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+LES DICTIONNAIRES LEXIQUE DE LA BIBLE (Lelièvre Charles) |
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Préface
Pasteur de l'Eglise Réformée De A. LODS, membre de l'Institut Professeur honoraire de l'Université de Paris La Bible présente un double aspect : elle est une source incomparable de vie spirituelle, étant le document classique de la révélation de Dieu à l'humanité, celui qui nous fait connaître sous la forme la plus claire et la plus accessible à tous ce qu'est Dieu et ce qu'est l'homme, ce que le Créateur a le droit d'exiger de sa créature et ce qu'il a fait pour sauver le pécheur. Et, d'autre part, ce livre - ou plutôt cette collection de livres - est un document d'histoire. C'est, en effet, au cours d'un développement millénaire que Dieu a fait progressivement tomber les voiles interposés entre lui et la conscience humaine. Aussi la plupart des livres qui constituent cette bibliothèque ont-ils la forme d'une histoire relatant les destinées d'un peuple étroitement mêlé à la vie générale des nations dans un coin déterminé du monde antique. Pour bien comprendre ces ouvrages, il est donc nécessaire d'avoir certaines connaissances historiques et géographiques. Ce sont quelques-unes de ces notions indispensables que M. le pasteur Charles Lelièvre a entrepris de mettre à la portée de tous les lecteurs de la Bible. Il s'est attaché principalement à faire comprendre les coutumes et les institutions auxquelles il est fait allusion dans les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament. Nul n'était plus qualifié que lui pour ce travail. Il possède le don fort rare d'exposer simplement et clairement les questions les plus complexes et les plus délicates. Il est, d'autre part, au courant des recherches qui ne cessent de se poursuivre, dans le domaine de l'archéologie, et dans celui de l'exégèse sur les textes bibliques et sur l'histoire générale de L'ancien Orient. Et il n'a pas manqué d'utiliser, pour la rédaction de ce lexique, les résultats les plus sûrs de cette vaste enquête. On peut donc le suivre avec confiance, on trouvera en lui un guide aussi prudent qu'averti. Puisse ce petit livre aider beaucoup de lecteurs de la Bible à mieux comprendre ce qu'ils lisent et, par suite, à profiter plus pleinement des trésors spirituels qu'elle renferme ! Adolphe Lods. NOTE DES ÉDITEURS
Le « Lexique » dont l'auteur est M. le pasteur Ch. Lelièvre, nous a paru répondre à un besoin depuis longtemps signalé. Il doit rendre les plus grands services, non seulement à ceux qui ont charge d'enseigner -- en particulier aux moniteurs et monitrices de nos Ecoles du Dimanche et du jeudi, présidents de cercles d'études bibliques - mais à tous ceux qui, en nombre sans cesse accru depuis quelque temps, recourent à la lecture méthodique de Ha Bible. Leur désir de ta mieux « connaître » les a souvent placés devant Ha nécessité de la mieux « comprendre », mais il Heur était difficile, à moins de recourir à des ouvrages importants, dont l'étude réclame un temps assez considérable et dont le prix demeure pour certains prohibitif, de recevoir les éclaircissements utiles. Le Comité de « La Bible jour après jour », publication trimestrielle dont le but, depuis sa fondation, il y a vingt ans, a toujours été de favoriser la culture biblique, a cru devoir combler cette lacune, et se charger de l'édition de cet ouvrage. Il est persuadé qu'en aidant à mieux « comprendre » certaines parties du texte biblique, ce « Lexique » aidera à l'enrichissement spirituel des lecteurs de la Bible, et qu'une intelligence plus complète de certaines réalités humaines et historiques fera mieux encore ressortir pour eux les voies admirables par lesquelles l'Esprit de Dieu a cheminé pour se révéler aux hommes. En éditant, en pleine guerre, le présent ouvrage, nous accomplissons un acte de foi. Nous avons dû surmonter bien des difficultés et ne pas reculer devant des frais très importants. Nous avons estimé que c'était notre manière à nous de « tenir tête » au déchaînement des forces matérielles. Nous ne devons rien céder de ce qui a trait à Ha formation religieuse et à Ha culture spirituelle, mais maintenir, quoiqu'il en coûte, tout ce qui doit les fortifier. Puisque ce « Lexique » peut jouer là un rôle utile, nous n'avons pas voulu remettre sa parution à des temps meilleurs. Nous attendons des membres de nos Eglises qu'ils répondent à notre foi, et que l'accueil qu'ils réserveront à cet ouvrage vienne justifier notre entreprise. Pour le Comité de « La Bible jour après jour » Le Directeur, EDMOND MERCIER.
AVANT-PROPOS
Les pages qui suivent n'ont aucune prétention à remplacer une Encyclopédie Biblique toujours indispensable à qui veut faire une étude approfondie des Livres saints. Le fait que notre Lexique n'offre aucun article sur les noms propres de la Bible (noms d'hommes ou noms géographiques) indique assez que nous n'avons envisagé qu'un but restreint. Nous nous sommes proposé simplement de donner au lecteur de la Bible quelques indications sommaires sur certains termes désignant des institutions, des coutumes ou des idées qui ne sont pas expliquées dans le texte. Nous dédierions volontiers ce petit ouvrage aux moniteurs et monitrices des écoles du dimanche et aux catéchumènes qui voudraient avoir, sur les sujets qu'il traite brièvement, des aperçus conformes à la science historique. Nous n'oserions nous exprimer ainsi si nous n'avions, en terminant, le devoir très doux d'adresser nos remerciements les plus sincères au professeur d'Hébreu et d'Ancien Testament qui nous donna jadis le goût de ces études et qui vient d'avoir la grande obligeance de lire ces pages et de nous proposer d'y apporter quelques modifications et corrections nécessaires : M. AD. LODS, Membre de l'Institut. La plupart de ces pages ont paru, en articles séparés, dans le journal mensuel La Normandie Protestante, et nous avons à remercier encore M. le pasteur E. MERCIER, rédacteur de La Bible jour après jour, qui a jugé qu'il pouvait y avoir intérêt à les présenter au public soit dans cette publication, soit en volume. CH. LELIÈVRE.
ABLUTIONS
Des ablutions rituelles, partielles ou totales, étaient prescrites par la Loi, à titre de purification, aux Israélites ayant contracté des « souillures » d'une certaine espèce. Ces ablutions n'avaient pas pour but d'écarter les malpropretés attachées au corps. Assurément, on se lavait aussi pour être propre ; mais on croyait à des souillures d'une autre nature, moins matérielles, qu'on pensait pouvoir combattre par le même procédé. Le contact d'un cadavre, d'une bête jugée impure, et aussi d'un objet sacré, était censé imprégner le corps et surtout les vêtements de quelque influence persistante et néfaste, nous dirions aujourd'hui de quelque espèce de fluide, impur ou sacré, mais également redoutable pour l'homme. Dans les deux cas, on avait affaire à une souillure et on devait se purifier par des ablutions (Le 17 : 15 ; 15 : 5 et 13 ; 22 : 6 ; Nombres 19 : 9 ; Deutéronome 23 : 11, etc. Voir Sainteté). En Israël, du temps de Jésus, les pharisiens et leurs adeptes se lavaient les mains « jusqu'au poignet » (Marc 7 : 3-9) et quelquefois tout le corps avant les repas, non pas pour qu'aucune impureté ne se mélangeât à leurs aliments, mais pour se remettre en état de justice légale, pour redevenir rituellement purs. On voit bien, par une parole célèbre d'un docteur de la Loi, nommé Rabbi Aquiba, à quel point tout souci de santé physique était absent de ces pratiques : « J'aimerais mieux, disait-il, mourir de soif que de transgresser les prescriptions sur le lavage des mains... »
C'est contre cette aberration morale que Jésus s'est élevé. Il n'a pas lutté contre des mesures d'hygiène, mais contre toute cette religion qui pensait obtenir une purification spirituelle par (les pratiques extérieures. Il n'a pas recommandé à ses disciples de ne pas se laver les mains avant les repas, mais il leur a appris que cet acte ne rendait pas « meilleurs » ceux qui l'accomplissaient. Les mains peuvent être « propres » sans que le coeur soit « pur ». Et c'est le coeur que Jésus veut purifier. Cela est admirablement exposé par le Maître lui-même dans Mt 15 : 1-20.
AGAPES
L'Epître de Jude met les chrétiens en garde contre certains personnages impies qui sont un écueil pour eux, dans leurs agapes, où ils ne songent qu'à se repaître et à faire bonne chère (Jude 1:12). Ce mot d'agapes, fréquemment employé par les écrivains chrétiens des premiers siècles, ne se rencontre, dans le Nouveau Testament, qu'au passage ci-dessus indiqué ; mais nous trouvons plusieurs allusions à l'usage qu'il désigne dans les Actes des Apôtres et les Epîtres. Le mot dérive de celui qui signifie, en grec, l'amour fraternel (agapè), et cette dérivation s'explique par le fait que l'agape était un repas pris en commun par les premiers chrétiens pour manifester l'esprit de familiale concorde qui caractérisait l'Eglise. Nous trouvons cette coutume établie à Jérusalem dès le lendemain de la première Pentecôte chrétienne (Ac 2 : 42.47). Plus tard, nous la retrouvons à Troas (Ac 20: 7). L'apôtre Paul la mentionne sous le nom de « repas du Seigneur » (1Co 11 : 20). Ce dernier passage nous apprend que l'agape était alors destinée à commémorer le dernier repas de Jésus avec ses disciples et que le pain et le vin, symboles du sacrifice du Maître, y étaient distribués aux fidèles. En d'autres termes, il s'agissait de reproduire l'événement de la Chambre Haute tout entier et l'on ne songeait pas encore que la Sainte Cène pût être distincte de l'agape. Il en résultait que l'une et l'autre étaient séparées du culte public, célébré à une heure différente. En un sens, cependant, ce repas mystique avait un caractère cultuel et l'apôtre insiste pour qu'y règnent le sérieux et la décence qui conviennent au « repas du Seigneur ». On n'y doit pas venir, comme à une table quelconque, parce qu'on a faim ou soif (1Co 11: 22,34), mais pour « annoncer la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne » (1Co 11:26). Il est certain que cette union de l'agape et de la Sainte Cène datait de la première heure, mais alors ce repas avait lieu tous les jours. Plus tard, l'Eglise étant devenue plus nombreuse et ayant dû renoncer à vivre dans une aussi étroite communauté qu'au début, les agapes ne se tinrent plus que le dimanche.
Mais des modifications plus sérieuses furent imposées à l'Eglise par l'esprit qui régnait fréquemment dans ces réunions. La fraternité qu'elles devaient manifester était trop souvent absente. Au lieu de mettre en commun des aliments fournis par tous, chacun gardait pour lui ce qu'il avait apporté, d'où résultait une choquante inégalité entre les convives (1Co 11 : 22). Sans doute les excès auxquels donnaient lieu les agapes étaient-ils répréhensibles du point de vue chrétien, mais ils n'avaient rien de commun avec ceux qui furent imputés aux Eglises par la haine des ennemis de l'Evangile. Parce que les agapes étaient des réunions intimes et qu'elles se tenaient de :finit, elles donnèrent lieu aux calomnies les plus absurdes. La malveillance transformait en repas de chair humaine la participation symbolique au corps et au sang du Christ et en pratiques de débauche le baiser fraternel que les chrétiens se donnaient au départ. - Mais il suffit de supposer que les abus signalés par Paul ne furent pas abolis par son intervention pour expliquer qu'on se vit obligé de séparer la Sainte Cène de l'agape pour l'adjoindre au culte public. Toutefois, cette séparation ne semble pas avoir eu lieu avant le II° siècle et sort du cadre de l'histoire biblique.
ALLELUIA
Voir Hallelouya.
ALLIANCE
A la base de toute pensée religieuse se trouve l'idée d'un rapport avec la divinité. Ce rapport peut être envisagé soit comme établissant un contrat entre les parties, et c'est une alliance ; soit comme réalisant une pénétration intime des êtres qui s'unissent, et c'est une communion.
En fait, ces deux notions s'amalgament étroitement dans les religions primitives et s'expriment conjointement dans le culte sacrificiel aussi bien que dans les .rapports d'homme à homme. L'alliance entre des individus ou des clans était souvent conclue par le moyen d'un repas pris en commun, parce que la participation à -une même nourriture était sensée établir entre les commensaux, par le « lien du sang », une communion intime, d'où résultait le vif sentiment des devoirs mutuels des contractants. Le sacrifice (voyez ce mot) fut de même, pendant longtemps, un partage d'aliments entre la divinité et l'adorateur : entre l'homme et son dieu s'établissait ainsi une communion et une alliance sacrées. Une conception de cette nature fut certainement à l'origine des pratiques religieuses des anciens Hébreux.
Cependant, l'idée d'une alliance entre Yahvé (voir : Dieu) et Israël, bien qu'apparaissant déjà chez les plus anciens écrivains de l'Ancien Testament (Ge 15 ; Ex 24), n'acquiert une véritable importance religieuse que dans le livre du Deutéronome (De 29), donc au temps du roi Josias. Elle repayait de temps en temps chez les prophètes (Jérémie, Ezéchiel), et ne devient vraiment dominante qu'après l'exil, dans les écrits sacerdotaux. Mais comme les écrivains de cette dernière époque ont réédité et remanié tous les récits des époques antérieures (voyez : Bible), il ne faut pas s'étonner que cette idée de l'alliance avec Dieu nous apparaisse dès les premières pages de la Genèse et s'exprime tout au long des livres historiques de l'Ancien Testament.
Yahvé traite avec Noé une alliance qui concerne tous les êtres vivant à la surface de la terre, et dont le signe est l'arc dans la nue (Ge 9 : 1-17) ; il traite avec Abraham une alliance qui concerne le futur peuple d'Israël en particulier, et dont le signe est la circoncision (voyez ce mot ; Ge 17). Et il est fait sans cesse allusion à cette alliance, surtout quand il y a lieu de la rappeler à un peuple (lui l'oublie (Le 26 : 14-17, 25:44-45 ; 2Ro 17 : 15 ; Jer 31:32, etc.).
Plusieurs prophètes se sont emparés de cette notion de l'alliance avec Dieu pour formuler, en des termes de nature à frapper l'imagination de leurs contemporains, le message d'espérance qui devait redresser un peuple vaincu et faire briller à ses yeux un avenir de rédemption. Jérémie, comme ses prédécesseurs, annonce à Israël son châtiment ; mais parce que Yahvé est miséricordieux (Jer 2 : 12), il donnera à son peuple un coeur nouveau (Jer 24 : 7 ; 32 : 39), et la nation qui ne possède ni la volonté ni le pouvoir de se convertir, Dieu lui-même la convertira : « Voici, les jours viennent, dit Yahvé, où je ferai avec la maison d'Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle, non comme l'alliance que je traitai avec leurs pères, le jour où je les saisis par la main pour les faire sortir du pays d'Egypte, alliance qu'ils ont violée quoique je fusse leur maître. Mais voici l'alliance que je ferai avec la maison d'Israël après ces jours-là : je mettrai ma loi au dedans d'eux, je l'écrirai dans leur coeur, et je serai leur Dieu et ils seront mon peuple... Et tous me connaîtront, depuis le plus petit jusqu'au plus grand » (Jer 31 : 31-34). L'alliance nouvelle se distinguera de l'alliance ancienne en ce que la communion qu'elle établira entre l'homme et son Dieu sera la vraie communion spirituelle, réalisée non plus dans une religion nationale seulement, mais dans une piété intérieure et individuelle (comparez : Esa 55 : 3 ; 59 : 21 ; Eze 16:60 ; 37 : 26-28).
Cette espérance prophétique, c'est l'Evangile qui l'a réalisée. Jésus, il est vrai, n'a pas présenté la Bonne Nouvelle au peuple sous le nom d'une alliance (les évangélistes ne mettent ce mot qu'une fois dans sa bouche, lors du dernier repas, Mt 26 : 28 ; Marc 14 : 24 ; Luc 22 : 20) : cette image d'un contrat était sans doute peu compatible, en ce qu'elle présente de juridique, avec le fait que le véritable rapport de Dieu à l'homme est pour Jésus un rapport de père à enfant. Dans la vie religieuse, il n'y a plus rien qui ne soit purement spirituel. Mais il est naturel que les premiers chrétiens, en comparant l'Evangile à la religion juive, n'aient cru mieux pouvoir exprimer leur contraste qu'en reprenant le langage de Jérémie et qu'en opposant la nouvelle à l'ancienne alliance. C'est ce que fait Paul, par exemple. dans la 2° Épître aux Corinthiens (2Co 3 : 6-1 ; comparez : Heb 8: 7-13). Cette opposition entre les deux Alliances a fait fortune dans l'Eglise et la littérature chrétienne, et elle s'offre sans, cesse à nos regards, aujourd'hui encore, puisque c'est elle qui a fourni leurs titres aux deux parties de notre Bible : les premières Bibles françaises se divisaient en « Ancienne Alliance » et « Nouvelle Alliance » (il aurait été plus exact d'écrire : livres de l'Ancienne et de la Nouvelle Alliance). Puis, le mot grec traduit par « Alliance » signifiant aussi « Testament », l'habitude fut prise d'employer ce dernier mot, malgré son caractère énigmatique.
ALPHA et OMEGA
Ces deux termes sont les noms de la première et de la dernière lettres de l'alphabet grec.. Réunis l'un à l'autre, ils expriment l'idée de commencement et de fin. Nous les trouvons employés trois fois dans le livre de l'Apocalypse (Apo 1 : 8 ; 21 : 6 ; 22 : 13), où ils sont placés dans la bouche du. Christ, qui se les applique à lui-même
« Je suis le Commencement et la Fin », « le Premier et le Dernier », « celui qui était, qui est et qui sera » (comparez : Esa 44 : 6). Ce symbole de la première et de la dernière lettre de l'alphabet fut cher aux chrétiens de l'Eglise primitive : ils l'inscrivaient sur les tombeaux, les Eglises, leurs sceaux ou leurs bagues, souvent en plaçant le signe de la croix entre les deux lettres,
AMEN
Mot hébreu ayant le sens général de stabilité mais qui n'apparaît dans la Bible qu'à titre d'interjection, pour exprimer l'approbation. - Quand David choisit Salomon pour successeur et fait part de sa décision à ses principaux conseillers, Benaja lui répond « Amen ! » (1Ro 1 : 36). - Cette interjection du langage courant devint avec le temps un mot consacré du culte juif, et on peut constater qu'il en était ainsi déjà du temps de l'auteur des Chroniques. Cet écrivain reproduit un Psaume de David qui se termine par ces mots : « Et que tout le peuple dise Amen ! Louez Yahvé » (1Ch 16 : 36 ; Ps 106 : 48). Cet usage liturgique du mot est attesté à plusieurs reprises par le livre des Psaumes.
Le mot amen a passé de l'Ancien Testament au Nouveau et de l'hébreu au grec. Jésus, qui parlait une langue apparentée à l'ancien hébreu (l'araméen , voyez ce mot), a fréquemment employé cette interjection pour donner à ses affirmations plus de solennité ou plus de force ; mais nos traducteurs des Evangiles ont généralement traduit l'hébreu amen par le français en vérité, par exemple dans Mt 6 : 5 : « Je vous le dis en vérité, ils reçoivent leur récompense. » Comme le mot amen était d'usage courant dans les synagogues et y servait aux fidèles pour marquer leur participation à la prière faite par l'officiant, il est probable que Jésus a employé ce terme dans sa forme liturgique, comme dans Mt 6 : 13, à la fin de l'Oraison Dominicale. - En tous cas l'Eglise Apostolique a recueilli ce terme liturgique (1Co 14 : 16) et l'a légué à l'Église de tous les temps et de tous les pays. La traduction française : Ainsi soit-il ! est très exacte.
Le nom propre Amen, appliqué à Jésus, ne se trouve que dans Apo 3 : 14, où il est suivi de son explication : « le témoin fidèle et véritable. »
ANATHEME
Ce terme se rencontre quatre fois dans les Epîtres de Paul et une fois dans l'Apocalypse; mais dans l'Ancien Testament grec (qu'on appelle Version des Septante), on le trouve partout où nos traductions françaises parlent de l'interdit (voir ce mot). Dans l'hébreu post-biblique le mot correspond à peu près à celui d'excommunication. Cette dernière signification est celle qu'a retenue l'Église Catholique ; l'anathème y est l'expression de l'excommunication majeure décrétée par le pape, le concile ou l'évêque. - Dans le Nouveau Testament, l'apôtre Paul déclare que personne ne peut dire de Jésus qu'il est anathème s'il parle par l'Esprit de Dieu (1Co 12 : 3) ; il dit que tous ceux qui n'aiment pas le Seigneur Jésus-Christ sont anathème (1Co 16 : 22) ; anathème encore ceux qui prêchent un autre évangile que le sien (Gal 1 : 8) ; enfin il exprime le désir d'être anathème lui-même pour le salut des Israélites, ses frères (Ro 9 : 3). Le sens que l'apôtre donne à ce mot parait ressortir du passage où il se l'applique à lui-même:
« Je souhaiterais d'être anathème moi-même, loin du Christ, en faveur de mes frères ». Etre anathème, c'est; pour lui, être eu dehors de la communion du Christ. Lorsqu'il l'applique à Jésus, en supposant que quelqu'un puisse déclarer Jésus anathème, le mot doit signifier par analogie : séparé de Dieu, maudit. On voit qu'il n'y a là aucune allusion à une excommunication ecclésiastique. - Par contre l'idée d'excommunication ne semble pas être absente de cette belle affirmation du livre de l'Apocalypse (Apo 22 : 3), déclarant que dans la Jérusalem Nouvelle, « il n'y aura plus d'anathème ».
ANCIEN TESTAMENT
ANCIENS
I. L'Ancien Testament nous donne fort peu de renseignements sur les fonctions de ces chefs de famille ou de clans (voir : Clans et Tribus) que l'on désignait le plus souvent par un terme équivalent au mot « ancien '». Leur rôle devait être analogue à celui des « cheikhs », mot arabe ayant le même sens. La tradition faisait remonter leur existence pour le moins au temps de Moïse, (Ex 3 : 18 ; 4 : 29 ; 24 : 1 ; Le 4 : 15, etc.), et leur attribuait une autorité à la fois civile et religieuse. Plus tard, au pays de Canaan, lorsque les clans en vinrent à correspondre à une répartition géographique du peuple plutôt qu'à une origine commune, les anciens sont souvent représentés comme les chefs des villes (Deutéronome 21:3; Josué 20 : 4 ; Ruth 4 : 2 ; 1Sa 11 : 3 ; Jer 26 : 17, etc.). Pendant l'exil, ils continuent à jouer un rôle dans la vie des déportés, évidemment avec la permission des autorités païennes (Eze 8 : 1 ; 14 : 1 ; 20 : 1). Après l'exil, leur rôle ne diminue pas en importance (Esdras 5 : 9 ; 6 : 7-14 ; 10 : 8). Au temps de Jésus, enfin, les anciens subsistent toujours ; nous les trouvons à la synagogue et au sanhédrin (voir ces mots).
II. Nous ne sommes guère mieux renseignés sur les « anciens » de l'Eglise primitive que sur les « anciens » d'Israël. En grec, « ancien » se disait presbutéros, mot qui a deux dérivés en français presbytre (terme savant) et prêtre (terme populaire). L'auteur du livre des Actes des Apôtres introduit brusquement dans son récit les anciens de l'église de Jérusalem au chapitre Ac 11:30, sans un mot préalable sur leur institution ou leurs fonctions. C'est à eux que Barnabas et Paul remettent, de la part des chrétiens d'Antioche, un secours destiné aux pauvres. Il était naturel que, dans une communauté juive, ce nom d'anciens, en usage à travers toute l'histoire d'Israël, parût tout indiqué pour désigner les hommes jugés dignes de diriger l'église. Les anciens réapparaissent au chapitre 15 qui raconte la Conférence de Jérusalem. Ils sont ici partout juxtaposés aux apôtres (5 fois : « Les apôtres et les anciens », Ac 15:2, 4, 6, 22, 23). Mais ici encore aucun renseignement particulier sur eux, rien qui indique qu'il s'agisse là d'une institution proprement dite et d'une fonction officielle et réglementée plutôt que de la seule autorité morale que leur confère leur ancienneté dans l'église. Au chapitre 21, lors de l'arrivée de Paul à Jérusalem, à la fin de son troisième voyage missionnaire, nous voyons encore « tous les anciens » se réunir chez Jacques (Ac 21:18) pour entendre l'apôtre des gentils. Ce sont eux qui parlent, qui conseillent et Paul se laisse convaincre par eux.
Les Actes des Apôtres ne nous parlent pas seulement des anciens de Jérusalem mais aussi de ceux des églises fondées par Paul. Celui-ci et son compagnon Barnabas nomment des anciens à Lystre, Iconium et Antioche de Pisidie (Ac 14 : 23). De passage à Milet, l'apôtre donne rendez-vous aux anciens de l'église d'Ephèse (Ac 20 : 17). Les paroles qu'il leur adresse nous montrent qu'il veut que ces hommes « veillent sur le troupeau » dont ils sont les évêques (en grec épiscopoï, c'est-à-dire surveillants ; voir le mot évêque). - Il faut cependant remarquer que dans aucune de ses épîtres, sauf celles que nous appelons les « pastorales » (1 et 2 Timothée et Tite), Paul ne mentionne les anciens : ni dans l'épître aux églises de Galatie, où il les aurait lui-même institués, ni dans l'épître aux chrétiens d'Ephèse, d'où il les aurait convoqués à Milet. Est-ce à dire qu'à l'époque ou Paul écrivait ces lettres les plus anciens membres des églises y aient joui d'une autorité morale bien naturelle, mais n'y aient pas encore exercé, de ce fait, une fonction officielle, celle-ci ne devant être instituée que plus tard ? Si tel était le cas l'auteur des Ac parlant des voyages de Paul, aurait quelque peu anticipé sur les événements, prêtant à des églises aussi peu organisées que possible les institutions plus arrêtées qu'elles ne tardèrent pas à se donner et qu'elles possédaient à l'époque où il écrivait. – Le rôle des anciens, tel qu'il nous apparaît dans les Epîtres pastorales a atteint cette forme plus arrêtée ; leurs fonctions sont mieux définies ; le simple ministère des débuts fait place à une institution. Dans 1Timothée (1Ti 4 : 14), Paul rappelle à son jeune disciple qu'il a reçu l'imposition des mains de la part des anciens. Plus loin (1Ti 5: 17), nous voyons que certains d'entre ceux-ci se vouaient à la prédication., et à l'enseignement et qu'ils méritaient, selon l'apôtre, comme ceux qui « gouvernaient bien » l'église, « un double honneur », et il n'est pas impossible qu'il s'agisse ici d'honoraires autant que° d'honneur, puisque Paul appuie son jugement sur le mot de Jésus : « l'ouvrier mérite son salaire » (Luc 10 : 7). Nous serions donc en présence d'une fonction salariée. Timothée, continue l'Apôtre, ne doit pas accueillir d'accusations contre un ancien, sauf dans le cas ou deux ou trois témoins déposeraient contre lui. Enfin, Tite (Tite 1 : 5) doit installer des anciens dans les villes de la Crète, en veillant à ce qu'ils soient « -sans reproche, maris d'une seule femme, qu'ils., aient des enfants croyants, ni indisciplinés, ni accusés de vivre dans le désordre ». - Des épîtres de Paul en général aux épîtres dites « pastorales » une évolution du rôle des anciens est donc, manifeste, et cette évolution a demandé du temps. Faut-il en conclure, avec certains savants, que bien des années se sont écoulées entre ces deux séries d'épîtres, de l'apôtre et que celui-ci par suite (comme on peut le croire pour d'autres raisons) ait vécu, évangélisé et écrit longtemps après l'époque où le livre des Actes des Apôtres arrête son récit ? Ou bien, comme d'autres le croient, les Epîtres Pastorales ne sont-elles pas de Paul ou ne sont-elles pas entièrement de sa main ? Nous n'avons pas à examiner ici ces questions. Ce qui est certain, quelle que soit la date qu'il faille assigner à ces trois lettres, c'est qu'elles nous mettent en présence d'un développement du rôle des anciens (comme, du reste, de l'organisation de l'Eglise en général) qui ne pouvait pas ne pas se produire ; mais elles nous laissent encore extrêmement loin du terme de cette évolution qui sera la constitution du sacerdoce catholique romain.
ANGES
En hébreu (langue de l'Ancien Testament) et en grec (langue du Nouveau Testament) les mots que nous traduisons par ange signifient messager et s'appliquent aussi bien aux hommes qu'à des êtres surhumains.
Dans les parties de l'Ancien Testament écrites avant l'Exil, il est extrêmement rare qu'il soit question d'anges (au pluriel); mais il est souvent fait allusion à l'Ange de Yahvé ou à l'Ange de Dieu (au singulier).
Quand on étudie les textes où apparaît cet Ange, on s'aperçoit que les anciens Israélites n'en avaient pas une représentation bien précise. Quelquefois l'Ange de Yahvé est vraiment un messager, parti d'auprès de Dieu, parlant en son nom et parlant de lui à la troisième personne ; tel est le cas dans l'histoire d'Agar, où l'Ange dit à la femme : « Dieu a entendu la voix de l'enfant » (Ge 21 : 17) Dieu est resté au séjour de sa divinité et a délégué son serviteur auprès d'Agar. Mais il est très rare qu'il y ait, dans l'esprit du narrateur, une distinction aussi nette entre Yahvé et son Ange. Il semble que les auteurs de ces vieux récits aient considéré l'Ange comme une sorte de double de la divinité, comme une manifestation de Dieu à peine distincte de Dieu lui-même. Cette curieuse conception se trahit même dans un récit comme celui que nous venons de citer, où Dieu et l'Ange semblent bien être deux, et où le lecteur attentif s'étonne cependant de constater qu'à un certain moment de la narration il n'est plus question de l'Ange, comme interlocuteur d'Agar, mais de Dieu lui-même.
Il en est très souvent de même ailleurs il semble, dans bien des récits; que l'apparition divine soit appelée indifféremment Ange ou Dieu. - Dans le livre des Juges il nous est dit que l'Ange de Yahvé vint s'asseoir sous le térébinthe d'Ophra pour annoncer à Gédéon l'aide et le secours de Dieu. Gédéon répond avec découragement que, loin de secourir son peuple, Dieu l'a visiblement abandonné. Alors, continue le narrateur, « Yahvé se tourna vers lui et lui dit : Va ! avec cette force que tu as » (Juges 6:14) ! Dieu a-t-il subitement pris la place de son messager ? Non, mais le messager est, en quelque sorte, Dieu lui-même. - Dans le livre de l'Ex nous voyons l'Ange de Yahvé apparaître à Moïse « dans une flamme de feu, au milieu d'un buisson », et, plus loin, c'est Dieu lui-même qui l'appelle du milieu du buisson ,(Exode 3 : 4). - Dans le livre de la Genèse au récit du sacrifice d'Isaac, l'Ange de Yahvé dit : « Je le jure par moi-même, - parole de Yahvé » (Ge 23 : 15-16 ; comparez Ge 16 : 13 ; 31 : 13 ; 48 : 15-16 ; Juges 2 : 1 ; 13:22 ; Esa 63 : 9). - On croyait évidemment que Yahvé était, de quelque manière, présent en son Ange, et c'est ce que l'on voulait exprimer en disant que le nom de Yahvé résidait en lui (Ex 23 : 21 ; voir le mot nom).
Le développement de cette conception ne se lit pas dans le sens d'une identification toujours plus grande de Dieu et de son Ange pour aboutir à l'idée que Dieu lui-même et Dieu seul se manifeste directement à l'homme ; elle se fit au contraire dans le sens d'une distinction toujours plus nette entre Yahvé et son messager. Et il eut des raisons pour cela. Les Hébreux primitifs, en effet,comme les Israélites des temps postérieurs, avaient un très vif sentiment que Dieu était invisible, inabordable et que sa proximité ou sa présence réelle consumerait comme un feu les hommes pécheurs
il devait paraître moins inadmissible et moins dangereux d'entrer en contact avec son Ange, même si quelque chose de la divinité résidait en lui. Et c'est pourquoi l'on a pu émettre l'hypothèse que, dans plusieurs des récits que nous avons cités, la tradition primitive faisait intervenir Yahvé en personne et Yahvé seul: l'Ange aurait été introduit plus tard dans le récit pour le rendre moins choquant, et le correcteur, par négligence, aurait laissé subsister par endroits la mention de Dieu sans lui substituer celle de l'Ange.
Une seconde raison peut encore expliquer cette substitution de l'Ange à Dieu. On crut pendant assez longtemps, après la conquête de Canaan, que Dieu résidait, comme à l'origine, au mont Sinaï. C'est, de là, pensait-on, qu'il pouvait, à l'occasion, venir au secours de son peuple comme il l'avait fait aux jours fameux de Débora (Juges 5 : 4). Mais il était naturel, dans les idées de ce temps, de penser que pour l'ordinaire des rapports entre Yahvé et Israël un messager devait suffire à ce Dieu lointain.
Ces deux raisons qui tendaient à bannir la pensée d'une manifestation directe de Dieu à son peuple ont trouvé leur expression dans une tradition relative aux ordres que Moïse reçut de Yahvé au Sinaï : « Yahvé dit à Moïse : Va, pars d'ici, toi et le peuple que tu as fait sortir du pays d'Egypte ; monte vers le pays que j'ai juré de donner à Abraham, à Isaac et à Jacob... J'enverrai devant toi un ange, ...mais je ne monterai point au milieu de toi, de peur que je ne te consume, car tu es un peuple au cou raide » (Ex 33 : 1-3).
Parmi les vieux récits de la Bible, trois seulement, plus récents d'ailleurs que les autres, parlent d'anges au pluriel : celui du songe de Jacob (Ge 28), où « les anges de Dieu » montent et descendent sur l'échelle mystérieuse (ce qui semble impliquer qu'on ne les conçoit pas comme des êtres ailés) ; celui, probablement écourté, qui mentionne, sans aucun détail, une rencontre de Jacob avec « des anges de Dieu » lors de son retour en Canaan (Ge 33 : 1) ; enfin celui qui raconte la destruction de Sodome (Ge 18-19), où les anges sont tantôt deux, tantôt trois, sont souvent appelés des « hommes » et disparaissent parfois, comme l'Ange unique, pour faire place à Yahvé seul.
Le développement de la conception primitive s'est donc accompli dans le sens de la pluralité d'abord, puis de la multiplicité des anges. Cela était d'autant plus naturel que les Heb depuis les temps les plus anciens, croyaient à l'existence de beaucoup d'êtres surhumains qui n'étaient pas, à l'origine, des anges, parce que ce nom implique une sujétion absolue à Dieu, mais qui furent, dans la suite, incorporés les uns après les autres dans les rangs des serviteurs célestes de la divinité. Voici quelques-uns de ces êtres surnaturels, qui, selon l'âge des récits où ils paraissent, deviendront ou sont déjà devenus, dans la pensée de l'époque, des anges de Dieu : les « fils de Dieu », êtres divins assurément, le nom l'implique, mais qui (dans Ge 6 : 1-3) ne nous sont pas présentés comme accomplissant la volonté de Dieu; - les « séraphins » (voyez ce mot) qui jouent, dans le seul passage où ils soient mentionnés (Esa 6), le rôle de serviteurs de Yahvé ; - les « chérubins » (voir ce mot) qui sont les gardiens des choses saintes telles que l'arbre de vie (Ge 3 : 24) et l'arche (1Ro 6 : 23-28) ; - dans la vision du prophète Michée (1Ro 22 : 19), Yahvé, assis sur son trône, est entouré de « toute l'Armée des cieux » (voir Dieu des Armées et Ciel) ; l'un des êtres qui la composent se charge de devenir pour Achab un esprit séducteur (comparez avec Satan et voyez ce mot) ; - dans Josué (Jos 5 : 13-15) cette Armée de Dieu est sous les ordres d'un « capitaine » ; - il est probable que les « chars » et les « chevaux de feu », mentionnés dans 2Ro 2 : 12; 6 : 17, étaient conçus comme appartenant à cette Armée céleste ; - il est également question d'un messager de mort, « le Destructeur », qui peut remplacer Dieu lorsqu'il s'agit pour celui-ci de châtier des coupables (Ex 12 : 23 ; 2Sa 24 : 16-17) et qui parfois n'est autre que cet Ange de Yahvé dont nous avons, parlé (2Ro 19 : 35).
