147 - CONSEILS AUX AMES ABATTUES
Oh! qui me ferait être comme j’étais autrefois
{#Job 29:2}
Le plus souvent le bon Berger conduit ses rachetés le long des eaux
tranquilles, et les fait reposer dans les parcs herbeux; cependant, il
permet parfois qu’ils soient errants dans un désert où il n’y a point
de chemin, et où ils ne trouvent aucune ville habitée. Ils sont affamés
et altérés; leur âme défaille, et ils crient à l’Eternel dans leur
détresse. {#Ps 107:4-6}
De même, il est beaucoup d’enfants de Dieu qui jouissent d’une joie à
peu près constante; pour eux véritablement les voies de la piété sont
des voies agréables et ses sentiers ne sont que prospérité; mais il en
est d’autres, au contraire, qui ont à passer dans le feu et dans l’eau;
selon l’expression du Psalmiste, les hommes montent sur leurs têtes {Ps
46} ils sont en butte à toutes sortes d’épreuves.
Le devoir de tout ministre de l’Evangile est de s’adresser tour à tour
aux diverses classes de ses auditeurs. Il doit, tantôt avertir les
forts, de peur qu’ils ne tombent dans la présomption; et tantôt
stimuler ceux qui dorment, de peur qu’ils ne dorment du sommeil de la
mort. Il doit aussi consoler les âmes abattues, et c’est là, mes bien
-aimés, ce que je désire faire en ce jour. Oui, je me sens pressé de
consoler ceux d’entre vous qui passent par des temps de langueur et de
découragement, ou, pour mieux dire, je voudrais leur adresser quelques
exhortations, qui, moyennant la bénédiction de Dieu, pourront les
aider, je l’espère, à sortir de la triste condition dans laquelle ils
sont tombés, en sorte qu’ils ne seront plus réduits à s’écrier avec
Job: Oh! qui me ferait être comme j’étais autrefois?
Abordons de suite notre sujet. - En premier lieu, mes frères, nous
étudierons LA MALADIE SPIRITUELLE dont mon texte me semble être
l’expression; nous rechercherons ensuite LA {CAUSE ET} LE REMÈDE de
cette, maladie, et enfin, QUELQUES MOTS D’EXHORTATION adressés aux âmes
qui se trouvent dans ce fâcheux état termineront ce discours.
I
Et d’abord, fixons notre attention sur la MALADIE SPIRITUELLE que
suppose la plainte amère contenue dans les paroles de mon texte.
Combien de chrétiens qui regardent au passé avec regret, à l’avenir
avec effroi, et au présent avec tristesse! Il leur semble que le temps
qui n’est plus a été le meilleur et le plus doux de leur carrière
chrétienne, mais quant au moment actuel, il leur paraît enveloppé d’un
voile sombre et mélancolique. Souvent, ils se prennent à souhaiter de
pouvoir retourner de quelques mois, de quelques années en arrière, car
alors ils vivaient près de Jésus, tandis que maintenant ils sentent
qu’ils se sont éloignés de lui, ou qu’il leur a caché sa face; en un
mot, le langage de leur coeur revient à ceci: Oh! qui nous ferait être
comme nous étions autrefois?
De même que toute maladie, soit physique, soit morale, celle qui nous
occupe ne présente pas toujours les mêmes caractères. Je vais essayer
de décrire successivement quelques -unes de ses phases les plus
ordinaires.
Voici un homme qui a perdu l’assurance de son adoption. Entendez -le
répétant dans l’amertume de son âme: Oh! qui me ferait être comme
j’étais autrefois? Ecoutez son triste soliloque:
« Ah! pourquoi les jours passés ne peuvent -ils plus revenir?
s’écrie -t -il. Alors je n’avais aucun doute de mon salut. A celui qui
m’aurait demandé raison de l’espérance qui était en moi, j’aurais
répondu avec douceur et respect. Nulle crainte ne me troublait, nulle
frayeur ne m’agitait. Je pouvais dire avec Paul: JE SAIS en qui j’ai
cru, et avec Job: JE SAIS que mon Rédempteur est vivant. Je sentais que
j’étais assis sur le rocher qui est Christ, et mon âme, pleine d’une
joyeuse confiance, était toujours prête à chanter:
Si l’Eternel est ma retraite,
Qui pourrait me troubler encor?
Pourquoi craindrais -je la tempête,
Quand je suis sûr d’entrer au port?
Appuyé sur Emmanuel
Que me ferait l’homme mortel?
« Mais hélas! que tout est changé! autrefois mon ciel était sans
ombres, aujourd’hui les nuages le couvrent; autrefois, je voyais, en
quelque sorte, mon nom écrit dans les cieux, aujourd’hui, je tremble
d’y lire un jour ma condamnation,. Autrefois, je croyais me confier
sincèrement en Christ, mais aujourd’hui je suis constamment assailli
par l’affreuse pensée que j’étais un hypocrite qui trompait les autres
et se séduisait lui -même. Il est vrai que j’essaie encore d’espérer au
Seigneur, et si je ne puis plus me réjouir à la clarté de sa face, du
moins je me réfugie à l’ombre de ses ailes. Je sens que hors de Christ
il n’y point de salut, et que si je m’éloigne de lui c’en est fait de
moi. Mais, ô misérable que je Suis! qu’elles sont épaisses les ténèbres
qui m’environnent! Comme Paul au milieu de la tempête, que de jours
sans soleil et de nuit, sans étoiles n’ai -je pas dû traverser! J’ai
perdu les arrhes de mon salut, le gage de mon adoption; je ne possède
plus le témoignage intérieur que je suis un enfant de Dieu en un mot,
je crains de m’être fait illusion jusqu’à présent sur mon véritable
état; je crains d’avoir pris de simples impression charnelles pour
l’oeuvre de la grâce, et attribué à Dieu le Saint -Esprit! ce qui
n’était que le fruit de mon imagination. »
Tel est, mes chers amis, un des cas les plus fréquents de la grande
maladie spirituelle que nous étudions. En voici un second, également
très ordinaire. Voyez ce chrétien qui demande à son tour: Oh! qui me
ferait être comme j’étais autrefois? Il gémit, non pas comme l’autre
parce qu’il a perdu le sentiment de son adoption, mais parce qu’il se
laisse troubler par des soucis terrestres. « Où est -elle, se dit
-il avec douleur, où est -elle cette paix délicieuse qui naguère encore
remplissait mon âme? Que sont -ils devenus ces jours bénis où peines et
épreuves étaient pour moi moins que rien? Je disais constamment en mon
coeur:
J’accepte, ô Père, par avance,
Le lot que tu m’assigneras;
En toi, j’ai mis ma confiance;
Fais de moi ce que tu voudras.
