151 - L’EFFUSION DE SANG
Sans effusion de sang, il ne se fait point de rémission des péchés. {Hébreux 9:22}
Mes chers auditeurs, voulez -vous voir trois fous? Je vais vous les montrer.
L’un est ce soldat qui vient de tomber sur le champ de bataille. Il est
blessé, grièvement blessé. Le chirurgien accourt, et le soldat
l’interroge. Ecoutez -le et jugez de sa folie. Lève -t -il les yeux
avec une ardente anxiété et demande -t -il si sa blessure est mortelle,
si l’habileté du praticien parviendra à la guérir, si l’on a sous la
main tous les secours, tous les remèdes nécessaires? Non; aucune
question semblable ne sort de ses lèvres. Chose étrange, il dit:
« Pourriez -vous m’apprendre quel est le sabre qui m’a blessé,
quel est le Russe qui m’a si cruellement mutilé? Je tiens beaucoup,
ajoute -t -il, à connaître jusque dans les plus minutieux détails
l’origine de ma blessure. » - « Mais sûrement le malheureux
est en délire! vous écriez -vous; son cerveau est malade. De telles
questions, dans un tel moment, prouvent jusqu’à l’évidence qu’il est
privé de l’usage de sa raison. »
Voici maintenant un second fou. - La tempête gronde; le navire, poussé
par un vent arrière, vole sur les flots avec une effrayante rapidité;
les lames inondent le pont; les mâts craquent, les voiles sont en
lambeaux et l’ouragan semble redoubler de fureur. Pendant ce temps, où
est le capitaine? Est -il à donner ses ordres à l’équipage? affronte -t
-il noblement le danger, ou cherche -t -il, par des manoeuvres habiles,
à déjouer la rage des éléments? Non. Il s’est retiré dans sa cabine, et
là, absorbé dans une profonde rêverie, il se livre à mille conjectures
sur l’endroit probable où la tempête a pris naissance. « Curieux
phénomène que ce vent! se dit -il à lui -même; personne encore n’a pu
découvrir d’où il vient. » Et sans se préoccuper du sort de son
vaisseau, du salut des passagers ou de sa propre vie, cet homme étrange
continue, heure après heure, à chercher à résoudre des problèmes
insolubles … « Mais il est hors de sens! vous écriez
-vous, encore; qu’on retire au plus tôt le gouvernail de sa main; il
n’a plus une lueur de raison, et si jamais il touche terre, qu’il soit
enfermé comme un aliéné incurable! »
Quant au troisième fou, mes chers amis, il est probable que je n’aurais
pas de peine à le trouver parmi vous. - Voici un homme qui est malade,
blessé par le péché, exposé au terrible ouragan de la vengeance divine;
et cependant la question qu’il voudrait me proposer est celle -ci:
« Quelle est l’origine du mal? » Mais tu es fou, mon frère,
spirituellement fou! m’écrierai -je à mon tour; sûrement, si tu étais
de sens rassis, tu t’enquerrais de toute autre chose. Tu demanderais,
non pas: « Comment le péché est -il entré dans le monde? »
mais bien plutôt: « Comment en serai -je délivré? - non pas:
« Comment se fait -il que le feu du ciel descende sur Sodome?
» mais bien plutôt « Comment puis -je m’échapper comme Lot?
». - non pas: « D’où vient que je sois malade? mais bien
plutôt: « Y a -t -il un remède capable de me guérir? Existe -t
-il un médecin qui puisse rendre la santé à mon âme malade? » Ah!
que de temps ne perdons -nous pas après de vaines subtilités, tandis
que nous négligeons des certitudes! Il n’est pas de sujet au monde,
j’en suis convaincu, qui ait soulevé autant de questions que l’origine
du mal. Les hommes ont creusé leur cerveau et mis leur esprit à la
torture afin de comprendre - (ce que l’intelligence humaine ne
comprendra jamais) - comment le mal est entré dans le monde, et comment
son entrée peut se concilier avec la bonté divine. Mais, je le demande,
à quoi bon ces discussions? L’existence du mal est un fait, un fait
patent, avéré, incontestable. Au lieu donc de nous perdre en vaines
spéculations, ne serait -il pas plus rationnel que chacun de nous se
dit sérieusement à lui -même:
« Que dois -je faire pour échapper à la colère à venir, suite
naturelle de cette grande maladie morale qui a envahi toute âme
d’homme? » Or, c’est ici qu’intervient la parole de l’Ecriture
que j’ai prise pour mon texte. Semblable à l’ange armé d’une épée, qui
jadis arrêta Balaam sur sa route vers Balak, cette déclaration
solennelle Sans effusion de sang, il ne se fait point de rémission des
péchés, vient se dresser devant la conscience du pêcheur réveillé.
Sentant que son iniquité doit être ou punie ou pardonnée, il se demande
avec inquiétude comment il pourra obtenir le pardon; et voilà que sa
demande se rencontre face à face avec cette réponse catégorique: Sans
effusion de sang, il ne se fait point de rémission des péchés!
Et n’allez pas dire, mes chers amis, que c’est là une maxime purement
juive: c’est, au contraire, une vérité vaste comme le monde et immuable
comme l’éternité. Elle concerne les Gentils, non moins que les Hébreux.