Mais c'est surtout à l'époque de l'Exil et dans les temps qui suivirent que les. Israélites firent aux anges une place considérable dans leurs croyances, soit. sous l'influence d'autres religions, comme celle des Perses, avec lesquelles les juifs étaient entrés en contact, soit par le développement d'une tendance naturelle à donner à Dieu un caractère de plus en plus transcendant.
On voit alors disparaître définitivement l'idée que Dieu peut se manifester à l'homme sous une forme visible (comme dans Ex 24 : 10 ; 33:11 ; Ge 32 : 20). Désormais le terme Ange de Yahvé désigne un être complètement distinct de Dieu, comme on le constate, par exemple, dans le récit de la vision de Zac où l'Ange parle à Yahvé et où Yahvé lui répond (Zac 1 : 12-13). Et il devient de plus en plus rare, d'ailleurs, qu'on entende parler d'un être particulier auquel seul appartienne ce nom d'Ange de Yahvé. On parle des anges (au pluriel) : « Bénissez Yahvé, vous ses anges, héros vaillants qui exécutez ses ordres (Psaume 103 : 20).
Ce n'est plus directement, mais par l'intermédiaire de ces anges que Dieu communique avec l'homme. Ezekiel il est vrai, aura encore tantôt une révélation directe (Eze 44 : 2), tantôt la visite d'un ange (Eze 40 : 3) ; mais Zacharie et Daniel n'entendront plus la voie de Dieu que par la bouche de ses messagers. Les mêmes anges qui parlent à l'homme de la part de Dieu, pourront, à l'occasion parler à Dieu en faveur de l'homme malheureux ou coupable: « S'il se trouve pour lui un ange intercesseur, - l'un d'entre les mille qui indiquent à l'homme le chemin qu'il doit suivre, - alors Dieu a compassion de lui et il dit à l'ange : délivre-le, afin qu'il ne descende pas dans la fosse » (Job 33 : 23).
Les anges sont innombrables (Daniel ï : 10) et sont répartis suivant une hiérarchie (Daniel 10 : 13,21 ; 12 : 1). Leurs chefs seront appelés, plus tard, en langue grecque, les archanges (1Th 4 : 16 ; Jude 1: 9). Michel et Gabriel sont les noms de deux d'entre eux (Daniel 10 : 13 et 21 ; 12 : 1). La théologie postérieure en comptera sept et donnera leurs noms (Raphaël, Uriel, etc.). Il y a des anges qui sont les protecteurs de certains peuples (Daniel 4 : 10 ; 10 : 12-13). Leur aspect est éblouissant et leur voix est semblable au tonnerre (Daniel 10 : 5 et suivants).
Il ne semble pas que la croyance aux anges ait' été partout accueillie avec une égale faveur en Israël. Plusieurs des livres de l'Ancien Testament n'y font aucune allusion. A l'époque de Jésus, c'était un sujet de controverse. Les Pharisiens croyaient aux anges (ainsi que la masse du peuple) : Les Sadducéens n'y croyaient pas (Ac 23 : 8 ; voyez Sadducéens).
Jésus n'a pas combattu la croyance populaire, mais il n'a pas prononcé une seule parole exprimant la pensée que les anges puissent intervenir dans la vie actuelle des hommes. Il n'en parle que pour dire ce qu'ils sont dans le monde supérieur où ils résident : ils ne se marient pas (Mt 22 : 30) ; ils ne savent pas toutes choses (Mt 24: 36) ; ils se réjouissent de la repentante des pécheurs (Luc 15 : 10) ; ils accompagneront le Fils de l'Homme à son retour glorieux (Mt 16: 27). Nous ne voyons jamais Jésus encourager l'idée, très populaire à cette époque, que les anges sont les intermédiaires prédestinés des révélations de Dieu. Il la combat implicitement, au contraire, en se présentant lui-même comme le seul révélateur (Matthieu 11 : 27), en annonçant à ses disciples que lui-même sera toujours avec eux (Mat 28 : 20) pour les instruire (Luc 21 : 15), ou en leur promettant les inspirations de l'Esprit saint (Jean, 14 : 17,26 ; 15 : 26). L'apôtre Paul met ses lecteurs en garde contre le culte que certains rendaient aux anges (Colossiens 2 : 18).
ANNEE, MOIS ET SEMAINE
Faute de connaissances astronomiques précises, les Anciens ne pouvaient établir leur calendrier sans d'assez graves inexactitudes. Aucune des méthodes imaginées par eux ne réussissait à opérer une division du temps qui ne laissât subsister quelque vide dans le cours de l'année. Les Egyptiens, par exemple, prenaient pour base de leurs calculs le jour. Ils en comptaient, comme nous, 365 par an, et divisaient l'année en 12 mois de 30 jours chacun, sans tenir aucun compte des lunaisons. Mais il leur restait ainsi 5 jours non incorporés aux mois. Le calendrier mahométan prenait pour point de départ le mois lunaire et aboutissait ainsi à une année de 354 ou 355 jours, trop courte de 10 à 11 jours. Chez les anciens Heb c'est l'année que l'on considérait d'abord, une année dont la longueur n'était pas rigoureusement déterminée comme celle des Egyptiens, mais que délimitait suffisamment, en pratique, le retour régulier des saisons. Les 12 mois étaient, comme plus tard chez les Mahométans, des trois lunaires, mais se succédaient sans que l'on se souciât de faire coïncider le début de l'année avec le premier jour d'un premier mois. En un mot, les années d'une part, les mois d'autre part, suivaient leurs cours sans qu'on essayât de des synchroniser. Et l'inconvénient de ce système était la nécessité d'intercaler, de temps en temps, un treizième mois dans l'année.
L'année israélite, dans les temps anciens, finissait en automne. C'était une année agricole. Et la clôture d'une période de vie agricole était, très naturellement, la rentrée des dernières récoltes. Le cycle de toutes les fêtes de l'année s'achevait par la fête des récoltes (Ex 23 : 16 ; 33 : 22 ; voir : Fêtes). La crise de l'Exil, sur ce point comme sur tant d'autres, introduisit en Israël de nouvelles habitudes. Il était bien tentant pour les déportés d'adopter le calendrier plus savant et mieux équilibré des Babyloniens. C'est ainsi que le commencement de l'année fut transféré de l'automne au printemps et en vint à coïncider avec l'époque de la Pâque (Exode 12 :2, est un texte post-exilique ; voir : Fêtes). Plus tard, sous la domination des Séleucides et sous l'influence de leur calendrier, on revint, dans la vie civile tout au moins, à l'année qui commence en automne, tout en conservant une année religieuse commençant au printemps.
Le mois, étant le mois lunaire, était tantôt de 29, tantôt de 30 jours. Cette longueur variable ne dépendait d'aucune règle permettant de déterminer à l'avance si un mois quelconque de l'avenir aurait 29 ou 30 jours. Le mois commençait, empiriquement, au moment où la nouvelle lune était visible dans le ciel.
Les noms des mois hébreux ont varié au cours de l'histoire. Les plus anciens de ces noms, conservés dans l'Ancien Testament sont : 1° Abib, le mois de la maturation des épis de froment (Exode 13 : 4 ; 2.1 : 15 : 34 : 18 ; Deutéronome 16 : 1) : la version Segond ne reproduit pas ce nom, mais le traduit a mois des épis » ; 2° Ziv (1Ro 6 :1,37), le mois de la splendeur, le mois des fleurs ; 3° Elhanim (1Ro 8 : 2), le mois où les ruisseaux se remettent à couler ; 4° Bul (1Ro 6 : 38 ), mois de la pluie. Ces noms. ainsi que les huit autres, que nous ne connaissons pas, changèrent avec l'Exil et furent remplacés par les nombres ordinaux correspondant à la place qu'ils occupaient dans le nouveau calendrier commençant au printemps : Abib devint le premier mois, Ziv le second, Ethanim le septième, But le huitième, etc. Plus tard les Juifs prirent l'habitude de désigner les mois non plus par leurs numéros d'ordre mais par leurs noms babyloniens : ceux qui sont mentionnés dans l'Ancien Testament sont Nisan (le 1°), Sivan (le 3°), Eboul (le 6°), Kislev (le 9°), Tébet (le 10°), Chebat (le 11°) et Adar (le 12°).
Pour ce qui concerne la semaine, les Hébreux commencèrent vraisemblablement par suivre la méthode babylonienne qui consistait à diviser les 28 premiers jours du mois lunaire en quatre périodes finissant les septièmes, quatorzièmes, ving-et-unièmes et vingt-huitièmes jours, la première semaine du mois commençant toujours à la nouvelle lune, ce qui avait l'inconvénient de laisser, chaque mois, un ou deux jours hors de compte. Mais on en vint vite, peut-être à cause de ce désavantage, à abandonner cet étroit rapport de la semaine et du mois. Les semaines se suivirent désormais sans ces intervalles illogiques, mais, par suite aussi, en dehors de toute considération d'ordre astronomique. Les jours de la semaine ne semblent pas avoir été distingués les uns des autres par des noms. L'Ancien Testament, du moins, ne nous en rapporte qu'un, celui du septième, le jour du repos, le Sabbat (voyez ce mot). On se contentait sans doute de désigner le jour dont on voulait parler en indiquant la place qu'il occupait dans la semaine, « le troisième, le quatrième jour de la semaine ». Le Nouveau Testament nous donne en outre le nom du sixième jour : le jour de « la préparation » (Mt 27 : 62 ; Marc 13 : 42 ; Luc 23 . 54 ; Jean 19 : 42) ou « l'avant-sabbat » (Marc 15 : 42).
ANTICHRIST
Ce terme ne se trouve dans la Bible qu'aux épîtres de Jean (1Jn 2 : 18 ; 2 : 22 ; 4 : 3 ; 2Jn 1:7) ; mais l'idée qu'il représente se rencontre beaucoup plus souvent. L'anti-Christ désigne, comme l'indique la composition du mot, l'adversaire du Christ, - en fait, le dernier et le grand ennemi du Messie (voyez : Oint). Cette figure de l'Antichrist appartient à cette littérature spéciale qu'on a appelée la littérature apocalyptique et qui date de la dernière époque de l'histoire d'Israël. On en trouve l'origine dans les livres les plus récents de l'Ancien Testament et déjà dans ces passages des Prophètes où nous voyons apparaître la préoccupation des choses finales. L'ère du Messie devait survenir à la fin de l'ère présente, à la fin des temps, et inaugurer une économie nouvelle. Le Messie serait l'agent providentiel de ce renouvellement de toutes choses. Une dernière lutte, plus grande et plus terrible . que toutes les précédentes, donnerait la victoire au bien sur le mal, au Christ sur... l'Antichrist. Comme la cause de Dieu était personnifiée dans le Messie, l'armée des ennemis de Dieu devait avoir aussi, dans la pensée du temps, un chef diabolique : l'AntiChrist. Cette figure de l'antichrist ne s'est dessinée que petit à petit dans la littérature apocalyptique. Nous en trouvons quelques éléments au livre du prophète Ezéchiel (Eze 38; Eze 39) sous les traits du roi Gog, et au livre de Daniel (Dan 11) sous les traits du roi persécuteur, Antiochus. A l'époque apostolique, il empruntera bien des traits à la figure dé Néron. A chaque période où des événements catastrophiques faisaient facilement penser à la fin des temps, celui que l'on considérait comme l'auteur responsable des malheurs de l'époque devenait l'Adversaire maudit, l'Antichrist. Il est probable que dans le livre de l'Apocalypse, le chiffre 666, désigne Néron-César.
Jésus, lui-même, ne parle pas de l'Antichrist, mais il semble avoir pensé que les derniers temps de l'économie actuelle seraient marqués par une recrudescence du mal, sous l'aspect d'une puissance séductrice contre laquelle ses
disciples même devront se tenir en garde. Il parle de faux-messies qui chercheront à les séduire (Marc 13 : 6,22).
Dans les épîtres de Jean, où apparaît le mot même d'antichrists, ces antichrists sont nombreux et se confondent avec les méchants en général ou tout au moins avec ceux qui se constituent chefs des ennemis de Dieu (1Jn 2:18).
APOTRE
Ce mot provient du grec apostolos, dont le radical apparaît sans déformation dans l'adjectif apostolique. Apôtre signifie messager ou, mieux encore, délégué, missionnaire, c'est-à-dire personnage muni de toute l'autorité de celui qui l'envoie. - La tradition la plus ancienne semble n'avoir donné ce titre d'apôtre aux disciples qu'à l'occasion de la mission spéciale que Jésus leur confia quand il les envoya, deux à deux, pour prêcher ta repentance et guérir les malades. (Marc 3 : 13-19 ; 6 7-13, 30). Mais cette désignation des Douze devint bientôt habituelle et servit à les distinguer des autres disciples. Luc l'emploie déjà de ta sorte (Luc 17:5 ; 24 : 10 ; Ac 1 : 2 ; etc.). Le Nouveau Testament contient quatre listes des Apôtres : Mat 10 : 2 ; Marc 3 16 ; Luc 6 : 14 ; Ac 1 : 13, cette dernière omettant naturellement Judas Iscariot.
Ces listes ne contiennent pas les douze noms dans le même ordre, mais elles des groupent invariablement en séries de quatre, dans chacune desquelles ce sont les mêmes apôtres qui figurent,
exactement comme s'il y avait eu, en fait, trois escouades de disciples. D, plus, dans toutes ces listes, chaque groupe de quatre noms débute invariablement par le même, exactement comme si chaque escouade avait eu, en fait, son chef désigné ; Pierre, pour la première ; Philippe, pour la seconde, et Jacques, fils d'Alphée, pour la troisième. Ce nombre de douze apôtres paraît avoir eu une signification symbolique et avoir correspondu, dans la pensée de Jésus, aux douze tribus israélites (Mt 19 28). En un sens absolu ce nombre était limitatif. Il fallut le compléter, après la disparition de Judas (Ac 1 : 15-26), mais on comprend qu'on n'envisageât pas la possibilité de le dépasser en instituant un treizième, un quatorzième apôtre. C'est probablement là une des raisons (il y en avait d'autres) pour lesquelles les prétentions de Paul à l'apostolat (Galates 1 : 1), soulevèrent dans certains milieux de violentes oppositions (1Co 9 : 2). Dans ce sens absolu du mot, le titre d'apôtre était réservé aux hommes qui avaient partagé la vie de Jésus durant son ministère et qui étaient les témoins de sa résurrection (Ac 1 : 21-22). - Cependant le mot apostolos appartenait au langage courant et y conservait sa signification habituelle de messager, délégué ou missionnaire. Il arrivait donc qu'on l'employât, même dans l'Eglise, avec son sens ordinaire et ce fut le cas, par exemple, quand les chrétiens de l'Eglise d'Antioche choisirent, parmi leurs « prophètes et docteurs », Barnabas et Paul pour leur confier une mission d'évangélisation chez les païens (Ac 13: 2-3). Ils étaient les délégués, les apôtres de cette communauté entreprenante. Aussi Lue n'hésite-t-il pas, en racontant leur apostolat, à leur donner ce titre, généralement réservé aux Douze (Ac 14:4 ; 14: 14). Et on sait que Paul a fait de même en parlant de ses compagnons d'évangélisation. Il écrit ses deux lettres aux Thessaloniciens en sort propre nom et au nom de Silvain et de Timothée ; et c'est de lui-même et de ses deux compagnons qu'il dit : « Etant apôtre du Christ, nous aurions pu nous imposer à vous ; or, au contraire, nous avons été pleins de douceur parmi vous (1Th 2 : 6-7).
Dans une autre épître il parle d'Andronicus et de Junias, ses parents et ses compagnons de captivité, et il écrit « Ils sont distingués entre les apôtres et même ont été en Christ avant moi (Romains 16 : 7). - Quoi d'étonnant si Paul a revendiqué pour lui-même le titre apostolique, étant donné, en outre, qu'il remplissait une des conditions essentielles demandées à ceux qui faisaient parti du cercle restreint des Douze ? N'avait-il pas été témoin, lui aussi, de la résurrection du Seigneur (1Co 9 : 1) ? - L'autorité impliquée par le titre d'apôtre n'est nulle part définie formellement dans le Nouveau Testament. Deux exemples nous permettent cependant d'en apprécier l'étendue et la signification. Lors de l'institution des sept diacres nous voyons les apôtres convoquer « une réunion de
tous les disciples » chargés d'élire des hommes « pleins d'Esprit saint, sages et considérés a ; l'élection faite, c'est aux apôtres que revient la charge de les consacrer solennellement par l'imposition des mains (Ac 6 : 1-6). Plus tard, lorsque fut soulevée la grave question de savoir si les païens convertis devaient être astreints à observer toute la loi rituelle des Juifs, le débat fut porté devant « les Apôtres et les Anciens (voir ce mot) » de Jérusalem, qui formulèrent leur décision dans une lettre dont le ton est celui d'une fraternelle recommandation plutôt que d'un ordre formel, et dont l'autorité est toute morale (Ac 15). Dans les Eglises fondées par Paul, l'apôtre exerce une réelle autorité en nommant les Anciens, en communiquant le don de l'Esprit, en tranchant toutes sortes de questions relatives tant à la vie privée des chrétiens qu'à la vie sociale de la communauté et à son culte (Actes 14 : 23 ; 19 : 6 ; 1Corinthiens chapitres 6, 7, 8, 10, 11, 12, 14 ; etc., etc.). - Les rapports de l'apôtre Paul avec les Douze sont empreints à la fois d'un sens très net de son indépendance et du désir le plus fraternel d'agir en communauté d'esprit avec eux.
ARCHANGES
voir Anges.
ARAMEEN
Ce nom désigne un peuple de l'antiquité, voisin d'Israël, mais il s'applique aussi à la langue de ce peuple. C'est cette langue qui mous intéresse surtout ici. Il faut cependant savoir que les Araméens (appelés Syriens par les Grecs), sans avoir jamais formé,, au sens politique du mot, une nation indépendante, furent -très nombreux et firent prédominer leur langue dans l'immense région de la Syrie et de la Mésopotamie pendant toute la longue période qui s'étend d'Abraham à la conquête grecque. Laban (Genèse 25 : 20 ; 31 : 20-24) est qualifié d'Araméen ; Jacob et sa postérité, c'est-à-dire tout Israël, nous est présenté ailleurs comme d'origine araméenne (Deutéronome 26 : 5) ; l'armée de Nébucadnetsar est appelée « l'armée des Chaldéens et des Araméens » (Jer 35: 11). La langue araméenne, apparentée à la langue hébraïque, était parlée dans toute l'étendue de la région que nous avons indiquée. Elle était très répandue en Babylonie et en Assyrie, la langue assyrienne étant surtout, sans doute, celle des autorités politiques, et elle s'étendit graduellement à des pays qui avaient leur langue propre. Les relations continuelles d'Israël avec leurs voisins araméens eurent pour résultat d'introduire de bonne heure des termes araméens dans la langue hébraïque. Cette influence grandissante est très sensible, par exemple, dans le langage de l'Ecclésiaste. Mais le fait le plus intéressant à retenir, c'est que des portions entières de l'Ancien Testament sont écrites en Araméen (Esdras 4 : 8-6,18; 7:12-26 ; Daniel 2 : 4 à Dan 7 : 28).
Ces livres semblent avoir été composés à cette époque de transition où l'araméen se substituait peu à peu à l'hébreu comme langue populaire et où la langue des pères devenait graduelle
ment, sinon une langue morte, du moins la langue sacrée réservée à l'usage religieux. Au temps de Jésus cette évolution était depuis longtemps parvenue à son terme. Jésus et ses disciples, comme tous les Juifs de Palestine, ne parlaient que l'araméen, qui fut ainsi la langue de la première prédication chrétienne.
Notons enfin, pour terminer, la longue vie de cette langue à la !fois dans le dialecte palestinien et dans le dialecte syriaque ». Au V° siècle, les chrétiens de Palestine traduisaient encore l'Evangile en araméen et ce ne furent que les conquêtes de l'Islamisme qui réussirent par la suite à reléguer la langue, sous l'une ou l'autre de ses formes, dans des cantons éloignés de son influence. Partout ailleurs la langue arabe avait été victorieuse. Il subsiste encore aujourd'hui quelques endroits où l'araméen, sous une forme moderne, s'est conservé, par exemple en Perse, ans la province d'Aderbaïdjan, aux confins de l'Arménie. Là se trouve Ourmiah, où l'oeuvre des missions américaines a été si efficace, et où elle a eu, entre autres résultats, celui de refaire, de la vieille langue araméenne modernisée, une langue littéraire.
ARCHE
L'arche était un coffre sacré pour lequel les anciens Hébreux avaient la plus grande vénération. Les textes les plus antiques nous apprennent que l'arche accompagnait le peuple à la guerre et qu'elle était, dans la bataille, le signe de la présence de Yahvé au milieu des siens. Sans l'arche, Israël était vaincu d'avance (Nom 14: 44).
Battu par les Philistins à Aphek, le peuple attribua sa défaite à l'absence de l'objet sacré (1Sa 4 . 3-4). En temps de paix l'arche était conservée dans un des sanctuaires du pays, à Béthel (Juges 20 : 27), à Silo (1Sa 4 : 3), à BethSchémesch (1Sa 6 : 13-16), à KirjathJéarim (1Sa 7: 1) et enfin à Jérusalem (2Sa 6).
La seule explication qui nous soit donnée du caractère sacré de l'arche date de l'époque où, sous l'influence des prophètes, on cherchait à spiritualiser les croyances ancestrales. On enseigna alors que l'arche tenait sa sainteté des tables de la Loi qui y étaient conservées (De 10 : 5). Mais les vieux textes ignorent cette conception ; pour eux l'arche n'est pas « l'arche de l'alliance » ou « l'arche du témoignage », c'est-à-dire l'arche de la Loi, mais simplement « l'arche de Dieu ». Nous savons aujourd'hui que les idées religieuses des Israélites primitifs se rapprochaient beaucoup de ce que nous appelons le fétichisme l'objet sacré était vénéré comme l'habitation de la divinité. On lui parlait comme on aurait parlé à la divinité même (No 10: 35-36). L'idée primitive était donc que Yahvé était dans. l'arche. On comprend dès lors la croyance que l'arche peut accomplir des miracles comme elle le fait au pays des Philistins (1Sa 5), punir les téméraires qui lui manquent de respect (1Sa 6 : 19-21 ; 2Sa 6 : 6-11) et diriger à sa volonté l'attelage qui la transporte (1Sa 6 : 7-12).
Il est à remarquer que l'arche disparut assez tôt du culte israélite et sans que nous sachions quand, comment et pourquoi. Nous savons seulement qu'elle n'existait plus au temps de Jérémie, dans :le livre duquel nous trouvons ces mots: « En ces jours-là, dit Yahvé, on ne parlera plus de l'arche de l'Alliance de Yahvé ; elle ne viendra plus à la pensée ; on ne se la rappellera plus ; on ne s'apercevra plus de son absence et l'on n'en fera point une autre » (Jer 3 : 16). Peut-on conclure de ces mots qu'à l'époque de Jérémie la disparition de l'arche ne remontait pas à un très lointain passé puisqu'on la regrettait encore ? Ce qui est certain, c'est que la dernière mention de l'arche dans les vieux récits historiques ne nous mène qu'aux jours de Salomon. Il est probable que l'arche perdit peu à peu de son prestige, à mesure que le développement des idées prophétiques battait en brèche les vieilles superstitions païennes et que le jour vint, - sans que nous puissions dire quand, - où, la vieille arche tombant en ruines, on ne songea plus à la remplacer par une arche neuve.
ARÉOPAGE
Ce terme désigne à la fois une colline d'Athènes et une assemblée (sénat ou tribunal) qui siégeait sur une terrasse naturelle encadrée dans les rocs de la colline. Cette assemblée a exercé, suivant les époques, une autorité plus ou moins grande et plus ou moins étendue, sur la cité athénienne. A l'époque où l'apôtre Paul comparut devant ce tribunal, l'Aréopage paraît avoir eu la charge d'assurer l'ordre en matière religieuse. Paul y comparut parce qu'il s'agissait pour les chefs de la cité de savoir si son enseignement sur les places publiques devait être considéré comme l'introduction d'une religion nouvelle, et par suite poursuivi et châtié conformément à la loi. L'apôtre se défendit sinon dans les termes mêmes qui nous sont rapportés au ch. 17 du livre des Actes des apôtres, Ac 17 du moins dans l'esprit que mous révèle ce résumé de son discours. Nous sommes donc portés à penser que certaines de ses paroles étaient parfaitement de nature à éveiller des sympathies chez ses juges ; mais telle était cependant l'éducation religieuse et philosophique de ceux-ci que le seul mot de a résurrection » leur fit apparaître l'accusé comme indigne de leur attention et qu'ils le renvoyèrent dédaigneusement sans attendre la fin de son discours.
ARMÉES (Dieu des)
ou Yahvé, Dieu des armées; ou Yahvé des armées. - Ces noms n'apparaissent nulle part dans les six premiers livres de la Bible et assez rarement dans les livres postérieurs à l'exil. Ils sont particulièrement fréquents dans le langage de certains prophètes. Ils se trouvent 282 fois dans l'Ancien Testament, 246 fois chez les prophètes en général, 55 fois chez le 1° Esaïe, 81 fois chez Jérémie, jamais chez Ezekiel Joël, Abdias. Ces appellations ne proviennent donc pas des origines israélites et ne paraissent pas s'être généralisées en dehors de certains cercles prophétiques.
Quelles sont les Armées dont Yahvé était considéré comme le Chef par ceux qui employaient ces noms ? S'agissait-il des guerriers israélites, ou des phalanges célestes ? et, dans ce dernier cas, l'Armée des cieux désignait-elle la multitude des astres (comme dans Deutéronome 4 : 19 ; 17 : 3) ou la multitude des anges (comme dans 1Ro 22 : 19)
Il semble bien qu'à l'origine le mot faisait allusion à l'armée d'Israël dont il est certain qu'on attribuait la conduite à Yahvé lui-même (Ex 7 : 4). David dit à Goliath : « Je marche contre toi au nom de Yahvé des armées, le Dieu de l'armée d'Israël » (1Sa 17 : 45). On ;sait aussi que l'arche (voyez ce mot) était pour Israël le symbole de la présence de Dieu à la tête des troupes en combat : on invoquait devant l'arche le nom de Yahvé des armées (2Sa 6:2).
Cependant cette acception du nom semble être inconnue des prophètes, même les plus anciens. La raison d'être du mouvement prophétique ayant été de réagir à tout prix contre les conceptions païennes de la religion populaire, il paraît évident qu'Esaïe, par exemple, n'aurait pas donné à Dieu un nom qui pouvait rappeler les tendances fétichistes du culte de l'arche. Il est donc probable que ce nom de « Dieu des Armées » n'a pu passer dans le langage des prophètes que parce qu'il avait déjà perdu sa signification primitive et qu'il désignait désormais l'armée céleste. Il y a, sans doute, une confirmation de cette opinion dans le fait que le nom « Yahvé des armées » est souvent employé , par les prophètes comme synonyme du a Dieu Saint » ou du a Saint d'Israël » a Yahvé des armées sera élevé par le jugement et le Dieu Saint sera sanctifié par la justice » (Esa 5 : 16). « Ils ont dédaigné la loi de Yahvé des armées et ils ont méprisé la parole du Saint d'lsraël » (Esa 5: 24). Le nom semble bien impliquer la notion de transcendance, l'élévation de Dieu par-dessus tout ce qui est terrestre et humain. Il désigne le Dieu très-haut, le Dieu du Ciel. Les armées auxquelles il fait allusion seraient donc les armées célestes, sans qu'il soit possible de dire si, dans la pensée des prophètes, ces armées étaient celles des anges ou celles des astres (Voyez le mot : Ciel). Peut-être faut-il penser que l'on passa insensiblement de la première de ces acceptions du mot à la seconde.
ASILE
Chez un grand nombre de peuples de l'antiquité comme encore aujourd'hui chez certaines peuplades d'Asie, d'Afrique, d'Amérique et d'Océanie, il existait des lieux de refuge où un homme poursuivi par ses ennemis ou ses justiciers pouvait, â certaines conditions, trouver la sécurité : en cet asile personne n'avait le droit de porter la main sur lui. Cette institution paraît avoir été particulièrement fréquente et avoir pris une importance spéciale dans les pays où régnait le droit de vengeance personnelle ou familiale (voir le mot : vengeance). L'asile était généralement un sanctuaire.
Les plus anciennes lois d'Israël font allusion au droit d'asile. En principe, un meurtrier doit toujours subir la peine capitale. Si l'homicide est prémédité, aucune considération ne sauvera l'assassin du châtiment qu'il aura mérité : on l'arrachera même à l'autel auprès duquel il aura pu chercher asile et on l'exécutera ; mais si l'homicide est accidentel, son auteur sera protégé par le sanctuaire où il se sera réfugié (Ex 21 : 12-14). L'histoire des premiers rois d'Israël renferme deux traits relatifs à cette institution. Lorsque Salomon monta sur le trône, Adonija, son frère aîné, qui aspirait à la royauté, eut peur du nouveau roi et « il saisit les cornes de l'autel » (voyez le mot : autel). Salomon lui ayant promis la vie sauve à condition qu'il se montrât honnête homme, le fugitif quitta le sanctuaire sans être molesté (1Ro 1 : 5-53). Mais on sait qu'il fut, plus tard, exécuté sur l'ordre de Salomon parce qu'il avait demandé à épouser Abishag, la Sunamite. A sa mère, qui lui présentait cette requête, le roi avait répondu : « Qu'attends-tu pour réclamer aussi la royauté pour ton protégé ? » Joab, chef des armées de David, qui avait suivi le parti d'Adonija, prit peur à son tour, « se réfugia vers la tente de Yahvé et saisit les cornes de l'autel ». Salomon ne lui fit pas grâce, mais ordonna qu'il fût tué dans le sanctuaire même (1Ro 2 13-35).
A l'époque où le culte fut centralisé à Jérusalem (sous le roi Josias, en 621), les lieux d'asile disparurent avec les sanctuaires provinciaux. On les remplaça par des « cités de refuge » (De 4 : 41-43 ; 19 : 1-13). Le principe du « refuge » est très nettement exprimé dans ces passages. « Un homme va couper du bois dans la forêt avec un autre homme ; la hache en main, il s'élance pour abattre un arbre ; le fer échappe du manche, atteint le compagnon de cet homme et lui donne la mort. Alors il s'enfuira dans l'une de ces villes pour sauver sa vie, de peur que le vengeur du sang, échauffé par la colère et poursuivant le meurtrier, ne finisse par l'atteindre s'il y avait à faire beaucoup de chemin, et ne frappe mortellement celui qui ne mérite pas la mort, puisqu'il n'était pas auparavant l'ennemi de son prochain... Mais si un homme s'enfuit dans une de ces villes après avoir dressé des embûches à son prochain par inimitié contre lui, après l'avoir attaqué et frappé de manière à causer sa mort, les anciens de sa ville l'enverront saisir et le livreront entre les mains du vengeur du sang, afin qu'il meure » (De 19 : 5-6, 11-12). Le « vengeur du sang », auquel fait allusion ce passage, est , le plus proche parent de l'homme qui a été tué. La coutume voulait qu'il poursuivit le meurtrier et le fit périr, quelles que fussent les circonstances de l'homicide. Mais de bonne heure, comme on le voit, le législateur intervint pour adoucir l'usage ancien et protéger le meurtrier par accident.
Plus tard encore, après l'exil, la loi maintint les cités de refuge, mais établit deux dispositions nouvelles. En premier lieu, le meurtrier qui aura atteint l'asile comparaîtra devant l' « Assemblée », c'est-à-dire devant le tribunal des « anciens » : s'il est innocent, il restera dans la cité de refuge; s'il est coupable, il sera livré au vengeur du sang. S'il quitte la cité de refuge et tombe entre les mains du vengeur, la justice n'aura plus à intervenir et le vengeur ne sera point poursuivi pour avoir tué le meurtrier. On voit que les lois les plus récentes contenues dans l'Ancien Testament limitent dans une certaine mesure l'usage primitif de la vengeance, mais ne le suppriment pas. Une seconde disposition de cette loi post-exilique établit que le meurtrier, admis à séjourner dans la ville de refuge, pourra la quitter et retourner chez lui, sans craindre vengeance, à la mort du grand-prêtre; l'asile peut donc être considéré comme une sorte d'exil qui cesse par une mesure d'amnistie lors de l'accession à sa charge d'un nouveau grand-prêtre (No 35 9-34 ; Josué 20 : 2-6).
AUTEL
Dans la langue hébraïque, le mot que nous traduisons par autel signifie l'objet sur lequel on sacrifie, ce qui est une définition très exacte Il semble qu'à l'origine cet objet ait été une pierre ou un rocher quelconque. C'est ainsi que dans l'histoire de la guerre contre les Philistins, nous voyons Saül, consterné d'apprendre que le peuple victorieux s'est jeté sur le butin et qu'il a apaisé sa faim sans réserver à Yahvé le sang des victimes, donner l'ordre qu'on roule vers lui une grande pierre où le bétail sera égorgé en sacrifice à Yahvé, avant d'être mangé par le peuple : « ce fut là le premier autel que Saül éleva à Yahvé » (1Sa 14 : 31-35). De même, dans le récit de la vocation de Gédéon, c'est un rocher qui est là, prés du térébinthe d'Ophra, qui sert d'autel (Juges 6 : 19-21). Mais l'autel pouvait également être en terre (Ex 20 : 24) et il était spécifié, par les anciennes lois cultuelles, que si on élevait un autel de pierres, ces pierres ne seraient pas taillées, « car en passant ton ciseau sur la pierre, tu la profanerais » (Ex 20 : 25). Toutefois ces prescriptions anciennes finirent par être oubliées et nous apprenons qu'il y avait dans le temple de Salomon un autel d'airain (1Ro 8 : 64). Plusieurs des innovations apportées à la construction des autels furent sans doute inspirées par un souci d'art et par l'imitation des coutumes étrangères. L'autel que David avait fait élever à Jérusalem avait des
cornes » : ses quatre coins se terminaient par des pointes relevées qui pouvaient être de simples motifs dé décoration, ou dont la signification, si elles en avaient une, ne nous est pas connue. Les suppliants qui venaient demander protection à Yahvé se réfugiaient auprès de l'autel dont ils saisissaient les cornes (1Ro 1 : 50-51 ; voir Asile).
Un autel spécial destiné à brûler les parfums fut ajouté par Salomon à l'autel des holocaustes (1Ro 6 : 20-22 ; 7 : 48).
AVANT-SABBAT
BAINS
BAPTEME
Le Nouveau Testament nous parle du baptême de Jean et du baptême chrétien ; mais la Bible (Ancien et Nouveau Testaments) nous fait connaître des coutumes analogues, pratiquées dans le judaïsme, fort en vogue au temps de Jésus, et qui n'ont certainement pas été sans influence sur l'apparition du baptême de Jean (Le 14 ; Nombres 19 ; 2Ro 5 : 10 ; voir Ablutions). -Nous savons par d'autres témoignages, extra-bibliques, que les prosélytes (voir ce mot) n'étaient admis dans la communauté juive qu'après une cérémonie purificatrice qui était un véritable baptême. La secte des Esséniens usait aussi de bains purificateurs. La Bible parle d'ailleurs souvent de l'eau comme d'un symbole de la purification (Esa 1 : 16 ; Zac 13 : 1 ; Eze 36 : 24-30).