Je sentais que sans murmures j’aurais pu faire au Seigneur le sacrifice
de toutes choses, et que s’il m’eût enlevé ce que j’aimais le plus au
monde, j’aurais dit avec Job: L’Éternel l’avait donné, l’Éternel l’a
ôté; que le nom de l’Éternel soit béni. L’avenir ne m’inspirait aucune
inquiétude. Comme un enfant dans les bras de sa mère, je reposais
tranquille sur le sein de mon Dieu. L’Eternel pourvoira, me disais -je.
Je me déchargeais sur lui de tout ce qui me concernait; j’allais chaque
jour à mon travail, sans m’inquiéter du lendemain. J’étais semblable au
passereau qui se réveille à l’aurore, ne sachant d’où lui viendra sa
nourriture, mais qui n’en gazouille pas moins son hymne matinal à Celui
qui nourrit les oiseaux de l’air. Sans crainte, je remettais entre les
mains du Seigneur mes intérêts les plus chers: ma femme, mes enfants,
ma vie même. Chaque matin, je priais ainsi: Seigneur, je ne crois point
avoir de volonté propre; toutefois, si j’en avais, je te dirais encore:
Non point ce que je veux, mais ce que tu veux! Ta volonté sera la
mienne; ton désir sera mon désir.
- Mais, ô regret, ô douleur! qui me fera être comme j’étais autrefois?
Qui me rendra ma confiance en Dieu, ma douce quiétude, ma sérénité
d’esprit? Maintenant, un rien me chagrine; mes affaires temporelles, me
troublent. La perte la plus minime suffit pour m’attrister, tandis
qu’autrefois j’aurais supporté sans me plaindre, et même en bénissant
Dieu, une perte a vingt fois plus considérable. Si le moindre nuage
vient assombrir mon horizon, mon âme en est comme écrasée. Pareil à un
enfant impatient et volontaire, je voudrais que tout marchât au gré de
mes {désirs. Je ne} puis plus dire avec sincérité que je remets toutes
choses à mon Père céleste: il y a un certain interdit que je me
réserve.
Enlacée autour de mon coeur, croît la plante vénéneuse appelée l’amour
du moi; ses racines ont pénétré jusques aux muscles et aux nerfs de mon
âme. Il y a quelque chose que je chéris plus que Dieu, quelque chose
dont je refuserais de lui faire le sacrifice s’il me le demandait.
Autrefois, quelque lourde qu’eût pu être ma croix, je n’aurais pas,
comme aujourd’hui, plié sous le faix, car le Seigneur l’eût portée avec
moi. Oh! comment ai -je pu oublier la céleste science de se décharger
de ses soucis sur l’Eternel; de déposer tout fardeau sur le rocher
inébranlable des siècles? Oh! si je savais comme jadis répandre devant
mon Dieu mes peines et mes tristesses! Oh! douce confiance en mon
Sauveur qui me rendait si heureux, que ne donnerais -je pas pour te
posséder encore!
Tel autre chrétien déplore peut -être la tiédeur, qu’il apporte dans la
maison de Dieu et le peu de jouissance que lui procurent les moyens
d’édification. Ecoutez les plaintes qui s’exhalent de son coeur à ce
sujet. « Autrefois, s’écrie -t -il, quand je montais dans la
maison de Dieu, combien mon âme était joyeuse! J’écoutais avec avidité
le message du salut; quand le serviteur de Christ parlait, je craignais
de perdre une seule de ses paroles; il me semblait qu’un ange
s’adressait à moi du haut du ciel. Que de fois, en entendant parler de
l’amour du Sauveur, des larmes brûlantes n’ont -elles pas sillonné mes
joues! Que de fois mes yeux n’ont -ils pas étincelé d’ardeur lorsqu’une
parole de foi et d’espérance faisait vibrer mon âme tout entière! Et
les sabbats de mon Dieu, avec quel transport je saluais leur retour!
Jour du Seigneur,
J’ouvre mon coeur
A ta douce lumière!
m’écriais -je au matin du saint jour.
Puis, lorsque de saints cantiques faisaient retentir les parvis du
Seigneur, quelle voix était plus joyeuse que la mienne? Le coeur
content, l’âme restaurée, je quittais le sanctuaire pour aller raconter
à mes amis, à mes voisins les glorieuses vérités que je venais
d’entendre. Et dans la semaine également, combien j’aimais à m’occuper
des choses de Dieu! Pas une assemblée d’édification qui ne me trouvât à
ma place. Je priais véritablement en esprit toutes les prières qui
étaient prononcées; j’écoutais avec bonheur tous les discours, pourvu
qu’ils fussent selon l’Evangile; et mon âme, assise pour ainsi dire à
un banquet somptueux, était rassasiée. comme de moelle et de graisse.
Si je lisais l’Ecriture, elle me semblait toujours brillante de clarté;
on eût dit qu’un rayon de la gloire divine illuminait pour moi ses
pages sacrées. Si je ployais le genou devant Dieu, mon âme se répandait
aussitôt en ardentes supplications; je prenais plaisir à ce saint
exercice, et les heures que je passais à genoux étaient les plus douces
de mes journées: j’aimais mon Dieu et mon Dieu m’aimait.