Jamais en aucun temps, jamais en aucun lieu, jamais pour aucune âme la
rémission des péchés n’a été obtenue autrement que par l’effusion du
sang.
Il y a plus: j’affirme que cette grande vérité est empreinte jusque
dans les entrailles de la nature humaine; c’est une loi essentielle du
gouvernement moral de Dieu, un de ces principes fondamentaux qui, en
dépit de toutes les attaques, resteront toujours debout, une règle qui
n’a jamais souffert et qui ne souffrira jamais d’exception. Toujours et
partout la même, cette doctrine subsistera d’âge en âge: Sans effusion
de sang, il ne se fait point de rémission des péchés. Sous l’économie
mosaïque, il en était ainsi; pour les Juifs, point de rémission sans
effusion de sang. Il existait certains cas, il est vrai, où l’eau et le
feu suffisaient pour rendre net; mais toutes les fois qu’il s’agissait
d’une violation positive de la loi, la purification ne pouvait avoir
lieu que moyennant un sacrifice sanglant: Dieu ayant voulu enseigner
par là à son peuple que le sang et le sang seul efface les péchés.
Et, chose remarquable! les païens eux -mêmes semblent avoir entrevu
confusément cette vérité capitale. Que me disent leurs couteaux
ruisselants du sang des victimes? que me disent les lugubres histoires
d’holocaustes, de sacrifices, d’immolations humaines qui, des points
les plus reculés du globe, parviennent de temps à autre à mes oreilles?
que me disent toutes ces choses, je le demande, sinon qu’au fond de
toute poitrine humaine, ancien comme l’existence même de l’homme,
retentit comme un écho affaibli de cette loi divine: Sans effusion de
sang, il ne se fait point de rémission des péchés? Et pour ne parler
que de vous -mêmes, mes chers auditeurs, je suis assuré que dans les
replis de vos coeurs et de vos consciences il y a comme un secret
instinct qui vous dit à tous que pour réconcilier l’âme coupable avec
un Dieu saint et juste, il faut que le sang coule, qu’une victime soit
immolée. C’est là, je le répète, la grande vérité du christianisme, et
c’est cette vérité que je voudrais essayer de fixer dans votre mémoire,
en demandant à Dieu de la faire pénétrer lui -même dans vos âmes.
Sans effusion de sang, il ne se fait point de rémission des péchés.
Avant de développer mon texte, je dois tout d’abord répondre à une
question qui se présente naturellement à l’esprit. De quelle effusion
de sang est -il ici parlé? L’apôtre n’avait -il point en vue un
sacrifice particulier lorsqu’il écrivait ces paroles? Oui, mes frères.
Un sang d’un prix infini a été répandu, et c’est à l’effusion de ce
sang que je voudrais vous faire assister. Il ne s’agit plus ici de
meurtres ou de massacres; il ne s’agit plus de brebis ou de boucs
égorgés sur les autels.
Il y eut une fois un sacrifice auprès duquel tous les autres ne sont
rien: c’était un homme, c’était un Dieu qui versa alors son sang. Venez
et voyez. Nous sommes dans un jardin à l’aspect triste et morne. Il est
minuit. Le sol, durci par la gelée, craque sous les pas. Parmi ces
oliviers, au sombre feuillage, je vois un homme; je l’entends exhaler
son âme dans la prière. Anges, écoutez!’ Ecoutez, ô fils des hommes!
écoutez et soyez étonnés! C’est le Sauveur qui offre sa vie avec de
grands cris et avec larmes. Approchez. Considérez son
front … .. O prodige! Des grumeaux de sang découlent de son
visage et de son corps tout entier! chacun de ses pores est ouvert, et
une sueur s’en échappe; mais ce n’est pas la sueur d’un homme qui
travaille pour son pain, c’est la sueur d’un Dieu qui travaille pour le
ciel: il sue une sueur sanglante! - La voilà cette effusion de sang,
sans laquelle il ne se fait point de rémission des péchés!
Mais suivons l’homme -Dieu. Des mains sacrilèges l’ont traîné de ce
jardin témoin de sa prière et de son agonie jusqu’au prétoire de
Pilate. On le fait asseoir et on l’insulte; on le revêt dérisoirement
d’un manteau de pourpre, on ceint son front d’une couronne d’épines, et
soudain (ô anges du ciel! que dûtes -vous éprouver à cette vue?)
soudain, deux lignes ensanglantées sillonnent sa face divine! Ensuite
on le dépouille du manteau royal, on découvre ses épaules: elles sont
teintes de sang! Esprits infernaux, dites -moi, oh! dites -moi qui a
ainsi blessé mon Sauveur? Les soldats romains se chargent de me
répondre: ils reprennent leurs verges encore sanglantes; ils le
flagellent de nouveau, ils déchirent ses chairs, ils font ruisseler son
sang jusqu’en terre! La voilà encore cette effusion de sang, en dehors
de laquelle il ne se fait point de rémission des péchés!