Si ces coutumes et ces textes ont contribué à inspirer à Jean l'idée de son baptême, il faut cependant remarquer qu'aucune indication biblique ne nous permet de préciser la signification qu'il donnait à cet acte. Y voyait-il une purification rituelle, analogue à celle des prosélytes, ou simplement un symbole de la repentante ? Les évangélistes établissent bien un rapport entre le baptême et la repentante, mais ne songent pas à en préciser la nature. On notera néanmoins que la repentante devant, une fois pour toutes, inaugurer une vie meilleure chez le disciple de Jean, le baptême qui l'accompagne ne sera pas un acte à reproduire sans cesse, comme la plupart des ablutions cultuelles de l'époque : il marquera, d'un signe unique, l'orientation nouvelle d'une vie transformée.
Sur la question des origines du baptême chrétien, les livres du Nouveau Testament ne nous apportent que très peu de clarté. A cet égard, le baptême de Jésus par Jean-Baptiste ne nous apprend rien, car il ne nous fait pas sortir dur cercle d'activité du Précurseur. Pour des raisons que nos Evangiles ne précisent pas, Jésus a voulu être baptisé par Jean, mais il n'en résulte pas qu'il ait introduit le baptême de Jean dans sa propre activité missionnaire. Nulle part les trois synoptiques (Mt Marc et Luc) ne nous montrent Jésus ou ses disciples baptisant ceux qui se laissent gagner par leur prédication. Un seul texte, dans l'Evangile de Jean (Jea 3 : 1-3), nous présente un tableau différent de leur ministère : « Ayant su que les Pharisiens avaient ouï-dire qu'il faisait plus de disciples et baptisait plus que Jean (quoiqu'il ne baptisât pas lui-même, c'étaient ses disciples qui baptisaient),, le Seigneur quitta la Judée et repartit pour la Galilée ». Si ces lignes sont historiquement vraies, il n'y a qu'un moyen d'en maintenir le témoignages côté de celui qui se dégage du silence
absolu des trois premiers évangiles c'est d'admettre que Jésus ait d'abord autorisé ses disciples, particulièrement peut-être ceux qui avaient été disciples de Jean, à baptiser, mais que cette autorisation ne concerne que les premiers temps de son activité, auxquels se rapporte le texte ci-dessus. Dans la suite, Jésus aurait entièrement rayé le baptême de son programme d'Évangélisation. On comprendrait alors que les anciens disciples du Baptiste n'ayant continué l'activité de leur premier maître que fort peu de temps, les Synoptiques aient pu négliger de rapporter ce fait ou même l'avoir oublié, et le témoignage de leur silence garderait toute sa valeur : le baptême n'a pas eu de place dans le ministère proprement dit de Jésus. Mais il faut bien voir aussi qu'une autre conclusion découlerait de là : c'est que Jésus, à un moment de son ministère, et de fort bonne heure, aurait pris position contre le baptême, et cette considération serait absolument concluante dans la question, souvent discutée, de savoir si Jésus, selon l'expression consacrée, a « institué » le baptême.
En faveur de cette institution du baptême par Jésus, on ne peut invoquer qu'un texte, Mt 28 : 19. Jésus, ressuscité, dit aux onze : « Allez faire: de toutes les nations mes disciples, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du saint Esprit ». Ce texte est appuyé par tous les manuscrits et toutes les versions que nous possédons, mais ne l'est pas avec la même unanimité par les citations des Pères de l'Église et il est certain que ces citations ont été tirées de manuscrits plus anciens qu'aucun de ceux que nous possédons. Il faut alors tenir compte du fait qu'Eusèbe de Césarée (mort en 340), qui cite vingt-cinq fois le texte en question, le reproduit vingt et une fois sous une forme où il n'est pas question du baptême. Quatre fois seulement le texte apparaît avec la forme que nous lui connaissons, mais deux fois dans des ouvrages dont l'authenticité n'est pas certaine et une fois dans une traduction en langue syriaque où la citation peut être imputable au traducteur. Ajoutons que ces quatre cita lions sont de la dernière période de la vie d'Eusèbe. Il semble donc bien que jusqu'au commencement du IV° siècle beaucoup de manuscrits aient mis dans la bouche du Christ ressuscité une recommandation dernière à ses disciples où il n'était pas fait mention du baptême. Si telle fut, comme il est probable, la forme primitive de Mt 28 : 19, la question de l'institution du baptême par Jésus est tranchée par la négative et toute contradiction disparaît entre la pratique de l'évangélisation par Jésus durant son ministère et la suprême recommandation du Ressuscité à ses disciples. La forme actuelle du texte serait le fait d'un copiste prêtant au Christ la doctrine de l'Église de son temps.
Reste alors la question de savoir pourquoi l'Église naissante a, dès l'abord adopté le baptême que Jésus avait répudié.
A cette question, ni les Actes des Apôtres ni les Epîtres ne nous donnent de réponse. Peut-être la seule conjecture qui explique, en une certaine mesure, ce fait surprenant doit-elle être tirée de la composition même de l'Eglise des premiers jours, beaucoup plus nombreuse qu'on ne l'imagine souvent, même avant la Pentecôte (1Co 15 : 6), et où les apôtres, malgré le respect dont ils étaient entourés, peuvent avoir été débordés, quant à leur influence sur le développement des idées, par une masse journellement croissante, au sein de laquelle figuraient sans doute des personnages plus instruits qu'ils ne t'étaient eux-mêmes (Ac 6 : 7 ; 15 : 5). Comment auraient-ils résisté à la pression d'une opinion dont ils étaient sans doute à peine détachés eux-mêmes et qui fit prévaloir dans la jeune Eglise une tendance rituelle largement répandue dans le judaïsme de l'époque ?
Ce baptême, que l'Eglise primitive a pratiqué dès ses origines, comment l'administrait-elle ? Le Nouveau Testament est très sobre de détails à cet égard, et son silence absolu sur certains points, très controversés dans la suite de l'histoire chrétienne, explique les divergences de doctrine et de pratique auxquelles la question du baptême a donné lieu.
Méthode. - Baptisait-on par immersion ou par aspersion ? Aucune description biblique de la cérémonie ne nous permet de répondre à cette question de façon péremptoire. Le fait que le baptême était, - dans certains cas tout au moins - administré en un lieu où se trouvait une eau courante (Ac 8: 36), et qu'alors le néophyte et celui qui le baptisait entraient tous deux dans l'eau, n'implique pas nécessairement une immersion totale, que le peu de profondeur de la plupart des rivières orientales rend d'ailleurs improbable. Debout dans l'eau, le baptisé, dans de telles circonstances, devait simplement être aspergé. Ainsi déjà pouvait avoir pratiqué Jean-Baptiste, même dans la rivière profonde qu'était le Jourdain. En tous cas, le récit du baptême de Jésus (Mt 3 : 16 et Marc 1 : 9-10) ne permet pas d'affirmer le contraire.
Nous savons en outre que les Juifs, qui connaissaient et pratiquaient, dans certains cas, le bain purificateur, en étaient venus, dans la plupart des cas, sans cloute à cause de la rareté des eaux profondes, à se contenter d'aspersions ou d'ablutions partielles, symbolisant l'immersion. On sait quel rôle joue le symbole dans les rites religieux de la plupart des religions et l'on sait en particulier qu'à la base de beaucoup de pratiques rituelles de caractère magique se trouve l'idée que la partie équivaut au tout. On peut s'expliquer ainsi la substitution, chez les Juifs, du rite d'aspersion au rite d'immersion ; et il ne serait pas surprenant qu'une semblable substitution ait passé de l'usage juif à l'usage chrétien.
Il faut ajouter qu'en grec, la langue du Nouveau Testament, le verbe baptiser ne s'applique pas seulement au baptême proprement dit (celui de Jean-Baptiste ou celui de l'Eglise), mais également aux ablutions partielles des Juifs. Dans
l'Evangile de Luc (Lu 11 : 33), nous voyons les Pharisiens s'étonner que les disciples de Jésus « ne se soient pas baptisés » avant le repas. Nos versions françaises traduisent avec raison : « qu'ils ne se soient pas lavés » ou « qu'ils n'aient pas pratiqué les ablutions ». Le mot baptême, dans la langue du Nouveau Testament, n'implique donc pas par lui-même, l'idée d'immersion.
En faveur de la pratique du baptême par immersion, dans l'Eglise primitive, on invoque parfois un texte de l'Apôtre Paul : « Nous avons été ensevelis avec lui (Jésus-Christ) par le baptême en sa mort » (Romains 6 : 3). L'image de l'ensevelissement, dit-on, ne peut s'appliquer qu'à un baptême où le corps disparaît momentanément dans l'eau. Mais si cet argument devait être retenu, impliquerait-il que l'immersion, pratiquée quand les circonstances le permettaient, n'ait pas été remplacée, dans des circonstances moins favorables et peut-être dans la généralité des cas, par l'aspersion ? Il se pourrait qu'en droit le baptême eût impliqué l'immersion et qu'en fait il fît souvent place à l'aspersion. Si la comparaison de Paul"comporte la conclusion qu'on en tire, il pouvait encore la faire en songeant au baptême dans sa forme la plus complète.
Ce qui résulte de l'examen des textes c'est qu'aucun d'entre eux ne nous contraint d'attribuer l'introduction du baptême par aspersion à l'Eglise du II° ou du III° siècles et de l'expliquer par son infidélité aux usages primitifs.
Age. - Baptisait-on les adultes seuls ou aussi les enfants? A cette seconde question les textes ne répondent pas davantage.
Assurément le baptême était en principe administré aux nouveau-convertis, aux hommes et aux femmes qui se repentaient de leurs péchés, devenaient disciples du Christ et entraient dans l'Eglise, ce qui semble bien exclure le baptême des petits enfants.
En faveur de ce baptême des enfants les seuls textes que l'on invoque sont loin d'être décisifs : ce sont ceux où il est spécifié que tel ou tel converti a été baptisé « avec sa famille » (Lydie Ac 16 : 15), « avec tous les siens » (le geôlier de Philippes : Ac 16 : 33) ou « avec sa maison » (Stéphanas : 1Co 1 : 16). Il est à peine nécessaire de faire remarquer que les familles ci-dessus désignées pouvaient fort bien ne pas comprendre d'enfants, et il faut ajouter que les écrivains sacrés n'auraient pas hésité à parler de familles baptisées même si les enfants en bas âge qui en faisaient partie n'avaient pas reçu te baptême. Il n'y a rien à tirer de ces textes pour trancher la question qui nous occupe.
Il faut, croyons-nous, en dire autant de la comparaison faite par l'Apôtre Paul entre le baptême et la circoncision (Colossiens 2: 11-12). Du fait que la circoncision était, en principe, pratiquée sur les nouveau-nés, on tire la conclusion que Paul n'en aurait pas rapproché par la pensée le baptême, si celui-ci n'avait été donné qu'aux adultes. L'argument est loin d'être probant : non seulement parce qu'une comparaison ne comporte pas nécessairement le degré de précision qu'on lui prête ici, mais encore parce que la circoncision n'était pas, selon la loi cérémonielle des Juifs, réservée aux petits enfants seuls, mais qu'elle était exigée des païens adultes qui embrassaient le judaïsme.
On ajoute, il est vrai, que si le judaïsme était si soucieux d'imprimer, par la circoncision, sa marque sur les petits enfants pour les agréger ainsi visiblement à la communauté sainte d'Israël, il n'était guère possible que le Christianisme naissant, avec sa doctrine de l'Eglise corps du Christ et avec sa sollicitude pour les enfants, « saints » comme les adultes (1Co 7 : 14), n'ait pas eu la même préoccupation et n'ait pas étendu le baptême aux nouveau-nés. Nous savons, certes, que c'est à des voeux semblables que l'Eglise donna satisfaction à l'époque, quelle qu'elle soit, où elle commença à baptiser les enfants ; mais aucun texte ne nous autorise à affirmer qu'elle le fit dès la première heure. Il est vrai qu'aucun ne nous permet davantage de le nier. Ici encore, la Bible ne répond pas à nos questions.
Formule. - On sait quelle est la formule traditionnelle du baptême chrétien, administré « au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ». Cette formule apparaît de très bonne heure dans l'Église où l'on n'a cessé de la justifier par le texte Matthieu 28 : 19. Nous avons vu ce qu'il faut penser de ce texte. A ce que nous avons dit de sa forme originelle la plus probable, nous devons ajouter maintenant que la formule trinitaire n'apparaît nulle part dans la pratique du baptême telle qu'elle nous est décrite dans le Nouveau Testament et particulièrement dans le livre des Actes des Apôtres. Dans tous les cas où une formule baptismale est indiquée, cette formule ne mentionne que Jésus seul. On baptisait alors « au nom de Jésus-Christ » (Ac 2 : 38; 10 : 48) ou « au nom du Seigneur Jésus » (Ac 8 : 16; 19 : 5 ; comparez 1Co 1 : 13 ; Romains 6 : 3 ; Galates 3 : 27). Aucun indice ne nous permet de conclure à l'emploi d'une autre formule dans l'Eglise primitive.
Signification. -C'est surtout Paul qui nous renseigne sur la signification du baptême pour les premiers chrétiens.
1° Le baptême est le signe de l'union mystique du chrétien avec le Christ mort et ressuscité, le symbole d'une mort et d'une résurrection spirituelles (Romains 6 : 1; Colossiens 2 : 11) et même d'une identification morale avec le Christ (Galates 3 : 27).
2° Le baptême est accompagné du don du saint Esprit (1Co 12: 12).
3° Il signifie l'agrégation au corps du Christ qui est l'Église (ibid.).
BENEDICTION ET MALÉDICTION
Pour les anciens Hébreux la bénédiction et la malédiction étaient des paroles magiques, produisant d'elles-mêmes leur effet bon ou mauvais, par une puissance mystérieuse qui leur était propre et qui était souvent conçue comme tout à fait indépendante de la puissance de Yahvé. Le fait de maudire ou de bénir ne consistait pas, au moins à l'origine, à appeler sur quelqu'un la colère ou la bienveillance divines : maudire, c'était déchaîner sur l'adversaire une force inconnue mais d'autant plus redoutable, et bénir c'était diriger une force salutaire, également inconnue, sur ceux auxquels on voulait du bien. Si la religion a fini par triompher de la magie, elle en a été longtemps fortement pénétrée.
L'histoire, si curieuse, de Balaam (Nombres 22) nous montre que certains hommes, sortes de devins ou de sorciers (No 22:7), étaient des spécialistes de la bénédiction et de la malédiction, surtout de la malédiction, si nécessaire, pensait-on, contre l'ennemi. On les, faisait venir de très loin pour utiliser leur puissance (No 22:5), car on savait que ceux qu'ils bénissaient étaient bénis et que ceux qu'ils maudissaient étaient maudits (verset 6). C'est ainsi qu'un roi de Moab fait venir de Mésopotamie le devin Balaam pour maudire Israël, persuadé que cette malédiction sera la ruine de l'adversaire. Et la tradition racontait comment Yahvé, pour sauver son peuple, obligea le sorcier à bénir au lieu de maudire. On voit par là que, selon les idées du temps, ce stratagème étant nécessaire, la malédiction aurait eu son effet malgré la volonté de Yahvé. Dieu, croit-on, peut forcer Balaam à bénir au lieu de maudire, mais la bénédiction ou la malédiction une fois prononcées, aucune puissance ne peut intervenir pour en arrêter les effets.
Cette parole magique n'était cependant pas l'apanage des seuls devins, des personnes « saintes », des prêtres ou des prophètes : la bénédiction ou la malédiction de tout homme pouvait être efficace. Goliath et David se maudissent l'un l'autre avant le combat (1Sa 17: 43-47). Et nous voyons, par cet exemple, que bénédictions ou malédictions, malgré leur puissance intrinsèque, en vinrent à être renforcés par l'invocation de la divinité. Goliath maudit David « par ses dieux » et David voue Goliath à la colère de « Yahvé des armées, le Dieu de l'armée d'Israël ». Quand des malédictions se croisent ainsi, elles ne peuvent pas être également efficaces puisqu'il y a un vainqueur et un vaincu. La réflexion en vient donc à admettre que toute malédiction n'a pas nécessairement d'effet : celle qui l'emportera sera celle qui sera soutenue par la divinité la plus puissante. La pensée commence à faire reculer la magie et c'est au profit d'une religion plus élevée : David n'a aucune crainte parce qu'il sait que « la victoire appartient à Yahvé » (1Sa 17:47).
Le père de famille, surtout aux derniers jours de sa vie, était de ceux à qui l'on reconnaissait un pouvoir tout particulier de bénir ou de maudire et par là d'influer efficacement, en bien ou en mal, sur l'avenir de ses enfants. Noé maudit Canaan, raconte le livre de la Genèse (Ge 9 : 25) et la tradition voulait que l'effet de cette malédiction se fût étendu, de génération en génération, sur toute la descendance du fils de Cham. Dans ce récit on voit que des considérations d'ordre moral ont motivé la malédiction paternelle. Il n'en a pas toujours été ainsi : Isaac veut bénir Esaü (Genèse 27: 1-5) plutôt que Jacob, non parce qu'il est meilleur que son frère, mais soit parce qu'il est l'aîné, soit parce qu'il est le préféré. On sait comment Jacob ravit à Esaü la bénédiction de son père et l'on reconnaît encore à quel point les idées de bien et de mal dominent peu ce récit puisque le stratagème de Rebecca et la fourberie de Jacob ne privent nullement ce dernier de la bénédiction d'Isaac. Cet exemple montre aussi ;la nature magique et le caractère irrévocable de la sentence paternelle. Pas plus ici que dans l'histoire de Balaam la divinité n'est absente, mais nous en sommes encore à la période primitive où elle pâlit devant la magie : Isaac manifeste bien l'intention de bénir Esaü « devant Yahvé » (Ge 27:7), mais c'est manifestement la puissance de sa bénédiction paternelle et non la puissance divine de Yahvé qui doit intervenir et quand il a béni Jacob par erreur rien ne peut défaire ce qui a été fait et il n'est pas question d'en appeler à la puissance supérieure d'un Dieu qui pourrait réparer tous les méfaits des hommes. Si Esaü obtient, comme une faible compensation pour tout ce qu'il a perdu, de, ne pas subir à perpétuité le joug de son frère (Ge 27:40), c'est encore la parole prophétique du père et non l'intervention du dieu qui réalisera la promesse.
Mais ces conceptions primitives devaient s'effacer lentement à mesure que le prophétisme donnait naissance à une religion plus morale et plus spirituelle.
On en vint, à reconnaître que seule la postérité du juste peut être bénie (Psaume 37 : 26) et qu'une malédiction sans cause demeure sans effet (Pro 26 : 2).
BIBLE
Ce terme ne se trouve, en nos Bibles, que dans le titre : La Sainte Bible, ou La Bible ; et ce titre est relativement récent, car on ne le rencontre pas avant le IX° siècle. Le mot Bible n'est donc pas un terme biblique. Il nous vient du latin, qui l'a emprunté au grec. En grec, Biblia était un pluriel signifiant les livres. En passant au latin, le mot prit la forme du singulier : le Livre, et signifia : le Livre par excellence.
Les livres contenus dans cette collection qu'est la Bible étaient écrits sur papyrus ou parchemin. La forme de ces livres était généralement le rouleau, c'est-à-dire une longue bande que le lecteur tenait horizontalement devant soi, le déroutant de la main droite et l'enroulant de la main gauche, au fur et à mesure de la lecture, l'écriture y étant disposée en colonnes verticales.
Ces rouleaux avaient toujours à peu près la même dimension. Un rouleau suffisait à contenir plusieurs écrits de faible longueur. Les douze « petits prophètes », par exemple, ne formaient qu'un livre. Il arrivait aussi que le rouleau fût trop long pour l'oeuvre que l'on y copiait ; on y ajoutait alors d'autres écrits, pour l'utiliser dans sa totalité. Ce fait explique que l'on ait parfois attribué à l'auteur de l'écrit principal ces morceaux ajoutés à la suite de son œuvre: l'erreur était à peu près inévitable dans le cas où ces morceaux étaient d'auteurs inconnus. C'est ainsi qu'aux écrits d'Esaïe, de Zacharie furent adjointes des prophéties anonymes qui ont longtemps passé pour être leur oeuvre. Il a fallu l'étude attentive et scrupuleuse à laquelle la Bible a été soumise dé notre temps pour que l'on reconnût, par exemple, que le livre d'Esaïe comprenait, outre les discours de ce prophète (chapitres 1-39), ceux d'au moins deux autres prophètes dont les noms n'ont pas été conservés et dont le plus remarquable est celui que l'on a pris l'habitude d'appeler le Second-Esaïe ou le Prophète Anonyme de l'Exil (ch. 40-55).
Les cahiers étaient aussi en usage et furent même préférés par tes chrétiens dès le II° siècle de notre ère, comme le prouvent les plus anciens papyrus chrétiens qui nous aient été conservés.
Formation de l'Ancien Testament. - La plus ancienne littérature hébraïque paraît avoir été constituée par des poèmes et des chants. Quelques fragments poétiques, cités par les écrivains postérieurs, sont, dans notre Bible, les pages les plus anciennes qu'elle nous offre ; plusieurs proviennent de cieux très anciens recueils poétiques : le Livre du Juste, nommé deux fois dans l'Ancien Testament (Josué 10 : 13 et 2Sa 1 : 18), et le Livre des Guerres de Yahvé (Nombres 21 : 14). Le plus célèbre de ces poèmes est le Chant de moi-même (Juges 5).
Ces pièces poétiques apparaissent dans des récits historiques composés plus tard. Les règnes de David et de Salomon semblent avoir été l'époque où se développa cette nouvelle forme de la littérature hébraïque. Une très importante partie de l'histoire de David est si vivante et si impartiale à la fois qu'il est difficile de ne pas y reconnaître une narration presque contemporaine des événements. Le goût de ces récits d'histoire nationale se répandit rapidement et il se forma bientôt, dans le Royaume de Juda, d'abord, et peu de temps après dans le Royaume d'Israël, des cercles littéraires, si l'on peut ainsi les appeler, où l'on se proposa de réunir toutes les traditions populaires et de constituer ainsi une histoire d'Israël depuis les origines et même de rattacher cette histoire aux origines du monde. Il se forma ainsi deux cycles distincts de récits, rapportant les mêmes traditions avec des variantes inévitables et où apparaît, à des degrés divers, l'influence morale et religieuse des prophètes.
Nous ne possédons pas ces deux écrits dans leur forme primitive, car, plus tard, sans doute après la disparition du Royaume du Nord, ils donnèrent naissance à une oeuvre unique dans laquelle les récits de l'un et l'autre furent, à propos de chaque événement, juxtaposés et, pour ainsi dire, tressés ensemble, plutôt que refondus, si bien qu'il n'est pas trop difficile de les distinguer encore aujourd'hui, comme l'on distinguerait des fils de couleurs différentes dans une tresse unique.
Cette oeuvre nouvelle n'est d'ailleurs pas reproduite telle quelle dans l'Ancien Testament. Elle a, dans la suite, reçu de nombreuses et importantes adjonctions et subi bien des remaniements. Au temps de la réforme du roi Josias (621), un écrit de nature législative et d'inspiration nettement prophétique y fut ajouté c'est celui qui forme presque exclusivement le livre actuel du Deutéronome. Son langage, très caractéristique, impossible à confondre avec celui des écrivains antérieurs, ou postérieurs, apparaît ici et là hors du Deutéronome au milieu des récits auquel le Deutéronome a été ajouté, et nous reconnaissons à ce fait que l'ouvrage nouveau n'est pas simplement l'ouvrage ancien augmenté du Deutéronome mais un livre refondu et corrigé dans l'esprit prophétique du Deutéronome.
Cette troisième forme de l'écrit n'est pas la dernière. Une nouvelle refonte, très considérable par l'étendue des textes législatifs et des morceaux narratifs ajoutés, très reconnaissable aussi par son empreinte théocratique et son inspiration sacerdotale, fut accomplie après l'Exil, à l'époque d'Esdras. Le livre du Lévitique tout entier appartient à cette nouvelle rédaction conçue dans le même esprit que les livres des Chroniques, d'Esdras et de Néhémie et généralement dénommée Code Sacerdotal. Ajoutons que de nombreux passages, législatifs ou narratifs, ont été introduits par les rédacteurs sacerdotaux dans les six premiers livres de l'Ancien Testament. Pour ne citer qu'un exemple, la première page de la Genèse (1: 1 – 2:4) est une adjonction de cette époque tardive.
La conclusion des remarques qui précèdent, c'est que beaucoup de chapitres des livres narratifs de l'Ancien Testament, principalement des six premiers, sont une mosaïque de fragments provenant principalement des deux sources parallèles que nous avons indiquées en premier lieu (les plus anciennes) et de la source sacerdotale (la plus récente), avec, ici et là, en assez grand nombre, des retouches ayant pour but d'harmoniser et de cimenter toutes ces pièces d'origines diverses, retouches dont le style caractéristique permet presque toujours d'attribuer l'insertion à telle ou telle des rédactions successives.
Nous avons dit que les plus anciens récits de l'Ancien Testament portent la marque de l'influence des prophètes. En un sens, c'est déjà de la littérature prophétique. Cependant, nous réservons ce nom, en général, aux livres qui portent les noms des prophètes et contiennent leurs discours. Ce n'est qu'à partir du VIII° siècle, avec Amos, que les prophètes - un certain nombre d'entre eux, tout au moins - commencèrent à consigner leurs paroles par écrit, et l'on sait quelle place importante leurs livres occupent dans l'Ancien Testament, tant par leur étendue que par la très haute inspiration morale et religieuse qu'ils traduisent. A ce dernier point de vue, la littérature hébraïque, expression de la vie spirituelle des plus grandes âmes du peuple d'Israël, atteint son apogée avec Amos, Esaïe, Jérémie, Ezéchiel. Cette littérature prophétique s'étend sur une longue période qui va du VIII° au IV° siècle.
A des dates diverses, mais qu'il faut toutes fixer après l'Exil, parurent enfin d'autres livres de l'Ancien Testament dont le plus important, par l'influence qu'il exerça et ne cesse d'exercer encore, est celui des Psaumes. Il faut y ajouter les autres livres appelés « poétiques » dans les tables des matières de nos Bibles : Job, Proverbes, Ecclésiaste, Cantique des Cantiques, et enfin les Lamentations, Daniel Ruth et Esther qui ont été placés dans notre Bible, (mais non dans la collection hébraïque), les deux premiers parmi les prophètes, les cieux autres parmi les livres que nous appelons historiques.
Tous ces livres, de genres si divers, étaient l'objet d'une grande vénération de la part des Israélites, mais tous n'étaient cependant pas placés sur le même rang. Ils étaient distribués entre trois collections : la Loi (les cinq premiers livres de l'Ancien Testament), qui jouissait de l'autorité la plus absolue ; les Prophètes (Josué, Juges, Samuel, Rois, Esaïe, Jérémie, Ezéchiel et les Douze), dont l'autorité était encore très grande ; et, enfin, les Ecrits (comprenant les autres livres), recueil qui ne paraît avoir été définitivement clos que très tardivement (puisque des livres qui n'y ont pas été admis sont cités dans le Nouveau Testament), et dont l'autorité était certainement moindre (puisqu'au temps de Jésus, l'ensemble des livres saints était couramment désigné par l'expression La Loi et les Prophètes, sans mention des livres de la troisième catégorie). .
Les livres ci-dessus indiqués sont ceux que renferme la Bible hébraïque. Mais on ne peut parler de la composition de l'Ancien Testament sans signaler les livres dits Apocryphes qui figurent dans la Version grecque des Septante, d'où ils ont passé dans la Bible latine et dans toutes les Bibles anciennes et modernes jusqu'au commencement du siècle dernier. Les principaux de ces livres sont I et Il Macchabées, Tobit, Judith, Baruch, le Siracide ou Ecclésiastique, la Sagesse de Salomon. L'Eglise catholique a maintenu les apocryphes dans la Bible en leur attribuant une autorité canonique de second ordre, les Eglises protestantes les ont généralement exclus, les trouvant d'une inspiration inférieure.
Formation du Nouveau Testament. - La formation du Nouveau Testament a ceci de commun avec celle de l'Ancien que les différents « livres » qu'il contient n'ont pas été écrits dans l'intention d'être incorporés à un recueil sacré.
Epîtres. - Les premiers qui ont vu le jour sont les Epîtres de Paul, composées à partir de l'an 50 ou 51. Toutes les lettres de l'Apôtre ne sont pas parvenues jusqu'à nous. Les plus anciennes de celles que nous possédons (1re et 2° aux Thessaloniciens) avaient peut-être été précédées par d'autres et quelques-unes (nous le savons expressément pour celles qu'il a adressées aux Corinthiens) ont été perdues. Ce ne fut sans doute pas dès les premières années du ministère de Paul que les Eglises songèrent à conserver précieusement les moindres missives de leur fondateur, mais cette préoccupation s'empara d'elles à mesure que grandissait l'influence de la personnalité de l'Apôtre et la conviction que ses écrits possédaient une valeur permanente. La première génération les légua à la seconde et de bonne heure on les recopia pour les répandre. Il était naturel que l'exemple de Paul fût suivi et que d'autres que lui écrivissent des Epîtres. Ce genre littéraire », qui existait d'ailleurs avant Paul, offrait trop d'avantages aux chrétiens qui avaient la responsabilité spirituelle des Eglises, pour qu'ils ne songeassent pas à l'employer. Et c'est ainsi qu'ont été écrites et qu'ont été conservées les autres Épîtres qui figurent dans le Nouveau Testament : l'Épître (anonyme) aux Hébreux et les sept Epîtres, dites « catholiques » (c'est-à-dire adressées à l'ensemble des chrétiens), Jacques ; 1 et 2 Pierre ; 1, 2, et 3 Jean ; Jude. Cette seconde série d'Epîtres se distingue de celles de l'apôtre Paul par un caractère moins spécifiquement épistolaire. Il ne s'agit plus ici d'écrits de circonstance, mais de petits traités que l'on pourrait comparer à ce que les anciens appelaient la diatribe. Il n'est pas facile de fixer une date à chacune des vingt et une Épîtres du Nouveau Testament. On y parvient approximativement pour celles de Paul grâce à la fois aux renseignements que nous fournit leur contenu même et à la connaissance que nous avons, par le livre des Actes des Apôtres, de sa carrière missionnaire. Pour les autres Epîtres, l'incertitude est grande. Les plus récentes (telles que 2 Pierre, 2 et 3 Jean), de l'avis à peu près unanime des savants, datent du II° siècle, d'où il résulte que leur attribution aux apôtres dont elles portent les noms ne saurait être maintenue. Nous n'entrerons d'ailleurs pas dans l'étude de la question de l'authenticité de telle ou telle Épître, qui dépasse les limites de notre modeste Lexique. L'essentiel de ce qu'il faut savoir, c'est que toutes les Épîtres qui peuvent être attribuées à Paul ont été écrites avant que les Evangiles, dont nous allons parler maintenant, aient vu le jour.
Évangiles et Actes des Apôtres. - Les Evangiles constituent un genre d'écrits particuliers à l'Église primitive. On ne les comprend bien qu'en sachant comment ils sont nés. Les chrétiens des premières années ne songeaient en aucune manière à écrire ce qu'ils savaient de Jésus. Attendant son prochain retour, ils regardaient à l'avenir plus qu'au passé. Il leur paraissait suffisant d'entretenir en eux le souvenir du Maître en se rappelant les uns aux autres et en racontant aux nouveau-convertis et aux enfants tout ce que l'on avait retenu de ses paroles et de sa vie. II se forma ainsi une tradition orale peu soucieuse d'établir la chronologie du ministère de Jésus ou de constituer sa biographie et fortement empreinte du caractère épisodique que lui conférait son utilisation pratique dans l'enseignement et la prédication. Ce fut la rapide extension de l'Église, devenue missionnaire, qui l'obligea à fixer par l'écriture cet « évangile », cette prédication de la Bonne Nouvelle, constituée par les paroles et les actes du Sauveur. Le missionnaire ne faisait que passer: quel avantage pour son oeuvre que de pouvoir laisser derrière lui non seulement le souvenir de ses paroles, mais un écrit qui maintiendrait la jeune Eglise en contact avec le Maître !
C'est évidemment dans cette intention que parut d'abord (nous ne pouvons dire à quelle date) un petit livre destiné à mettre en lumière le message chrétien en reproduisant des paroles de Jésus. Cet écrit n'existe plus sous sa forme primitive, mais a été utilisé par les auteurs des premier et troisième évangiles et on le reconstituerait, à peu de chose près, avec tous les fragments de discours qui sont communs à Matthieu et à Luc seuls. C'est vraisemblablement ce recueil auquel fait allusion Papias, évêque d'Hiérapolis au II° siècle, et qu'il attribue à Matthieu. On le désigne par le terme Logia, qui signifie Paroles. Mais cet ouvrage ne pouvait longtemps suffire aux besoins des Eglises. Il était manifestement trop incomplet, laissant de côté de larges portions de cette « tradition » que l'on voulait posséder par écrit.
Marc au dire du même Papias, aurait été l'auteur d'un écrit nouveau où « il écrivit exactement, mais sans ordre, tout ce qu'il se rappelait qu'avait dit ou fait le Christ », et il aurait composé son ouvrage sous l'inspiration de Pierre dont « il était devenu l'interprète ». Cet ouvrage, c'est notre Évangile de Marc actuel ou un écrit à peu près identique à cet Evangile. Tels furent les deux premiers écrits chrétiens relatifs à Jésus : les Logia et Marc. Cet Evangile de Marc (comme les Epîtres de Paul, ainsi que nous l'avons vu) devint pour d'autres écrivains un exemple à suivre.
Notre Évangile de Matthieu est une combinaison des deux écrits précédents avec quelques additions. Chose curieuse son apparition provoqua la disparition des Logia en tant qu'ouvrage séparé, mais laissa subsister Marc. Notre Évangile de Luc est également une reproduction des deux mêmes documents, mais avec une beaucoup plus forte proportion de fragments nouveaux empruntés à d autres sources que nous ne connaissons pas. Ces trois premiers Evangiles (Marc, Matthieu et Luc) sont désignés par le nom de Synoptiques ; ce terme signifie qu'on peut en avoir une vue d'ensemble en disposant leur texte en colonnes parallèles ; une telle disposition fait immédiatement ressortir dans les trois textes un nombre extrêmement important de passages ou bien identiques, ou bien très ressemblants ou bien équivalents, avec, ici et là, dans chaque colonne, des vides correspondant à des passages n'existant que dans un ou dans deux des Evangiles. Ces ressemblances et ces différences soulèvent des problèmes très délicats dès que l'on veut préciser (ce que nous n'essayons pas de faire ici) les rapports des synoptiques entre eux ou avec leurs sources communes.
Mais nous avons un quatrième Évangile, l'Evangile de Jean ; et ce qui le caractérise dès le premier abord, c'est l'impossibilité de le faire figurer avec les trois premiers dans un cadre synoptique. Une quatrième colonne, destinée au texte du quatrième évangile, montrerait, au premier coup d'oeil, qu'il contient très peu de pages équivalentes à celles des trois premiers. L'Evangile de Jean est seul de son espèce et diffère des trois autres non seulement par sa composition qui ne consiste pas en une simple combinaison de documents antérieurs, non seulement par sa méthode qui ne vise pas à rapporter, autant que possible, tout ce que l'on savait de Jésus, non seulement par son contenu qui paraît tendre à compléter et parfois à rectifier les synoptiques en laissant de côté la plus grande partie de ce qu'ils ont raconté, mais surtout par l'image même qu'il dessine de Jésus, auquel il prête un langage très différent de celui que nous trouvons dans les synoptiques et un enseignement infiniment moins varié, presque entièrement consacré à mettre en lumière la divinité de sa mission. Ce quatrième Evangile, comparé aux trois autres, n'a pu, de toute évidence, voir le jour qu'à une époque où la pensée chrétienne, surtout pour ce qui concerne la personne de Jésus, avait pris un développement inconnu au temps des synoptiques. Aussi, tandis que la composition de Marc Matthieu et Luc peut être approximativement fixée, à des dates diverses, entre les années 70 et 90, celle de l'Evangile de Jean doit être repoussée aux dernières années du I° siècle ou, peut-être même, au premier quart du II°.