- Mais, hélas! ce saint zèle, cette ferveur d’esprit, je ne les possède
plus. Je vais toujours à la maison de Dieu; j’y entends la même voix;
le même serviteur de Christ, que j’aime si cordialement, m’adresse
encore les plus touchants appels; mais je n’ai plus de larmes à verser;
mon coeur s’est endurci; les douces émotions que je goûtais naguère
deviennent de plus en plus rares. Je me rends au culte divin, à peu
près comme un écolier se rend à son école: j’y vais sans plaisir, sans
amour, parce qu’il faut y aller, et j’en sors l’âme aussi sèche qu’en
entrant. Lorsque je cherche à m’entretenir en secret avec mon Père
céleste, il semble en vérité que les roues de mon char aient été
enlevées, tant il se meut pesamment; et lorsque j’essaie de chanter les
louanges de Dieu, je me trouve sans élan et sans ferveur. Oh! qui me
ferait être comme j’étais autrefois, comme j’étais en ces jours où Dieu
faisait luire sa lampe sur ma tête? »
Je dois le dire, mes chers amis, je ne pense pas qu’il y en ait
beaucoup parmi vous qui puissent s’associer pleinement à un tel
langage. En général, je le sais, vous aimez à venir dans la maison de
Dieu; et, pour ma part, je rends grâces à mon Maître de ce qu’il me
permet de prêcher l’Evangile à des auditeurs; qui paraissent le goûter
et le sentir, à des chrétiens dont les yeux ne restent pas toujours
secs en l’entendant annoncer, et dont le coeur sait parfois bouillonner
d’un saint enthousiasme. Mais sans être parvenus au triste état que je
viens de décrire, vous pouvez cependant en connaître quelque chose;
peut -être la Parole ne vous semble -t -elle plus aussi douce, aussi
savoureuse qu’autrefois; et alors, j’en suis assuré, les plaintes que
je viens d’exprimer éveillent quelque écho dans votre coeur.
Mais passons à un quatrième cas.
Il est des chrétiens qui se lamentent amèrement parce que leur
conscience n’est plus aussi délicate que par le passé. Ils disent avec
tristesse: « Dans les premiers temps qui suivirent notre
conversion, c’est à peine si nous osions faire un pas, tant nous
craignions de nous fourvoyer. Nous éprouvions avec soin toutes choses;
nous évitions jusqu’à l’apparence du mal. Dès que nous apercevions sur
notre route la moindre trace du Serpent ancien, nous nous détournions
avec épouvante.
Le monde se moquait de nous; il nous appelait des puritains. Nous
étions constamment sur nos gardes; nous avions peur d’ouvrir la bouche,
et nos scrupules allaient si loin que nous condamnions certaines choses
qui, en réalité, étaient innocentes. Notre conscience ressemblait à la
sensitive: si la main du péché s’en approchait, aussitôt elle se
reployait sur elle même. Notre âme était comme couverte de
meurtrissures, en sorte que le plus léger attouchement lui arrachait
des cris. Offenser Dieu, nous paraissait être le malheur suprême; si
quelqu’un prononçait une imprécation en notre présence, nous tremblions
d’effroi si nous voyions un homme violer le sabbat, nous étions
éperdus.
La moindre tentation nous indignait; il nous semblait entendre la voix
du démon lui -même, et pleins d’une sainte colère, nous nous écriions:
Arrière, de moi, Satan! » Le péché, sous toutes ses formes, nous
faisait horreur: nous le fuyions comme un serpent; nous le craignions
comme du poison … Mais où est -elle maintenant cette
conscience si sensible et si tendre? Qu’est devenue sa délicatesse
d’autrefois? Nous n’avons pas, il est vrai, abandonne les sentiers du
Seigneur ni oublié sa loi; nous n’avons point extérieurement déshonoré
notre sainte profession, et Dieu seul connaît nos iniquités; toutefois,
nous l’avouons avec confusion, notre conscience n’est plus ce qu’elle a
été. Hier encore elle tonnait contre le péché; aujourd’hui elle garde
le silence.
O conscience, conscience! nous t’avons abreuvée de soporifiques, et
maintenant tu dors, tandis que tu devrais nous avertir. Sentinelle du
Seigneur, ta voix pénétrante savait naguère se faire entendre jusqu’au
plus profond de notre être; mais maintenant tu es assoupie, et nous
succombons à la tentation. Jusqu’à présent, nous n’avons péché que dans
de petites choses mais de même que le balancement d’un brin d’herbe
indique de quel côté souffle le vent, de même ces petites infidélités
ne prouvent que trop dans quelle funeste voie notre âme est engagée.
Oh! qui nous délivrera de cette conscience si épaisse, si dure, si
calleuse, de cette conscience que les flèches de la loi ne peuvent plus
transpercer? Oh! qui nous fera être comme nous étions autrefois?
»
Enfin, mes bien -aimés, il est peut -être quelques -uns, d’entre nous
qui gémissent, et non sans raison, parce qu’ils n’ont pas autant de
zèle pour la gloire de Dieu et pour le salut des âmes qu’ils en avaient
jadis. Il y a quelque temps, si nous voyions une âme cheminer vers la
perdition, nos yeux se remplissaient de larmes.
Si nous voyions un de nos semblables prêt à commettre un péché, nous
nous élancions vers lui, le suppliant de renoncer à son coupable
dessein. Jamais nous ne sortions sans donner à l’un quelque traité
religieux, à l’autre quelques bons avis; il nous semblait que nous
devions toujours parler du Seigneur Jésus.
Si une occasion de faire du bien se présentait, nous étions toujours
les premiers à la saisir. Notre voeu le plus cher était de sauver
quelques âmes, et si profond, si ardent était notre amour pour les
pécheurs que volontiers nous eussions consenti à être moqués, hués,
abreuvés d’outrages, persécutés par le monde entier, exposés même à la
mort cause de Christ, si à ce prix nous eussions pu arracher un seul de
nos frères à la perdition éternelle. Notre âme brûlait d’un désir
intense d’amener des âmes à Christ, et nous estimions que c’était là le
seul but en vue duquel il valait la peine de vivre.
- Mais, hélas! quel souffle glacial est venu flétrir ce généreux élan?