Mais ce n’est pas tout. On entraîne Jésus au lieu du supplice; on
l’étend sur le sol, on cloue ses mains et ses pieds au bois
transversal; puis on dresse la croix, on l’assujettit dans le
soubassement préparé pour la recevoir; maintenant elle est debout, et
sur elle est suspendu le Christ de Dieu. O déchirant spectacle! Du sang
de sa tête, du sang de ses mains, du sang de ses pieds! Et avec son
sang, sa vie s’écoule dans une inexprimable agonie! Et son âme s’épuise
en angoisses sans pareilles! « Eloï, Eloï, lamma sabachthani!
» Enfin, il expire … .. Mais voyez encore: on lui perce
le côté avec une lance, et aussitôt il en jaillit du sang et de l’eau.
- Voilà l’effusion du sang, pécheurs et saints! Voilà cette grande,
cette solennelle aspersion, ce sacrifice sanglant et expiatoire, sans
lequel, ni pour vous individuellement, ni pour la race humaine en
général, il ne saurait y avoir de rémission des péchés.
Oui, c’est là l’effusion de sang dont parle l’apôtre. Oh! mon Dieu,
comment se fait -il que des hommes puissent écouter une telle histoire;
les yeux secs? Je l’ai mal racontée, direz -vous. Il est vrai, mes
amis, et je me blâme tout le premier. Mais sachez -le: alors même que
la scène sanglante du Calvaire vous serait décrite par la langue la
plus malhabile, si vos coeurs étaient ce qu’ils devraient être, ils se
fondraient en larmes de sang! Oh! quel crime, quel meurtre que celui
-là! C’était plus qu’un régicide, plus qu’un fratricide, plus qu’un
parricide c’était … .. la langue humaine n’avait point de mot
pour désigner un tel crime, il a fallu en inventer un, - c’était un
déicide! le meurtre d’un Dieu! le meurtre de celui qui s’est incarné
pour nous sauver! Ah! si nos coeurs étaient seulement aussi malléables
que le fer, nous pleurerions! s’ils étaient aussi tendres que le marbre
des montagnes, nos yeux se changeraient en ruisseaux d’eau! Mais ces
coeurs sont plus durs que la pierre, même qu’une pièce de la meule de
dessous (Allusion à #Job 41:15), c’est pourquoi nous oublions les
douleurs de Celui qui à cause de nous est mort d’une mort pleine
d’ignominie et d’amertume; nous ne plaignons pas de ses souffrances;
nous ne considérons pas que c’est pour nous, pour nous proprement qu’il
a tout enduré, tout accompli … ..
Mais pour en revenir à notre texte, redisons que le grand principe
qu’il établit est celui -ci Sans effusion de sang, il ne se fait point
de rémission des péchés. Cette proposition me semble être à la fois
négative et affirmative. J’y trouve d’abord UNE NÉGATION FORMELLE:
« Point d’effusion de sang, point de rémission »; et
ensuite UNE AFFIRMATION IMPLICITE qui ressort de la négation même, et
qu’on peut formuler ainsi: « Par l’effusion du sang, il y a
rémission des péchés. »
En premier lieu, ai -je dit, mon texte exprime UNE NÉGATION FORMELLE.
Point de rémission en dehors du sang de Jésus: voilà ce qu’il nous
enseigne de la manière la plus nette. Et veuillez considérer, mes
frères, que cette assertion est d’autorité divine. En la prononçant
aujourd’hui devant vous, je ne fais que répéter les paroles mêmes de
Dieu. Ce n’est pas une chose que vous puissiez croire ou rejeter à
votre choix; vous devez la croire, vous devez l’admettre, sinon vous
vous inscrivez en faux contre l’Écriture et vous donnez le démenti au
Tout -Puissant. Peut -être m’arrive -t -il quelquefois d’émettre
certaines idées qui n’ont guère d’autre base que mes propres
raisonnements ou mon interprétation particulière, ce qui, j’en
conviens, est bien peu de chose; mais ici, je ne viens pas simplement
étayer une opinion personnelle par des passages empruntés à l’Écriture:
je cite textuellement les paroles sorties des lèvres de Dieu lui -même.
Prenez et lisez: « Point de rémission! c’est écrit en toutes
lettres dans la Parole inspirée; donc, cette doctrine est divine. Il
est possible que vous soyez disposés à regimber contre elle; mais
rappelez -vous qu’en le faisant, vous vous révoltez, non pas contre moi
mais contre Dieu.
Je ne veux point perdre mon temps en vaines disputes de mots; Dieu me
garde de négliger la belle mission de proclamer l’Évangile pour
contester avec les hommes! Je me présente à vous en ce moment, le
décret irrévocable de Dieu à la main, et je vous dis à tous: Sans
effusion de sang, il ne se fait point de rémission des péchés. Sans
doute, vous n’êtes pas tenus de recevoir comme article de foi tout ce
que vous enseigne le prédicateur; mais souvenez -vous que si vous ne
croyez point ceci, c’est au péril de vos âmes! car, encore une fois, la
vérité que je vous annonce émane directement de Dieu; or, quand Dieu
parle, oseriez -vous contredire? Non, vous ne l’oseriez! car ce serait
le comble de l’impiété. Inclinez -vous donc devant la solennelle
négation de mon texte et profitez du sérieux enseignement qu’elle vous
donne.