Un cinquième livre narratif, les Actes des Apôtres, écrit par l'auteur du troisième Evangile comme complément à son premier ouvrage, daterait des environs de l'an 85.
Apocalypse. - Quant au dernier livre du Nouveau Testament, intitulé l'Apocalypse de Jean, écrit à une époque de persécutions violentes et continues, mais postérieures à la persécution de Néron, il date vraisemblablement des dernières années du I° siècle, peut-être du règne de Domitien (81-96).
Nous n'entrerons pas ici dans l'étude du canon (les saintes Ecritures, c'est-à-dire du choix par les autorités juives et chrétiennes, des livres dignes de faire partie du recueil sacré. Cette étude, essentiellement historique, sort du cadre de notre Lexique.
Nous indiquerons cependant pour terminer qu'un certain nombre d'écrits chrétiens des premiers temps ont reçu le nom d'apocryphes du Nouveau Testament parce qu'ils n'ont pas paru mériter d'y être introduits, par exemple l'Evangile des Hébreux, l'Evangile de Pierre, l'Evangile de Nicodème, etc.
CANANITE (ou CANANEEN)
Surnom d'un des Douze, appelé Simon, selon Marc 3 : 18 et Mt 10 : 4. Le même Simon est surnommé zélote ou zélateur dans Luc 6 : 15 et Ac 1 : 13. Les deux surnoms ont la même signification, la première étant la transcription en grec d'un terme araméen (voir ce mot), qui, comme on le voit, ne désigne nullement, malgré l'apparence, un habitant du pays de Canaan ou de Cana, (voyez zélote ou zélateur).
CEINDRE
Ce verbe, en lui-même, ne présente aucune difficulté ; chacun sait qu'il signifie : attacher une ceinture autour du corps. Ce qui peut nous arrêter à la lecture de certains passages de la Bible, c'est l'emploi du mot. On peut se demander, par exemple, pourquoi il était ordonné aux Israélites de « manger la Pâque les reins ceints » (Ex 12 : 11). Et l'on peut demeurer assez perplexe en présence de cette exhortation imagée: « Ceignez les reins de votre entendement » (1Pi 1 : 13). L'obscurité de ces passages et de quelques autres s'évanouit dès qu'on se rappelle les usages israélites en ce qui regarde le vêtement. Comme beaucoup d'orientaux d'autrefois et d'aujourd'hui, ils portaient, pour mieux supporter la chaleur, un vêtement très large, sorte de burnous arabe, qui tombait jusqu'aux pieds et qui permettait à l'air de circuler librement autour du corps, parce qu'il était de nature « flottante ». On comprend que ce vêtement, très agréable aux heures de repos, devint encombrant pour les heures d'effort, de travail, de marche rapide. On obviait alors à l'inconvénient qu'il présentait en le serrant au corps et en le relevant par une ceinture. Le geste de « se ceindre » était de ceux que l'on faisait machinalement vingt fois par jour, dé que l'on se mettait à une besogne quel conque, dès que l'on passait du repos ; l'action. « Elie se ceignit les reins et cou rut » (1Ro 18 : 46). « Elisée dit à Guéhazi : Ceins tes reins et part » (2Ro 4 : 29). - On comprend, dès lors, qua l'expression « ceindre ses reins » en soi venue à signifier, au figuré, « se tenu Prêt ». On comprend aussi la coutume israélite de manger la Pâque, les rein ceints, les pieds chaussés pour la marche et le bâton en main : la Pâque commémorait, en effet, le départ précipité des Israélites fuyant l'Egypte. On comprend encore que la curieuse expression: « Ceignez les reins de votre entendement » signifie : que votre esprit soit en alerte prêt à tout. Sous une autre forme, Jésus exprimait la même pensée quand il disait : « Heureux le serviteur que le maître trouvera veillant quand il reviendra » (Mat 24 : 46).
CENDRE
Dans les coutumes relatives au deuil (voyez ce mot), la cendre (et quelquefois la poussière et la terre; joue un rôle considérable, non seulement en Israël mais chez beaucoup d'autres peuples de l'antiquité comme aujourd'hui encore parmi certaines races non civilisées. Les exemples bibliques de ces rites de deuil sont nombreux. Après une défaite, Josué et les anciens du peuple, prosternés le visage contre terre, se couvrent la tête de poussière (Josué 7:6). Le messager qui vient annoncer au vieil Eli la mort de ses fils a la tête couverte de terre (1Sa 4 : 12). Celui qui annonce à David la mort de Saül présente le même aspect (2Sa 1 : 2). Job déclare qu'en signe de deuil, il a roulé sa tête dans la poussière (Job 16 15). Les trois amis de Job voyant celui-ci défiguré et méconnaissable, jettent de la poussière en l'air au-dessus de leur tête (Job 2:12 ; comparez : Ac 22 : 23). Ailleurs, c'est la cendre qui remplace la poussière et la terre (2Sa 13 : 19). Mardochée se couvre (on peut traduire, se revêt) de cendres (Esther 4 : 1). Le roi de Ninive s'assied sur la cendre (Jonas 3 : 6), Job de même (Job 2 : 8 ; 42: 6). Jérémie ordonne à son peuple de prendre à l'avance le deuil des dévastations qu'il va attirer sur lui par ses péchés : « Roule-toi dans la cendre », dit-il (Jer 6: 26). Un autre prophète, dont les oracles sont inclus dans notre livre actuel d'Esaïe, fait au contraire le procès de ces jours d'humiliation qu'observe le peuple, mais où les signes extérieurs, comme de se coucher sur la cendre, n'expriment aucun deuil véritable (Esa 58 : 5). - Le fait que ces coutumes n'étaient pas réservées au deuil proprement dit, mais qu'elles s'étendaient à toute espèce de tristesse, montre qu'à l'époque où ont été écrits les divers livres de la Bible qui les mentionnent, on n'y voyait pas autre chose qu'une marque de chagrin (ou d'indignation). Mais comme on ne peut trouver aucune raison pour que le chagrin s'exprime par de telles manifestations, on doit supposer qu'à une époque très lointaine, dont les auteurs bibliques ne se souvenaient plus, ces coutumes avaient un autre sens, où le rôle de la cendre, de la poussière ou de la terre s'expliquait naturellement. On sait aujourd'hui que chez beaucoup de peuples, les gens en deuil se noircissent avec des cendres, de la boue, de la terre glaise, de la suie. Les Pahouins s'enduisent le corps d'une argile blanche qui les rend méconnaissables. Tous les faits analogues rapportés par les chroniqueurs de l'antiquité ou par les explorateurs et missionnaires actuels semblent indiquer que leur but est, précisément, de rendre l'affligé méconnaissable. La principale préoccupation de celui-ci est de ne pas être reconnu par l'esprit du mort, - un esprit étant toujours à redouter. - Chez les Juifs modernes de certaines contrées, on lance des tessons quand le convoi funèbre quitte la maison, et des mottes de terre ou de l'herbe lorsqu'on sort du cimetière, pour empêcher le mort de revenir.
CENTURION (ou CENTENIER)
Officier de l'armée romaine commandant une centurie, soit, en principe, cent hommes. Cinq ou six centuries formaient une cohorte, et dix cohortes une légion. Ces « capitaines » (on pourrait traduire ainsi leur titre) paraissent avoir été généralement des hommes de valeur. Ceux qui paraissent dans le Nouveau Testament attirent la sympathie ou l'admiration du lecteur (Mt 8 : 5-13 ; Luc 7 : 1-10 ; Mt 27 : 54 ; Marc 15 : 39; 44-45 ; Luc 23 : 47 ; Ac 10 : 22, 25 ; 23 : 17,23 ; 24 : 23; 27 : 1, 3, 11, 43).
CHAIR
Dans son acception courante, ce mot désigne « les parties molles du corps de l'homme et des animaux » (Littré) et nous lui trouvons souvent cette signification dans la Bible. On pourrait en conclure que quand l'apôtre Paul, en particulier, oppose la chair à l'esprit, il entend parler simplement du corps et de l'âme. On serait amené par suite à penser que pour lui le corps est le siège du péché (Ro 7 : 17-18). Cette interprétation ne serait pas exacte. La conception de l'apôtre ne repose pas en effet sur cet antique dualisme païen. Paul reste dans la tradition hébraïque qui n'a jamais uni, comme la philosophie grecque, les idées de matière et de mal. Pour les Juifs, le péché est si peu lié à la partie matérielle de l'homme comme à son principe, qu'ils ne peuvent pas séparer l'espoir d'une vie future de celui de la résurrection des corps. Ce n'est donc pas, pour eux, le corps qui est cause du péché. Jésus se place au même point de vue quand il dit : « Ce n'est pas ce qui «entre dans l'homme, c'est ce qui sort de son coeur qui souille l'homme » (Marc 7:15). Quand il dit ailleurs : « L'esprit est prompt, mais la chair est faible » (Marc 14 : 38), il ne s'agit donc pas du corps et de l'âme. Pour lui, comme plus tard pour l'apôtre Paul, la chair désigne l'homme naturel et l'esprit l'élément divin qui introduit l'homme dans une vie nouvelle. L'homme charnel c'est l'homme tout entier avant que la foi l'ait justifié, et l'homme spirituel c'est l'homme tout entier quand il est « en Christ ».
CHEOL
Voir Séjour des morts et Géhenne.
CHERUBIN
Ce mot évoque aujourd'hui l'idée d'une figure particulièrement gracieuse et jolie. En peinture et en sculpture, il désigne une tête d'enfant, avec des ailes, figurant un ange. Et cette acception du mot s'explique par le fait que l'ancienne théologie catholique avait placé les chérubins parmi les anges du second rang de la première hiérarchie. - Dans la Bible, les chérubins ne répondent pas à cette idée. Si nous pouvions voir leur image, telle qu'elle figurait dans le Temple de Salomon (1Ro 6: 23-28'), nous ne les confondrions plus avec les anges de la tradition chrétienne. Il est très vraisemblable qu'ils ressemblaient beaucoup plus aux animaux fantastiques munis d'ailes qui ornaient les temples babyloniens. S'ils avaient eu une apparence humaine, le prophète Ezéchiel n'aurait pu songer à en donner la description que nous trouvons au premier chapitre du livre qui porte son nom. Même si cette représentation lui est personnelle, elle ne devait pas être en opposition absolue avec la tradition. Or le chérubin d'Ezéchiel a quatre figures (d'homme, de lion, de taureau et d'aigle, quatre ailes et quatre mains). - Les chérubins nous apparaissent, dans l'Ancien Testament, comme les soutiens de Dieu quand il se manifeste sur la Terre dans sa gloire (Psaume 18). Pour Ezekiel ils soutiennent et font mouvoir le trône de Dieu (aussi ont-ils à côté d'eux des roues). Ils sont aussi les gardiens de l'endroit où Dieu est présent, comme le jardin d'Eden (Ge 3 : 24) ou l'arche (1Ro 6 : 23-28). Nous retrouvons les chérubins dans le livre de l'Apocalypse où ils sont encore les gardiens du trône de Dieu, mais où ils chantent la sainteté et la gloire divines (Apo 4 : 6 ; 5 : 6,11 ; 7 : 11 ; 14:3, etc.). Voir le mot : Anges.
CIEL
Les Israélites, comme tous les peuples orientaux, attachaient une grande importance à la contemplation du ciel et des étoiles, « nombreuses comme les grains de sable au bord de la mer » (Ge 15 : 5 ; 22 : 17 ; 24 : 6 ; Jer 33: 22). Leur cosmologie ressemblait à celle des Babyloniens. La terre était pour eux une surface plate partout entourée par les eaux de la mer, et le ciel une voûte solide reposant sur de hautes montagnes qui se dressent au bord de ces eaux et forment les colonnes du ciel (Job 26 : 11 ; 2Sa 22 : 8). Les poètes comparaient cette voûte à une tente (Esaïe 40 : 22 ; Ps 19 : 5) qui peut être « roulée » ainsi qu'un parchemin (Esa 34 : 4). Au-dessus d'elle les eaux encore : les eaux d'en haut, opposées aux mers, qui sont les eaux d'en bas (Ge 1 : 6-8). Au-dessous de la terre se trouvait le « séjour des morts » (voyez ces mots). Au-dessous de tout, les eaux toujours, celles de l'abîme (Ge 7: 11 ; 8 : 2 ; Am 7: 4).
Les mouvements des astres sont réglés par les lois immuables de Yahvé (Jer 31 : 35-36) que l'homme, dans sa faiblesse,.ne saurait connaître (Job 38 : 33), mais qu'il ne cesse d'admirer, en louant la toute-puissance de son Dieu (Esa 40 : 26). Le soleil, la lune et les étoiles ont été créées pour servir à diviser le temps en périodes (Ge 1 : 14 ; Psaume 104 : 19) : les jours et les mois.
Par opposition à la merveilleuse régularité des mouvements célestes les plus fréquemment observables, tous les phénomènes astronomiques qui semblaient échapper à cette régularité, parce qu'on ne savait pas encore les prévoir et qu'on n'en connaissait pas les causes, passaient pour avoir une signification redoutable: les éclipses du soleil ou de la lune, les étoiles filantes et les comètes (Amos 8: 9 ; Esa 13 : 10 ; Eze 32 : 7 ; Joe 2 : 10 ; 2 : 31 ; 3 : 15).
Pour les esprits primitifs, tout ce qui se meut est vivant et les corps célestes ne font pas exception à la règle. « L'armée des cieux », qui désigne les étoiles, est adorée par les peuples voisins d'Israël comme un ensemble imposant du divinités, et les prophètes condamnent sévèrement ce culte (Deutéronome 4: 19 ; 17 : 3 ; Jer 8 : 2 ; 19 : 13, etc.) qui s'était introduit en Israël (2Ro 21 : 5 ; 23 : 4, 5, 11). Au VII° siècle, en particulier, les habitants de Jérusalem et de quelques autres villes de Juda, un peu plus tard les Judéens réfugiés en Egypte faisaient des offrandes de gâteaux « à la Reine du Ciel », que l'on identifie soit avec la Lune, soit, plus justement sans doute, avec Vénus (Jer 7 : 16-20 ; 44 : 15-19). Mais certains textes nous montrent que cette condamnation ne visait pas l'idée même que les astres étaient des êtres doués de vie : on pouvait, en ce sens, les considérer comme soumis à Yahvé, qui leur a donné la vie (Ne 9 : 6) et qui peut avoir à les châtier (Esa 24 : 21). Il semble bien qu'on les confondît avec les êtres qu'on appelait « les Fils de Dieu » (Job 38 : 7). Et d'ordinaire quand on parlait du « Dieu des Armées » (voir ce mot), on faisait allusion à cette domination de Yahvé, qui est le Seigneur du ciel et de la terre, des vivants d'en haut et des vivants d'en bas.
Les Israélites avaient des noms pour les diverses constellations. Nos versions françaises mentionnent « la Grande Ourse avec ses petits », Orion et les Pléiades (Job 38 : 31-32 ; Amos 5 : 8) ; mais il est loin d'être certain que cette traduction soit exacte.
CIRCONCISION
Cette pratique extrêmement ancienne date peut-être des temps préhistoriques, car les anciens Hébreux avaient conservé la tradition qu'on devait y employer des couteaux de pierre (Josué 5 : 2 ; Ex 4 : 5). Elle paraît avoir été, à l'origine, le rite d'initiation qui faisait de l'enfant mâle un homme véritable, digne de faire partie du clan et apte au mariage. Plus tard, l'usage se transforma et les garçons furent circoncis dès leur plus tendre enfance.
Mais la circoncision n'eut pas d'abord le caractère d'un signe distinctif du clan ou de la nation, car elle était commune à bien des peuples (Jer 9: 25-26). Les anciens Israélites n'ont connu qu'un peuple d'incirconcis : les Philistins.
Il est difficile de dire si eux-mêmes ont toujours pratiqué ce rite. En effet,. on doit remarquer d'abord que toutes les vieilles traditions s'accordent à parler de son introduction en Israël ; elles ne. diffèrent que sur la date de cette introduction : l'une la place lors de l'arrivée du peuple en Canaan (Josué 5, où tout un développement du rédacteur du livre a pour but de mettre ce récit en harmonie avec ceux que nous allons encore citer) ; une seconde tradition fait remonter le rite à l'époque de Moïse, Moïse lui-même étant représenté comme incirconcis (Ex 4 : 24-26) ; plus tard enfin on le fit remonter jusqu'au temps d'Abraham (Genèse 34).
Il faut remarquer encore, dans le même ordre d'idées, que les lois les plus anciennes d'Israël ne font aucune mention de la circoncision, sans qu'on sache exactement s'il faut conclure de ce silence que la coutume n'avait pas encore été adoptée à cette époque, ou simplement qu'elle n'intéressait pas le législateur. Il semble bien, en tous cas, qu'elle était loin d'être alors, comme elle le fut plus tard, le symbole national et religieux du peuple. Elle pouvait, du fait de son caractère purement social et peut-être aussi du fait de son universelle application, ne pas figurer dans des codes de lois dont le but essentiel fut toujours d'acclimater au sein du peuple des pratiques nouvelles ou de rendre générales et incontestées des pratiques en voie d'acclimatation. La loi est réformatrice et ne s'occupe pas de ce qui a cause gagnée.
Il importe de remarquer enfin que les prophètes ne reconnaissent à la circoncision aucun caractère religieux. Jérémie n'établit aucune différence entre la circoncision d'Israël et celle des autres peuples : « Voici, les jours viennent, dit Yahvé, où je châtierai tous les circoncis qui ne le sont pas de coeur, l'Egypte, Juda, Edom, les enfants d'Ammon et Moab » (Jer 9: 25-26). Il dit : « Circoncisez-vous à Yahvé » (Jer 4 : 4), comme si le rite pratiqué en Israël n'avait aucun rapport avec le culte. Et l'on sait ce que Jérémie entendait par la vraie circoncision : en opposition avec le rite tout extérieur, le prophète réclame la pureté morale : « Circoncisez vos coeurs, hommes de Juda et habitants de Jérusalem » (Jer 4: 4). Et la même pensée se retrouve dans d'autres textes d'inspiration prophétique (Deutéronome 10 : 16 ; 30 : 6).
Toutes ces remarques semblent bien nous amener à la conclusion que la circoncision eut d'abord un caractère plus social que religieux.
Ce caractère social était destiné à s'effacer par la suite. C'est ce qui se produisit au temps de l'exil, quand les Juifs se trouvèrent en contact journalier avec des peuples incirconcis, Assyriens, Babyloniens et Perses, au milieu desquels leur pratique de la circoncision, comme celle du sabbat (voyez ce mot) constitua leur marque distinctive essentielle, le signe particulier, gravé dans la chair, de leur alliance avec Yahvé. Et la loi de ces temps nouveaux fera de la circoncision et du sabbat les deux exigences capitales du Dieu d'Israël. Il sera interdit, par exemple, de participer effectivement à la Pâque si l'on n'a pas reçu la circoncision, interdiction qui vise particulièrement l'esclave (Ex 12 : 44) et l'étranger (Ex 12:48 : voyez ces deux mots).
A l'époque gréco-romaine - et par conséquent au temps de Jésus et des apôtres - la circoncision était exigée des prosélytes (voyez ce mot). Et ce fait est à l'origine de la crise si grave qui menaça de compromettre l'oeuvre de l'apôtre Paul et à laquelle, par suite, furent suspendues, pendant un temps, les destinées mêmes du christianisme. Deux doctrines, passionnément soutenues l'une et l'autre, s'affrontaient : pour l'apôtre Paul, un païen devenait chrétien par le seul fait de sa foi au Christ et il ne pouvait être question d'exiger de lui aucune autre condition à son admission dans l'Eglise ; pour les adversaires de l'apôtre, juifs convertis à l'Evangile comme Paul mais non pas libérés comme lui de la Loi, le christianisme demeurait comme une secte ou un parti à l'intérieur du judaïsme. Ces judéo-chrétiens, comme on les a appelés, ne concevaient donc pas qu'un païen pût se convertir à l'Evangile sans devenir juif, ou, plus exactement, sans faire acte de prosélyte et sans s'assujettir par là à observer la Loi et d'abord à accepter la circoncision.
C'est ainsi qu'aux environs de l'an 50 l'Eglise de Jérusalem n'est guère autre chose qu'une secte de messianistes juifs, alors même que se développe hors d'elle, avec une extraordinaire puissance, la mission de l'apôtre Paul parmi les païens. Des Eglises nouvelles naissent partout, ardentes et pleines de foi, qui grandissent et qui essaiment sans se soucier du judaïsme, inconscientes de la crise qui va éclater. Mais les judéo-chrétiens de Jérusalem apprennent l'existence de ces étranges sociétés de chrétiens qui ignorent la religion d'Israël et sont des incirconcis ! Evidemment, ils hésitent à entrer en lutte contre les Eglises de Paul, car enfin ces Eglises se réclament, elles aussi, de Jésus, et l'on ne peut contester qu'elles soient zélées et, conquérantes. On ne sait exactement, à Jérusalem, quelle attitude il convient de prendre à leur égard. On discute : il y a des hésitants et il y a des intransigeants. Mais ce sont finalement les intransigeants qui l'emportent.
La conférence de Jérusalem, où Paul rend compte de sa mission et expose ses principes (Galates 2 : 1-10) semble aboutir à un accord et mettre fin à la crise. Il n'en est rien cependant, car les intransigeants n'ont pas désarmé. Et c'est alors, précisément, qu'ils commencent les hostilités. Leur action fut facilitée par le fait que la plupart des Eglises fondées par l'apôtre en pays païens contenaient un élément plus ou moins important de juifs convertis à l'Evangile. Circoncis et incirconcis y vivaient en paix parce que la question de la Loi n'était posée par personne. Mais que quelqu'un vint à la poser, et la paix, en même temps que la vie même des Eglises, pouvait être sérieusement menacée. C'est précisément ce qui arriva : les intransigeants de Jérusalem envoyèrent des délégués aux Eglises de Galatie, réussirent à les diviser et furent bien près de les arracher à l'influence de Paul. Paul ne remporta sans doute la victoire définitive que par l'arme merveilleusement acérée que fut entre ses mains la lettre qu'il écrivit aux Galates. Il suffit de la lire pour se convaincre qu'elle tourne tout entière autour de la question de la circoncision.
Une lutte analogue recommença un peu plus tard à Corinthe, mais il semble que les adversaires de Paul, instruits par leur défaite en Galatie, n'aient pas osé porter tout de suite leurs polémiques sur la question de la circoncision ; il serait temps pour eux d'aborder ce point capital une fois la victoire remportée ; et c'est sans doute parce qu'il a deviné cette tactique que l'apôtre les accuse de fausseté et de dissimulation (2Co 11 : 13). Ici encore, la victoire fut à l'apôtre. Et ce fut la victoire définitive. La question de la circoncision ne fut plus jamais posée. L'Evangile de la foi et de la liberté était sauvé.
CITES DE REFUGE
Voir Asile.
CLANS et TRIBUS
Quand Saül dit à Samuel : « Ne suis-je pas Benjamite, de l'une des plus petites tribus d'Israël et ma famille n'est-elle pas la moindre de toutes les familles de la tribu de Benjamin ? » (1Sa 9 : 21, version Segond), le mot de famille est pris dans un sens très large et serait avantageusement remplacé, là comme en maint autre lieu, par le terme de clan. Entre le groupe constitué par la famille proprement dite (en hébreu : « maison du père ») et la tribu existait en Israël un groupe intermédiaire auquel il est constamment fait allusion dans l'Ancien Testament, mais que nos versions font pour ainsi dire disparaître du texte en le confondant avec la famille. Il ne parait pas possible de trouver pour ce groupe une désignation plus appropriée que celle de clan. La tribu était donc subdivisée en clans comprenant chacun un nombre variable de familles. Cette organisation sociale, d'origine nomade, se conserva tout au long de l'histoire d'Israël. Mais il est fort probable que ce fat avant l'établissement en Canaan et dans les siècles immédiatement postérieurs que le clam joua dans cette histoire le rôle le plus important. Le clan parait avoir été, plus que ta tribu, la subdivision fondamentale du peuple hébreu. En tous cas il y eut certainement des clans avant que les tribus aient eu une grande importance sociale et politique.
Le clan était une association de « frères » (1Sa 20:29, où il faut lire : « nous avons dans la ville un sacrifice de clan... permets que j'aille en hâte voir mes frères »). Ce terme de frères n'impliquait pas nécessairement, bien qu'on le crût, que tous les membres du clan fussent les descendants d'un même ancêtre, mais il exprimait l'étroite unité morale et religieuse d'une petite société fermée. Le texte précédemment cité nous montre ces frères (au temps de Saül) liés à leurs propres yeux par le devoir de se réunir pour un sacrifice solennel.
Le nombre des membres du clan parait avoir été très variable : 300 pour Abiézer, (Juges 7 : 16-22 ; 8 : 4), 600 pour Dan (Juges 18: 11), peut-être 1.000 ailleurs (le mot millier paraissant avoir été synonyme du mot que nous rendons par clan). En temps ordinaire, le clan était dirigé par les chefs de familles ; à la guerre, un capitaine pouvait prendre le commandement ; mais l'autorité de ces hommes était faite de leur seul ascendant moral. En fait, tous les hommes du clan se sentaient égaux entre eux, ayant mêmes droits et mêmes obligations. Au nombre de leurs devoirs les plus sacrés étaient la vengeance du sang (voir : Vengeance) et la participation de tous aux mêmes entreprises, émigration (Juges 18) ou expédition guerrière (Juges 8 : 2; 18-21).
La tribu comprenait donc un certain nombre de clans ; on conçoit que la cohésion de ses membres entre eux fût â la fois moins étroite que dans le clan et plus étroite que dans l'ensemble de la nation. On croyait que tous les membres de la tribu (comme ceux du clan) descendaient d'un même ancêtre. Les douze tribus de la tradition étaient censées issues des douze fils de Jacob et chacune portait le nom de cet ancêtre, comme Israël tout entier portait le nom de Jacob. Ce nombre de douze tribus n'existait sans doute pas lors de l'invasion du pays de Canaan. Peut-être même n'a-t-il jamais existé douze tribus à la fois. Ce qui semble certain c'est que l'accession du peuple à la vie sédentaire eut pour résultat d'amener de nouvelles combinaisons de clans par lesquelles augmentèrent ou diminuèrent le nombre des tribus, soit qu'une tribu devint assez nombreuse pour donner naissance à deux tribus nouvelles, soit au contraire qu'elle déclinât au point d'être obligée de s'agréger à une tribu soeur ou de disparaître. Joseph se scinde en Ephraïm et Manassé ; Ruben, Siméon et Lévi disparaissent de bonne heure ; Galaad, de tribu (Juges 5 : 14-17) devient clan (Josué 17 : 1-2) tandis que Juda s'accroît rapidement.
La conquête de Canaan eut aussi pour résultat que clans et tribus correspondirent progressivement à des localisations géographiques plutôt qu'à des liens de parenté, réels ou fictifs. Le clan se confondit souvent avec les habitants d'un canton ou d'une ville, la tribu avec ceux d'une région plus étendue.
COHORTE
Dixième partie de la Légion (voir ce mot) et divisée elle-même en centuries (voir centurion). La cohorte était composée de 500 à 1.000 hommes, suivant les lieux et les temps. A Jérusalem, son chef était un tribun (voir ce mot ; Marc 15 : 16 ; Mt 27:27 ; Ac 21 : 31 ; 23 : 17, etc.).
COLERE DE YAHVE
Avant l'époque des grands prophètes (VIII° et VII° siècles avant Jésus-Christ), Israël vivait dans la persuasion que Yahvé ne voulait que la grandeur et la prospérité de son peuple. Yahvé n'était pas encore adoré comme le Dieu de l'univers : il était le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, le
Dieu d'un peuple, le Dieu d'Israël. Les autres nations avaient aussi des dieux protecteurs dont l'existence et le pouvoir n'étaient pas mis en doute. Dans une telle conception, que serait-il resté à Yahvé, s'il n'avait pas défendu son peuple ? Sa propre gloire n'était-elle pas faite de la gloire d'Israël ? On avait donc la plus parfaite confiance en sa protection : c'était de sa main qu'on avait reçu en héritage le pays de Canaan, et c'était par sa faveur qu'on en conservait la paisible jouissance ; c'est lui qui multipliait le peuple et lui donnait des chefs militaires, des prêtres et des prophètes ; c'est à lui qu'on rendait grâces pour les récoltes et les oracles, comme pour les délivrances à main armée.
Cependant on ne pouvait se dissimuler que cette protection divine faisait parfois défaut : la guerre n'était pas toujours victorieuse, la sécheresse compromettait les récoltes, la peste décimait le peuple et les prêtres et les prophètes ne trouvaient pas infailliblement de remèdes à ces maux. On en concluait que le malheur même était voulu de Yahvé et on l'attribuait à sa colère.
Le sentiment moral venait d'ailleurs renforcer cette conclusion, car il était naturel de penser que Yahvé n'approuvait pas toujours la conduite de son peuple et qu'il prenait offense des crimes commis en Israël. En cas d'infortune nationale, on était ainsi amené à chercher l'explication de la colère divine dans les fautes des hommes. Il fallait alors découvrir les coupables et apaiser Dieu par leur châtiment. Yahvé, en effet, était déjà conçu, dans ces temps primitifs; comme le protecteur du droit, le patron de la veuve et de l'orphelin, le vengeur du sang innocent : les admirables récits da meurtre d'Urie (2Sa 11-12) et de Naboth (1Ro 21) le prouvent surabondamment.
Mais d'innombrables textes ne nous en montrent pas moins qu'il s'en fallait de beaucoup, dans les idées de ce temps, que la colère de Yahvé se confondît avec l'exercice d'une stricte justice. On concevait Dieu à l'image de l'homme et on lui prêtait souvent des sentiments plus humains que divins.
D'abord, on admettait que Yahvé ignorât parfois le crime et ne vit pas toutes les actions des hommes. Quand on croyait quelqu'un coupable, on faisait le voeu que Dieu le regardât, condition indispensable pour qu'il pût te juger (Ex 5 : 21). Il arrivait aussi, pensait-on, que Yahvé ne découvrit le crime qu'après de longues années. Juda dit à Joseph; après que la coupe d'argent eût été découverte dans le sac de Benjamin: «Dieu a trouvé l'iniquité de tes serviteurs » (Genèse 44 : 16). Les fautes impunies donnaient aussi à penser que Yahvé pouvait les avoir oubliées. La veuve de Sarepta reproche à Elie d'avoir rappelé à Dieu le souvenir de son iniquité et explique ainsi la maladie de son fils (1Ro 17 : 18). Quand un crime n'a pas eu de témoins et qu'il n'y a pas de preuves contre l'inculpé, il arrive que là loi prescrive à l'offensé une offrande destinée à rappeler le crime à Dieu : la justice humaine étant impuissante, on essaye d'attirer l'attention de la justice divine sur cette cause difficile (Nombres 5: 15). C'est la même conception d'un Dieu qui ne remarque pas tout et qui ne se rappelle pas tout, qui apparaît dans la prière d'Anne, mère de Samuel: « Yahvé des armées ! si tu daignes regarder l'affliction de ta servante, si tu te souviens de moi, si tu ne m'oublies pas... » (1Sa 1 : 11).
Par contre, Yahvé n'ignore ni n'oublie jamais une offense qui lui est faite à lui-même personnellement. Sa colère alors ne manque jamais d'atteindre le coupable. Les fils du prêtre Eli, prêtres eux-mêmes, prennent la part des sacrifices destinée aux prêtres avant d'avoir fait à Yahvé la sienne. Yahvé, qui veut être servi le premier, fait périr les criminels et retomber le châtiment sur leurs descendants en leur interdisant à jamais l'accès au sacerdoce : « Jamais le crime de la maison d'Eli ne sera expié » (1Sa 3 : 14). Eli avait cependant essayé d'expliquer à ses fils qu'il est autrement dangereux de pêcher contre un Dieu que contre son prochain : « Si un homme pêche contre un autre homme, Dieu s'entremettra comme un arbitre entre eux ; mais si c'est contre Yahvé qu'il pèche, qui pourra s'entremettre en sa faveur » (2 : 25) ? - L'arche (voyez ce mot) est conçue comme l'habitation du Dieu d'Israël ; quiconque y touche commet une profanation et offense gravement la divinité ; celle-ci se venge en faisant périr les téméraires (2Sa 6 : 6-11). - Des milliers d'hommes sont également victimes de la colère de Yahvé pour d'autres crimes qui l'ont gravement offensé et qui ont été commis par Acan (Josué 7), par Saül (1Sa 15), par David (2Sa 24), par Achab (1Ro 20).
Comme Dieu d'Israël, Yahvé est atteint quand son peuple est atteint : il est personnellement offensé par ceux qui menacent Israël. S'il livre parfois son peuple à l'ennemi, c'est pour le punir ; mais l'ennemi d'Israël n'en reste pas moins l'ennemi de Yahvé ; et la colère de Yahvé contre l'ennemi est terrible ; elle se manifeste souvent par l'ordre donné à son peuple victorieux de massacrer les vaincus jusqu'au dernier : « Ils s'emparèrent de la ville et ils dévouèrent par interdit, au fil de l'épée, tout ce qui était dans la ville, hommes et femmes, enfants et vieillards, jusqu'aux boeufs, aux brebis et aux ânes » (Josué 6 : 21 ; voir Interdit et Anathème et comparez : Josué 10 : 28 ; 1Sa 15 : 3). Aucun texte ancien ne dit jamais que Yahvé ait donné raison contre Israël à aucune autre nation ; à moins d'avoir des motifs d'être irrité contre son peuple, il le défend comme s'il se défendait lui-même. Les considérations d'ordre moral n'interviennent ici que dans une très faible mesure. A leur départ d'Egypte, les Israélites reçoivent l'ordre de dépouiller leurs ennemis (Ex 3 : 32) ; la colère de Yahvé s'enflamme contre un pharaon qui a ravi Sara à Abraham, à la suite d'un mensonge du patriarche; et non seulement celui-ci n'est pas puni, mais, après que le pharaon a été « frappé de grandes plaies », Abraham, secouru par son Dieu, peut quitter l'Egypte en sécurité avec tous les présents qu'il reçus en échange de Sara (Exode 12: 10-20) ; Jacob est protégé de même malgré toutes ses fautes (Ge 27 à 31) : c'est que les patriarches représentent déjà Israël et les intérêts de Yahvé.
La colère de Yahvé atteint les enfants du criminel en même temps que le criminel ou à sa place. Koré, Dathan et Abiram, révoltés contre Moïse, ne périssent pas seuls, mais avec toutes « leurs maisons » (Nombres 16). David, après le meurtre d'Urie, n'est puni qu'en la personne de son enfant (2Sa 12-13). De même tout le peuple peut être châtié pour la faute d'un seul (Josué 7-8 ; 1Sa 14:37-45 ; 2Sa 21 : 1-14 ; 24). Le fléau national, déchaîné par Yahvé, oblige le peuple à rechercher le coupable, car il faut apaiser la colère divine. Les peines prévues par la loi contre toute espèce de crime, comme aussi, dans certains cas, le culte lui-même, n'ont guère d'autre but que celui-là : prévenir la vengeance de Dieu.
On pensait, en outre, que Yahvé pouvait éprouver de la colère à l'égard d'un homme pour la seule raison qu'il ne l'aimait pas. On prêtait à Dieu des sentiments de sympathie ou d'antipathie spontanées dont il était inutile de chercher les motifs. On ne pouvait dire, à ce sujet, qu'une seule chose : c'est qu'il faisait grâce à qui il faisait grâce et miséricorde à qui il faisait miséricorde (Ex 33 : 19). On ne savait pas pourquoi Yahvé avait regardé avec faveur Abel et son offrande et sans faveur Caïn et la sienne (Ge 4 : 4-5), pourquoi il avait préféré Jacob à Esaü. On admettait qu'il eût des favoris. On s'inclinait devant ses disgrâces comme devant ses grâces. Le sentiment de la justice n'était pas encore assez puissant pour que ces caprices de la divinité parussent choquants.