Aujourd’hui, les âmes peuvent être damnées, et nous ne pleurons point;
les pécheurs peuvent être précipités dans l’étang ardent de feu et de
soufre, et nous demeurons impassibles; des milliers de créatures
immortelles peuvent être moissonnées chaque jour et tomber dans l’abîme
du tourment, et cela ne nous touche point! Nous exhortons bien encore
notre prochain à fuir la colère à venir, mais nos yeux restent secs;
nous prions pour lui, mais sans que nos coeurs prennent part à nos
prières; nous lui parlons de son danger, mais sans avoir l’air de
prendre ce danger au sérieux. Nous passons à côté des repaires du vice
et de l’infamie: sans doute nous voudrions que ceux qui y habitent
fussent meilleurs, mais c’est là tout. On dirait que la compassion même
est éteinte dans nos coeurs.
Il fut un temps où l’enfer était pour nous une réalité si vivante,
qu’il nous semblait sans cesse entendre les hurlements et les
lamentations des réprouvés, en sorte que le cri constant de notre âme
était celui -ci: « O Dieu; aide -moi à sauver mon prochain!
»
Mais maintenant nous prenons les choses plus froidement: nous avons peu
d’amour pour les hommes, peu de zèle pour la gloire de Dieu, peu
d’énergie pour son service … .. Oh! mes bien -aimés, si tel
est votre état spirituel; si, comme votre indigne pasteur, vous pouvez
vous associer dans une certaine mesure à ces tristes aveux, assurément,
du fond de votre coeur humilié s’élève en cet instant même cette
plainte amère: Qui nous fera être comme nous étions autrefois?
II
Mais nous nous sommes assez longtemps arrêtés à la maladie spirituelle
si bien décrite par les paroles de notre texte; recherchons -en
maintenant LA CAUSE ET LE REMÈDE.
Le plus souvent ce fâcheux état de choses est le résultat du
relâchement dans la prière; et quant au remède, il est facile de
comprendre qu’il est l’inverse de la cause. - Voyons, mon frère, qui es
toujours à te plaindre de l’alanguissement de ta piété, essayons de
descendre à la racine du mal. Si tu n’es plus comme tu étais autrefois,
ne serait -ce pas tout simplement parce que tu as négligé la prière?
Rien ne débilite l’âme comme le manque de prière.
On l’a observé avec raison: « Un cabinet négligé est le berceau
de toute sorte de mal. » On peut dire que le cabinet du chrétien
est pour lui la source, soit de beaucoup de bien, soit de beaucoup de
mal: de bien, s’il le fréquente assidûment; de mal, s’il le néglige.
Nul ne peut croître dans la grâce, s’il est paresseux à s’approcher de
Dieu. Quelque avancé que soit un chrétien, s’il ne priait pas, il
aurait bientôt cessé de vivre. L’enfant de Dieu a besoin d’être
constamment substanté; si bien nourri qu’il puisse être aujourd’hui, il
ne saurait subsister demain, si ses provisions ne sont renouvelées: or,
ce renouvellement incessant de grâces, c’est par la prière seule qu’il
peut l’obtenir. Quand même une âme posséderait la force spirituelle de
cinquante chrétiens d’élite, si elle cessait de prier, elle ne pourrait
que périr.
- Mon frère, examine -toi donc à cet égard; et si en regardant en
arrière, tu étais contraint à te dire: « Il fut un temps où mes
prières étaient plus régulières, plus senties, plus nombreuses
qu’aujourd’hui; maintenant elles sont faibles, languissantes, sans
sincérité et sans onction »; - si, dis -je, ta conscience
t’obligeait à faire cet aveu, oh! mon bien -aimé, ne t’étonne plus du
malaise de ton âme; ne cherche pas ailleurs l’explication de ce marasme
spirituel dont tu te sens atteint.
Le relâchement dans la prière: voilà la cause du mal. - « Mais où
en est le remède? » diras -tu. Eh! c’est tout simple, chère âme:
prie davantage. Si peu de prières t’ont réduite à l’état d’abaissement
dans lequel tu te trouves, beaucoup de prières te relèveront. C’est le
manque de prière qui t’a appauvrie; c’est l’abondance de prière qui
t’enrichira. Où il n’y a point boeuf, la grange est vide, a dit
Salomon; {#Pr 14:4} et même que sans labourage l’homme n’aurait point
de pain, de même sans la prière l’âme croyant serait affamée: Voulons
-nous donc prospérer sous le rapport spirituel? soyons plus
persévérants dans la prière. Oh! mes chers amis la pierre de la
muraille ne pourrait -elle pas crier contre nous, et la paroi nous
condamner? {#Hab 2:11} La poussière de notre cabinet ne s’élève -t
-elle pas en témoignage devant Dieu, nous accusant de négligence dans
nos dévotions particulières?
Voilà pourquoi nous ne sommes plus tels que nous étions autrefois. Ce
qu’est pour une machine à vapeur le feu qui entretient son mouvement,
la prière alimentée par le Saint -Esprit l’est pour le chrétien. La
prière est le véhicule que Dieu a choisi pour faire part de ses grâces
à ses enfants, et bien insensé est celui qui néglige. Mes frères,
permettez -moi d’insister sur ce point, car il est de la plus haute
importance. Si vous reconnaissez qu’en négligeant de vous approcher de
Dieu vous placez votre âme dans la situation la plus périlleuse, votre
devoir est tout tracé: vaquez à la prière avec plus de soin que jamais.
Un commerçant gémit parce que son négoce n’est plus aussi florissant
qu’autrefois; or, il avait coutume d’envoyer au loin des navires qui
lui revenaient chargés d’or; mais depuis longtemps pas un seul n’a mis
à la voile: a -t -il donc le droit de se plaindre de ce qu’il ne reçoit
plus de précieux chargements.
De même, lorsqu’un homme prie, il envoie vers le ciel un navire qui lui
revient chargé des plus riches trésors, mais si, au lieu de cela, il
laisse son navire amarré, dans le port, est -il étonnant qu’il
s’appauvrisse de jour en jour?
