tes drogues, ou près de la table sur laquelle tu écris tes ordonnances, et il te dit : « Ô homme, toi aussi tu es malade, mais je puis t’indiquer un remède souverain. Le sang et la justice de Christ, saisis par la foi et appliqués par l’Esprit, guériront ton âme souffrante. Je puis te composer une potion qui te délivrera de tous les maux et te fera parvenir à cet heureux séjour dont les habitants ne diront plus : « Je suis malade » (#Esa 33:24). Veux-tu prendre le remède que je te prescris ou veux-tu le rejeter ? Te semble-t-il amer et en détournes-tu tes lèvres ? Allons, bois, mon enfant ; bois sans hésiter, car il y va de ta vie. Comment échapperas-tu, en effet, si tu négliges un si grand salut ?

       Moules-tu le fer, fonds-tu le plomb ou travailles-tu quelque autre métal arraché aux entrailles de la terre ? Alors prie le Seigneur de fondre ton cœur et de le jeter dans le moule de son Évangile. — Fais-tu des vêtements pour tes semblables ? Oh ! Prends garde d’être toi même couvert d’un vêtement qui subsistera aux siècles des siècles.

       Ou bien ton art est-il celui de construire ? Es-tu occupé tout le jour à placer pierre sur pierre, et à remplir les interstices avec du mortier ? Souviens-toi, ô mon frère, que tu bâtis pour l’éternité. Oh ! Puisses-tu toi-même être assis sur le seul fondement solide qui est Christ. Et puisses-tu bâtir sur ce fondement non du bois, du foin, du chaume, mais de l’or, de l’argent, des pierres précieuses, afin que ton ouvrage résiste à l’épreuve du feu. Prends garde, ô homme, de ne pas être un simple échafaudage dont le Seigneur se sert pour bâtir son Église, mais qui ensuite doit être abattu et brûlé au feu qui ne s’éteint point. Prends garde de construire l’édifice de ton salut sur le roc et non sur le sable. Prends garde enfin que le précieux ciment du sang de Jésus t’unisse à la maîtresse pierre de l’angle, ainsi qu’à chacune des pierres qui composent la maison spirituelle du Seigneur.

       Es-tu joaillier ou lapidaire ? Tailles-tu le diamant et donnes-tu à la pierre précieuse l’éclat qui en fait le prix ? Plût à Dieu que tu voulusses profiter du contraste qui existe entre ton âme et le joyau sur lequel tu exerces ton art ! Plus tu le tailles, plus il brille ; mais toi, ô homme, quoique tu aies été taillé, battu, pulvérisé, dirai-je, par les coups de l’affliction ; quoique la mort, tantôt sous la forme du choléra, tantôt sous celle de la fièvre ou de quelque autre maladie, ait souvent frappé à ta porte, tu n’en es pas plus brillant ; au contraire, tu sembles plus terne. Et comment s’en étonner ? Tu n’es pas, hélas, un diamant ; tu n’es qu’un caillou sans valeur ; aussi quand l’Éternel mettra à part ses plus précieux joyaux, il ne te serrera pas dans la cassette de ses trésors, car tu n’es point au nombre des chers enfants de Sion qui sont estimés comme le meilleur or.

       Tu le vois, mon cher auditeur, quelle que puisse être ta position, quel que soit l’étal que tu exerces, Dieu parle incessamment à la conscience. Oh ! Puisses-tu, dès aujourd’hui, ouvrir tes yeux et tes oreilles, afin que tu voies et que tu entendes les choses excellentes que ton Père céleste veut t’enseigner.

       Et maintenant quittons les similitudes et résumons nettement et clairement ce qu’il importe à chacun de savoir. Pécheur ! Tu es encore sans Dieu et sans Christ. D’un moment à l’autre tu peux mourir. Tu ne saurais affirmer qu’aujourd’hui même, avant que l’aiguille de l’horloge ait achevé le tour du cadran, tu ne sois au milieu des flammes de l’enfer …  Bien plus : tu es déjà condamné, parce que tu ne crois pas au nom du Fils unique de Dieu. Mais voici, Jésus-Christ te dit en ce jour : oh ! Si tu voulais être sage ! Si tu voulais considérer ta dernière fin ! Il crie en cet instant à tous ceux qui m’écoutent : combien de fois ai-je voulu vous rassembler comme une poule rassemble sa couvée sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! Je vous en conjure, mes chers auditeurs, rentrez en vous-mêmes, considérez vos voies. S’il vaut la peine de vous préparer un lit dans les flammes éternelles, faites-le ! Si les plaisirs de ce monde méritent qu’on perde son âme pour en jouir, si le ciel est un mensonge et l’enfer une imposture, persévérez dans vos iniquités ! Mais s’il est vrai qu’il y ait un enfer pour les pécheurs et un ciel pour les âmes qui se repentent ; si toi-même, ô mon frère, tu dois passer toute une éternité dans l’un ou l’autre de ces lieux, — je te le demande sans détour, sans similitude, aussi simplement que possible : es-tu sage de vivre comme tu le fais ? Es-tu sage de vivre sans sa simplicité : « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé » ? Jésus est mort, il est ressuscité, et maintenant il faut que tu l’acceptes comme TON Sauveur. Il faut que tu croies fermement qu’il peut sauver à plein tous ceux qui s’approchent de Dieu par lui ; plus encore : il faut que croyant cela de tout ton cœur, tu te jettes, sans hésiter, corps et âme, dans les bras de Jésus.

       Esprit de Dieu ! Aide-nous tous à faire ces choses ! Que par le moyen de similitudes, ou par les dispensations de ta providence, ou par la voix de tes prophètes, nous soyons tous amenés à toi ! Oui, Seigneur, sauve-nous pour l’éternité, et qu’à toi en soit toute la gloire !