Si l'on ajoute que la colère de Yahvé s'abattait sur le criminel sans avoir égard à ses intentions, on aura relevé les caractères les plus importants de la conception primitive de la divinité chez les anciens Israélites. Ceux-ci, malgré quelques intuitions plus élevées (Ge 20: 4-5), ne connaissaient guère que les crimes de fait (voyez : Vengeance) et se faisaient un Dieu à leur image. Abimélek va subir toute la rigueur de la colère divine à cause d'un acte qu'il croyait légitime : il avait introduit Sara dans son harem ignorant qu'elle fût la femme d'Abraham ; Dieu lui dit, d'ailleurs, en songe : « Je sais que tu as agi avec un coeur pur » ; cependant il le châtie par une maladie et l'aurait fait périr si le crime involontaire avait été consommé ; encore faudra-t-il qu'Abraham, qui, en trompant Abimélek, a attiré sur ce dernier la colère divine, intercède auprès de Dieu pour obtenir sa guérison (Genèse 20).
C'est contre cette conception grossière de la colère de Dieu que s'élevèrent avec force les premiers grands prophètes (voyez ce mot).
Ils proclamèrent d'abord que la colère de Dieu ne se manifeste jamais que contre 'l'injustice. Yahvé est le seul Dieu juste et il n'y a jamais rien d'arbitraire ou de capricieux dans ses jugements: par suite, l'homme n'a plus aucune raison de croire qu'il peut être frappé pour des causes inconnues de lui, ou épargné malgré ses péchés.
Et il devait résulter de là qu'Israël même, le peuple de Dieu, ne pouvait jouir d'aucune impunité s'il vivait dans l'iniquité. Les prophètes, en effet, n'hésitent pas à affirmer que Dieu ne reculera pas, si cela est juste, devant la nécessité d'anéantir son peuple lui-même. Yahvé est d'ailleurs devenu le Dieu de qui dépendent toutes les nations et qui les juge sans aucune partialité.
A bien des égards, c'était là une religion nouvelle : celle du Dieu de justice. Mais il restait aux hommes à recevoir la révélation de la seule vraie religion celle du Dieu d'amour. L'Evangile du Père a effacé la colère de Dieu.
CORNES
Voir Autel.
CRAIGNANT DIEU (Les)
Cette expression, particulière au livre des Actes des Apôtres, désigne une catégorie d'hommes tout à fait spéciale. Aussi nos versions, pour faire ressortir ce fait, devraient-elles la placer entre guillemets (les « craignant Dieu ») et ne pas la remplacer par un adjectif pouvant plus facilement encore désigner d'autres hommes, comme « pieux ». Les « craignant Dieu » étaient des païens gagnés au judaïsme mais non encore circoncis (Ac 10 : 2 et 7 ; 13: 43; 17: 4 ; voir : prosélytes).
DEMONS
Ce terme générique a pour équivalent en hébreu un mot qui ne se rencontre que deux fois dans l'Ancien Testament (De 32 : 17 ; Ps 106: 37) ; les êtres surnaturels et malfaisants auxquels le peuple croyait étaient généralement désignés par des noms divers, selon leur espèce.
II est fort peu question d'êtres semblables dans les livres de l'Ancien Testament antérieurs à l'exil, bien que la croyance à ces mauvais esprits occupât probablement en Israël, comme chez les autres peuples sémitiques, une certaine place dans les superstitions populaires du temps. On peut expliquer ce silence par deux considérations. Il est certain, d'abord, que les écrits dont nous parlons sont tous issus des écoles prophétiques, hostiles à ces superstitions. Il est facile de constater ensuite que la religion populaire elle-même,par sa conception particulière de la divinité, ne favorisait pas la croyance aux démons. L'ancien Israélite estimait, en effet, que Yahvé lui-même peut inspirer à l'homme le mal comme le bien et l'obliger à pécher pour le perdre ensuite (Juges 9: 23: lieu envoie un mauvais esprit; Ex 10:20: Yahvé endurcit le coeur de Pharaon ; 1Sa 2 : 25 : les fils d'Eli n'écoutent pas leur père parce que Yahvé veut les faire mourir ; 2Sa 24 : 1 : Yahvé excite David à pécher ; 1Ro 12 : 15 : Jéroboam n'écoute pas tes sages avis des « anciens », dirigé en cela par Yahvé ; 2Ro 2.4 : 19-20 : Sédécias fait le mal « à cause de la colère de Yahvé contre Jérusalem et contre Juda, qu'il voulait rejeter de devant sa face »), L'intervention séductrice d'êtres surnaturels, voués au mal, n'était donc pas nécessaire pour expliquer le péché de l'homme. Plus tard seulement, quand la notion de Dieu se fut épurée, les Israélites, subissant d'ailleurs l'influence des peuples avec lesquels l'exil les mit en rapport, rendirent à la croyance aux démons une grande importance.
Cette croyance reprit vie d'autant plus facilement qu'elle n'avait sans doute jamais été totalement extirpée par les prophètes. Les livres dus à l'inspiration de ces derniers nous en fournissent eux-mêmes quelques preuves. Ils font allusion, ici et là, sous des noms divers, à des êtres malfaisants, reconnaissables dans le texte hébreu, mais qui passent généralement inaperçus dans nos traductions, comme ceux de la Lilit (Segond : « le spectre de la nuit », Esa 34 : 14), des Seïrim (Segond : « les boucs », Esa 13 : 21 ; 34 : 14), c'est-à-dire les « velus », auxquels on offrait des sacrifices (Le 17 : 7 et 2Ch 11:15), et de quelques autres encore, tous habitant avec les bêtes sauvages les lieux déserts ou les steppes arides. Peut-être peut-on citer encore Azazel, qui habitait te désert de Juda et auquel, plus tard, on envoyait chaque année le bouc chargé des péchés du peuple (Le 16: 3-10). Les livres anciens ne parlent pas de cet être mystérieux, mais il semble bien être, dans la religion postexilique, une survivance des croyances ancestrales. Tous ces êtres malfaisants semblent, d'ailleurs, être à redouter comme le sont certaines bêtes sauvages plutôt que comme des puissances séductrices, qui entraîneraient l'homme à faire le mal.
Après l'exil, nous l'avons dit, les Israélites, instruits par les prophètes, auraient cru faire injure à Yahvé en lui imputant l'inspiration de mauvaises pensées. C'est ainsi qu'on voit, dans le livre des Chroniques, l'auteur reproduisant un ancien récit de la vie de David, y remplacer le nom de Dieu par celui de Satan, car on ne pouvait plus admettre que Yahvé fît pécher un homme pour le punir ensuite (2 Samuel 24 et 1Ch 21). Il y aura donc désormais un Esprit du mal (voir : Satan), mais à côté de lui, les démons des anciennes croyances prendront place et on leur adjoindra les divinités païennes, car le monothéisme juif aura cet étrange résultat, non de supprimer l'existence de ces dieux, mais de les faire passer au rang des ennemis surnaturels du vrai Dieu. Un ennemi de Yahvé, cité plusieurs fois, est Rahab (traduction Segond : « l'Egypte » : Esa 51 : 9 ; « l'orgueil » : Job 9 : 13 ; 26 : 13 ; Psaume 89 : 10). Un autre, si ce n'est le même, est le Léviathan (Job 3 : 8 ; Psaume 74 : 14 : dans ce dernier passage, Segond traduit Léviathan par « monstre ») ; mais ces ennemis-là ont été vaincus par Yahvé dans les anciens temps et l'un au moins d'entre eux appartient plutôt à une très antique mythologie qu'à la démonologie proprement dite qui nous intéresse ici. Ce qui est bien certain, c'est que les temps qui séparent le retour de l'exil de l'ère chrétienne et qui ont donné naissance à la littérature dite apocryphe et aux pseudépigraphes de l'A. T. ont vu la croyance aux démons prendre un considérable essor, à la fois par un retour aux vieilles superstitions populaires et sous l'influence des religions étrangères. Le livre de Tobie parle du démon Asmodée ; dans le livre d'Enoch, Azazel, avec ses complices, semble être le chef des démons.
Quand nous arrivons à l'époque de Jésus, cette croyance aux démons et à leur influence sur la vie des hommes a pris un empire extraordinaire sur les esprits, sous la forme de la croyance à la possession. On n'a pas cessé de croire que les démons sont des esprits séducteurs qui entraînent l'homme au péché (Matthieu 12 : 43 ; Luc 11 : 21 ; 1Co 10 : 20 ; 1Ti 4 : 1 ; Apocalypse 9 : 20). Les possédés peuvent donc être des pécheurs asservis aux démons ; mais ce qui est surtout mis en relief, en particulier dans les Evangiles synoptiques, et parfois dans l'Evangile de Jean et le livre des Actes c'est le trouble que la possession démoniaque introduit dans la vie physique ou psychique de ceux qui en sont les victimes : les possédés sont des malades. Assurément, tous les malades ne sont pas des possédés, et cette distinction apparaît nettement dans Mt 10 : 18; Marc 1:32; Luc 6: 17. Mt 4: 24 distingue encore la catégorie des lunatiques. Une maladie qui n'était pas, au temps de
Jésus, mise en rapport avec l'action des démons est la lèpre. D'une façon générale on peut dire que les maladies mises sur le compte de la possession étaient les maladies d'ordre psychique : l'épilepsie et tout espèce de troubles nerveux et mentaux. Il y a cependant des exceptions : Matthieu et Luc expliquent par la possessions des cas de surdité (Mt 9 : 32 ; Luc 11 : 14), de cécité (Matthieu 12: 22) ou d'autre infirmité purement physique, telle qu'une déviation de la colonne vertébrale (Luc 13 : 11). Il semble donc bien qu'il existait à cette époque une certaine tendance à élargir l'influence de la possession démoniaque et à l'étendre peu à peu à toutes sortes de maladies ou d'infirmités.
La conséquence de cette croyance à la possession était qu'on ne pouvait expliquer la guérison que par la disparition du mauvais esprit et qu'on pensait ne pouvoir l'obtenir que par son expulsion. La médecine faisait place à l'exorcisme. Les Scribes et les Docteurs de la Loi chassaient les démons; aucune science spéciale ne leur était nécessaire ; ils prononçaient des formules magiques, versaient de l'huile sur la tête du malade et vraisemblablement n'obtenaient la guérison que dans la mesure de leur ascendant moral et de la foi du malade.
DESTRUCTEUR
Voir Ange.
DEUIL
Les peuples primitifs, comme beaucoup de peuples sauvages actuels, estimaient que l'homme est sans cesse menacé par des puissances invisibles, par des « esprits ». Dans certaines situations de la vie, pensait-on, l'homme est plus particulièrement en danger, parce que plus voisin de ces puissances : quand il pénètre dans un sanctuaire, quand il subit les épreuves de l'initiation, quand la coutume l'oblige à assumer la tâche de « vengeur du sang » (voir : Vengeance), etc. Il faut alors qu'il se prémunisse contre l'influence funeste. Dans le deuil aussi, on risque d'entrer en contact avec l'esprit du défunt, qui peut continuer à hanter les lieux qu'il a habités au cours de sa vie terrestre, et il faut donc, dans ce cas encore, se mettre en garde contre l'invisible danger que l'on court. La plupart des anciennes coutumes de deuil étaient des pratiques préservatrices.
Il est difficile d'échapper à cette conclusion quand on voit les mêmes procédés employés par les anciens Israélites dans des cas très divers, analogie qui ne peut s'expliquer que par l'identité du but poursuivi. En pénétrant dans la terre sainte d'un sanctuaire, on devait ou bien se mettre un vêtement spécial, ce qui était le cas des prêtres (Eze 44 : 19 ; Ex 28 ; 29 : 5-9 ; Le 8 : 16) ou bien avoir lavé ses vêtements ordinaires, ce qui était obligatoire pour tous les fidèles (Ex 19: 10 et 14 ; Nombres 8 : 7). On pensait que certains effluves invisibles étaient susceptibles de s'attacher au vêtement : il ne fallait pas que les effluves de la vie sociale pénétrassent dans le lieu saint et il fallait éviter que le fluide sacré fût transporté dans la vie profane. Le sacré et le profane devaient être rigoureusement séparés. Ezekiel en un temps cependant bien éloigné des origines, dira encore que le prêtre doit dépouiller son vêtement sacerdotal avant de quitter le temple, « de peur qu'il ne sanctifie le peuple » (Eze 44:19 voir Sainteté). Sanctifier signifie ici « contaminer » par un contact considéré comme très redoutable partout ailleurs que dans le sanctuaire, où l'on ne pénètre, d'ailleurs comme nous venons de le voir, qu'après s'être prémuni contre le dangereux fluide. Mais l'esprit du mort est aussi quelque chose de divin et les mêmes précautions doivent protéger celui qui risque d'être en contact avec lui : aussi, dans le deuil, quitte-t-on le vêtement de la vie ordinaire pour revêtir le sac, costume sans doute plus primitif et plus grossier (Genèse 37 : 34; 1Ro 21 : 27 ; 2Ro 19 : 1 ; Esther 4 : 1 etc.).
C'était encore une pratique de préservation fréquente dans le deuil, que de se rouler dans la cendre (voir ce mot) ou dans la poussière, ou, plus simplement de se mettre de la cendre ou de la poussière sur la tête, peut-être, à l'origine, avec l'intention de se rendre méconnaissable à l'esprit du trépassé (1Sa 4:12 ; 2Sa 13 : 19 ; Jer 6 : 26, etc.).
Il est vrai qu'à l'époque où furent composés même les plus anciens livres de la Bible, on n'attachait plus à ces rites du deuil d'autre signification que celle de la douleur ; on ne les considérait plus que comme des signes de chagrin et c'est pourquoi les mêmes gestes finirent par devenir une manifestation de la peine morale, quelle qu'en fût la cause. La survivance d'une coutume après la disparition de sa signification primitive est un fait très fréquent dans l'histoire des moeurs et l'on reconnaît ce fait d'autant plus facilement que la signification nouvelle donnée à l'ancienne coutume s'y adapte moins naturellement. On peut concevoir que l'habitude de se revêtir d'un sac et de se couvrir la tête de poussière ait fini par être simplement un signe de douleur morale, si ces gestes ont d'abord signifié autre chose, mais on ne, peut certainement pas admettre que des actes si particuliers, si étranges aussi, aient jamais été des manifestations spontanées de désappointement, de désespoir, d'indignation ou de simple tristesse.
Mais à côté des pratiques préservatives, le deuil comportait aussi des rites ayant pour but de rendre le mort favorable aux vivants ou de l'apaiser, si les vivants pouvaient craindre sa colère : ce sont les pratiques propitiatoires, au premier rang desquelles il faut placer la lamentation (Ge 50 : 1) ; 1Ch 35 : 25 ; Jer 9 : 17-18, etc.). Une autre coutume était celle qui consistait à se faire des incisions ou des tonsures « pour un mort ». La loi interdisait cette pratique comme incompatible avec le culte de Yahvé, sans doute parce qu'elle attribuait aux morts un caractère divin (Deutéronome 14 : 1-2 ; Le 19 : 28 ; 21 : 5 ; Jer 16:6 ; 41 : 5 ; 47 : 5 ; 48 : 37). La tonsure a pu primitivement avoir pour but une offrande de cheveux au mort et l'incision une offrande de sang (voir aussi : Jeûne).
DIABLE
Voir Satan.
DIACRE et DIACONESSE
Ces femmes dérivent du grec diaconos, qui signifie serviteur, au sens propre celui qui prépare ou sert les repas, au figuré celui qui se met librement au service de ses frères ou au service d'une cause. Il a ces deux significations dans les Evangiles et les Epitres. Dans la parabole des noces, les diaconoï sont les domestiques qui servent les convives (Matthieu 22 : 13) ; dans sa réponse aux fils de Zébédée Jésus dit à ses disciples que parmi eux le plus grand sera celui qui se fera le diaconos des autres. Paul emploie souvent ce mot dans le sens de serviteur de l'Evangile, ou de Christ, ou de Dieu. Il appelle Timothée diaconos de Dieu (1Th 3 : 2) et il se donne à lui-même le même titre (1Co 3 : 5 ; Ephésiens 3 : 7 ; Colossiens 1 : 23-24).
Mais le terme diaconos désigne aussi, dans le Nouveau Testament, la fonction exercée dans l'Eglise par lés diacres. Le récit de l'institution des diacres se trouve dans Actes 6 : 1-6, car, bien que le nom de diacre ne figure pas dans le récit, la. tradition de l'Eglise a toujours considéré les sept élus de Jérusalem comme les premiers diacres. - Dans tes épîtres de Paul, ou le mot diaconos revient souvent, il n'y a que deux ou trois passages où il désigne indubitablement la fonction ecclésiastique : l'épître aux Philippiens est adressée « à tous les saints en Jésus-Christ qui sont à Philippes, ainsi qu'aux évêques et aux diacres » (Phi 1 : 1 ; voir : évêque). La 1° épître à Timothée contient des recommandations détaillées sur les qualités morales qui doivent caractériser les diacres (1Ti 3: 8-13). - Qu'il y ait eu, dans les Eglises fondées par Paul, des diaconesses à côté des diacres, c'est ce qui résulte du dernier passage cité. En effet, au v. 11, il ne faut pas lire, avec certaines de nos versions, « leurs femmes » (c'est-à-dire celle des diacres, mais « les femmes » (sous-entendu : celles qui exercent la même fonction). Romains 16: 1, confirme cette interprétation en nous parlant de Phoebé « qui est diaconos de l'Eglise qui est à Cenchrae ».
On sait par 1Ti 3 : 8-13, quelles étaient les qualités exigées des diacres et des diaconesses. Quant à leurs fonctions, dans les Eglises missionnaires de Paul elles ne sont nulle part précisées, mais il y a tout lieu de croire qu'elles furent maintenues dans la sphère d'activité suggérée par le titre de diaconos = serviteur. Ces hommes et ces femmes sont au service de l'Eglise et en particulier de ses membres les plus déshérités, les pauvres, les infirmes et les malades.
DIEU
Le mot hébreu signifiant « dieu » est « élohim », qui est le pluriel de « éloah ». Mais le singulier n'est guère employé qu'en poésie, surtout dans le livre de Job. On a expliqué ce pluriel de deux façons : soit comme un héritage du polythéisme, soit comme une marque de déférence à l'égard de la divinité (pluriel de majesté).
Mais les dieux de l'antiquité avaient tous des noms propres et le dieu d'Israël portait un nom qui a longtemps été rendu par « Jéhovah ». Nous savons cependant qu'il ne s'appelait pas ainsi. La langue hébraïque ancienne n'avait pas de voyelles. Nous ne sommes donc sûrs que des consonnes qui formaient ce nom : J. H. V. H., ou Y. H. V. H. D'où viennent donc les voyelles de « Jéhovah » : E, O, A ?
Leur apparition s'explique de la manière suivante. Lorsque l'hébreu cessa d'être une langue vivante, le texte des livres saints, qui ne comportait aucune division ni en livres, ni en chapitres, ni en. versets, ni même en phrases et en mots, et qui ne formait, pour ainsi dire, qu'un seul mot immense, risquait de devenir inintelligible au lecteur moyen. Les rabbins juifs, entre le V° et le IX° siècles après J-C, s'attachèrent, par un travail minutieux de très longue haleine, à en rendre la lecture plus facile : ces « massorèthes », comme on les a appelés, sans toucher au texte même tenu pour sacré, le divisèrent en livres, chapitres, versets et mots, et de plus y marquèrent la ponctuation et y indiquèrent la prononciation exacte des voyelles absentes par des points placés au-dessus, au-dessous ou à l'intérieur des consonnes. Il semblerait donc que nous dussions posséder les voyelles exactes correspondant au « tétragramme » divin Y. H. V. H. ou JHVH.
Il n'en est rien, cependant ; car, à l'époque de l'entreprise « massoréthique », il était interdit au lecteur, rencontrant ces quatre lettres, de prononcer le nom sacré du Dieu d'Israël. Ce nom ineffable devait être remplacé par un autre, généralement par le mot « Seigneur », et pour que cette substitution orale du lecteur fût provoquée par le texte écrit lui-même, on eut l'idée d'accompagner les quatre consonnes Y, H, V, H, des voyelles appartenant au mot « Seigneur » (Adonaï). Le lecteur juif ne s'y trompait pas : il savait qu'il avait sous les yeux deux mots en un, un mot tout en voyelles et un mot tout en consonnes. Mais, plus tard, on s'y trompa : les traducteurs chrétiens de la Bible s'y trompèrent. Ils ne virent qu'un mot là où il y en avait deux. Et ce sont eux qui ont forgé le nom de « Jéhovah », qui n'a jamais existé, et qui est un mélange, nous le répétons, des consonnes d'un mot et des voyelles d'un autre.
Si le Dieu d'Israël ne s'appelait pas Jéhovah, comment s'appelait-il ? Les savants modernes s'accordent à penser que son véritable nom était « YaHVèH ». Et c'est ce nom de Yahvèh (ou Yahvé) qui est employé couramment aujourd'hui, dans les livres historiques ou scientifiques relatifs au peuple d'Israël.
Il faut cependant noter que ce nom a disparu de nos Bibles modernes françaises, où il a été traduit par « l'Éternel ». Au sujet de cette traduction, il y a deux remarques à faire. D'abord, « l'Éternel » est une épithète et n'est pas un nom. Quand on dit: l'Éternel, on sous-entend Dieu : le Dieu éternel. Or, YHVH était un véritable nom propre, comme Zeus ou Jupiter. Nos versions de la Bible nous donnent l'impression fausse que la langue hébraïque, comme nos langues modernes, ne donnait pas de nom à Dieu. Ensuite, il faut bien reconnaître que les traducteurs n'ont pas su traduire exactement YHVH ; les traducteurs grecs, latins, anglais et allemands s'en sont tenus à la substitution des « massorèthes » ; ils ont décidé de remplacer le nom divin par « le Seigneur » ; les traducteurs français, en choisissant « l'Éternel », ont peut-être pensé rester plus près de l'étymologie donnée par la Bible elle-même au nom hébreu. D'après Ex 3 : 14, YHVH signifie « Celui qui est ». L'idée d'éternité n'est, en tous cas, pas explicitement contenue dans cette étymologie, et la traduction française, « l'Éternel », reste tout approximative.
DIEU DES ARMEES
Voir Armées.
DOCTEURS DE LA LOI
Voir Scribes.
EPHOD
Ce terme se rencontre à plusieurs reprises dans les livres de l'Ancien Testament et parait avoir désigné, peut-être suivant les époques, des objets divers.
Dans le récit qui raconte le transport de l'arche à Jérusalem (2Sa 6), il nous est dit que « David dansait de toute sa force devant Yahvé et qu'il était ceint d'un éphod de lin » (2Sa 6:14). Sa femme, Mical, à ce spectacle, « le méprisa dans son coeur » (2Sa 6:16) et elle explique pourquoi : « Le roi d'Israël s'est découvert aux yeux des servantes de ses serviteurs, comme se découvrirait un homme de rien » (2Sa 6:20). David dansait à peu près nu et l'éphod qu'il portait devait donc être une sorte de pagne. Il nous est dit ailleurs que le jeune Samuel « faisait le service devant Yahvé revêtu d'un éphod de lin » (1Sa 2 : 18). Dans le récit de la vengeance de Saül contre Achimélek, le roi fait mettre à mort quatre-vingt-cinq prêtres, qui sont désignés comme des « hommes portant l'éphod de lin » (1Sa 22 : 18). Il est donc vraisemblable qu'à cette époque le pagne en question était le costume sacerdotal. David, dansant devant l'arche de Yahvé, se considère comme prêtre.
Ailleurs, l'éphod est un objet en rapport avec la coutume de « consulter Yahvé ». David, poursuivi par Saül, veut savoir ce que l'avenir lui réserve. Il demande, pour cela, au prêtre Abiathar, de lui apporter l'éphod. Et c'est quand le prêtre a obéi que la consultation a lieu : David pose des questions et Yahvé répond (1Sa 23 : 9-12). Un récit analogue, mais qui ne nous renseigne pas davantage sur la nature de l'objet, se trouve dans l'histoire de la guerre de David contre les Amalécites (1Sa 30 : 6-8). Un texte du livre des Proverbes jette peut-être un peu de lumière sur cette « consultation » de la divinité « On jette le sort dans le pan de la robe mais toute décision vient de Yahvé » (Pro 16: 33). On peut admettre, d'après cette maxime, que Dieu était consulté par une sorte de tirage au sort au moyen d'objets contenus dans une poche du vêtement sacerdotal ou simplement dans un pan de ce vêtement, relevé à cet effet. Il est probable que ces objets étaient au nombre de deux, l'un appelé ourim et l'autre toummim. Selon que l'un ou l'autre de ces objets « tombait », on en concluait que l'oracle se prononçait en faveur de l'une ou l'autre des deux possibilités définies à l'avance. Ainsi Saül, s'étant aperçu qu'une faute avait été commise par l'un des guerriers de son armée, dit à Dieu : « Si la faute incombe à moi ou à mon fils Jonathan, Yahvé, Dieu d'Israël, donne ourim et si la faute incombe à Israël, ton peuple, donne toummim. » Jonathan et Saül furent désignés tandis que le peuple restait indemne. Saül dit alors : « Faites tomber le sort entré moi et Jonathan », et Jonathan fut désigné (1Sa 14 : 41-42, texte complet conservé par la version grecque).
Une troisième série de passages bibliques présentent l'éphod comme une sorte d'image divine. C'est ainsi que Gédéon demande à ses guerriers les anneaux qu'ils ont eu pour butin après la défaite des Madianites et en fait un éphod. Le poids en est indiqué : 1.700 sicles d'or, - de 25 à 30 kilos. Il s'agit probablement d'une statue « qu'il plaça dans sa ville, à Ophra, où elle devint l'objet des prostitutions (de l'idolâtrie) de tout Israël ; et elle fut un piège pour Gédéon et pour sa maison » (Juges 8 24-27). - La curieuse histoire de Mica (Juges 17-18) nous montre une « maison de Dieu », sanctuaire de famille, pour laquelle, entre autres objets de culte, ont été fabriqués un éphod et des teraphim (voyez ce mot). Il semble, ici aussi, qu'il s'agisse de statues, voyez encore la mention de l'éphod du sanctuaire de Nob (1Sa 21 : 9).
Dans un quatrième groupe de textes, de rédaction plus moderne, le mot éphod désigne une pièce d'étoffe que le grand-prêtre portait sur son costume et à laquelle tenait une poche contenant l'ourim et le toummim (Exode 25 : 7 ; 28:4, 30 ; Le 8 : 8).
Sur le rapport qu'ont dû avoir entre eux les objets désignés dans ces quatre séries de passages on n'a pu jusqu'à présent émettre que des conjectures.
EPITRES
Voir Bible (formation du Nouveau Testament).
ESCLAVE
Le mot hébreu « ébed » est traduit, dans nos versions françaises de la Bible, tantôt par « serviteur », tantôt par « esclave », sans que l'on sache pour quel motif, dans chaque texte, l'un des termes a été préféré à l'autre. Il est certain que ces mots éveillent dans nos esprits des idées que les Israélites ne connaissaient guère. D'une part, un libre contrat entre employeur et employé était chose rare : il n'y a, dans tout l'Ancien Testament, que quelques allusions à des « mercenaires » qu'on n'appelle pas d'ailleurs « ébed », mais « sakir » (Ex 12 : 45 ; Job 7 : 1 ; 14 6 ; Malachie 3 : 5). Un serviteur ou une servante étaient, en règle générale, la propriété du maître de maison. Un « ébed », en tous cas, est un esclave. D'autre part, l'esclavage ne ressemblait pas à ce que nous entendons généralement par ce mot : l'esclave était placé, dans la maison israélite, presque au même niveau que l'épouse ou que l'enfant. Ce niveau n'était évidemment pas très élevé, car les membres de la famille, tout comme l'esclave, étaient les choses du maître : celui-ci pouvait vendre ses enfants, aussi bien que ses esclaves. On n'était pas révolté par l'idée qu'un homme, né libre, pût devenir esclave. Il n'y avait pas entre ces deux conditions l'abîme que nous serions tentés d'imaginer aujourd'hui. Les esclaves n'étaient pas considérés comme des êtres inférieurs ; s'ils ne possédaient pas ce que nous appelons les droits civils, ils n'en étaient pas moins les frères des hommes libres, tout autant sinon plus que les « étrangers » (voyez ce mot). L'esclavage, en somme, n'était pas une dégradation. Telle est bien l'impression qui se dégage avec évidence de bien des récits de l'Ancien Testament. Saül et son esclave, à la recherche des ânesses de Kis, s'entretiennent sur la route comme des frères et c'est l'esclave qui fournit l'argent pour payer l'homme de Dieu (1Sa 9: 3-10). Abigaïl accepte d'un esclave, et contre la volonté de son propre mari, le conseil d'aller apaiser la colère de David (1Sa 25: 14-17). Abraham a un esclave qui est l'intendant de tous ses biens. Aussi longtemps qu'il n'a pas d'enfants, il le considère comme son héritier (Ge 15 : 2) et, plus tard, il lui confie les négociations qui aboutiront au mariage d'Isaac (Genèse 24). David donne à un esclave, Tsiba, tous les biens du dernier survivant de la famille de Saül (2Sa 9 : 1-4 ; 16 : 1-4). Un Israélite donne sa fille en mariage à un esclave égyptien (1Ch 2 : 35).
Les lois sur l'esclavage sont, en Israël,, plus humaines que partout ailleurs dans l'antiquité. Elles lui assurent une protection efficace contre la dureté du maître (Exode, 21 : 20-21, 26-27 ; Deutéronome 23 : 15-16). Le Sabbat est une institution qui le vise particulièrement (Exode 23 : 12 ; Deutéronome 5 : 12-15). La femme esclave, qui était généralement une des épouses du maître, était peut-être mieux protégée encore (De 21 : 10-14). Les esclaves étrangers, la plupart prisonniers de guerre, et plus nombreux vraisemblablement que les esclaves indigènes, bénéficiaient comme ces derniers de la protection légale ; et il ne pouvait guère en être autrement puisque, par leur participation au culte de la famille ou du peuple, ils étaient, en un sens, assimilés à la nation. En ce qui concerne particulièrement les esclaves de race israélite, il faut noter les. traits suivants. La loi ne permettait pas qu'on se les procurât par enlèvement (Exode 21 : 16), mais elle autorisait le père à vendre sa fille (Exode 21 : 7): Certains textes nous prouvent que l'on pouvait vendre le débiteur insolvable (2Ro 4 : 1) ainsi que le voleur incapable de restituer ce qu'il avait dérobé (Ex 22 : 3). Enfin un homme, tombé dans l'indigence, pouvait se vendre lui-même (Le 25 : 39,47). Mais ces esclaves israélites jouissaient d'un privilège essentiel refusé aux esclaves étrangers. Ceux-ci étaient esclaves à vie, ceux-là non.
Les lois contenues dans le code qu'on appelle « Le Livre de l'Alliance » (Ex 21 Ex 23) stipulent qu'un esclave hébreu devra servir six ans et être relâché la septième année, « sans rien payer ». « S'il est entré seul, il sortira seul ; s'il avait une femme, sa femme sortira avec lui. Si c'est son maître qui lui a donné une femme et qu'il en ait eu des fils et des filles, la femme et les enfants seront à son maître, et il sortira seul. Si l'esclave dit : « J'aime mon maître, ma femme et mes enfants et je ne veux pas sortir libre, alors son maître le conduira devant Dieu et le fera approcher de la porte ou du poteau et lui percera l'oreille avec un poinçon, et l'esclave sera pour toujours à son service » (Ex 21 : 2-6).
Le code « deutéronomique », plus récent, et partout préoccupé de rendre la législation plus humaine, exige davantage du maître : l'esclave ne sera pas renvoyé à vide ; « tu lui feras des présents de ton menu bétail, de ton aire, de ton pressoir, de tout ce que tu auras par la bénédiction de Yahvé, ton Dieu. Tu te souviendras que tu as été esclave au pays d'Egypte et que Yahvé, ton Dieu, t'a racheté » (Deutéronome 15: 12-18).
On voit, d'ailleurs, par le récit renfermé au ch. 34 du livre de Jérémie, (Jer 34) que ces prescriptions étaient loin d'être toujours observées.
Enfin, le « code Sacerdotal », plus récent encore, puisqu'il est postérieur à l'exil, ne veut pas qu'aucun Israélite soit réellement esclave ; si un pauvre se vend à un de ses « frères », celui-ci le considérera comme un serviteur à gages et ne le traitera jamais avec dureté. « C'est des nations qui vous entourent que tu prendras ton esclave, il le demeurera à perpétuité et tu le laisseras en héritage à tes enfants après toi » (Le 25 39-46); et si un Israélite pauvre se vend à un riche étranger, résidant dans le pays, il pourra être racheté par un membre de sa famille ou se racheter lui-même (Le 25: 55). En progrès général sur les législations précédentes, le Code Sacerdotal marque cependant un recul, au moins théoriquement, quant à la périodicité des dates de libération des esclaves : il n'est plus question d'une émancipation obligatoire après six années, sans doute parce que cette prescription n'avait pu être généralement imposée, mais d'une émancipation globale tous les cinquante ans, lors de l'année du « Jubilé » (Le 25 : 8-17). Toute propriété revenant alors à son premier propriétaire, l'esclave libéré aura le moyen de vivre. Assurément, cette loi impraticable de l'année jubilaire n'entra jamais en vigueur, mais il est certain que l'émancipation fut fréquente et que, peu à peu, l'esprit de la loi prévalut : l'idée se répandit qu'un Israélite ne saurait légitimement être l'esclave d'un autre Israélite, tous les enfants du peuple de Yahvé étant frères et esclaves de Dieu seul.
L'esclavage n'en subsista pas moins en Palestine jusqu'à la fin de l'histoire du peuple juif, sans que l'on puisse savoir, semble-t-il, si les esclaves israélites étaient le petit ou le grand nombre. Le Christianisme naissant n'a pas protesté contre l'esclavage, mais il a répandu dans le monde le principe d'universelle fraternité qui devait, un jour, en réaliser l'abolition.
ETOILES
Voir Ciel.
ETRANGERS
Les étrangers résidant au sein du peuple d'Israël constituaient une classe sociale nettement distincte de toute autre. Leur situation particulière s'explique par la nécessité où ils étaient de trouver protection auprès des habitants du pays. La sécurité de l'existence n'était pas garantie par une force armée, gendarmerie ou police, mais par « le lien du sang » qui attachait l'homme à sa famille ou à son clan et par la coutume de la vendetta qui en découlait. On était protégé par le fait qu'une impitoyable vengeance (voyez ce mot) s'appesantissait sur le meurtrier. Mais l'étranger, isolé dans le pays, sans aucun lien de parenté avec ceux qui l'entouraient, ne pouvant compter sur aucun « vengeur du sang », se savait à la merci des gens mal disposés, et il y en avait beaucoup en un temps où tout étranger était facilement tenu pour un ennemi.
Force lui était donc de chercher sécurité dans la protection d'une famille israélite dont il devenait, en quelque sorte, le « client » et au sein de laquelle il occupait, de ce fait, une place spéciale, qui lui valut un nom particulier. Ce nom, nos traductions de la Bible l'ont rendu par « l'étranger » (voir le 4° commandement : «... l'étranger qui est dans tes portes »), mais en hébreu, ce nom n'était pas celui qui désignait n'importe quel homme d'une autre nation. Il y avait un mot pour désigner l'homme qui est de l'autre côté de la frontière, et c'est ce mot-là (« nokri ») qui est bien traduit par « étranger ». Mais il y avait aussi un nom spécial pour l'étranger résidant en Israël: cet homme était le « guér », mot qui signifiait « séjournant », mais qu'on rendrait assez bien par « client » ou « protégé ». La protection qui lui était accordée était celle qui s'étendait sur tous les membres de la famille, à laquelle il était censé appartenir, tout comme l'hôte de passage. Le « lien du sang » s'étend à tous ceux qui demeurent, pour, quelque durée que ce soit, dans la maison de l'hôte. L'hospitalité implique le devoir de défendre et, au besoin, de venger l'étranger que l'on héberge.