Mais on objecte que la manière dont Dieu a sauvé les hommes, c’est -à
-dire par l’effusion sang, est cruelle, injuste,
inhumaine … .. que sais -je encore! A ceux qui raisonnent
ainsi, je n’ai qu’un mot à répondre. Votre opinion à cet égard me
touche peu, leur dirai -je; les faits sont là; Dieu a jugé bon de faire
reposer tout le plan du salut sur le sacrifice de son Fils. Si votre
Créateur vous semble avoir eu tort, attendez de vous trouver en sa
présence pour lui demander raison de sa conduite. Mais réfléchissez, je
vous le conseille, avant de lui jeter le gant. Malheur au vermisseau
qui voudrait lutter contre celui qui le forma, et malheur à l’homme
assez audacieux pour oser se mesurer avec le Très -Haut! Bien comprise
et reçue avec foi, la doctrine de l’expiation est pleine de douceur,
car elle est la manifestation d’un amour sans bornes, d’une bonté
incommensurable et d’une justice infinie. Mais, je le sais, cette
doctrine, si précieuse pour le croyant, a toujours été en scandale aux
gens du dehors. Que vous dirai -je, ô incrédules? Vous haïssez ce qui
seul pourrait vous sauver; vous méprisez la grâce qui vous est offerte;
encore une fois, je ne veux point perdre mon temps à discuter avec
vous; je me borne à répéter au nom de mon Maître: sans effusion de
sang, il ne se fait point de rémission des péchés.
Et observez, mes chers auditeurs, combien cette déclaration est
absolue. « Mais ne puis -je obtenir le pardon de mes péchés par
mon repentir? dira l’un; si je pleure, si je gémis, si je prie, le
Seigneur ne me pardonnera -t -il pas?
Point de rémission sans effusion de sang, répond mon texte. - «
Mais si je ne pèche plus désormais, dira un autre; si je sers Dieu avec
plus de fidélité, avec plus de zèle qu’aucun de mes semblables, le
Seigneur ne me pardonnera -t -il pas à cause de mon obéissance? »
Point de rémission sans effusion de sang répond mon texte. - «
Mais si je me confie simplement en la miséricorde de Dieu, reprend un
troisième, ne serai -je point pardonné sans que j’aie besoin de
recourir à un sacrifice quelconque? Sans effusion de sang, il ne se
fait point de rémission des péchés l telle est la réponse invariable de
mon texte. Oh! que de fatales illusions crouleraient, si on voulait se
placer en présence de ces paroles si claires, si nettes, si positives!
Fils des hommes, apportez ici vos espérances de salut, et si elles ne
sont pas fondées dans le sang et scellées de sang, dites -vous bien
qu’elles sont aussi chimériques que des châteaux en l’air ou que les
songes de la nuit. Et pourtant, malgré cette déclaration si formelle,
l’on s’obstine à essayer de cinquante moyens différents pour obtenir la
rémission des péchés; tellement qu’en vérité le ministre de l’Evangile
est parfois fatigué d’avoir toujours à revenir sur les mêmes doctrines,
toujours à combattre les mêmes erreurs. Mes frères, je tiens à vous le
redire en termes aussi clairs que possible: Faites ce que vous voudrez
et dites ce qu’il vous plaira, vous ne parviendrez jamais à obtenir le
pardon de vos péchés, à moins que vous ne placiez votre confiance dans
le sang répandu de votre Sauveur, et uniquement dans ce sang, car hors
de là, il n’y a point de rémission.
Et si mon texte est absolu dans sa nature, il est de plus universel
dans son application, Quoi? ne puis -je point obtenir la rémission de
mes péchés autrement que par l’effusion du sang? » demande le
monarque, et il s’avance le front ceint de sa couronne royale; «
ne puis -je point avec toute ma splendeur, avec toute ma puissance,
avec tous mes trésors,, payer par moi -même la rançon de mon âme?
» Impossible! répond mon texte. - Vient ensuite l’homme de
science, tout chargé de titres et de distinctions universitaires; il
les étale avec complaisance et demande à son tour: « Ne puis -je
point obtenir la rémission de mes péchés en vertu de ces témoignages de
mon grand savoir? » Impossible! impossible! répète mon texte. -
Puis survient le philanthrope, l’homme bienfaisant et libéral. «
J’ai répandu mon argent en aumônes, dit -il; j’ai distribué mon bien
pour la nourriture des pauvres: cela ne m’assure -t -il point le pardon
de Dieu? » Non! dit mon texte; sans effusion de sang, il ne se
fait point de rémission des péchés. Ah! comme, ceci passe un même
niveau sur toutes les têtes! Monseigneur, vous n’êtes pas plus que
votre cocher; maître, gentilhomme, vous marchez de pair avec le paysan
qui laboure vos domaines. Ministre de l’Evangile, ton office ne te
place aucunement en dehors de la loi commune; ton plus humble auditeur
est tout aussi bien partagé que toi: Sans effusion de sang, il ne se
fait point de rémission des péchés. Pour le meilleur, comme pour le
plus mauvais des hommes, il n’y a aucun espoir de salut hors de
l’effusion du sang.