Mais le fâcheux état spirituel qui nous occupe peut avoir d’autres
causes. Si vous êtes réduits à vous écrier: Oh! qui me ferait être
comme j’étais autrefois? peut -être est -ce moins votre faute que la
faute de vos conducteurs spirituels. Oui, mes chers amis, il n’est pas
impossible qu’une âme devienne très gravement malade, par suite de la
mauvaise nourriture que lui donne son pasteur. Peut -on s’attendre, en
effet, à ce qu’ils croissent dans la grâce ces chrétiens qui ne sont
jamais arrosés par les ruisseaux qui réjouissent la cité de notre Dieu?
Comment pourraient -ils se fortifier dans le Seigneur Jésus, ceux qui
ne sont pas nourris du lait spirituel et pur de la Parole? Recherchez
donc, avec le plus grand soin, les instructions d’un ministre fidèle.
Je connais des chrétiens qui jamais ne sortent de leur lieu de culte
sans se lamenter sur le peu d’édification qu’ils y trouvent; et
pourtant (étrange contradiction!) ils y retournent régulièrement
dimanche après dimanche.
En vérité, je ne sais comment qualifier une telle conduite, et bien
loin d’exciter ma compassion ou ma sympathie, j’estime que ces
chrétiens méritent qu’on aille à eux avec la verge. Lorsqu’il peut
choisir, tout fidèle est tenu d’aller là où il trouve la nourriture qui
correspond le mieux aux besoins de son âme. Sans doute, il ne doit pas
changer de lieu de culte à la légère; mais si une longue expérience l’a
convaincu que la prédication qu’il entend habituellement ne lui tourne
pas à profit, au lieu de perdre son temps en vaines doléances, il est
de son devoir d’aller ailleurs. Souvent un pasteur infidèle affame,
pour ainsi dire, son troupeau; il réduit les brebis du Seigneur à
l’état de squelettes ambulants, en sorte qu’on peut compter tous leurs
os. C’est là, mes frères une seconde cause qui peut amener les âmes à
s’écrier-: Oh! qui nous ferait être comme nous étions autrefois
Mais il y en a une troisième que j’ai hâte de vous signaler, car je
crois qu’elle vous concerne plus que la précédente. Votre état de
dépérissement spirituel peut provenir, non de la qualité de votre
nourriture, mais de la quantité insuffisante que vous en prenez. Je
m’explique.
Voici un homme, un simple ouvrier, je suppose, qui autrefois se rendait
régulièrement deux fois chaque dimanche à la maison de Dieu. Le lundi
soir, quoique pressé de travail, il trouvait néanmoins le temps d’ôter
à la hâte son tablier de cuir et de courir à la réunion de prière: peut
-être y arrivait -il un peu tard, mais il y entendait toujours quelques
bonnes paroles. Le jeudi soir encore, il s’efforçait de se rendre dans
le sanctuaire pour écouter les exhortations d’un ministre de
l’Evangile, et afin de regagner les heures passées à ces divers
exercices religieux, il se couchait tard, se levait matin et
travaillait avec une infatigable ardeur. Mais un jour, voilà que cet
homme pense en lui -même: « Je suis surchargé d’ouvrage; la vie
que je mène est par trop fatigante; je ne puis plus sortir aussi
souvent; d’ailleurs, les courses sont si longues! » Alors il
renonce d’abord à telle réunion, puis à telle autre, et ainsi de suite,
jusqu’à ce qu’enfin s’apercevant que la vie de somme décline d’une
manière sensible, il s’écrie tout éperdu:
Oh! qui me ferait être comme j’étais autrefois? Eh! ne devais -tu pas
t’attendre à ce qui t’arrive, mon frère? tu prends moins d’aliments que
par le passé: n’est -il pas tout simple que tu t’affaiblisses? Comme le
petit enfant, le chrétien a besoin de manger souvent et peu à la fois.
Pour ma part, je n’hésite pas à le dire, je crois que lorsqu’une âme
abandonne les services religieux de la semaine: - (si ce n’est pour
cause d’empêchement absolu), - c’en est fait pour cette âme de la vie
religieuse. « Tant que l’on n’adore Dieu que le dimanche, disait
Whitefield, une piété pratique ne saurait exister. » Les services
de la semaine sont souvent les meilleurs. Si dans les jours de sabbat
Dieu abreuve ses enfants à des ruisseaux de lait, on peut dire que
souvent il semble réserver la crème pour les autres jours. Lors donc
qu’un chrétien se tient volontairement éloigné des moyens de grâce les
plus propres à fortifier son âme, n’est -ce pas à lui -même qu’il doit
s’en prendre s’il est réduit à s’écrier: Oh! qui me ferait être comme
j’étais autrefois?
- Je ne vous blâme pas, mes bien -aimés, je désire seulement réveiller
par mes avertissements les sentiments purs que vous avez. {#2Pi 3:2} Je
vous parle en toute simplicité comme en toute franchise, et j’ai
toujours l’intention d’en agir ainsi. Oh! chrétiens, soyez fidèles à
votre drapeau! Ne le perdez pas un seul instant de vue, et vous
remporterez la victoire. Mais si le plus léger indice de défection se
manifeste dans vos rangs, n’est -il pas du devoir de votre pasteur de
vous avertir, de peur que vous ne veniez à déchoir de vôtre fermeté?
L’idolâtrie: telle est une autre cause très ordinaire du déclin de la
piété. Il est des chrétiens qui se laissent aller insensiblement à
retirer leur coeur à Dieu pour le donner à quelque objet terrestre, et
qui s’affectionnent aux choses qui sont d’ici -bas plus qu’à celles qui
sont d’en haut. Ah! mes amis, il est difficile d’aimer le monde et
d’aimer Christ; je dis plus: c’est impossible. Mais d’un autre côté, il
est difficile, j’en conviens, de ne pas aimer la créature, il est
difficile de ne pas s’attacher à la terre; j’allais presque dire: c’est
impossible. Et par le fait, c’est impossible pour l’homme laissé à ses
propres forces; Dieu seul peut nous apprendre à préférer l’invisible au
visible, le spirituel au matériel; Dieu seul peut nous rendre capables
de lui donner nos coeurs sans réserve et sans partage. Mais notez bien
ceci, mes frères: toutes les fois que cédant à notre penchant à
l’idolâtrie nous nous ferons un veau d’or et nous nous prosternerons
devant lui, tôt ou tard ce veau d’or sera réduit en poudre et mêlé,
pour ainsi dire, à l’eau que mous boirons, en sorte que nous pourrons
dire avec le Psalmiste: Tu m’as abreuvé d’absinthe. Jamais chrétien ne
s’est façonné une idole sans qu’elle ne se soit écroulée sur lui et ne
l’ait grièvement blessé dans sa chute; jamais l’âme n’a essayé
d’étancher sa soif aux citernes crevassées du monde sans qu’elle n’ait
trouvé, au lieu des ondes pures qu’elle cherchait, des reptiles
immondes, et des eaux croupissantes.