Néanmoins, ce client, lorsqu'il est fixé à demeure dans une famille, y a une situation très dépendante et probablement peu enviable. Peut-être ne faut-il pas attacher trop d'importance au fait qu'il n'est fait mention de lui, dans le 4° commandement, qu'après le bétail mais sans doute faut-il penser que, si la législation intervenait souvent en sa faveur, c'est qu'il était fréquemment nécessaire de le protéger contre ses protecteurs ? « Tu ne maltraiteras pas l'étranger et tu ne l'opprimeras pas, car vous avez été étrangers dans le pays d'Égypte » (Exode 22 : 21). Le livre des Psaumes appelle la vengeance de Yahvé sur les méchants qui égorgent « la veuve, l'étranger et l'orphelin » (Psaume 94 : 6), c'est-à-dire ceux qui ne sont pas toujours aussi bien défendus qu'ils devraient l'être. Sans doute ne s'agit-il pas, dans ce texte, de meurtre proprement dit, mais d'oppression ; et il est facile de concevoir que des hommes peu scrupuleux aient pu profiter de ce que l'étranger, réfugié chez eux, fût à leur merci, pour lui faire payer leur protection bien cher, en l'accablant soit de corvées, soit d'humiliations. De cette oppression, nous avons de nombreux témoignages dans les protestations des prophètes et des législateurs (Jer 7 : 6 ; 22 : 3 ; Eze 22 : 7,29 ; Zacharie 7 : 10 ; Malachie 3 : 5 ; Exode 23 : 9 ; Deutéronome 24 : 17 ; Le 19 : 34), et nous voyons que la législation deutéronomique voulait que les différends entre le patron et le client fussent portés devant les juges (Deutéronome 1:16). Le même code veut que le client étudie et respecte la Loi et qu'il soit inclus dans l'alliance que Yahvé traite avec son peuple (Deutéronome 31 : 12 ; 29: 10-13). Après l'exil, la nation ayant de plus en plus une tendance à se transformer en communauté religieuse, il fut bientôt indispensable que le client devint un adorateur de Yahvé (Le 16: 29-31 ; 18 : 26 ; 20:2 ; 22 : 18 ; 24 : 16, etc.). Il ne tardera pas à se confondre avec le « prosélyte » (voyez ce mot).
Nom donné par Jésus à son message. Le mot signifie : bonne nouvelle. Aucun autre n'aurait pu désigner plus heureusement la promesse du salut apporté par Jésus à l'humanité.
ÉVANGILES
Nom donné aux quatre premiers livres du Nouveau Testament parce qu'ils renferment le bon message de Jésus. Voir : Bible (formation du Nouveau Testament).
EVEQUE
(En grec épiscopos, qui signifie surveillant.) Le mot ne se rencontre que 5 fois dans le Nouveau Testament. - Dans Actes, Ac 20 : 28, Paul s'adresse en ces termes aux anciens (voyez ce mot) d'Ephèse convoqués par lui à Milet : « Prenez donc garde à vous-mêmes et à tout le troupeau sur lequel vous avez été établis épiscopous. » Si ce mot était le nom habituel de la fonction des hommes auxquels parle l'apôtre, il faudrait en conclure que diacre et évêque étaient alors des expressions équivalentes et que, par suite, les évêques-diacres étaient plusieurs dans l'Église d'Ephèse. Mais il est plus probable que le mot épiscopos doit être pris ici dans son sens général, impliquant qu'un des aspects du ministère des diacres était la surveillance de l'Église ; il faudrait alors traduire : « le troupeau sur lequel vous avez été établis surveillants, en se gardant d'employer le mot évêque, qui suggère non pas une fonction seulement, mais un titre. Dans l'épître aux Philippiens (Phi 1:1), Paul s'adresse « aux évêques et aux diacres », sans faire mention des anciens. Rien ne s'oppose donc à la supposition qu'évêque et ancien soient ici encore des mots synonymes, les hommes désignés indifféremment par l'un ou l'autre de ces noms étant plusieurs dans l'Église. - Dans 1Ti 3 : 1-13, il est encore question des évêques et des diacres. Mais tandis que diacre est au pluriel (1Ti 3 :8-13), évêque est au singulier (1Ti 3 :1-7), et il est difficile de lire ce qui est dit de ce dernier sans avoir l'impression qu'il n'y a qu'un évêque à Ephèse. Faut-il en conclure gaie le nom, après avoir été appliqué à tous les anciens, en était venu déjà à ne désigner que leur chef ? L'histoire nous apprend que cette évolution s'est faite plus tard ; mais était-elle accomplie ou en voie de s'accomplir quand fut écrite la 1° épître à Timothée ? - On hésite à se prononcer, l'épître à Tite, qui doit être à peu près de la même époque, paraissant à nouveau confondre purement et simplement les anciens et les évêques « S'il y a quelque homme d'une réputation intacte..., choisis-le pour ancien, car il faut que l'évêque soit irréprochable... » (Tit 1 : 6). - Le 5° et dernier texte renfermant le mot épiscopos n'entre pas` ici en ligne de compte (1Pi 2 : 25), car le tenue est appliqué au Christ, il est employé dans son sens le plus général et ne doit évidemment pas être traduit par évêque : « Vous êtes retournés à celui qui est le pasteur et le surveillant (ou le gardien) de vos âmes. »
En résumé, le Nouveau Testament semble nous apprendre que les anciens avaient dans l'Église une fonction qui faisait d'eux les surveillants du troupeau. Ce second terme correspondait si bien à la réalité qu'il devint habituel et finit par être employé comme synonyme d'ancien. Les anciens ou évêques étaient un certain nombre dans chaque Eglise. Peut-être peut-on ajouter que l'évolution des ministères ecclésiastiques, qui de ait plus tard placer l'évêque à la tête des anciens, se dessinait déjà lorsque fut écrite la 1° épître à Timothée. Mais il ne s'agissait pas, en tous cas, d'un évêque dirigeant plusieurs Églises.
EXTERMINATEUR (ange)
Voir Anges.
FETES
Les grandes fêtes annuelles d'Israël étaient au nombre de quatre.
I. Pâque. - Bien qu'elle ne soit pas mentionnée dans les récits bibliques avant le temps du roi Josias
(Les récits de l'Exode relatifs à la Pâque appartiennent, en effet, à l'ouvrage sacerdotal, mêlé aux ouvrages plus anciens, mais ne datant lui-même que du temps d'Esdras) (voir : Bible, formation de l'Ancien Testament).
De 16 : 1-8 ; 1Ro 23 : 21-23 ; Eze 45 : 21), cette fête date assurément d'une époque antérieure, car, outre que les rites du repas sacrificiel et de l'aspersion des portes dénotent le caractère très archaïque des cérémonies pascales, il est certain que si la Pâque était apparue pour la première fois lors de la concentration du culte à Jérusalem, elle n'aurait pas eu pour caractère essentiel d'être une fête de famille, car une fête de famille se célèbre à domicile. La Pâque fut à l'origine une fête du foyer, célébrée au foyer. Il est vrai que les législations postérieures s'efforcèrent de perpétuer ce caractère familial de la fête, bien qu'elle fût désormais, pour la majorité des fidèles, sans rapport avec la maison paternelle, n'étant plus célébrée qu'à Jérusalem. L'Israélite des campagnes dut se transporter à la ville avec sa famille et le bétail du sacrifice et faire le repas pascal dans le logis de fortune qu'il pouvait y avoir trouvé, et la Pâque fut désormais beaucoup moins la fête du foyer que la fête de la communauté. On facilita d'ailleurs le déplacement des gens de la campagne en leur permettant d'acheter à Jérusalem le bétail destiné au sacrifice (Deutéronome 14 : 24,26). Au temps de Jésus, c'était dans le parvis extérieur du temple même que se faisaient ces achats (voir : Sanctuaires, hauts-lieux, Temples). A cette même époque, la Pâque attirait à Jérusalem des pèlerins innombrables (plus de deux millions, selon l'estimation sans doute exagérée de l'historien Josèphe). Le rituel du repas pascal était le suivant : le père de famille bénissait la coupe et la passait aux convives ; ceux-ci mangeaient ensuite quelques herbes amères ; puis venaient la lecture de la Loi, les prières et l'explication de l'origine de la cérémonie ; une deuxième fois, la coupe circulait et l'on chantait les psaumes 113 et 114. Une prière encore et le repas proprement dit commençait, composé de l'agneau pascal, de pain sans levain et d'herbes amères. La coupe passait une troisième fois ; on chantait les psaumes 115-118 ; on buvait encore une quatrième fois, et la cérémonie était terminée.
Il. Fête des pains sans levain.
Cette fête était étroitement unie à la Pâque et, comme elle, mise en rapport avec la sortie d'Egypte. Elle devait rappeler le départ des Israélites, quittant en hâte le pays de la servitude et mangeant du pain que l'on n'avait pas eu le temps de faire lever (Ex 12). Mais certains textes montrent que cette fête marquait aussi le commencement de la moisson. On peut en conclure qu'à l'origine elle était essentiellement agricole et sans doute cananéenne avant de devenir israélite, et qu'elle se combina par la suite avec la Pâque des Hébreux parce qu'elle tombait à la même époque. La législation sacerdotale, d'ailleurs (contemporaine d'Esdras), bien qu'insistant sur cette signification historique, n'en retient pas moins des rites qui rappellent son origine agricole, comme l'offrande de la première gerbe (Le 23 : 10).
III. Fête de la moisson (ou des semaines, ou Pentecôte).
Cette fête marquait l'achèvement de la moisson des blés et durait une journée. Elle n'avait, à l'origine., de rapport avec aucun fait historique. C'était une fête purement agricole, vraisemblablement empruntée aux Cananéens. La législation du Deutéronome la dénomma fête des semaines parce qu'elle survenait sept semaines après celle des pains sans levain (De 16 : 9). La législation sacerdotale insistait sur la cérémonie essentielle de la fête, la présentation, à Yahvé de deux pains tels qu'on les consommait, c'est-à-dire levés. Le judaïsme postérieur lit de cette fête une commémoration de la promulgation de la Loi an Sinaï. Du temps de Jésus, c'était, après Pâque, la fête la plus populaire. Le nom grec de Pentecôte fait allusion aux sept semaines (49 jours) qui la séparaient de la Pâque. On la célébrait le 50° jour.
IV. Fête des récoltes (ou des tabernacles).
Le cycle des quatre grandes fêtes d'Israël s'achevait par la fête des récoltes. Par ce mot, il faut entendre j'ensemble de toutes les récoltes de l'année, y compris la vendange. Elle avait donc lieu en automne, « au mois d'Ethanim. qui est le septième mois » (1Ro 8 : 2 ; voir : Année, mois et semaine). Ce fut longtemps après l'exil encore, la plus grande fête, appelée par excellence la fête ou la fête de Yahvé (1Ro 8 : 2 ; 12 : 32 ; Juges 21 : 19 ; Le 23 : 39-41 ; Eze 45 : 25 ; Ne 8 : 14). C'est la seule qui soit mentionnée dans les livres historiques de l'Ancien Testament. Dans la législation deutéronomique, elle est appelée fête des tabernacles. Il n'est pas probable que ce nom date de cette époque, et il est certain que la coutume qu'il rappelle est très archaïque : on habitait pendant les sept jours de la fête dans des huttes de feuillage, destinées, selon la législation sacerdotale, à rappeler le souvenir des tentes de l'ancien Israël (Le 23 : 42-43). On donnait ainsi à la fête une signification historique et nationale qu'elle n'avait pas eu à l'origine.
V. Il faut citer encore la fête mensuelle de la Nouvelle lune
(1Sa 20; 2Ro 4 : 23; Esa 1 : 13; Amos 8 ; Eze 46 : 1), fête très ancienne dont la célébration remontait sans doute à l'époque nomade, et le Jour des expiations (Le 16 ; 23 : 22-23 ; No 29: 7-9), fête récente, au contraire, créée par la législation sacerdotale, destinée à la fois à assurer la purification du Temple et à obtenir l'expiation de tous les péchés du peuple qui n'auraient pas été expiés par des cérémonies antérieures, en particulier les péchés involontaires.
A part cette dernière, qui s'accompagnait d'un, jeûne (voir ce mot), toutes les fêtes religieuses d'Israël étaient caractérisées par de grandes démonstrations de joie. Le Deutéronome ordonne sans cesse au peuple de «se réjouir en présence de Yahvé » (De 12: 7,12; 14: 26; 16:11, etc.). Une de ces réjouissances était le repas du sacrifice qui donnait lieu parfois, semble-t-il, à des excès (Amos 2 : 8 ; Esa 28 : 7 ss) ; une autre les processions et des danses accompagnées de musique (Juges 21 : 19-21 ; Psaumes 149 : 3; 150 : 4).
FRANGES
Voir Phylactères.
GEHENNE
Nom donné par les Juifs, après l'exil et du temps de Jésus, au lieu où les méchants, après la mort, reçoivent leur châtiment. Les Israélites anciens (avant l'exil) ne paraissent avoir eu aucune conception analogue. Pour eux, le séjour des morts (voyez ce mot), appelé cheôl, était un lieu où se trouvaient réunis les bons et les méchants. 11 était situé dans les profondeurs de la terre (No 16 : 30 ; Job 11 : 8), à l'extrême opposé du ciel (Ps 139: 8). C'était le séjour du silence (Ps 44 : 17), de l'obscurité (Job 10:22) et de la tristesse (Ps 6 : 6 ; Job 3 : 17-11 ; Esa 38 18). Les morts y avaient, croyait-on, la même apparence que sur la terre, quoiqu'ils ne fussent plus que des ombres (1Sa 18 : 14 ; Eze 32 : 27) et n'y poursuivissent plus qu'une vie réduite (Job 3 : 1 7 ; Ecc 9:10) où, même pour les âmes pieuses, il ne pouvait être question de vivre en communion avec Dieu (Ps 6 : 6 ; 30 : 10 ; 88 : 11 ; 115:17 ; Esa 38 : 18). Cette existence diminuée, la même pour tous, triste perspective d'avenir pour les bons et les méchants, ne comportait ni récompense ni châtiment. Deux ou trois passages, tout au plus, nous montrent dans l'Ancien Testament, qu'une idée différente de l'au-delà s'élaborait lentement dans la pensée juive d'après l'exil. Nous y trouvons, ici et là, comme un pressentiment que le juste reverra Dieu, sera reçu dans la gloire (Job 19 : 25 et suivants ; Ps 73 : 23 et suivants ; Esa 26 : 19) et que le temps viendra où la mort sera détruite (Esa 25 : 8 ; voir : Séjour des Morts).
L'idée de récompense et de châtiment d'outre-tombe apparaît pour la première fois d'une façon indubitable au II° siècle avant J-C. dans le livre de Daniel (Da 12:3). On la voit se développer de plus en plus dans les apocalypses juives ultérieures (voyez notamment : Hénoch, 22).
On localisait le séjour où les méchants sont punis soit dans le cheôl (Hénoch, 22 : 13 ; 63 : 10 ; 99 : 11 ; 103 : 7 ; Jubilé 7 : 29 ; 22 : 22 ; Psaumes de Salomon, 16:2), soit dans le Troisième Ciel (Secrets d'Hénoch, 10 : 2 ss ; Apoc. de Baruch, 4), soit plus ordinairement dans une vallée située au sud de Jérusalem, la « vallée du fils de Hinnom » ou « vallée de Hinnom » - en hébreu Géhinnom, en grec Géhenna, d'où les mots français Géhenne et gêne (tourment) - vallée maudite en raison des sacrifices d'enfants qui s'y célébraient autrefois. Cette dernière localisation est supposée déjà dans Esa 66 : 24 ; elle se retrouve dans Hén., 27:1-3 ; 48 : 7 ; 54 : 1-2 ; 62 : 12-13 ; 90: 26-27). -- Dans le Nouveau Testament, la transformation de la vieille idée hébraïque nous apparaît achevée. Les Juifs, au temps de Jésus -- ceux du moins qui croyaient à un jugement d'outre-tombe -- distinguaient dans le séjour des morts la demeure des bienheureux appelée « paradis » ou « sein d'Abraham » et celle où les réprouvés subissaient des tourments. Un abîme séparait les deux domaines (Luc 16 : 22-26 ; 23 : 43. Le mot Géhenne est souvent employé dans le Nouveau Testament pour désigner le lieu où les méchants seront châtiés soit avant soit après la résurrection (Mt 5 : 29-30 ; 10 : 28 ; 18 : 9 ; 23 : 15 ; Marc 9 : 48, 45 ; Luc 11 : 5 ; Jas 3 : 6).
GENTILS
Ce terme, que l'on trouve généralement employé dans nos anciennes traductions de la Bible, a fait place, dans les nouvelles, au mot païen qui a la même signification. Le mot gentils traduit plus exactement le mot hébreu gôyim, car il signifie comme lui: les nations. Pour les Hébreux tous les peuples de la Terre, tout ce qui n'était pas israélite était objet de mépris. Dans un sentiment analogue, les Grecs traitaient de barbares toutes les nations :autres que la leur. Mais tandis que le Grec faisait peu de cas de l'étranger à cause de son infériorité en matière de culture et de civilisation, l'Israélite le regardait de très haut à cause de (infériorité de sa religion. Et c'est ainsi que le terme « les nations », les gentils, en «est venu à signifier les païens, c'est-à-dire ceux qui ne possèdent pas la vraie religion. --- On sait que le terme « païen » lui-même avait à l'origine une signification absolument étrangère à toute idée religieuse. Dans les pays de langue latine, les chrétiens du II° siècle de notre ère prirent l'habitude de désigner le culte des divinités gréco-romaines, qui subsistait surtout dans les campagnes, par le nom méprisant de religion des paysans. C'est ce nom de paysans (en latin = pagani) qui nous a donné le mot : païen.
GLOSSOLALIE
Voir Langues (don des).
GOUVERNEUR
Le titre officiel du gouverneur de Judée était celui de procurateur (voir : proconsul et procurateur); mais il est remplacé dans le Nouveau Testament par le titre plus général de gouverneur. - Ce gouverneur de la Judée avait sa résidence à Césarée (de Palestine) où il habitait le prétoire (voir ce mot) construit par Hérode (Ac 23:35). Lors des grandes fêtes qui amenaient à Jérusalem des foules immenses et qui pouvaient, de ce fait, donner lieu à des troubles populaires, le gouverneur se transportait dans la ville sainte et résidait dans l'ancien palais d'Hérode, appelé prétoire comme son palais de Césarée (Mt 27: 27 ; Ac 22: 24). Le gouverneur était l'administrateur des finances de la province, le chef suprême des troupes romaines qui y étaient en garnison et le juge suprême. A ce dernier titre, il avait le droit de vie et de mort ; mais les citoyens romains comme Paul, avaient le droit d'en appeler à l'empereur (Actes 25 : 11).
HALLELOUYA
Mot signifiant Louez Yahvé ! », que l'on rencontre souvent au commencement et à la fin de certains psaumes et qui nous apparaît là comme un terme liturgique.
HAUTS-LIEUX
Voir Sanctuaires.
HOLOCAUSTE
Dans la plupart des sacrifices (voir ce mot) le sang et quelques parties seulement de la victime étaient offerts à Dieu, une part revenait aux prêtres (voir ce mot), le reste constituait le repas des sacrifiants qui se prenait sur les lieux mêmes du sacrifice. L'holocauste était l'offrande sans prélèvements, consumée tout entière par le feu, un don sans réserve à Yahvé.
HOSANNA
Ce mot se trouve une fois dans l'Ancien Testament où nos versions le traduisent en français « accorde le salut » (Traduction Segond, Psaume 118: 25) et cinq fois dans le Nouveau Testament, dans le récit évangélique de l'entrée de Jésus à Jérusalem (Mat 21 ; Marc 11 ; Jean, 12). Hosanna signifie en effet : « sauve », c'est-à-dire « sauve-moi », ou « sauve-nous ». Il est naturel, par suite, que ce fût le thème principal ou le refrain du chant triomphal qui accompagne le Messie faisant son entrée dans la Ville Sainte : il vient, en effet,; pour apporter le salut à son peuple.
IMPUR
Voir Sainteté.
INCISIONS
Voir Deuil.
INTERDIT (voir : anathème).
Le terme d'interdit (en hébreu : khérem) désigne un usage qui se retrouvait sous des noms divers chez un grand nombre de peuples anciens et qui subsiste aujourd'hui au sein de certaines peuplades dites « primitives ». Le mot correspond à peu près au tabou des Polynésiens. Lorsqu'un homme, un animal ou un objet avait été frappé de khérem, il était rigoureusement interdit de se l'approprier, il était prescrit, sous peine des plus terribles châtiments divins, de les détruire entièrement. Des récits bien connus de l'Ancien Testament nous apprennent que dans certaines circonstances graves au cours des guerres d'Israël, la personne et les biens de l'ennemi devaient être anéantis, les vivants passés au fil de l'épée et les biens consumés par le feu : les Amalécites de 1Sa 15 et les habitants de Jéricho (Josué 7 ; voir encore : Nombres 21 : 2-9 ; Juges 1 : 17 ; De 17 : 25-26 ; 20 : 11-18 ; 1Sa 15, etc.). - Dans quelques textes beaucoup moins anciens (tels que Le 27 : 28) le même terme (khérem, interdit) est appliqué à des êtres et à des choses que le fidèle donnait à Dieu sans être obligé de les détruire, mais avec interdiction de les racheter. - Il est à peine nécessaire de dire que de cette antique coutume du « tabou », spéciale aux formes les plus barbares de la superstition primitive, rien n'a été conservé par Jésus.
JEUNE
Ce mot désignait, pour les Israélites, une complète abstinence de nourriture qu'ils s'imposaient du lever au coucher du soleil (Juges 20 : 26 ; 1Sa 14 : 24 ; 2 Samuel 1 : 12 ; 3 : 35). Si le jeûne s'étendait sur plusieurs jours (1Sa 31 : 13) il était rompu quotidiennement par le repas du soir. - Le jeûne était une manifestation de chagrin (1Ro 21 : 27 ; Esa 58 : 5 ; Joe 2 : 12, etc.) et devint, par là même, un des rites du deuil (voir ce mot). Sans doute pensait-on éveiller ainsi la compassion de la divinité. Mais, à mesure que la religion se spiritualisait, cette idée faisait place peu à peu à celle d'une humiliation morale devant Dieu (1Ro 21 : 27-29). De là à faire du jeûne un acte de pénitence, il n'y eut qu'un pas à faire (1Sa 7 : 6 ; Ne 9 : 1 ; Joe 2 : 12). Mais il était difficile d'éviter alors le danger d'en faire une oeuvre méritoire. Les prophètes luttèrent en vain contre une telle conception (Esa 58 : 3-7 ; Zac 7:5). Elle prévalut de plus en plus dans le judaïsme. A l'époque de Jésus, le jeûne, l'aumône et la prière formaient la triade des oeuvres pies. Jésus n'a ni condamné ni recommandé le jeûne. A ceux qui le pratiquaient il conseille d'éviter toute ostentation et de jeûner en secret (Matthieu 6 : 16-15). Paul de même ne prescrit pas le jeûne et le condamne même dans la mesure où l'on en fait un acte méritoire (Romains 14 : 17 ; Colossiens 2 : 16 ; 1Ti 4 : 1-5).
LAMENTATION
Voir Deuil.
LANGUES (don des) ou GLOSSOLALIE
Deux passages du Nouveau Testament nous parlent du don des langues avec quelques détails : Actes des Apôtres, 2 (Ac 2; 10 : 46; 19 : 6) et 1Co 14.
Dans Actes 2, qui est un récit de la Pentecôte, se trouvent juxtaposées deux conceptions différentes du don des langues. L'une d'entre elles voit dans la glossolalie le miracle par lequel les apôtres, divinement inspirés, se mettent subitement à parler des langues qui leur sont étrangères et à les parler assez correctement pour que leurs auditeurs, Parthes, Mèdes, Elamites, etc., les comprennent parfaitement bien (Ac 2 : 4-12). On ne voit pas alors comment on pouvait de ces discours cohérents tirer la conclusion que ceux qui les tenaient étaient pris de vin (Ac 2:13,15). Nous sommes, avec cette accusation ou ce sarcasme, en présence de la deuxième conception de la glossolalie : il s'agit ici d'inspiration encore (Ac 2:33), mais qui revêt une toute autre forme. Ceux qui en sont les objets parlent eux aussi, « prophétisent » (Ac 2:17), mais de telle façon qu'ils ne paraissent plus dans leur bon sens. Ils sont évidemment dans un état d'exaltation religieuse sur lequel peuvent se méprendre les spectateurs qui ne partagent pas leurs émotions. - Ces deux conceptions du don des langues sont inconciliables. Quelle est donc celle qui s'accorde avec les faits historiques ?
A cette question répond sans ambiguïté le ch. 14 de la 1° aux Corinthiens. (1Co 14) Dans ces pages, où Paul traite de la glossolalie, tout indique que nous sommes en présence de la deuxième conception indiquée ci-dessus. Celui qui parle en langues n'est pas compris des auditeurs (1Co 14:2, 16) et il n'édifie que lui-même (1Co 14: 4,17), alors que ce qui importe c'est l'édification de l'Église (1Co 14:12,26); il n'émet que des sons confus (1Co 14:7-9); il faut qu'il puisse ensuite interpréter lui-même ce qu'il a dit (1Co 14: 5,13) ou être interprété par un « frère » (1Co 14:27); ou bien alors, s'il n'y a pas d'interprète dans l'assemblée, il doit se taire. A la glossolalie Paul préfère la prédication (qu'il appelle prophétie) ou l'enseignement (1Co 14:5). Sans doute lui-même parle aussi en langues, mais il aime mieux dire cinq paroles avec son bon sens pour instruire ses frères que dix mille paroles en langues (1Co 14:18-19). Les glossolales seront pris pour des fous par de simples curieux alors que la prédication (ou prophétie) qu'ils comprendront pourra les amener à la repentance (1Co 14:24-25).
Paul, glossolale lui-même, écrit à une Eglise où la glossolalie est bien connue et très appréciée : ce qu'il nous dit du phénomène doit être tenu pour rigoureusement exact ; et il est remarquable que cette conception du don des tangues n'ait pas disparu du ch. 2 des Actes des Apôtres alors que l'auteur lui-même comprenait l'événement comme il était naturel qu'on le comprit plus tard, quand la glossolalie eut disparu de l'Eglise. Cet écrivain a dû reproduire deux documents reflétant ces deux conceptions ou du moins s'inspirer de l'un et de l'autre, ne voulant renoncer à rien de ce que lui offraient ses sources.
LEGION
La légion romaine, sous l'empire, avait un effectif de 6.000 hommes répartis en 10 cohortes divisées elles-mêmes en centuries.
Marc 5 : 9,15 ; Luc 8 : 30; Matthieu 26 : 53, nous montrent que ce terme de légion était employé, dans l'antiquité comme de nos jours, pour désigner une grande multitude.
LEVIRAT
Ce mot, dérivé du latin levir (beau-frère), désigne une vieille coutume israélite, codifiée par la législation deutéronomique (Deutéronome 25: 5-10). Lorsqu'un homme mourait sans laisser de fils (et non pas sans laisser d'enfants, comme on le crut dans le judaïsme postérieur : Mt 22 : 24) son cas était considéré comme la pire des disgrâces : il disparaissait et « son nom était effacé d'Israël ». Ce malheur pouvait être évité : le plus proche parent du défunt, généralement son frère, épousait la veuve et « relevait la maison ». Le premier fils né de ce mariage était considéré comme fils du mort et devenait son héritier.
LIEU SAINT et LIEU TRES SAINT
Voir Sanctuaires.
MALEDICTION
Voir Bénédiction et Malédiction.
MARANATHA
Ce mot ne se trouve qu'une fois dans la Bible, dans la conclusion de la 1° épître de l'apôtre Paul aux Corinthiens : « Si quelqu'un n'aime pas le Seigneur, qu'il soit anathème, maranatha ! » Or, maranatha signifie: «le Seigneur vient ». On en conclut ou bien que ce terme était une formule d'anathème employée par les Juifs pour menacer un méchant -- le plus grand des malheurs, pour celui-ci, devant être la venue de celui qui mettra fin à l'injustice et détruira l'impie --, ou bien, si le terme n'était pas une formule courante, que Paul l'a employé pour signifier aux ennemis du Seigneur que son retour était proche et que le châtiment de leur impiété ne tarderait pas.
MESSIE
Voir Oint.
MOIS
MORTS
Voir Séjour des morts et Géhenne.
NAZIREENS
Le nazir était un homme qui se consacrait à Yahvé, soit pour un certain temps soit pour toute sa vie. Il est difficile de dire laquelle de ces deux formes du naziréat est primitive. L'histoire de l'institution est peu connue. Ce que l'on constaté c'est que deux textes très anciens nous parlent du naziréat à vie de Samson (Juges 13 : 5)« et de Samuel (1Sa 1 : 11), et qu'Amos place les naziréens au même rang que les prophètes dont la mission n'est généralement pas temporaire (Amos 2 : 11-12). Le nazir de ces temps anciens devait laisser croître sa chevelure et s'abstenir de vin. Les textes plus récents (Nombres 6), qui réglementent le naziréat, le considèrent comme un voeu s'appliquant à une période de la vie seulement et interdisent, en outre, au nazir tout contact avec un cadavre. Ces prescriptions ont pour but le maintien du nazir en état de « sanctification » (voir : Sainteté). On devenait impur en touchant un mort; quant aux interdictions relatives aux cheveux et au vin, elles paraissent simplement avoir remis en vigueur, dans ce cas spécial, de vieilles coutumes tombées en désuétude et désormais incomprises, mais auxquelles leur antiquité avait conféré un caractère vénérable et sacré. L'existence des nazirs, comme celle des prophètes, était considérée comme un des bienfaits de Yahvé. Ces hommes de Dieu semblent avoir joué, dans les temps anciens, un rôle important dans les guerres de Yahvé. Mais nous ne savons si l'allusion d'Amos (Am 2: 11-12) doit suggérer que les nazirs, comme les prophètes, en étaient venus à remplir en Israël une mission d'ordre moral et spirituel.
NOM
Ce mot est souvent employé par les auteurs bibliques avec une signification un peu spéciale, particulière à l'antiquité. Dans nos langues modernes, un nom désigne simplement un objet ou une personne. Cependant, lorsqu'il s'agit d'une personne, l'habitude de la désigner toujours par le même nom engendre facilement l'illusion que ce nom lui convient particulièrement et qu'il y a autre chose, entre la personne et le nom, qu'un rapport fortuit. Cette illusion n'était pas reconnue, chez les anciens, comme une illusion. Il est difficile de dire quel rapport ils établissaient entre la personne et le nom. Eux-mêmes n'auraient peut-être pas pu l'exprimer clairement. Mais on approche de leur conception en disant que le nom était une sorte d'attribut, une sorte de manifestation, une sorte d'émanation de la personne. - C'est ainsi que dans le livre de l'Exode (Ex 23 : 20) il est dit de l'Ange (voyez ce mot) envoyé au peuple d'Israël, que le nom de Yahvé était en lui. Nous dirions aujourd'hui que Dieu lui-même était en lui. Dans le livre du Deutéronome (De 12:11) il est dit qu'au pays de Canaan, Dieu se réservera un lieu où résidera son nom. Dans d'autres passages on voit qu'il s'agit là de la présence de l'Eternel lui-même (par exemple : Psaume 20 : 2 «que Yahvé t'exauce au jour de la détresse; que le nom du Dieu de Jacob te protège ! »). Avec cette conception particulière, on comprend que le nom de Dieu, déjà digne de tout le respect des croyants, quand il est une simple désignation, soit devenu chez les Israélites, l'objet d'une très grande vénération, puisque ce nom, c'était presque Dieu lui-même. Ainsi s'explique le fait qu'au nombre des péchés capitaux condamnés par le Décalogue figure celui qui consiste à « prendre le nom de Dieu en vain ». Aucun chrétien ne rejette ce commandement, le troisième ; mais bien peu se rendent compte de l'importance considérable qu'il avait aux yeux des Israélites pieux. - Cette vénération du nom de Dieu finit même, chez eux, par verser dans la superstition. On en vint à ne pas oser prononcer ce nom, à en interdire l'usage. Le nom que nos versions actuelles traduisent : l'Eternel, et que les vieilles Bibles traduisaient : Jéhovah (nous lisons aujourd'hui : Yahvé), fut, pour ainsi dire, rayé des Ecritures. Sur les quatre lettres qui formaient le Nom, des signes furent placés, indiquant au lecteur qu'il fallait lire autrement et prononcer : le Seigneur (voir : Dieu). - On trouve dans le Nouveau Testament aussi le mot nom employé dans le sens particulier que nous venons de signaler. Il est évident que « croire au nom » de Jésus (1Jn 5:13), c'est croire en lui simplement. Demander à Dieu que son « nom soit sanctifié », c'est prier pour que la sainteté de Dieu lui-même soit reconnue et adorée de tous.
NOUVEAU-TESTAMENT
Voir Bible.
OINT
On sait que les rois d'Israël recevaient la consécration de leur royauté par la cérémonie de l'onction (1Sa 10 : 1; 16 : 3,13; 2 Sa 2 : 4 ; 1Ro 1 : 45, etc.). Ce sacre était fait au nom du Dieu d'Israël (1Sa 10: 1). Aussi prit-on l'habitude d'appeler le roi l'oint de Yahvé (1Sa 2 : 19 ; 16 : 6 ; 2Sa 1 : 14 ; Ps 2 : 2, etc.). Ce même nom servit tout naturellement plus tard, par une extension qui ne se rencontre pas encore dans l'Ancien Testament, à désigner le roi futur qui ferait toutes choses nouvelles. Ce fils de David qu'attendait la nation juive était, par excellence, l'oint ; en hébreu, ha-Maschiach, le Messie ; en grec, ho-Christos, le Christ. Ces trois mots : le Christ, le Messie, l'oint, sont donc un seul et même mot, en trois langues : grec, hébreu et français. A l'origine, ce mot était donc un nom commun. Quand il fut appliqué à Jésus il ne tarda pas à devenir un nom propre : Christ. Cependant, dans le langage apostolique, - et, par suite, dans notre langage moderne, - il est tantôt nom commun, tantôt nom propre. Nous disons, comme l'apôtre Paul : le Christ ou Christ.
OURIM et TOUMMIM
Voir Ephod.
PAINS SANS LEVAIN (Fête des)
Voir Fêtes.
PAQUE
Voir Fêtes.
PARVIS
Voir Sanctuaires, hauts-lieux, temples.
PAIENS
Voir Gentils.
PEAGERS
Voir Publicains.
PENTATEUQUE
Ce terme, dérivé du grec et signifiant « les cinq rouleaux », ne se trouve pas dans la Bible. Il désigne les cinq premiers livres de l'Ancien Testament que les Juifs désignaient d'un seul mot : la Loi.
PENTECOTE
Voir Fêtes.
PHARISIENS
Ce terme est bien connu des lecteurs du Nouveau Testament, et chacun sait qu'il désigne une portion de l'élite religieuse du peuple juif au temps de Jésus. Mais les indications des Evangiles sont trop incomplètes pour nous donner une idée exacte du rôle que ces hommes ont joué dans l'histoire. Il est nécessaire de les compléter par les renseignements que nous fournissent les écrits des rabbins et des scribes (les Talmuds), ainsi que ceux de l'historien Josèphe. - On comprend alors que les Pharisiens ne formaient pas ce qu'on appelle une secte religieuse, car ce terme implique une dissidence de ceux auxquels on l'applique par rapport à la croyance ou à la pratique religieuse des adeptes de la même foi. Telle n'était en aucune mesure ta position des Pharisiens qui furent, depuis la première heure jusqu'à la fin, les plus fidèles représentants, les plus stricts défenseurs de l'orthodoxie juive. Ils ne se distinguaient de la masse des croyants que par cette attitude de farouche conservatisme. Le but qu'ils assignaient à leur effort spirituel était de maintenir et de renforcer l'autorité de la Loi mosaïque au sein de la nation. C'est ainsi que Jésus comprenait leur position quand il disait : « C'est dans la chaire de Moïse que sont assis les Scribes et les Pharisiens : observez donc ce qu'ils vous disent et faites-le ; mais n'imitez pas leurs oeuvres, car ils disent et ne font pas » (Mat 23 : 2). Les Pharisiens étaient donc un parti religieux plutôt qu'une secte.