Oh! que j’aime l’Evangile! Et savez -vous, mes amis, une des raisons
qui me le font aimer? Je l’aime parce qu’il est un Evangile
essentiellement égalitaire. Bien des gens ne veulent pas d’un tel
Evangile, et moi non plus je n’en voudrais certes pas si j’attachais au
mot d’égalitaire le sens qu’on lui a trop souvent donné. Que chacun
conserve son rang, ses titres, sa fortune: rien de plus juste; mais
j’aime, je l’avoue (et je suis sûr qu’en ceci tout vrai chrétien sera
d’accord avec moi), oui, j’aime à voir le riche et le pauvre s’entre
rencontrer, j’aime à les voir placés côte à côte sous le grand niveau
de l’Evangile. « Arrière vos sacs d’argent! dit l’Evangile aux
riches; ils ne peuvent rien pour votre salut. » - «
Reployez vos diplômes, dit -il aux lettrés; ils ne peuvent rien pour
votre salut. » - « Oubliez votre ferme ou votre parc., dit
-il à ceux qui possèdent; ces choses ne peuvent rien pour votre salut.
» - « Couvrez votre écusson, dit -il aux nobles; toutes les
armoiries du monde ne peuvent rien pour votre salut. Venez, vous,
pauvres, mendiants, déshérités du monde; venez, vous, rebut et
balayures de la terre: avancez. Quoique votre esprit soit sans culture
et vos manières peu policées, le salut est pour vous tout autant que
pour le riche, le titré, le puissant, l’homme entouré d’hommages et
d’honneur. » Mon texte s’adresse indistinctement à toutes les
classes de la société; tous nous sommes égaux sur ce terrain: Sans
effusion de sang, il ne se fait point de rémission des péchés.
Remarquez en outre, mes chers auditeurs, que ces paroles sont d’une
application perpétuelle. Paul les a dites; je dois répéter son
témoignage, et si dans mille ans d’ici l’Evangile est encore prêché,
les ministres de Dieu le répéteront à leur tour. Cette vérité ne
changera jamais. Dans l’autre monde comme dans celui -ci, il sera
toujours vrai que sans effusion de sang, il ne se fait point de
rémission des péchés. On peut chercher à vous faire croire le
contraire, mes bien -aimés; on peut vous dire, par exemple, que vos
oeuvres, ou vos pénitences, ou votre argent vous assureront le pardon
de Dieu; mais repoussez de toutes vos forces ces fables et ces
mensonges, et tenez pour certain qu’il n’y a de rémission possible que
par le sang propitiatoire du Fils de Dieu. Non, quand vous passeriez
sur vos deux genoux votre vie tout entière; quand vos yeux se
fondraient en torrents de larmes; quand vous gémiriez et supplieriez
jusqu’à ce que les fibres de votre coeur se rompissent au dedans de
vous; non, jamais - jamais en ce monde, jamais dans l’éternité - vous
ne pourrez obtenir le pardon de vos péchés autrement que par le sang de
Christ; jamais votre conscience ne sera purifiée que par la foi en son
sacrifice! Et aussi bien, mes chers amis, à quoi vous servirait -il de
vous contenter de rien moins que ce qui a contenté Dieu le Père? Vous
vous séduiriez vous -mêmes, voilà tout. Rien n’a pu satisfaire sa
justice que l’effusion du sang de son Fils, et rien ne pourra blanchir
vos consciences que les mérites de ce sang appliqués à vos âmes par la
foi.
II
Mais j’ai dit que de la négation même contenue dans mon texte ressort
UNE AFFIRMATION; or, cette affirmation implicite est celle -ci: Il y a
une rémission des péchés par l’effusion du sang, - Et observons tout
d’abord que cette rémission est un fait accompli. Le sang ayant été
versé, la rémission est déjà obtenue. Je vous ai conduits au jardin de
Gethsémané et au mont Calvaire, pour vous faire assister à l’effusion
du sang. Allons maintenant dans un autre jardin et sur un autre mont,
pour contempler les grandes preuves de la rémission acquise au prix de
ce sang. Allons dans un autre jardin, ai -je dit. Et en effet, c’est un
jardin qui s’étend devant nous, jardin tout embaumé de doux, de
triomphants souvenirs. Là, dans un rocher, loin de l’agitation et du
bruit du monde, Joseph d’Arimathée s’était fait tailler un sépulcre
neuf, où il pensait que son pauvre corps d’argile serait bientôt
déposé; mais le corps de Jésus y fut mis le premier.
Les scènes lugubres de la crucifixion venaient d’avoir lieu. Jésus
s’était constitué répondant de son peuple, et la loi avait demandé son
sang. La mort l’avait étreint de sa main de fer, et ce tombeau était
comme la sombre prison où semblait devoir être détenu à jamais Celui
qui avait donné sa vie pour ses brebis. Comment donc se fait -il que je
voie dans ce jardin un sépulcre ouvert et inoccupé? Mes frères, je vais
vous le dire. La dette est payée, les péchés sont effacés, la rémission
est acquise. Le grand Pasteur des brebis a été ramené d’entre les morts
par le sang de l’alliance éternelle. Donc, le sacrifice a été accepté,
et maintenant nous avons la rédemption par son sang, savoir, la
rémission des péchés {#Heb 13:20 Eph 1:7}
Voilà, mes bien -aimés, une première preuve.