Le Seigneur veut que ses enfants vivent de lui, et de lui seul: que
s’ils cherchent ailleurs leur vie, il prend soin de leur faire boire
des eaux de Mara, de verser de l’amertume dans leur âme, afin de les
ramener vers le Rocher d’où jaillissent les seules eaux vivifiantes.
Oh! mes bien -aimés, prenons donc garde que nos coeurs soient tout à
Christ, entièrement à Christ, uniquement à Christ. S’il en est ainsi,
nous jouirons certainement d’une paix constante, et notre âme ne sera
pas contrainte à s’écrier: Qui me ferait être comme j’étais autrefois?
Il semble presque superflu de vous indiquer, d’autres causes qui
peuvent déterminer la maladie spirituelle dont nous parlons; toutefois,
nous vous en signalerons une dernière, qui est peut -être la plus
commune de toutes.
Souvent notre piété n’est plus ce qu’elle a été, parce que nous avons
nourri au -dedans de nous des sentiments d’orgueil et de propre
justice. Ah! mes amis, sachez -le: aussi longtemps que vous serez sur
la terre, vous ne parviendrez point à vous débarrasser complètement de
ce vieux levain de propre justice. Le démon nous est représenté par
l’Ecriture sous l’emblème d’un serpent, parce qu’un serpent se glisse
partout, jusque dans le moindre interstice. De même, la propre justice
peut être comparée à un serpent, car elle s’insinue jusque dans les
moindres de nos actions. - Si vous vous efforcez de servir Dieu «
Excellent chrétien! vous dit le diable; comme tu sers Dieu fidèlement!
tu dépenses ta vie à prêcher l’Evangile; tu es un noble coeur. »
- Si, dans une réunion de prières, le Seigneur vous donne de répandre
votre âme devant lui avec liberté et avec quelque ferveur, aussitôt
Satan vous caresse avec complaisance:: « Comme tu as bien prié!
s’écrie -t -il; certainement les frères t’aimeront; tes progrès dans la
grâce sont vraiment remarquables,! »
- Si une tentation se présente et que vous soyez rendu capable d’y
résister: « Ah! s’écrie -t -il encore, tu es un vaillant soldat
de la croix! Regarde l’ennemi que tu as terrassé; une brillante
couronne t’attend au bout de la carrière; tu te comportes en véritable
héros. » - Vous vous confiez implicitement au Seigneur, vous
acceptez toutes ses promesses; Satan murmure alors à votre oreille:
« Combien ta foi est ferme! rien ne peut l’ébranler; quelle
différence entre toi et tel ou tel de tes frères! Sa foi n’est pas la
moitié aussi forte que la tienne. » Sur quoi vous allez, tout
gonflé d’importance, tancer vertement votre frère qui est faible; vous
lui reprochez de n’être pas de votre taille; et pendant ce temps, le
démon continue ses perfides insinuations, ne se lassant pas d’admirer
votre force, votre fidélité, votre confiance en Dieu, et vous affirmant
que vous n’avez point la moindre parcelle de justice propre.
Votre pasteur s’adresse aux Pharisiens de son troupeau; mais qu’avez
-vous de commun avec les Pharisiens? Vous vous croyez complètement
inaccessible à l’orgueil, tandis qu’en réalité il n’est pas d’être qui
soit plus orgueilleux que vous. Ah! mes bien -aimés! c’est justement
lorsque nous nous estimons humbles, que nous sommes enflés d’orgueil,
et lorsque nous gémissons le plus sur notre orgueil, c’est alors que
nous sommes le plus humbles. En général, notre appréciation de nous
-mêmes est le contre -pied de la vérité.
Quand le chrétien se croit le plus mauvais, il est souvent le meilleur,
et quand il se croit le meilleur, il est souvent le plus mauvais. Si
donc vous reconnaissez avec douleur que vous n’êtes plus tels que vous
étiez autrefois, examinez si des sentiments de propre justice ne se
sont point glissés dans votre âme. Peut -être le flambeau de votre vie
spirituelle est -il obscurci par l’orgueil: débarrassez -le donc de cet
orgueil, et il brillera comme auparavant. Tu volais trop haut, mon
frère; c’est pourquoi il convient que tu sois humilié pour un temps,
afin que comme un pécheur coupable et perdu tu ailles de nouveau
t’abattre aux pieds de ton Sauveur. Alors, n’en doute pas, tu n’auras
plus à t’écrier: Oh! qui me ferait être comme, j’étais autrefois?
III
Et maintenant, je termine par QUELQUES MOTS D’EXHORTATION.
En premier lieu, mes chers amis, je me sens pressé de vous exhorter à
prendre, courage. L’un de vous se dit peut -être en ce moment même:
« Oh! c’en est fait; jamais je ne recouvrerai le bonheur que j’ai
perdu; le Seigneur m’a caché la clarté de sa face. J’ai contristé son
Esprit, et il s’est éloigné; je me suis joué de ses avertissements, et
il m’a abandonné; j’ai délaissé les sentiers de la justice, et
maintenant je suis comme emprisonné dans une cage de fer dont il m’est
impossible de sortir. » Il est vrai, pauvre âme, tu ne saurais
par toi -même recouvrer la liberté; tes faibles forces ne parviendront
jamais à briser ou à limer les barreaux derrière lesquels tu languis.