Ils avaient déjà une longue histoire à l'époque de Jésus. Pour saisir l'origine de leur mouvement, il faut remonter jusqu'au lendemain des temps d'Esdras et de Néhémie. Les hommes dévoués et sincères qui continuèrent l'oeuvre de ces réformateurs, les Hassidim (les Pieux ou Dévots), furent amenés, après la conquête de la Palestine par Alexandre le Grand, à combattre la civilisation grecque qui s'infiltrait dans la nation juive et menaçait, pensaient-ils, de ruiner l'oeuvre de reconstruction qui était leur héritage. Les partisans de la culture grecque étaient nombreux (voir Sadducéens). Les partisans de la fidélité à la tradition s'organisèrent fortement pour les combattre : les Hassidim s'appelèrent, à partir du milieu du II° siècle avant J.-C., les Pharisiens, c'est-à-dire les Séparés. Au temps de Jésus, la haine du Grec avait fait place, dans leur coeur, à la haine du Romain.
L'histoire de la lutte de ces deux partis est trop longue pour être racontée ici. Il suffira de dire que la tendance des Pharisiens finit par l'emporter et qu'à l'époque évangélique des Sadducéens, affaiblis, ne comprenant plus guère que la caste des prêtres, étaient relégués dans le Temple d'où ils ne sortaient plus. La lutte entre les deux partis n'était plus qu'une lutte d'école, faite d'âpres discussions théologiques.
Ce qui distinguait particulièrement la doctrine pharisienne de celle des Sadducéens, c'était leur attachement à la Tradition. Au cours des siècles, la Loi écrite avait été grossie d'innombrables traditions orales, qui en étaient le commentaire ; commentaire plus volumineux, quand il fut à son tour mis en écrit, que la Loi primitive, et devenant toujours plus volumineux à mesure que les écoles de scribes et de rabbins, non contents du commentaire, entreprenaient le commentaire du commentaire. Or, les Pharisiens tenaient cette énorme masse de la tradition pour aussi sainte et aussi contraignante que la Loi elle-même. Et s'il semblait y avoir parfois quelque contradiction entre la Loi et la Tradition, certains Pharisiens étaient d'avis qu'il fallait donner la préférence à la Tradition. Ainsi s'expliquent les paroles bien, connues de Jésus : « Et vous, pourquoi transgressez-vous, au profit de votre Tradition, le Commandement de Dieu : Honore ton père et ta mère ? » (Mat 15 : 1-10).
Entre les mains des Pharisiens, la Loi était ainsi devenue un code formidable et minutieux, aux exigences innombrables, amplifié d'une casuistique dont les discussions nous paraîtraient aujourd'hui le comble du ridicule (voir : Sabbat) si nous ne savions pas que Jésus est mort pour avoir établi la glorieuse liberté des enfants de Dieu en face de ce monument effrayant d'oppression spirituelle et de bigoterie religieuse. Un mouvement dont tes origines étaient pures s'achevait dans l'épanouissement du formalisme le plus aveugle et parfois de l'hypocrisie la plus caractérisée (Mt 23).
Que les Pharisiens, contrairement aux Sadducéens, aient cru à la Résurrection des Justes, qu'ils aient attendu l'apparition d'un Messie temporel et politique et qu'ils aient favorisé le développement de la Synagogue (voyez ce mot), ne suffit pas à contrebalancer l'influence néfaste exercée par leurs doctrines sur le peuple juif. Ce qui peut être dit de meilleur pour leur défense, c'est qu'un petit nombre d'entre eux, sincères et clairvoyants, furent les amis de Jésus.
PHYLACTÈRES et FRANGES
Ces termes sont bien connus des lecteurs de l'Evangile par la parole de Jésus, rapportée clams le passage (Mat 23: 5)
« Toutes leurs actions, ils les accomplissent pour attirer les regards ; ils portent d'énormes phylactères et leurs franges sont interminables ». On comprend que Jésus censure ici une coutume des Pharisiens, non parce qu'elle est mauvaise en elle-même, mais parce qu'elle manifeste une tendance fâcheuse à exagérer l'importance des détails extérieurs de la vie religieuse an détriment des sentiments essentiels : la justice et la miséricorde. Ce que l'on sait moins c'est la nature de cette coutume des Pharisiens. - Les phylactères étaient de petits sachets de cuir cousus à une courroie. On en portait deux : l'un attaché autour du bras gauche, de telle sorte que le bras étant replié sur la poitrine, le sachet appuyât à l'endroit du coeur ; l'autre, attaché autour de la tête, de façon à ce que le sachet fût au milieu du front. Ce dernier sachet était divisé en quatre pochettes contenant chacune un morceau de parchemin où étaient écrites des paroles de la Loi. Le sachet porté sur le bras était simple et contenait un seul parchemin avec les mêmes passages. L'origine de cette coutume est dans un texte du livre du Deutéronome : « Ces commandements seront dans ton coeur... Tu les lieras comme un signe sur tes mains et ils seront comme des fronteaux entre tes yeux (De 6 : 6-8) ». Un passage analogue se trouve dans Exode Ex 13 : 9,16. Les Rabbins considéraient ces phylactères comme des objets particulièrement sacrés. Il fallait les respecter à l'égard des saintes Écritures. Comme ces dernières, ils pouvaient être sauvés du feu le jour du sabbat. Leur sainteté était supérieure à celle de la Mitre du souverain sacrificateur, qui ne contenait qu'une fois le nom de Yahvé, tandis que les phylactères le contenaient 23 fois. On leur attribuait la vertu de protéger (c'est le sens du mot grec phylactère) contre les mauvais esprits ; ils participaient donc à la nature des amulettes. Peut-être, aux temps prophétiques, en avait-on admis l'usage pour essayer d'effacer, en le perpétuant sous une forme et avec un esprit nouveaux, l'emploi des amulettes païennes on de signes tatoués sur le front et la main. Mais l'interprétation païenne avait reparu sous l'interprétation prophétique. On jurait par les phylactères en y portant la main.
Les franges, ou plutôt les houppes, étaient des ornements du manteau auxquels on attachait une signification religieuse à cause du texte (Deutéronome 22 : 12): « Tu mettras des franges aux quatre coins du vêtement dont tu te couvriras ». Voir aussi No 16: 37. Mais quelle était cette signification, c'est ce qu'il est impossible de préciser.
POSSESSION, POSSEDE
Voir Démons.
POUSSIERE
Voir Cendre.
PRÉPARATION (Jour de la)
PRESBYTRE
Voir Ancien.
PRETEUR
Dans Ac 16 : 19-20, Paul et Silas sont « traînés vers les magistrats » et « amenés devant les prêteurs », deux membres de phrase qui semblent faire double emploi. Au sens strict du mot, il n'y avait dans les villes des colonies romaines qu'un seul prêteur qui en était le magistrat suprême. On peut supposer qu'on avait pris l'habitude d'étendre le terme aux magistrats subordonnés.
PRÉTOIRE
Ce terme désignait à l'origine la tente du général en chef d'une armée romaine et l'espace réservé où elle était dressée. A l'époque impériale il en était venu à s'appliquer à la résidence des gouverneurs de province. Dans le Nouveau Testament, le prétoire, où séjourne le procurateur (voir ce mot) quand il vient à Jérusalem, est l'ancien palais des Hérodes. Devant ce prétoire était un espace pavé (sans doute en mosaïque) qui servait de tribunal. Ailleurs, une cour réunissait le corps de garde (Mat 27 : 27 ; Mr 15 : 16 ; Jea 18 : 28,33 ; 19 : 13. La résidence ordinaire du gouverneur de la Judée était Césarée, où il habitait aussi un ancien palais d'Hérode, également dénommé prétoire (Ac 23 : 35). Par analogie, il semble bien que le prétoire dont parle Paul dans Philippiens, Phi 1 : 13, où tout le monde avait su qu'il était prisonnier pour la cause de Christ, fût le palais du plus haut magistrat de la ville, l'empereur, si, comme il est probable, l'épître fut écrite à Rome. Ce qui rendrait cette supposition plausible, c'est que le mot de prétoire tendait alors à devenir un terme synonyme de palais.
PRETRES et LÉVITES
Les anciens Hébreux comme les autres nomades de race sémitique, avaient une religion aux cérémonies peu compliquées pour lesquelles un nombreux clergé ne semble pas avoir été indispensable. - Le culte prit un caractère nouveau quand Israël devint sédentaire. La religion des pasteurs du désert emprunta plus d'une coutume à la religion du peuple agricole de Canaan et les prêtres devinrent des personnages plus important sans être encore nombreux. Les rites israélites gardèrent longtemps la marque de leur origine. Le prêtre, tel qu'il nous apparaît dans les récits du temps des Juges Eli à Silo (1Sa 1-4) ou Jonathan dans le sanctuaire privé de Mica (Juges 17-18), est encore beaucoup plus semblable à un gardien de temple qu'à un indispensable officiant. Il existe, ici et là, un édifice destiné à abriter un objet sacré, comme l'arche (voir ce mot) à Silo, l'éphod et le teraphim (voyez ces mots) dans la « maison de Dieu » de Mica ou l'épée de Goliath à Nob (1Sa 3 : 3 ; Juges 17 : 5 ; 1Sa 21 : 9). Et il y a un prêtre pour veiller sur ce sanctuaire, mais non pour y sacrifier. Les offrandes des fidèles sont encore spontanées : elles sont présentées et consommées par une famille, un clan (voir ce mot) ou un village et donnent lieu à un repas sacrificiel où les prêtres n'interviennent .pas nécessairement. Gédéon (Juges 16 : 17 ss) et Manoach (Juges 13 : 19) offrent eux-mêmes leur sacrifice avec le plein assentiment de Yahvé ou de son Ange (voir ce mot).
Comme chez les bédouins primitifs, la plupart des sanctuaires n'ont pas de temples et ne sont que des enceintes sacrées où se dressent la pierre, la stèle ou l'arbre qu'on vénère (1Sa 14 : 34). Même les sacrifices faits à Silo, auprès d'un temple, sont faits par les particuliers, le prêtre n'intervenant, par l'entremise d'un serviteur, que pour prélever la part de l'offrande qui lui revient (1Sa 2 : 13). Si le prêtre ne préside pas nécessairement le sacrifice, quel est donc son rôle en dehors du gardiennage du temple et de son contenu ? C'est de consulter Yahvé au moyen de l'éphod (voir ce mot ; 1Sa 14 : 18 texte grec ; 1Sa 14 : 41 texte grec ; 1Sa 23 : 6-12 ; 30 : 6-9). Nul doute qu'à cet égard le prêtre de Silo n'ait joui en Israël d'un grand prestige. Il avait droit, comme nous l'avons vu, à des redevances en nature, et il ne semble pas qu'on osât lui résister s'il réclamait plus que son dû (1Sa 2:12-17). Eli était assurément un grand personnage de son temps et l'on peut en conclure qu'il donna beaucoup de lustre au sacerdoce israélite. Le fait est qu'après la mort de ses fils, ses descendants s'établirent à Nob (1Sa 14:3 ; 21 : 1 ; 22 : 11), y exercèrent longtemps la prêtrise et furent constamment appelés à consulter Yahvé pour le compte des rois d'Israël jusqu'à la déposition d'Abiathar par Salomon (1Ro 2 : 26-27). - La tradition voulait qu'Eli fût un Lévite, c'est-à-dire qu'il appartînt à la tribu de Moïse et même à sa descendance (1Sa 2 : 27). On en vint peu à peu à choisir de préférence les prêtres dans cette lignée (Juges 17 : 13) et à maintenir leur postérité dans le sacerdoce (Juges 18 : 30),. Enfin, quand les sanctuaires pourvus de prêtres se furent multipliés et quand le clergé fut devenu une classe à part au sein du peuple, « prêtre » et « lévite » devinrent des expressions équivalentes. A l'époque où fut composé le poème appelé Bénédiction de Moïse (Deutéronome 33), cette équivalence des deux termes est absolue. Peu à peu, à travers une période obscure de leur histoire, les prêtres ou lévites en sont venus à former une corporation où les fonctions sacerdotales ont toujours plus tendance à être héréditaires. Par l'intermédiaire du clergé, les rois continuent à consulter Yahvé en toute occasion où le choix d'une ligne de conduite est difficile. Les prêtres conservent soigneusement les légendes relatives à leurs sanctuaires. Ils possèdent des traditions. bien établies en matière de droit civil et rituel, traditions qui émanent de leurs oracles mêmes. Cet ensemble, encore oral, s'appelle déjà la Tora, nom qui sera plus tard celui de la Loi écrite d'Israël. Un des premiers écrits législatifs que nous possédons se trouve incorporé dans l'Exode (21-23). On l'appelle le Livre de l'Alliance. Longtemps les prêtres constituèrent la plus haute puissance morale et spirituelle d'Israël. De bonne heure, sans doute, toute loi fut considérée comme remontant à Moïse. Les fonctions sacerdotales avaient du reste pris une importance nouvelle du fait de l'unification de la nation. Le rituel étant de plus en plus compliqué, le prêtre devenait aussi de plus en plus indispensable au fidèle qui voulait offrir un sacrifice à Yahvé. Les revenus du sacerdoce devenaient aussi de plus en plus considérables. Outre les redevances en nature dont nous avons parlé, les prêtres, étant les juges du peuple, touchaient et gardaient les amendes auxquelles ils condamnaient certains coupables (2Ro 12 : 16; Os 4 : 8 ; Am 2 : 8). Le prophète Michée les accusait d'être devenus insatiables, de « juger pour des présents et d'enseigner pour un salaire » (Mic 3 : 11). Au VIII° siècle, ils sont des hommes riches, et, comme le déclarent les prophètes ci-dessus nommés, ils ont été corrompus par la convoitise des richesses. Dans les sanctuaires royaux, tels que Jérusalem, Béthel ou Dan, le clergé dépend étroitement du roi ; aussi semble-t-il que dans le royaume d'Israël il disparaisse avec la chute de la dynastie (2Ro 10: 11) alors qu'ils participaient, dans le royaume de Juda à la stabilité de la famille royale (2Ro 11 : 4 ss). A Jérusalem, à partir du règne de Salomon, les prêtres du sanctuaire royal seront jusqu'à l'exil, les descendants de Sadoq et posséderont, après l'exil, une absolue suprématie.
Au VII° siècle, la réforme de Josias, avec la concentration du culte à Jérusalem, supprimait les sanctuaires provinciaux et dépossédait les prêtres des campagnes. La nouvelle législation de l'époque, le Deutéronome les autorisait, il est vrai, à venir à la capitale et leur accordait les mêmes droits qu'aux membres du clergé royal ; mais en fait ceux qui se laissèrent attirer à Jérusalem par ces assurances n'obtinrent pas ce que le nouveau régime leur promettait et formèrent au Temple un sacerdoce subalterne n'ayant pas le droit de monter 'à l'autel (2Ro 23: 9). On ne sait si beaucoup acceptèrent cette situation inférieure et si un bon nombre ne retournèrent pas à leurs anciens sanctuaires, quand, à la mort de Josias, les rigueurs, de la réforme disparurent. Quoiqu'il en soit cette période de l'histoire touchait à sa fin et la prise de Jérusalem, en 586, et la déportation qui suivit, en détruisant la vie nationale de Juda, dispersa le clergé et interrompit le culte.
Mais pendant l'exil (vers 572), quand Ezéchiel prépare la reprise du culte et la réforme religieuse en vue du retour à la patrie, son programme de réorganisation du clergé futur prévoit deux catégories de prêtres : une catégorie inférieure composée des anciens desservants des sanctuaires provinciaux qui méritent cette déchéance en punition de leurs péchés, ce sont les lévites, et une catégorie de prêtres proprement dits, composée des descendants de Sadoq, ce sont les prêtres-lévites (Eze 44 : 10 ss). Plus tard ce dernier mot (lévite) sera d'ordinaire réservé aux clercs subalternes. Le programme d'Ezéchiel ne se réalisa pas dès le retour de l'exil. - Il se réalisa cependant, non sans modifications, comme on va le voir, par l'application du Code Sacerdotal, législation datant des environs de l'an 450 av. J-C. La distinction entre prêtres et lévites est désormais absolue, mais, comme on la fait remonter au temps de Moïse (aussi bien que toutes les ordonnances de la loi) il ne peut plus être question de la légitimer par lés considérations historiques du Deutéronome et d'Ezéchiel. Dieu a voulu, dès la révélation mosaïque, que le sacerdoce fût réservé aux seuls descendants d'Aaron (façon de désigner les fils de Sadoq). Et c'est également par la volonté de Dieu que, dès l'origine, les lévites ont été destinés non à la sacrificature, mais aux fonctions subalternes du culte : ils n'ont encouru aucun châtiment. A la tête des prêtres et des lévites, comme à la tête de la communauté juive tout entière, est placé le grand-prêtre (ou souverain sacrificateur), seul autorisé à pénétrer dans le lieu très saint. Nous ne pouvons ici entrer dans le détail de la loi sacerdotale et des attributions, prérogatives et devoirs qu'elle assigne au clergé. Nous n'avons eu d'autre but que de faire connaître l'évolution historique de la fonction du prêtre qui atteint son terme avec la dernière en date des législations d'Israël.
PROCONSUL et PROCURATEUR
Certaines provinces romaines, dîtes sénatoriales, étaient administrées par des proconsuls, comme l'Achaïe (Ac 18: 12), l'Asie (Ac 19 : 38), File de Chypre (Ac 13 : 7) ; d'autres, dîtes impériales, comme la Judée, par des procurateurs. Les deux termes, proconsul et procurateur, sont synonymes de gouverneur (voir ce mot) et c'est cette dernière expression (en grec : hègémôn) que le Nouveau Testament emploie pour désigner les procurateurs de la Judée.
PROPHETES
On ne peut songer à donner ici même un bref aperçu de l'histoire du prophétisme. On se bornera à quelques indications indispensables.
I. Le lecteur de la Bible doit savoir en premier lieu que presque tous les livres de l'Ancien Testament ont été écrits sous l'influence des prophètes. Les plus anciennes traditions nationales (voir : Bible, formation de l'A. T.) sont imprégnées de leur esprit, et les traces de leurs principes sont loin d'être absentes des écrits les plus récents, qui manifestent cependant une singulière déformation de leur idéal. Il n'est pourtant pas impossible de retrouver dans l'Ancien Testament quelque chose de la religion primitive des Hébreux non pas en y cherchant des documents datant de cette lointaine époque, mais en éliminant des documents postérieurs, que nous possédons, tout l'apport de la religion prophétique et du judaïsme ancien. Il reste alors sous nos yeux, comme le montrent plusieurs articles de ce Lexique, un résidu substantiel du vieux patrimoine de croyances et de coutumes païennes que les Israélites possédaient en commun avec les peuples de leur voisinage. Encore ces coutumes antiques, qui transparaissent dans les récits refondus par les écoles prophétiques, ne doivent-elles pas toujours être interprétées dans le sens que celles-ci leur ont donné.
II. Le lecteur de la Bible doit, en second lieu, se garder de croire que le prophétisme ait toujours été tel qu'il nous apparaît dans les pages des prophètes écrivains des VIII°, VII° et VI° siècles.
On sait assurément qu'il y eut, dans les siècles antérieurs, des prophètes qui n'écrivirent point, car quelques-uns d'entre eux, comme Elie, ont une grande célébrité. Ce que l'on sait peut-être moins, c'est que le prophétisme, sous une forme primitive, existait déjà dans la vieille religion païenne des anciens Hébreux comme il existait d'ailleurs dans d'autres religions de l'antiquité. Le prophète israélite de ces temps reculés ne se distinguait pas très nettement, semble-t-il, du prêtre (voir ce mot), sinon par le fait que ce dernier était attaché à un sanctuaire où il consultait la divinité au moyen d'un objet sacré (voir le mot éphod), alors que le prophète, qui était un voyant, recevait de Dieu, pensait-on, des révélations directes. Les inspirations qu'il croyait recevoir étaient souvent accompagnées de phénomènes d'exaltation, d'excitation ou d'extase. Balaam, semblable à ses confrères Heb est « l'homme qui tombe et ses yeux s'ouvrent » (ne pas traduire : l'homme qui se prosterne ; Nombres 24 : 4). Il arrivait que l'on consultât ces prophètes primitifs dans les circonstances les plus ordinaires de la vie (1Sa 9: 6). Certains d'entre eux étaient des isolés, d'autres vivaient en troupes, comme ceux que rencontra Saül (1Sa 10 : 10), marchant au son des instruments de musique et « prophétisant ». Par ce dernier mot, il faut entendre les paroles qu'ils proféraient dans leur délire religieux. L'histoire des religions, anciennes ou modernes, nous fournit beaucoup d'exemples de phénomènes analogues.
L'esprit du prophète, pensait-on, était alors envahi par l'esprit divin, et l'homme ainsi favorisé était un « homme de Dieu », participant de la force divine. On conçoit qu'une croyance semblable conférât au prophétisme une extraordinaire puissance, soit pour le bien, soit pour le mal. Ce qui est merveilleux, c'est qu'en Israël cette puissance spirituelle, d'ailleurs grandissante, fut mise de plus en plus au service de la justice et de la vérité, et cela, au VIII° siècle surtout, avec une si pure intuition du divin que le prophétisme doit être considéré comme un des miracles de l'histoire.
III. Le lecteur de la Bible doit enfin être averti que l'ordre dans lequel l'Ancien Testament lui présente les récits des prophètes n'est pas l'ordre chronologique. Cet ordre chronologique est le suivant : au VIII° siècle, Amos, Osée, Esaïe, Michée ; au VII° siècle, Sophonie, Nahum, Jérémie, Habakuk ; au VI°l siècle, Ezekiel le second Esaïe (Esa 40-66) ; et plus tard, à des dates diverses, Aggée, Zacharie (ch. 1-8), Malachie, Joël, Esaïe Esa 24 : 27, Zacharie Zac 9-14, Abdias. On remarquera que, dans cette liste, le nom d'Esaïe revient trois fois et celui de Zacharie deux fois. Nous avons expliqué, à l'article Bible, que les rouleaux (les livres de l'antiquité) n'étaient pas généralement faits à la mesure des ouvrages que l'on y recopiait. Si ces récits étaient insuffisants à couvrir toute la surface du rouleau, on les faisait suivre d'un ou deux écrits de même espèce selon la place restée libre. Il arrivait très facilement alors qu'en recopiant le rouleau toute espèce de séparation disparût entre ces ouvrages juxtaposés qui, désormais, étaient attribués à l'auteur du premier d'entre eux.
PROSELYTES
Il est fait mention des prosélytes dans le récit de la Pentecôte (Ac 2: 10), dans le récit de l'élection des diacres (Ac 6 : 5), et dans le récit du séjour de Paul et de Barnabas à Antioche de Pisidie (Ac 13 : 43). De plus, nous trouvons ce mot dans la bouche de Jésus, reprochant aux Pharisiens « de parcourir terres et mer pour faire un seul prosélyte » qu'ils rendent bientôt plus mauvais qu'eux-mêmes (Mt 23 : 15). En outre, il s'agit de la même catégorie d'hommes dans les passages où il est question des « craignant Dieu » (Ac 10 : 2 ; 13:16,26; 13:50; 16:14; 17:4,17; 18 : 7). Les prosélytes sont les convertis au judaïsme. Il y eut, au temps des Macchabées, des prosélytes par force. Mais, dans le monde païen du temps de Jésus, où les Juifs étaient répandus partout, beaucoup de conversions s'expliquaient par leur esprit missionnaire et par le désir d'une religion plus pure qui couvait en bien des âmes.
PUBLICAINS ou PEAGERS
Les personnages désignés par ces noms dans nos Evangiles nous y apparaissent avec une réputation détestable que le lecteur ne s'explique pas toujours. Pour la comprendre, il faut savoir quelque chose de l'impôt dont ils étaient les receveurs l'impôt perçu par l'étranger, par le Romain. Il semblait au Juif que payer cet impôt, c'était reconnaître le droit du conquérant, et c'était aussi, semblait-il, renoncer au titre de Peuple Elu, trahir à la fois le patriotisme et la Religion, être infidèle au Dieu d'Israël. La haine de l'étranger était grande en Palestine. L'impôt l'entretenait et l'exaspérait. C'était avec une effervescence où grondait la révolte qu'on posait sans cesse la question : « Faut-il payer le tribut à César (Mt 22 : 17} ? » On le donnait, certes, mais en protestant. Un certain Judas, le Gaulonite, s'était soulevé pour ne pas le payer. On comprend qu'il parût incroyable aux patriotes qu'un Juif pût consentir à devenir le receveur de cet impôt abhorré. On comprend que les publicains ou péagers fussent considérés et traités comme des parias. On les accusait, en outre, de retenir sur leurs perceptions un droit énorme. Aussi, traîtres et voleurs, étaient-ils exclus du droit de témoigner en justice. Dans le langage du temps, ils sont assimilés aux païens et aux pécheurs : « Qu'il soit pour toi comme un publicain et un païen » (Mat 18 : 17). - « Les publicains et les pécheurs s'approchaient tous de lui pour l'entendre » (Luc 15 : 1).
RECOLTES (fête des).
Voir Fêtes.
REFUGE (cités de).
Voir Asile.
REINE DU CIEL
Voir Ciel.
REHABITES
Les Rékabites semblent avoir été un clan apparenté à la tribu des Qéniens (1Ch 2 : 55), en même temps qu'une confrérie religieuse qui, vers le milieu du IX° siècle, attribuant les malheurs d'Israël à l'abandon des anciennes moeurs nomades, se proposa de revenir aux traditions et coutumes du désert et pour cela se dépouilla volontairement de toutes les habitudes de la vie sédentaire et agricole, cananéennes d'origine, adoptées par la masse du peuple. Peut-être, plus que tout autre clan; s'étaient-ils toujours montrés réfractaires aux moeurs nouvelles et ne transformèrent-ils cet éloignement instinctif en principe conscient que sous l'influence de Jonadab, fils de Rékab, qui fit d'eux une sorte de secte religieuse. Les deux textes à lire sur les Rékabites sont 2Ro 10 : 15-24 et Jer 35 1-10. Par le sentiment qu'ils avaient des fautes et des erreurs qui compromettaient la pureté morale et religieuse d'Israël, les Rékahites furent au nombre des précurseurs des grands prophètes.
SABBAT
Le sabbat était le septième jour de la semaine des Israélites et leur jour de repos. La nature de l'observation du sabbat a varié suivant les époques. Les textes législatifs les plus anciens (entre autres Ex 33 : 12 ; De 5: 12-15) et, d'une manière générale, toutes les lois antérieures à l'exil considèrent le sabbat comme un jour consacré à Yahvé et marqué, comme toutes les fêtes religieuses (Am 8: 5), par la cessation du labeur quotidien et en particulier des travaux agricoles, repos dont le caractère rituel ne voile nulle part, dans ces textes primitifs, la portée sociale et humaine : « Tu te reposeras afin que ton boeuf et ton âne aient du repos, afin que le fils de ton esclave et l'étranger aient du relâche » (Ex 23 12), « afin que ton serviteur et ta servante se reposent comme toi » (De 5 : 14). L'interruption du travail de la semaine n'était pas encore confondue avec la cessation de toute activité. L'Israélite pieux profitait volontiers du sabbat pour seller son âne et aller consulter « l'homme de Dieu » (2 Rois 4:23). On n'avait pas encore imaginé que toute course ou toute promenade fût en ce jour une offense à Yahvé.
Le caractère du sabbat se transforma après l'exil. Déjà, la législation deutéronomique du VII° siècle, en abolissant tous les sanctuaires d'Israël, à l'exception de celui de Jérusalem, c'est-à-dire en extirpant de la vie religieuse du peuple des campagnes tous les rites, toutes les fêtes, réservées désormais à la capitale, avait singulièrement accru l'importance du sabbat. Pour le paysan ou le citadin éloigné de Jérusalem, le jour du repos hebdomadaire devenait le signe à peu près unique de sa fidélité au Dieu d'Israël. Cette importance nouvelle du sabbat permit à l'institution de survivre à la destruction du Temple et à la catastrophe de l'exil. L'Israélite déporté, comme le provincial des temps qui avaient précédé, s'attacha au sabbat avec d'autant plus de force qu'il ne possédait plus guère, dans le monde païen où il se trouvait perdu, que cette seule marque de son attachement à la religion de ses pères. C'est ainsi que le sabbat prit tout naturellement une importance très grande dans la vie religieuse de l'exil, et qu'à partir de cette époque il fut considéré comme le vrai signe de l'alliance entre Israël et Yahvé (Eze 20 : 12). Le caractère social et humain qu'avait le sabbat en Israël avant l'exil disparut alors dans la glorification de son caractère divin. Le sabbat n'est plus qu'un jour sanctifié par Yahvé et qui, par suite, doit lui appartenir fout entier. En consacrer la moindre partie au travail, c'est offenser Dieu : toute espèce de travail devient donc un péché extrêmement grave en ce jour. Les textes de loi postérieurs à l'exil ne donnent plus qu'un motif théologique au repos du sabbat
c'est qu'après la création Dieu s'est r posé le septième jour. Il faut cesser travail parce que Dieu l'a ordonné ainsi La loi continuera donc d'interdire le travail sabbatique pendant les semailles et les moissons (Ex 34 : 21) ; mais elle interdira également les occupations normales du ménage : ramasser le bois, cueillir les légumes (Ex 16 : 22 ; No 15 : 32), allumer le feu pour la cuisson des aliments (Ex 35 : 3), etc.
A l'époque où vivait Jésus, le sabbat n'était pas réglementé seulement par ces textes de loi que nous retrouvons dans la Bible, mais par les innombrables commentaires qu'y avaient ajoutés les Docteurs de la Loi ou Scribes (voir ce dernier mot). Ces commentaires eurent bientôt plus d'autorité que la Loi elle-même. On les jugeait indispensables à qui voulait observer fidèlement le sabbat. Les interdictions de la loi paraissaient trop vagues. Une certaine activité était évidemment impossible à proscrire, même pendant le sabbat : on pouvait se lever, se vêtir, manger, aller à la Synagogue. Il fallait, pensait-on, savoir au juste ce qui était permis et ce qui était défendu, afin de ne pas rompre, sans le vouloir, l'alliance avec le Dieu d'Israël. Les docteurs de la Loi s'efforcèrent de dissiper les doutes et les indécisions des fidèles les plus scrupuleux. Ils formulèrent une réglementation d'une incroyable minutie. Trente-neuf espèces de travaux étaient interdits. Nous n'en citerons que quelques-uns, les moindres : faire deux points (un seul ne constituerait pas un péché), tisser deux fils, détacher deux fils, faire un noeud, le défaire, écrire deux lettres de l'alphabet, allumer ou éteindre le feu, porter un objet d'un endroit à un autre, etc.
On pourrait estimer qu'il était difficile d'être plus précis. Cependant, chacune de ces interdictions était encore entourée d'explications copieuses. Certain rabbin disait qu'il n'y avait pas péché si l'on pouvait défaire le noeud d'une seule main. Certains noeuds, d'ailleurs, devaient être permis, comme ceux des chaussures ou sandales. Vous pouvez également écrire deux lettres de l'alphabet, sans péché, à condition que ce soit sur deux feuilles d'un livre et qu'on ne puisse les lire ensemble ; mais si vous les écrivez sur deux pans de mur faisant un angle, il suffit qu'on puisse les lire ensemble pour que vous ayez enfreint le sabbat. On pourrait allonger démesurément la liste de ces exemples. Ceux qui viennent de passer sous les yeux suffisent à donner une idée du formalisme insensé et de la ridicule casuistique auxquels aboutissait, entre les mains des scribes, l'observation rigoriste du sabbat.
Ce rigorisme, que beaucoup de Pharisiens (voir ce mot) poussaient à l'extrême, conduisait tout naturellement à cette hypocrisie que Jésus condamnait avec sévérité chez ses adversaires. A côté des Pharisiens, intraitables observateurs du sabbat, se rencontraient des Pharisiens plus libéraux qui comprenaient la puérilité de certaines prescriptions. Mais ceux là même n'osaient pas les violer ouvertement : ils mettaient toute leur habileté à les tourner. Il était interdit de porter un objet d'une maison à une autre, ce qui pouvait être bien gênant entre amis voisins. On imaginait donc de faire communiquer les maisons entre elles par leurs cours intérieures pour qu'on pût considérer toutes les habitations ainsi reliées les unes aux autres comme une seule maison divisée en plusieurs logements.
Ce qui était également grave; c'est que la stricte observation du sabbat était. inhumaine. Le soin des malades était interdit (Mat 12 : 9-10 ; Marc 3 : 1-5 ; Luc 6 : 6-10 ; 13 : 10-17 ; 14 : 1-6 ; Jean 5 : 1-16 ; 9 : 14,16). On était plus pitoyable pour les animaux que pour les êtres humains (Luc 13 : 15 et suiv.).
Enfin, la conséquence de ce rigorisme était de dépasser la mesure du possible. Une grande partie du petit peuple de Galilée ou de Judée avait abandonné depuis longtemps toute prétention à être en règle avec la Loi des Scribes, et comme ils étaient, pour cette seule raison, profondément méprisés des Pharisiens, traités de « gens de mauvaise vie », ils vivaient eux-mêmes dans le sentiment déprimant d'être « hors la loi »,; séparés à jamais des chefs religieux de la nation. Et c'est à eux que va la pitié de Jésus, car ils sont « languissants et abattus, comme des brebis qui n'ont point de berger » (Mt 9 : 36).
SAC
Voir Deuil.
SACRIFICE
Dans son acception la plus générale, le terme sacrifice peut désigner n'importe quel rite religieux constituant une offrande à Dieu : les Israélites offraient à Yahvé des animaux, des végétaux, du pain, de l'huile, du vin, etc. - Dans un sens plus restreint et plus commun, le terme de sacrifice désigne plus particulièrement l'offrande sanglante. - C'est dans son acception la plus large que nous emploierons ici le mot de sacrifice.
Au temps de Jésus, le culte quotidien ,du matin, dans le Temple de Jérusalem, consistait en un sacrifice, le sacrifice de :l'agneau, - puis en un service où un prêtre priait devant le peuple et lui lisait la loi, - enfin en une offrande de parfums sur l'autel d'or. Un second culte analogue avait lieu avant le coucher du :soleil. Le reste de la journée était consacré aux sacrifices des particuliers par exemple l'offrande des mères après leur délivrance (une paire de tourterelles). Les sacrifices particuliers étaient extrêmement nombreux pendant les fêtes, spécialement à la Pâque.