En voulez -vous une autre plus concluante encore? Venez avec moi sur le
mont des Oliviers. Là, contemplez Jésus levant ses mains sur ses
disciples, comme autrefois le souverain sacrificateur sur la multitude,
et tandis qu’il les bénit, voyez -le montant majestueusement vers le
ciel et disparaissant sur une nuée de devant leurs yeux. « Mais
que signifie cette glorieuse ascension? demandez -vous; où donc va
Jésus? pourquoi, oh! pourquoi quitte -t -il ainsi la terre? »
L’Apôtre va vous répondre: Christ est entré, non point dans le
sanctuaire fait de la main des hommes, mais dans le ciel même, pour
comparaître maintenant pour nous devant la face de Dieu; et il est
entré avec son propre sang, nous ayant obtenu une rédemption éternelle;
c’est pourquoi nous avons, par le sang de Jésus, la liberté de nous
approcher de Dieu. {#Heb 9:24,12 10:19} La rémission est donc un fait
accompli: en voilà une seconde preuve.
O croyant, quelles sources abondantes de consolations n’y a -t -il pas
ici pour toi! Que pourrais -je te dire que tu ne saches pas déjà? Aussi
je te laisse à tes douces expériences, mon bien -aimé, pour essayer de
convaincre ceux qui n’ont pas cru au prix infini de cette rémission des
péchés, acquise par l’effusion de sang.
- On raconte qu’un pasteur éminent étant allé visiter un inconverti sur
son lit de mort, celui -ci lui dit: « M. le pasteur, je me confie
en la miséricorde divine; certainement, puisque Dieu est infiniment
bon, il ne voudra pas vouer une âme à la condamnation éternelle.
» Plus tard, le serviteur de Dieu revint auprès du malade, dont
l’état s’était aggravé. « Oh! M. le pasteur, s’écria -t -il, je
n’ai plus de confiance! Je viens de réfléchir que si Dieu est
miséricordieux il est juste aussi; et que ferais -je, oh! que ferais
-je, si, au lieu de déployer sa bonté envers moi, il ne déployait que
sa justice? Non, je ne puis plus compter sur la seule miséricorde de
Dieu! Oh! dites -moi ce qu’il faut que je fasse pour être sauvé!
» Le pasteur exposa alors au moribond le plan du salut; il lui
dit que Christ était mort à la place du pécheur qui se confie en lui,
en sorte que Dieu est juste tout en justifiant celui qui a la foi en
Jésus. {#Ro 3:25} Le malade écoutait avec avidité. « Ah!
monsieur, s’écria -t -il enfin, voilà justement ce qu’il me fallait;
j’avais besoin d’un fondement solide sur lequel je pusse bâtir mes
espérances, et vous venez de me l’indiquer; ailleurs je ne vois
qu’incertitude et que doute. » Cet homme disait vrai. Non, mes
amis, il n’y a aucune paix, aucune confiance possible hors de Christ. A
part les âmes qui se confient uniquement dans le sang de Jésus, pas un
de nous, j’ose l’affirmer, n’a jamais rencontré une seule personne qui
fût pleinement assurée de son pardon. Voyez le musulman: il ne sait
rien du pardon des péchés. Voyez l’incrédule: il n’est jamais sûr s’il
est pardonné ou non. Voyez le formaliste: il dira bien « J’espère
que mes péchés me seront remis », mais il n’ose affirmer qu’ils
le sont. Je le répète, celui -là seul possède l’assurance de son salut
qui croit fermement que Christ, et Christ seul, a expié les péchés par
l’effusion de son sang.
Mais quelles sont les âmes que Christ est venu sauver? Pour répondre à
cette question, permettez -moi de vous raconter un simple fait. Le
grand prédicateur Whitefield avait un frère, qui avait été, comme lui,
un fervent chrétien; mais il s’était détourné des sentiers de la piété,
il avait fait des chutes graves. Or, un jour, après qu’il eut reconnu
ses égarements, il était fort troublé dans son âme, car il avait
entendu la veille un sermon de son frère qui avait blessé sa conscience
jusqu’au vif. Le soir, au souper, il s’écria, comme se pariant à lui
-même: « Je suis un homme perdu! » et il commença à gémir
et à pleurer, en sorte qu’il ne pouvait prendre aucune nourriture. -
« Pardon, M. Whitefield, que disiez -vous, je vous prie? »
demanda lady Huntingdon qui était assise en face de lui A ceux de nos
lecteurs qui ne connaîtraient point le nom de lady Huntingdon, nous
dirons que cette dame, illustre par sa naissance, par ses talents, et
surtout par son éminente piété, consacra au service de son divin Maître
tous les dons qu’elle avait reçus de lui. Elle vécut à l’époque du
grand réveil religieux qui eut lieu en Angleterre le siècle dernier, et
dépensa une fortune considérable, soit à construire des lieux de culte,
soit à pourvoir aux besoins temporels des fidèles serviteurs de Dieu
qui passaient leur vie à annoncer l’Évangile. Le célèbre Whitefield
était l’un de ses amis les plus intimes. (Voir pour plus de détails
l’intéressant ouvrage intitulé: Lady Huntingdon et ses amis, etc.,
publié par la Société de Toulouse. Note du Traducteur.) « Madame,
répondit -il, je disais que je suis un homme perdu. » - «
J’en suis fort aise, monsieur, répliqua -t -elle, j’en suis fort aise.