Toutefois, je le répète, prends courage.
D’autres sont sortis avant toi de la sombre prison du découragement et
du désespoir. Sais -tu ce que tu dois faire, mon bien -aimé? Crie à ton
bon Maître demande -lui de venir te délivrer; et quand même il
semblerait pendant longtemps fermer l’oreille à tes cris de détresse,
il t’entendra à la fin, n’en doute pas; en sorte qu’avec Jonas tu
pourras bientôt entonner ce chant de délivrance:
J’ai crié à l’Éternel à cause de ma détresse, et il m’a exaucé;
je me suis écrié du ventre du sépulcre, et tu m’as entendu! {#Jon 2:3}
Reviens, reviens, ô pécheur égaré!
Entends la voix du Seigneur qui t’appelle;
Vers lui déjà n’es -tu pas attiré
Par les cordeaux de son amour fidèle?
En second lieu, mes amis, je désire vous exhorter à faire tous vos
efforts pour progresser continuellement dans la vie spirituelle. O
chrétiens, mes frères et mes soeurs en Jésus -Christ! combien en est
-il parmi vous dont toute l’ambition consiste à se soustraire à la
colère à venir! Combien en est -il qui disent: « Pourvu que je
sois sauvé, peu m’importe que ce soit comme, au travers du feu; pourvu
que l’entrée du ciel ne me soit pas refusée, peu m’importe si je suis à
la dernière place! » Et ceux qui parlent ainsi se conduisent en
conséquence, c’est -à -dire qu’ils sont aussi peu chrétiens que
possible. De la piété, ils en veulent bien; mais avec modération. Or,
qu’est -ce {que la} modération en matière de piété? C’est un mensonge,
c’est une dérision, et rien de plus! Une femme demande -t -elle à son
mari de l’aimer avec modération?
Un père se contente -t -il que son fils soit modérément obéissant? Une
probité modérée vous satisferait -elle chez vos serviteurs? Evidemment
non. Que parlez -vous donc d’une piété modérée? Etre modérément
religieux, ce n’est autre chose qu’être irréligieux. Posséder une
religion qui ne pénètre pas jusqu’au fond du coeur et qui n’exerce
point d’influence sur la vie, c’est, par le fait, n’avoir aucune
religion.
Ah! mes chers auditeurs, vous le dirai -je? je tremble souvent à la
pensée que parmi vous il en est un grand nombre qui n’ont que
l’apparence de la piété. Malheur à vous, sépulcres blanchis, qui vous
contentez de paraître beaux au dehors sans considérer qu’au dedans vous
n’êtes que souillure et corruption! Malheur à vous, Pharisiens
formalistes, qui nettoyez le dehors de la coupe et du plat et qui vous
persuadez avoir assez fait, parce que ni l’Eglise ni le monde ne
peuvent élever contre vous aucune accusation grave! Prenez garde!
prenez garde! le jour viendra où le Juge suprême examinera l’intérieur
du plat et de la coupe, et s’il les trouve pleins d’injustice et de
méchanceté, il les mettra en pièces et en jettera les débris dans
l’abîme du tourment.
Pauvres formalistes! votre prétendue piété ressemble aux ailes de cire
d’un personnage de la fable: elle peut fort bien vous suffire pour
voler ici -bas, mais lorsqu’il vous faudra prendre votre essor vers les
régions supérieures, le puissant, soleil de Jésus la fondra en un
instant, et vous tomberez pour jamais dans le gouffre de la perdition!
Oh! soi -disant chrétiens, si habilement dorés, ornés et vernissés, que
ferez -vous lorsque au dernier jour vous serez reconnus pour être du
vil métal? Quand la paille, le foin et le chaume auront été consumés,
que deviendrez -vous, je vous le demande, si votre christianisme est de
mauvais aloi, s’il n’a pas été frappé au coin du Très -Haut? Comment
pourrez -vous passer par le creuset au grand et illustre jour du
Seigneur, si vous n’êtes pas de l’or fin?
Mais, j’en ai la confiance, il est des âmes dans cet auditoire qui
n’ont rien à craindre de cette solennelle épreuve; elles sont nées de
Dieu, par conséquent le feu ne saurait les consumer. Toutefois, mes
bien -aimés - (et ici je ne parle qu’aux véritables croyants), - jugez
vous -mêmes si je suis injuste à l’égard des chrétiens de nos jours, en
disant qu’en général nous nous contentons trop aisément de savoir que
nous sommes enfants de Dieu, et que nous n’aspirons point assez à
croître en stature et en force. Nous ressemblons à des nains, à de
pauvres enfants rachitiques et souffreteux. Au lieu de marcher
courageusement en avant, nous sommes toujours à gémir et à répéter sur
tous les tons: Qui nous ferait être comme nous étions autrefois?
C’est là un symptôme de rachitisme. Si nous voulons faire de grandes
choses dans le monde, nous ne devons pas souvent pousser ce cri. Il
faut bien plutôt que nous soyons toujours prêts à chanter:
Ma langue, égaie -toi;
réjouis -toi, mon coeur;
Entonne un chant d’amour,
Jésus est ton Sauveur
et que, pleins de joie, nous puissions dire avec saint Paul: Je sais en
qui j’ai cru. Chrétiens, voulez -vous être utiles? voulez -vous honorer
votre Maître? Désirez -vous obtenir dans le ciel une brillante
couronne, afin d’en faire hommage à votre Sauveur? S’il en est ainsi
(et peut -il ne pas en être ainsi?) veillez avec le plus grand soin à
la santé de votre âme; ne la laissez pas végéter et languir. Que
l’homme intérieur qui est en vous n’ait pas simplement le souffle de la
vie, mais qu’il se développe de jour en jour et devienne semblable à un
arbre planté prés des eaux courantes, qui porte son fruit en sa saison
et dont le feuillage ne se flétrit point.
Quoi! mes bien -aimés, vous vous contenteriez d’une couronne sans
ornement quand vous savez que si vous amenez des âmes à Christ vous
luirez comme des étoiles dans la splendeur de l’étendue? {#Da 12:3}
Vous voudriez vous asseoir au banquet des noces, revêtu, il est vrai,
de la robe de Christ, mais sans que Dieu vous ait donné un seul joyau
comme récompense de vos services ici -bas? Ah! non, j’en suis certain.
Vous désirez, au contraire, n’est -il pas vrai? que l’entrée du royaume
éternel vous soit abondamment, accordée; vous voulez jouir de la
plénitude des grâces du Seigneur.
A l’oeuvre donc, mes bien -aimés; à l’oeuvre avec ardeur et courage! A
celui qui aura fait valoir cinq talents, cinq villes seront données; et
que personne ne se contente de posséder un seul talent, mais qu’il le
place à intérêt; car on donnera à quiconque a déjà, et il aura encore
davantage; mais pour celui qui n’a pas, on lui ôtera même ce qu’il a.
Mais; je le sais, pour beaucoup de ceux qui m’écoutent en ce moment, ce
que je viens de dire est dépourvu de tout intérêt. Peut -être pensent
-ils eux aussi: « Qui nous ferait être comme. nous étions
autrefois? » mais dans leur bouche cette plainte a un sens tout
autre que dans la bouche du chrétien. « Hélas! dit le pécheur
avec amertume, que ne suis -je encore ce que j’étais il y a quelques
années! car alors j’étais plein d’entrain et d’insouciance; je menais
joyeuse vie. Nul mieux que moi ne savait vider la coupe des festins;
nul ne se laissait emporter plus gaiement par le tourbillon des
plaisirs et de la folie. Mais ce que je faisais alors; je ne puis plus
le faire. J’ai usé ma santé, j’ai dépensé mon énergie, j’ai perdu ma
fortune. Je suis malade de corps et faible d’esprit. Qui me ferait être
comme j’étais autrefois? »
Ah! pauvre pécheur, tu as lieu, en effet, de regretter le passé; mais
attends seulement quelques mois, et le présent, qui maintenant te
semble si sombre, sera à son tour l’objet de tes amers regrets. Et plus
tu avanceras dans la vie, sache -le, plus tu souhaiteras de retourner
en arrière; car le chemin de l’enfer descend, - descend, descend
toujours, - et le malheureux engagé sur cette pente, fatale se consume
continuellement en impuissants désirs de revenir sur ses pas. Oh! oui,
tu auras encore à t’écrier: « Qui me ferait être comme j’étais
autrefois? »
Tu penseras aux jours heureux où la prière de ta mère te bénissait, où
la voix de ton père t’avertissait, où tu allais prendre place sur les
bancs d’une école du dimanche, où, assis sur les genoux de ta mère, tu
l’écoutais te parlant du Sauveur. Et ces réminiscences d’un heureux
passé seront d’autant plus poignantes que ce passé sera plus éloigné de
toi.
Ah! mes chers auditeurs, il y en a beaucoup parmi vous qui ont bien
besoin de rebrousser chemin. Pensez au nombre de vos égarements; voyez
jusqu’où vous êtes tombés … .. Mais qu’ai -je dit? Non,
pécheur, tu n’as que faire de rebrousser chemin! Au lieu de regarder
aux choses qui sont derrière toi, regarde à celles qui sont devant; et
au lieu de t’écrier: Qui me ferait être comme j’étais autrefois? dis en
sincérité de coeur: « Que ne suis -je un nouvel homme en Jésus
-Christ » Il ne te servirait de rien, crois -le, de recommencer
la vie tel que tu es: tu serais bientôt aussi mauvais que tu l’es en ce
moment.
Mais si Dieu daignait faire de toi un homme nouveau, oh! alors; pauvre
mortel, qui que tu sois, quelque bas que tu sois tombé, tu vivrais
véritablement en nouveauté de vie. Un chrétien est tout aussi
réellement un nouvel homme que s’il n’avait pas vécu avant sa
conversion. La vieille créature est détrônée; il est une nouvelle
créature, née de nouveau et entrant dans une nouvelle existence. Pauvre
âme! Dieu peut accomplir en toi cette merveilleuse transformation. Dieu
le Saint -Esprit peut faire de toi un nouvel édifice, et cela sans
employer une seule des pierres qui entraient dans la structure de
l’ancien. Il peut te donner un nouveau coeur, un nouvel esprit, de
nouveaux plaisirs, un nouveau bonheur, de nouvelles perspectives, et
enfin un ciel nouveau. « Ah! me dis -tu peut -être; je sens que
j’ai besoin de toutes ces choses, mais est -il bien vrai que je puisse
les obtenir? » Juge toi -même, mon frère, si tu le peux, par
cette simple déclaration de l’Evangile:
C’est une chose certaine et digne d’être reçue avec une entière
confiance que Jésus -Christ est venu dans le monde pour sauver les
pécheurs. Il n’est pas dit, remarque -le, que ce soit là une chose
digne seulement de quelque confiance, mais d’une entière confiance, de
toute la confiance dont tu es capable. Si donc tu dis en cet instant
même: « Jésus est venu pour sauver les pécheurs; je le crois, je
le sais ». tu n’as rien à craindre; le salut est à toi.
- Mais Jésus voudra -t -il bien me recevoir; moi, si vil et si indigne?
» demandes -tu peut -être. Je te répondrai par une parole de mon
Sauveur lui -même: Je ne mettrai point dehors celui qui viendra à moi.
- « Mais je n’ose aller à lui! » objectes -tu encore. Si
quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive, est -il écrit. As
-tu soif? soupires -tu après le pardon? sens -tu le besoin que tu as
d’un Sauveur? as -tu soif, te dis -je? S’il en est ainsi, ô mon frère,
voici ce que te dit Dieu. le Saint -Esprit: Que celui qui voudras de
l’eau vive en prenne gratuitement!
Ecoutez tous une bonne nouvelle!
C’est pour sauver que Jésus -Christ est mort; Qui croit au Fils a la vie éternelle; Notre salut est un don du Dieu fort !
Que Dieu vous accorde à tous la grâce d’accepter ce salut pour l’amour de son nom !