» - « Comment, madame! Que voulez -vous dire? balbutia le
pauvre homme au comble de l’étonnement; c’est bien cruel à vous de vous
réjouir de ce que je suis perdu … » - « Je le
répète, monsieur, j’en suis fort aise, fort aise en vérité »,
reprit -elle. Il la regarda, de plus en plus surpris de son inhumanité.
« Oui, M. Whitefield, j’en suis fort aise, continua lady
Huntingdon, car il est écrit: Le Fils de l’Homme est venu chercher et
sauver ce qui était PERDU. » A l’ouïe de ces paroles, Whitefield
fondit en larmes, « Quel précieux passage, madame! s’écriat -il,
et d’où vient qu’il s’applique en cet instant avec tant de force à mon
âme? Oh! je bénis Dieu de me l’avoir fait entendre! Jésus veut donc me
sauver; je remets mon esprit entre ses mains; je suis pardonné! »
Ayant dit cela, il sortit de la maison, se sentit pris d’un malaise
soudain, tomba en arrière et expira.
Oui, le Fils de l’Homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu!
Y a -t -il ici une âme perdue? Dieu le veuille! Homme perdu! femme
perdue! où êtes -vous? Vous sentez -vous perdus sans ressource? Oh!
combien j’en sais heureux! car c’est pour des créatures telles que vous
qu’a été faite la rémission des péchés par l’effusion du sang. Pauvre
pécheur! tes yeux sont peut -être obscurcis par les larmes de la
repentance; mais regarde au travers de tes larmes, mon frère. Vois -tu
cet homme dans le jardin de Gethsémané? Il sue pour toi des grumeaux de
sang. Vois -tu cet homme attaché sur un bois infâme? Il a été cloué là
pour toi. Oh! mes amis, si pour vous sauver d’une mort certaine, je
consentais à être cloué aujourd’hui sur une croix, je sais ce que vous
feriez: vous vous jetteriez à mes pieds, vous les couvririez de
baisers, vous les arroseriez de larmes d’amour et de reconnaissance.
Eh bien, pécheur, pécheur perdu, pécheur qui te sens tel, Jésus est
mort pour toi, pour toi proprement; et s’il est mort pour toi, tu ne
peux qu’être sauvé, car Christ n’est mort en vain pour personne. La
question est donc celle -ci: Te reconnais -tu misérable et indigne? Es
-tu convaincu de péché parce que tu ne crois pas en Christ? S’il en est
ainsi, mon cher auditeur, je suis chargé par mon Maître d’un message
pour toi: crois en son nom, et tu seras sauvé. Mais penses -tu qu’en
définitive tu n’es pas un si grand pécheur? Oh! alors, je ne sache pas
que Christ soit mort pour toi. Dis -tu que tu n’as pas besoin de
repentance? Alors je n’ai point de Christ, point de salut à t’annoncer.
Dis -tu que tu n’as pas besoin d’un Sauveur? Alors je n’ai absolument
rien à te dire que ces trois mots: La colère venir! la colère à venir!
Christ n’est pas venir pour sauver les justes, les âmes satisfaites
d’elles -mêmes; il est venu pour sauver les méchants. Es -tu méchant?
le Sent -tu? Es -tu perdu? le sais -tu? Es -tu coupable? serais -tu
prêt a le confesser en toutes occasions? Dans ce cas, je le répète, mon
bien -aimé, ne crains rien. Si Jésus était ici en cet instant, il
étendrait vers toi ses mains sanglantes et te dirait: « Pauvre
pécheur, je suis mort pour toi; veux -tu croire en moi? »
Jésus n’est pas ici en personne, mais il a envoyé son serviteur pour te
dire de sa part: « Ne veux -tu pas croire en Celui qui est mort
pour toi? » - « Oh! dis -tu peut -être, je suis un si grand
pécheur! » - « C’est justement à cause de cela que je suis
mort », répond Jésus. - « Mais je suis indigne d’un tel
sacrifice », objectes -tu encore. « C’est justement à cause
de ton indignité que j’ai dû me sacrifier pour toi », dit Jésus.
« Mais j’ai haï Christ », ajoutes -tu. « Mais moi, je
t’ai toujours aimé », reprend Jésus. - « Mais, Seigneur,
j’ai insulté les ministres, j’ai méprisé ta Parole … »
- « Tout est pardonné, dit Jésus; le sang qui a coulé de mon côté
percé a effacé toutes tes transgressions. Crois seulement; je ne te
demande rien de plus; et pour cela même je t’aiderai: je te donnerai un
coeur croyant à la place de ton coeur incrédule. »
Mais quelqu’un me dira: « Prédicateur de l’Evangile, vos paroles
vont sûrement au delà de votre pensée. Quoi? Voudriez -vous dire aux
hommes et aux femmes les plus dépravés qui sont dans cette enceinte,
que la rémission des péchés a été faite pour eux? » Mon cher
auditeur, je veux dire précisément ce que je dis. La voilà, la
pécheresse, la femme de mauvaise vie, qui a entraîné bien des âmes dans
le vice et envoyé bien des âmes en enfer! La voilà! Tous ses amis l’ont
chassée de leur maison; son père lui -même rougit de l’appeler sa fille
et lui a défendu de jamais reparaître en sa présence. Femme! te repens
-tu? Pleures -tu sur tes péchés? Te reconnais -tu coupable et perdue?
Détestes -tu tes égarements passés? S’il en est ainsi, Jésus est mort
pour te sauver, et quoi que puisse dire le monde, tu seras sauvée! - Le
voilà, l’intempérant, le violateur du sabbat, l’homme flétri par le
vice! je le reconnais! La nuit dernière, j’entendis sa voix dans les
rues, comme il regagnait sa demeure, ivre, vociférant des blasphèmes,
jetant le trouble sur son passage. Arrivé chez lui, il maltraita sa
malheureuse femme, et quand aux imprécations qu’il a prononcées, Dieu
seul en sait le nombre … Eh bien! à toi -même, ô homme, je
dis en cet instant: Sens -tu combien tu es coupable? Haïs -tu tes
transgressions et désires -tu sincèrement y renoncer? S’il en est
ainsi, que Dieu soit béni! Christ est mort pour le sauver. Crois !
« Qu’est -ce à dire? s’écriera peut -être une autre personne;
faut -il donc être un pécheur scandaleux pour avoir part à la rémission
des péchés acquise: par l’effusion du sang de Christ? »
Assurément non, mon cher auditeur. J’ai reçu il y a quelques jours une
lettre d’un jeune homme, qui, comptant m’entendre cette semaine,
m’écrivait à peu près en ces termes
« Monsieur, veuillez, je vous en prie, prêcher un sermon
approprié à l’état de mon âme, car je suis dans une grande perplexité.
J’ai ouï dire que chacun de nous doit s’estimer le plus coupable des
hommes, sans quoi il ne peut être sauvé: or, je fais tous mes efforts
pour me croire tel, mais, vous l’avouerai -je, monsieur, je ne puis y
parvenir. Je désire de tout mon coeur avoir part au salut, mais je ne
sais pas me repentir assez profondément ». Si le jeune homme qui
m’a écrit ces lignes, ou si d’autres personnes qui pensent comme lui,
sont devant moi en cet instant, voici ce que je leur dirai. Dieu ne
demande pas à tout homme de se croire le plus grand misérable qu’il y
ait sur la terre, par la raison toute simple que, dans bien des cas, ce
serait croire une fausseté car il est évident qu’il y a des hommes plus
méchants les uns que les autres.
Ce que Dieu demande de nous, c’est que nous disions, chacun pour son
propre compte: « Je me connais mieux que je ne connais mon
prochain, je ne sais que bien imparfaitement ce qui se passe en lui, et
d’après ce que je vois, non seulement dans ma vie mais dans mon coeur,
je ne pense pas qu’il puisse y avoir beaucoup de mes semblables plus
mauvais que moi. Aux yeux du monde leur conduite est peut -être plus
condamnable que la mienne mais j’ai eu plus de lumières, plus de
privilèges, plus d’avertissements, plus d’occasions de connaître Dieu
qu’ils n’en ont eu, en sorte qu’en réalité je suis plus inexcusable.
» Voilà ce que nous devrions penser, mes chers amis. Je ne vous
dis pas de faire comparaître votre frère avec vous devant le Seigneur,
en disant, comme pour vous recommander à la faveur divine: « Je
suis plus coupable que lui. » Non; je voudrais bien plutôt que
vous vous présentassiez seul devant Dieu, en murmurant, comme l’enfant
prodigue: « Père, j’ai péché! » Peu importe, jeune homme,
que ton frère ait plus ou moins péché que toi; peu importe, jeune
fille, que ta soeur se soit plus ou moins égarée que toi; ce qui
importe, c’est que vous vous écriiez les uns et les autres en vous
frappant la poitrine: « O Dieu! sois apaisé envers moi qui suis
pécheur! » C’est là tout ce que vous avez à faire.
Je termine. O vous tous qui vous sentez perdus, encore une fois je vous
le dis: Venez à Christ! Venez à lui, et vous serez les bienvenus. Il
n’est pas un seul pécheur contrit et humilié dans le monde qui ne
puisse avoir part à la rémission des péchés que Christ a acquise au
prix de son sang, et se glorifier dans l’espérance de la gloire, de
Dieu. Fût -elle noire comme l’enfer, votre âme peut devenir, dans
l’espace d’un instant, aussi pure que le ciel. Je sais, hélas, je sais
que ce n’est pas sans une lutte désespérée que le pécheur parvient à
saisir la promesse du salut; mais du moment qu’il croit, toute lutte
cesse; c’est là sa première victoire: glorieuse et sainte victoire! Oh!
mes bien -aimés, puissent les paroles de ce cantique être en cet
instant même le langage de vos coeurs; retenez -les, adoptez -les, et
qu’elles deviennent le cri habituel de vos âmes.
Misérable et perdu, sans force et sans défense, Je me jette, ô Christ,
dans tes bras! Donne -moi sainteté, pardon et délivrance Tu l’as
promis, tu le feras » !