Mais, à l'époque de Jésus, le rite du sacrifice avait eu une très longue histoire et subi des modifications profondes dans sa forme et dans son inspiration. - Depuis la réforme deutéronomique de l'an 622 avant J.-C., on ne sacrifiait plus que dans le Temple de Jérusalem, tandis qu'auparavant, et depuis l'entrée du peuple en Canaan, les sacrifices s'accomplissaient dans tous les sanctuaires du pays. - L'idée même du sacrifice avait évolué à travers les âges. A l'origine, il semble que cette idée ait été avant tout celle d'une communion avec la divinité par le partage d'une même nourriture. Quand deux hommes de tribus différentes voulaient conclure une alliance (voir ce mot), ils ne se contentaient pas d'établir entre eux un pacte d'amitié, ils créaient le lien du sang et ainsi devenaient frères. Pour cela, il fallait ou bien .boire un peu du sang l'un de l'autre, ou bien boire tous deux le sang d'un même animal, ou bien, enfin, plus simplement manger d'une même nourriture (Ge 31 : 54) qui devenait en eux, pensait-on le même sang. Ainsi s'explique le fait que l'hospitalité créait, dans l'antiquité, de tels liens entre les hommes : avoir mangé à la même table, c'était être devenus parents et alliés ; tout repas en commun était une communion. Cette coutume fut transposée naïvement du domaine des relations humaines au domaine des rapports de la tribu, ou du village, ou de l'individu avec son Dieu. Pour faire alliance avec la divinité, on célébrait, dans le sanctuaire, un repas sacré où la nourriture était partagée entre Yahvé et ses adorateurs : ceux-ci étaient les invités de leur Dieu qui leur accordait la grâce de son alliance. Le récit d'un sacrifice de ce genre nous est donné avec assez de détails dans l'histoire de la première rencontre de Saül et de Samuel (1Sa 9 : 11-24). Yahvé était censé prendre part au repas ; il recevait le sang et la graisse de la victime, et le repas était ainsi une communion avec la divinité. - De cette idée du repas en commun avec Dieu, on arriva tout naturellement, puisque Dieu absorbait de la nourriture, à l'idée qu'il fallait lui en offrir d'une façon régulière. Le sacrifice devint de plus en plus le repas de la divinité. Et la signification du rite pour l'adorateur était, de ce fait, transformée du tout au tout, puisque ce n'était plus Dieu qui accordait une grâce à l'homme, mais l'homme qui donnait à Dieu. Nous avons, dans l'Ancien Testament, bien des pages où cette conception du sacrifice est évidente. L'autel est appelé par Malachie « La table de Yahvé » (Mal 1 : 7,12). Sur cette « table » étaient renouvelés continuellement (No 4 : 7) les pains de proposition (1Sa 21 : 5). Les prêtres « offrent à Yahvé les sacrifices consumés par le feu, qui sont la viande de 'leur Dieu » (Le 21 : 6). - Cette nourriture de la divinité était un présent de ses adorateurs. On conçoit donc que cette idée d'un don à Dieu soit devenue, par la suite, prépondérante dans la conception du sacrifice. Pour être agréable à Yahvé, pour obtenir quelque chose de lui, ou pour se le rendre généralement favorable, on lui offrira le meilleur de ce que l'on possède, les prémices de sa récolte, les premiers-nés de son bétail. Mais parce qu'il ne s'agit plus simplement d'un repas à offrir à son Dieu, mais d'un don à lui faire, on pourra lui offrir autre chose que de la nourriture. Il acceptera d'autres présents, et les plus précieux, sans doute, seront les plus efficaces. Et c'est ainsi que les Israélites, adoptant les coutumes du pays de Canaan, en vinrent à pratiquer les sacrifices d'enfants, comme en témoignent l'histoire de Jephté immolant sa fille (Juges 11 : 39), d'Achab et de Manassé faisant « passer leurs fils par le feu » (2Ro 16 : 2 ; 21 : 6). Aucun don, pensait-on, ne pouvait mieux prouver à Dieu l'absolu dévouement de ses enfants, aucun ne serait plus puissant pour obtenir sa faveur (cf. Ge 22:1; 12 ; Mic 6 : 7). Et pendant longtemps les prophètes protesteront en vain contre cette religion barbare (Jer 7 : 31; Eze 20 : 25-26). -- Donner à Dieu, en tous temps, ce qu'il aime fut donc une idée dominante du sacrifice ; mais il était d'autant plus urgent de lui offrir des présents lorsqu'on l'avait irrité, pour apaiser sa colère. Le sacrifice pour le péché, le sacrifice expiatoire, était donc un développement logique de l'idée précédente. Mais ce développement du sacrifice en acte d'expiation finit par effacer presque complètement les idées primitives de communion et de repas et, dans une certaine mesure, l'idée même d'un don fait à Dieu. Après l'exil, tout le culte d'Israël est en fonction du besoin d'expiation, qui est devenu le sentiment dominant de la religion. Mais, en même temps, l'exagération du ritualisme fut telle que la valeur religieuse du sacrifice fut gravement compromise. En théorie, les sacrifices ne pouvaient expier que des péchés commis par inadvertance ou ignorance. En pratique, on y recourait pour effacer quantité d'autres manquements. La loi, d'autre part, donnait si exactement la ligne de conduite à suivre pour l'expiation des péchés que le fidèle pouvait se croire assuré d'obtenir le pardon de ses fautes par la simple ponctualité à observer les rites prescrits. Tout était prévu : même les péchés ignorés du pécheur. Pour que ces fautes involontaires, dont on n'a pas connaissance, et qui n'ont pas été expiées par des sacrifices particuliers, ne risquent pas de souiller le sanctuaire et de rendre inefficace le culte entier, il fut institué un grand jour des expiations, une sorte de fête du grand pardon (Lev 16 ; voir Fêtes). L'expiation n'est pas seulement devenue mécanique, elle est devenue certaine; assurée, infaillible, couvrant tout péché pour le peuple entier, à une seule condition, c'est que le rite ait été observé.
Voilà le terme de l'histoire du sacrifice en Israël. On n'en connaît cependant pas toute l'histoire si l'on néglige de rappeler que quelques hommes, au VIII° siècle avant J.-C., en particulier Amos et Osée, ont dénoncé toute la religion sacrificielle comme contraire à la volonté de Dieu et ont prêché la religion du plus pur spiritualisme. « M'avez-vous fait des sacrifices et présenté des offrandes au désert pendant quarante années, maison d'Israël ?... Je hais, je méprise vos fêtes, je ne puis sentir vos assemblées... Mais que la droiture soit comme un courant d'eau et la justice comme un torrent qui ne tarit jamais ! » (Am 5 : 21-25).
S'il a fallu un intervalle de sept siècles avant que le même idéal reparaisse dans le monde avec l'Evangile de Jésus-Christ, c'est que d'autres prophètes, moins absolus dans leur condamnation de la religion traditionnelle et plus frappés, en tous cas, par la nécessité pratique de donner au peuple un culte extérieur, ont essayé de réformer la religion que leurs prédécesseurs reniaient. Jérémie, Ezéchiel et ceux qui ont suivi ces inspirateurs étaient assurément d'ardents spiritualistes, mais ils ont concédé une large part au ritualisme qui, plus tard, dans le judaïsme, a tout envahi.
SADDUCEENS
Les Sadducéens nous sont présentés, dans le Nouveau Testament, comme les adversaires des. Pharisiens (voyez ce mot). Ces deux partis existaient depuis longtemps lorsque Jésus entra en contact avec eux. L'origine de leurs doctrines, sinon de leur appellation, remonte vraisemblablement à trois cents ans environ avant J.-C., c'est-à-dire à l'époque où l'on commença, en Israël, à accompagner la Loi de ces Commentaires auxquels les Pharisiens attachaient une importance si grande. A bien des égards, ceux-ci apparaissaient comme des novateurs : leurs commentaires de la Loi étaient une nouveauté, leurs synagogues étaient une nouveauté, leurs doctrines de la résurrection et des anges étaient des nouveautés. Il était inévitable que des résistances se manifestassent. Il y eut des conservateurs, et ce furent les Sadducéens, recrutés presque uniquement, semble-t-il, parmi le clergé de Jérusalem et les personnages de marque de la ville sainte. A l'époque de Jésus, en tous cas, ils sont le petit nombre et ont perdu, en dehors du Temple, beaucoup de leur influence. A certaines périodes de leur histoire, ils furent, politiquement, très forts ; mais il leur fut toujours difficile d'être populaires, car ils s'opposaient au peuple en luttant contre les adaptations pharisiennes de la religion aux besoins des masses. Les Pharisiens, en effet, bien qu'ils aboutissent, au temps de Jésus, à un formalisme sans précédent et souvent à l'hypocrisie la plus caractérisée, n'avaient songé, à l'origine, qu'à sauver la religion du peuple. Les Sadducéens, en s'opposant à l'évolution religieuse, font figure de purs négateurs ce qui n'est jamais une attitude populaire. Sans doute, ils sont religieux, mais leur religion, probablement assez froide, trouve pleine satisfaction dans le culte du Temple et dans la vieille Loi, telle qu'Esdras l'avait rétablie. On s'explique, en tous cas, que les Sadducéens ne soient guère connus que par leurs négations.
I. Ils niaient la résurrection (Mt 22 : 23,32). Et leur point de vue était que la résurrection des morts ne pouvait être prouvée par un texte de la Loi. Moïse n'avait rien dit à ce sujet : c'était clone qu'il n'y avait rien à en dire. L'ancien Israël n'avait pas connu ces espérances et rien n'autorisait de nouveaux docteurs, dépourvus de tout mandat divin, à les faire luire aux yeux du peuple. On saisit ici, chez les Sadducéens, cet état d'esprit, pour lequel tout développement de la doctrine, toute évolution des croyances, toute possibilité de progrès religieux doivent être écartés sans examen, la vérité totale ayant été révélée une fois pour toutes, autrefois. Mais il faut ajouter que cette négation de la résurrection dénote peut-être aussi, chez les Sadducéens, une tendance matérialiste de la pensée. Le paragraphe suivant semble confirmer cette supposition.
II. Ils niaient l'existence des anges, des démons, des esprits. Sur ce point, on peut se demander comment les Sadducéens justifiaient leur opinion, étant donné qu'il leur était bien difficile de prouver que les livres de la Loi ne contenaient aucune allusion à la croyance qu'ils rejetaient (voir: anges). Ont-ils été entraînés à cette négation du monde des esprits par leur attitude d'hostilité générale contre tout ce qui était de couleur pharisienne, -- et l'on sait que les Pharisiens avaient donné un considérable développement à la théorie de l'existence et de l'action des anges et des démons ? Ou bien faut-il admettre que la tendance au matérialisme était assez forte, chez les Sadducéens, pour les conduire à faire peu de cas de certaines croyances authentiquement anciennes ? Les deux motifs se combinaient sans doute dans leur esprit.
Les Sadducéens étaient donc les conservateurs et les Pharisiens les novateurs, en matière de doctrine. Mais, dans un autre ordre d'idées, leurs rôles étaient renversés. Depuis le temps de la conquête de la Palestine par Alexandre le Grand, il existait parmi les Juifs deux tendances politiques : les uns apprirent à connaître la civilisation grecque et à l'apprécier, les autres, plus que jamais, considéraient toute relation avec l'étranger comme la pire des infidélités à la Loi. Lors de l'insurrection des Macchabées, le peuple, presque tout entier, combattit pour l'indépendance de la patrie ; mais un petit nombre de Juifs désapprouvaient ce fanatisme ; ils ne trouvaient pas les étrangers si détestables ; ils aimaient à parler leur langue, à se pénétrer de leurs idées et de leurs moeurs ; peut-être par indifférence, peut-être par tournure d'esprit matérialiste et utilitaire, ils étaient tolérants et larges: c'étaient les philhellènes, qu'on appellera, à l'époque de la domination romaine (depuis 63 avant J-C.), les Sadducéens. Ici, par opposition au conservatisme intransigeant et farouche des Pharisiens, ils représenteront le parti des idées nouvelles, de la modération, du sang-froid et de l'équité ; mais aussi donneront-ils parfois le spectacle moins édifiant de leur complaisance pour des moeurs singulièrement corrompues.
On comprend que Jésus n'ait trouvé, chez les Sadducéens, que des adversaires.
L'origine du nom donné à ce parti est obscure. Selon les uns, il leur serait venu d'un certain Sadoq, du reste inconnu, qui aurait été leur premier docteur. Selon d'autres, il signifierait partisan des prêtres, « cléricaux », et ferait allusion â Sadoq, le prêtre contemporain de David et de Salomon, fondateur de la dynastie sacerdotale du Temple de Jérusalem.
SAINTETE
Aucun terme du langage de la Bible ne nous offre un exemple plus frappant que celui de sainteté de l'évolution des idées religieuses d'Israël vers une plus haute spiritualité. -- On sait ce que ce mot signifie dans l'Evangile, et c'est pourquoi il est si difficile au lecteur non averti de comprendre qu'il désignait tout autre chose pour l'Hébreu primitif. -- Non seulement ce terme n'était nullement synonyme de perfection absolue, mais il n'exprimait même pas, à l'origine, une idée morale quelconque. Rien ne le montre mieux que ce fait extraordinaire pour nous c'est que sainteté et impureté fussent deux façons d'exprimer une même notion, celle d'un être ou d'une chose intangible et redoutable, en un mot, la notion de « tabou ». Il était interdit, par exemple, de manger de la chair de certains animaux que l'on appelait sacrés quand on voulait dire qu'il se trouvait en eux quelque sorte de puissance divine, mais que l'on appelait impurs quand on voulait indiquer qu'on ne pouvait les offrir en sacrifice à d'autres êtres divins. Ni l'un ni l'autre de ces termes, que l'on distinguait mal, n'impliquait le moindre jugement d'ordre moral, et c'est pourquoi ils pouvaient être à peu près synonymes, alors qu'ils sont, pour nous, contradictoires. -- Est saint, en somme, pour l'Israélite, tout ce qui est divin et tout ce qui, comme tel, frappe l'être humain de cette sorte d'horreur religieuse que connaissaient bien les primitifs. Saint et divin sont donc des termes équivalents et expriment l'idée d'un être ou d'une chose dépassant la nature humaine et, par là, redoutable, inviolable ou même mortelle pour l'homme qui s'en approche. -- Soixante-dix habitants de Bét-chèmèch périssent pour avoir regardé l'arche (voyez ce mot) et les gens de l'endroit s'écrient : « Qui peut subsister en présence de Yahvé, ce Dieu saint » (1Sa 19: 21). Cette « sainteté » peut passer d'un objet ou d'un être à un autre, on pourrait presque dire qu'elle était considérée comme contagieuse : au temps d'Ezéchiel encore (Eze 44:19), il était prévu qu'à la reprise des cérémonies religieuses du Temple à Jérusalem, les prêtres, au sortir du parvis intérieur, où ils seront en contact avec les objets saints du culte ou avec la divinité elle-même, devront ôter les vêtements avec lesquels ils auront officié et en mettre d'autres « afin de ne pas sanctifier le peuple par leurs vêtements ». Quelque chose comme un fluide sacré et redoutable pouvait, pensait-on, s'attacher aux vêtements de ceux qui pénétraient dans le sanctuaire et, par eux, se communiquer dangereusement au dehors. Pourtant, il est désirable que l'adorateur puisse s'approcher de son Dieu, et il le fera, et pénétrera dans le sanctuaire, mais après avoir pris toutes les précautions indispensables à la fois pour que le sanctuaire ne soit pas souillé par des contacts avec le profane et pour que l'adorateur n'emporte avec lui rien du fluide divin. On dira alors qu'il s'est sanctifié, parce qu'il se sera lavé (voir ablutions) ou se sera habillé de vêtements sacrés pour le temps de son séjour dans le lieu saint. L'acte de quitter ses sandales avant d'y pénétrer avait la même signification (Ex 3 : 5 ; Josué 5 : 15). - En résumé, le concept de sainteté exprime la distance infinie que l'Israélite croit sentir entre l'humain et le divin, mais cette distance n'est pas conçue dès l'abord sous son aspect moral. Dire que Dieu est saint ne sera pas autre chose, pendant longtemps, qu'affirmer sa divinité glorieuse et redoutable (Esa 8 : 13 ; Ex 15 : 13-14 ; Esa 6: 3). -- Quand Esaïe insiste, comme aucun autre prophète ne le fit, ni avant ni après lui, sur la sainteté de Yahvé, le sentiment si puissant qui remplit son coeur est celui de l'abîme qui sépare, l'homme «de Dieu. Mais avec Esaïe, cette distance commence à se mesurer autrement que par le passé. Ce n'est plus par sa puissance seule ou par sa gloire seule que Dieu est infiniment élevé au-dessus; de l'homme, c'est aussi par sa perfection morale : une nouvelle antithèse apparaît entre l'humain et le divin : celle du péché et de la justice. Du coup, le mot même de sainteté, sans perdre de longtemps encore la faculté d'exprimer les; vieilles conceptions païennes, prend une nouvelle signification. Les deux notions de sainteté et de divinité étant, d'ailleurs, comme nous l'avons indiqué, à peu près interchangeables, tout progrès dans la façon de concevoir Dieu entraînait un progrès correspondant de l'idée de sainteté. Dieu étant avant tout juste, sa sainteté devient, par là même, un attribut moral. Tout au plus doit-on dire, pour ne pas prêter à Esaïe ce qui n'appartient qu'à Jésus, que la notion de sainteté divine demeure encore, pour le prophète, assez étroitement liée à la notion, esthétique autant que morale, de majesté divine. - Avec Jésus, enfin, nous aboutissons au terme de cette évolution du concept de sainteté. L'Evangile abolit définitivement, pour ceux qui le reçoivent dans sa pureté originelle, toute trace de la vieille notion païenne d'un contraste, entre le profane et le sacré, et le remplace par le contraste entre le mal et le bien. La sainteté est désormais purement morale et spirituelle. Et la marque spéciale que l'Evangile imprime à cette idée, c'est que l'amour s'y joint à la justice et s'y confond avec elle.
SANCTUAIRES, HAUTS-LIEUX, TEMPLES
Depuis l'époque de leur -établissement dans le pays de Canaan et jusqu'à la réforme de Josias, en 622, les Israélites, adoptant les coutumes du pays conquis, eurent des sanctuaires nombreux. Ces lieux de culte coïncidaient le plus souvent avec l'emplacement d'un objet sacré, tantôt, une pierre (à Béthel: Ge 28 ; à Ophra : Juges 6 ; à BethSchémesch : 1Sa 5 : 14 ; à Sichem Josué 24 : 26), tantôt un arbre (chêne Ge 13 : 6 ; térébinthe : Ge 35 4 ; Josué 24 : 26 ; tamarisc : Ge 21 : 33 ; etc.), tantôt une colline (Carmel, Thabor, Ebal, Garizim, Morija, Sion, etc.). Les sanctuaires établis sur des hauteurs étaient si nombreux que le nom de haut-lieu, qui les désigne, devint synonyme de lieu-saint.
L'objet sacré fut quelquefois, par la suite, plus ou moins façonné ou entièrement fabriqué (pierre, bois ou métal fondu). Nos versions françaises de la Bible rendent les noms hébreux qui désignent certains de ces objets manufacturés par ceux de monument (Esa 19 : 19), d'idole (Juges 6: 25), de statue (Os 10 : 1), ou transcrivent le terme hébreu lui-même . éphod, teraphim (Os 3 : 4 ; voyez ces mots). L'objet sacré n'était pas considéré comme la divinité même, mais comme l'indice palpable de sa présence, comme son habitation ; ainsi, Béthel signifie maison de dieu, et le nom s'appliqua d'abord à la pierre même dressée par Jacob (Ge 28), avant de désigner le sanctuaire. Cet exemple de Béthel, auquel plusieurs autres pourraient être ajoutés, nous montre que les sanctuaires étaient établis sur les emplacements où Yahvé, d'après la tradition, s'était manifesté par une apparition, par un songe, par une victoire.
Le culte pratiqué dans ce sanctuaire primitif est très simple. L'objet sacré reçoit directement le sacrifice (voir ce mot), comme nous 'le remarquons, par exemple, dans le récit du songe de Jacob. Plus tard, quand, aux simples offrandes d'huile ou de sang, dont il suffisait d'oindre l'arbre ou la pierre, on ajouta des sacrifices où la chair de la victime devait être brûlée, il fallut établir, dans les sanctuaires, des autels proprement dits, de dimensions et de forme convenables.
Avant de se présenter au sanctuaire, c'est-à-dire devant son Dieu, l'Israélite devait prendre certaines précautions pour que le voisinage de la divinité ne lui fût pas funeste (Ex 19 : 21-22) il devait pratiquer certaines ablutions (voyez ce mot), laver ses vêtements ou les changer. C'est ce qu'on appelait se purifier ou se sanctifier (voyez : sainteté). L'adorateur ne pénétrait pas dans le lieu saint sans s'être déchaussé (Ex 3 : 5 ; Josué 5 : 15). La plupart de ces coutumes religieuses étaient trop profondément enracinées dans une immémoriale tradition pour que la réforme du culte pût les abolir (Eze 44 : 19). Plusieurs d'entre elles durèrent aussi longtemps que la nation elle-même.
Le sanctuaire primitif ne comportait pas d'édifice sacré, car les objets du culte n'avaient pas besoin d'être protégés contre les intempéries. L'apparition des temples coïncida, sans doute, avec celle d'objets plus fragiles ou plus précieux qu'il fallut abriter et surveiller. L'Ephraïmite, Mica, « avait une maison de Dieu » pour ses images saintes (Juges 17 : 1-5). La ville de Silo était célèbre, au temps des Juges par sa « maison de Yahvé » (1Sa 1), qui était la demeure de l'arche (1Sa 3 : 3 ; voyez ce mot). Par analogie avec les sanctuaires cananéens de ce genre que les fouilles opérées en Palestine ont mis au jour, on peut supposer que ces édifices étaient très simples et fort exigus.
Salomon ne fit donc rien d'absolument nouveau en construisant un temple à Jérusalem (au X° siècle avant Jésus-Christ). La célébrité unique de cet édifice s'explique par les deux faits suivants : c'est qu'il dépassait en splendeur tous les temples anciens et qu'il était le sanctuaire destiné, dans l'avenir, à supplanter tous les autres. Mais il est absolument certain qu'en le faisant construire Salomon ne songea pas un instant à le substituer aux sanctuaires anciens (Béthel, Sichem, Dan, Gabaon, etc.), qui subsistèrent pendant des siècles. On trouve la description du temple de Salomon au 1° livre des Rois, ch. 6. (1Ro 6) Le plan général de l'édifice comprenait, semble-t-il: l' une pièce relativement exiguë, de forme cubique, appelée plus tard « le lieu Très Saint » et qui était considérée comme la demeure de Yahvé ; 2° une pièce plus grande, contiguë à la première : c'était le « lieu saint », où se trouvaient divers objets sacrés. Les laïcs, à tout le moins le roi, étaient anciennement autorisés à y pénétrer ; enfin 3°, devant l'édifice, l'autel, dans la cour où le peuple assistait aux sacrifices.
Ce temple de Jérusalem, d'abord simple « chapelle royale », plus luxueux, mais moins populaire que d'autres, devait cependant avoir, après environ trois siècles et demi, une destinée unique. La prédication des prophètes amena le jeune roi Josias, en 622, à entreprendre la réforme du culte. Les plu hardis parmi les prophètes, Amos (Am 5 : 21-27), Osée (Os 6 : 6 ; 8 : 11), n'auraient pas reculé devant l'abolition du culte sacrificiel entier, qu'ils jugeaient idolâtre ; mais ni la royauté, ni le clergé, ni le peuple n'étaient mûrs pour « le culte en esprit et en vérité », et la réforme ne fut qu'un compromis entre la prédication prophétique et la tradition religieuse.
Le résultat essentiel que l'on obtint fut la suppression de tous les temples et de tous les hauts-lieux du territoire, à l'exception du seul sanctuaire royal, et, par suite, la centralisation du culte à Jérusalem. C'était déjà là un dangereux bouleversement de la religion des ancêtres qui, malgré son paganisme incontestable, avait du moins l'avantage immense d'être étroitement unie à la vie quotidienne et qui, sous la forme nouvelle qu'on lui imposa, s'éloigna de l'individu et se figea dans une forme de plus en plus nationale et cléricale. En outre, un culte national concentré tout entier en un même lieu devenait singulièrement vulnérable. Porter un coup à Jérusalem, c'était, désormais, menacer la religion elle-même. Quatre fois, à notre connaissance, cette menace fut suspendue sur le peuple ,d'Israël : quatre fois le temple fut mis au pillage par divers ennemis, avant d'être détruit de fond en comble par les Babyloniens, en 586 (1Ro 4 : 26 ; 2Ch 21 : 16 ; 2Ro 14 : 14 ; 24 : 13 ; 25 : 8-10 ; Jer 52 : 12-14). Une fois le temple rasé et le peuple privé de culte, la religion même d'Israël aurait disparu dans la tourmente de la déportation si les prophètes n'avaient été là pour continuer leur oeuvre dans l'exil.
L'exil fut relativement court: en 538, Cyrus détruisit l'empire babylonien et autorisa les Juifs à retourner dans leur patrie. Ils ne tardèrent pas, au milieu de mille difficultés, à entreprendre la reconstruction du temple. Le souvenir de l'ancien sanctuaire les avait poursuivis dans l'exil (Lam 2 : 6-7 ; 4 : 1 ; Eze 24 : 21 ; Esa 44 : 28 ; 64 10) ; la vision d'un temple nouveau les avait réconfortés (Eze 40-43). Leur premier effort de restauration devait être le rétablissement du culte. Cette grande entreprise ne fût menée à bonne fin que vers l'an 515. Au cours des siècles qui suivirent, le temple fut sans doute remanié ou agrandi à plusieurs reprises, mais aucune de ces transformations n'égala en importance celle qui fut inaugurée par Hérode le Grand, en l'an 19 avant J.-C., et achevée par Agrippa II en l'an 64 après J. C. Les travaux n'étaient donc pas entièrement terminés du temps de Jésus, et six ans après qu'on y eut mis la dernière main, le temple fut détruit de nouveau, entièrement et pour toujours, par les Romains (an 70).
C'est ce temple d'Hérode que Jésus et ses disciples apercevaient, dominant la ville comme une forteresse, quand ils arrivaient à Jérusalem par le chemin du Mont des Oliviers. Le meilleur emplacement pour l'apercevoir dans son ensemble était celui-là : on voyait l'énorme mur de défense qui l'entourait entièrement et l'on pouvait distinguer, à l'intérieur, une suite d'enceintes successives séparant entre elles des cours en terrasses de plus en plus élevées, communiquant par des escaliers : c'étaient les parvis, parvis des païens, parvis des femmes, parvis des Israélites, parvis des prêtres ; il fallait les traverser les uns après les autres, en s'élevant chaque fois plus haut, pour arriver enfin au sanctuaire même, qui comprenait un vestibule monumental, le a lieu saint » et le « lieu très saint », et qui se distinguait de fort loin par les dorures dont il était couvert.
La première enceinte subsiste encore en partie ; on y voit ces pierres énormes qui excitaient l'admiration des disciples de Jésus (Marc 13 : 1) ; quelques-unes ont plus de six à sept mètres de longueur. Le premier parvis, appelé parvis des païens parce que l'entrée en était entièrement libre pour tous, y compris les étrangers, était une place publique, un champ de foire, un bazar, où s'installaient ces marchands de bétail pour sacrifices et ces changeurs que Jésus chassa (Marc 11 : 15-18, et parallèles). Le second parvis, celui des femmes, était ainsi appelé parce que les femmes ne pouvaient le dépasser, mais il était ouvert à tout Israélite. C'est dans cette cour-là que Paul fut accusé d'avoir laissé pénétrer avec lui ses compagnons grecs (Actes 21 : 28). C'est probablement là encore, près des portes d'entrée, qu'étaient placés les troncs qui recevaient les offrandes des fidèles et où Jésus vit une pauvre femme mettre sa « pite » (Marc 12: 41). Le troisième parvis, celui des Israélites, était réservé aux hommes, le quatrième, aux prêtres c'est au centre de ce dernier, très vaste, que se dressait le temple proprement dit, devant la porte duquel, en plein air, se trouvait le grand autel des holocaustes.
Diverses salles couvertes étaient disposées autour du parvis des prêtres, l'une où on lavait les entrailles des victimes, l'antre où l'on salait les peaux, une troisième où étaient parqués les agneaux pour le sacrifice. Plus loin les anneaux où l'on attachait les bêtes pour les égorger, les tables de marbre où l'on déposait la chair, les colonnes où les quartiers de viande étaient suspendus pour être écorchés. Le Lieu Saint, comme on le voit, était entouré, au premier plan, par un véritable abattoir, au dernier plan par un véritable marché aux bestiaux.
Quand on compare l'Evangile à cette religion barbare et sanglante, on comprend la solennité prophétique et la divine allégresse de cette parole de Jésus « Il n'en restera pas pierre sur pierre ; tout sera renversé » (Marc, 13 : 2).
Il faut ajouter qu'au temps de Jésus le Temple n'a plus guère de prestige que pour le Juif arrivant à Jérusalem de loin. Depuis longtemps les Pharisiens (voyez ce mot) ont donné au peuple une autre religion, celle de la Loi, et d'autres lieux de culte, les Synagogues (voyez ce mot). Seul le Sadducéen (voir ce mot) se sent chez lui dans le Sanctuaire. Quand le Temple et les prêtres disparaîtront, le Judaïsme restera vivant parce qu'il vit déjà hors du Temple et loin du prêtre.
SANHEDRIN
Ce nom, dérivé du grec sunedrion (lieu où l'on siège ensemble), n'apparaît pas dans l'Ancien Testament et il n'est pas prouvé que dans le Nouveau il désigne, comme quelques-uns le croient, la même cour de justice dont l'établissement, par Josaphat, est raconté dans 2Ch 19. Il y a trop de lacunes dans l'histoire du Judaïsme pour que cette identification soit certaine. Il importe assez peu, d'ailleurs, d'établir ce point, - l'existence et la juridiction de cette assemblée n'ayant d'autre intérêt, aujourd'hui, que celui qu'il tient de l'histoire de Jésus et des apôtres.
Le nom de Sanhédrin apparaît d'abord dans le texte Matthieu 5 : 22 : « Celui qui dira â son frère : Raca ! sera passible de la justice du Sanhédrin. » Ces mots n'ayant pas été prononcés dans la langue grecque, qui nous les a transmis, nous ne savons pas par quel terme Jésus désignait le tribunal auquel il fait allusion, mais comme il parlait à des Galiléens, il y a tout lieu de croire qu'il désignait non le Sanhédrin de Jérusalem, mais la petite assemblée qui administrait la justice dans chaque village et qui était composée des chefs de la synagogue.
Dans les trois autres textes où nous trouvons le nom de Sanhédrin, il s'agit du tribunal de Jérusalem, devant lequel .comparaissent Jésus (Luc 22 : 66), Pierre et les autres apôtres (Ac 5: 27), Etienne (Ac 6 : 12), et enfin Paul (Ac 23). Il est très difficile de préciser quelles étaient, au temps de Jésus, les attributions du Sanhédrin. Sous la domination romaine, il semble bien que l'administration des affaires publiques était partagée, d'une certaine façon, entre le Procurateur (voyez ce mot), représentant l'empire, les Tétrarques (voyez ce mot), représentant l'ancienne royauté, et enfin le Sanhédrin. On ne sait même pas si cette distribution du pouvoir «donnait à chacun de ces éléments une fonction déterminée. La politique constante des Romains était de laisser, autant que possible, aux peuples conquis, leur indépendance religieuse et, par suite (les lois anciennes étant toujours des lois religieuses), l'administration de la justice traditionnelle. On ne peut donc douter que les attributions du Sanhédrin fussent très étendues et nombreuses. On pense assez généralement que les Romains avaient cependant enlevé au Sanhédrin le droit de mettre à mort, se réservant la ratification et l'exécution de toute condamnation à la peine capitale. C'est du moins ce qui semble impliqué par le récit de la condamnation de Jésus et particulièrement par la parole des Juifs à Pilate : « Il ne nous est pas permis de mettre à mort » (Jean 23 : 31). Il est vrai qu'Etienne, ayant comparu, lui aussi, devant le Sanhédrin, fut exécuté séance tenante, sans aucun appel au pouvoir exécutif du Procurateur. Etait-ce là une procédure admise par Rome, ou était-ce une irrégularité ? - Certains historiens croient que les Romains faisaient, à cet égard, une entière liberté aux Juifs, mais que, dans beaucoup de cas, les Juifs, eux-mêmes, préféraient abandonner leur droit à décréter la peine capitale. En effet, l'es crimes qu'avait à juger le Sanhédrin avaient souvent un caractère politique : il s'agissait de punir des fanatiques, des zélotes (voyez ce mot), des meurtriers que la passion patriotique et religieuse avait affolés. Le peuple, qui se sentait opprimé par Rome et n'avait qu'une demi-confiance dans les grands personnages du Sanhédrin, manifestait ouvertement son indulgence ou même sa sympathie à ces exaspérés du nationalisme juif. Les juges naturels de ces meurtriers pouvaient craindre d'être accusés d'antipatriotisme s'ils frappaient ceux dont le seul crime, pensait-on, était de travailler à la délivrance du peuple élu. Ainsi, dans nombre de procès, le Sanhédrin, par crainte des exaltés, si nombreux, et des Pharisiens, presque tous ardents nationalistes, aurait pris l'habitude d'obtenir de l'autorité romaine la condamnation, en tout. cas l'exécution, et telle aurait été son attitude dans le procès de Jésus, dont la popularité lui était connue.
Quelle était la composition du Sanhédrin ? Il était, paraît-il, composé de 71 membres. Le Nouveau Testament les répartit en trois classes : les Grands-Prêtres (c'est-à-dire le Grand-Prêtre en fonction, les anciens Grands-Prêtres et les membres de leurs familles), les Anciens (chef des grandes familles (.sacerdotales et laïques) et les Scribes (voyez ce mot). La tradition juive veut que la présidence du Sanhédrin ait toujours appartenu aux Scribes. Il en fut ainsi après la ruine du Temple, en 70. Mais au temps de Jésus et des apôtres, le président du Sanhédrin était certainement le Grand-Prêtre.
Lorsque Jésus fut condamné, Caïphe présidait le tribunal. - Au point de vue des opinions, il est certain que l'assemblée était partagée, sans que nous puissions dire dans quelles proportions, entre les Sadducéens (voyez ce mot), qui se recrutaient dans la caste sacerdotale, et les Pharisiens (voyez ce mot), très nombreux parmi les Scribes (Ac 23 : 6).
SATAN, DIABLE
Dans l'Ancien Testament, le personnage appelé ha-satan ou Satan (terme que les traducteurs grecs ont rendu par ho-diabolos, « le calomniateur », d'où le français diable) n'apparaît que dans trois passages de la littérature postérieure à l'exil, et l'on peut tirer de ce fait la conclusion que la représentation exprimée par ces mots était inconnue des anciens Israélites et qu'elle a été suggérée à leurs descendants, pendant l'exil, par des croyances étrangères. - Un exemple frappant nous montre, d'ailleurs, que l'idée d'une puissance distincte de Yahvé ne s'imposait nullement à l'esprit des plus anciens écrivains bibliques lorsqu'ils voulaient expliquer l'erreur ou la faute d'un homme par une influence de l'au-delà. Cet exemple se trouve dans l'histoire de David, qui est racontée deux fois dans la Bible : dans 2 Samuel et dans 1 Chroniques. La comparaison des deux récits, à l'épisode du dénombrement et de la peste (2Sa 24 et 1Ch 21), fait ressortir bien clairement l'évolution qui s'est produite dans les idées religieuses entre les deux époques qui ont donné naissance à ces écrits. Dans le premier passage, nous lisons ceci : « La colère de Yahvé s'enflamma de nouveau contre Israël, et il excita David contre le peuple en disant : va, fais le dénombrement d'Israël et de Juda. » David obéit à Yahvé (2Sa 24: 2), comprend qu'il a cependant commis un grand péché en faisant ce dénombrement (2Sa 24:10), et Yahvé punit le peuple (2Sa 24:15). On voit que, dans la pensée de ce premier narrateur, l'impulsion à l'action coupable est venue de Yahvé lui-même. Quand le Chroniqueur, longtemps après, raconte la même histoire, les idées ont changé : on ne peut plus attribuer à Dieu une influence mauvaise ; et le récit prend la forme suivante : « Satan se leva contre Israël et excita David à faire le dénombrement d'Israël. » Le roi se laisse induire en tentation et cela « déplut à Yahvé qui frappa Israël. » Ici, deux volontés distinctes s'opposent l'une à (autre. Entre le premier récit et le second, une conception nouvelle, celle de Satan, a pris sa place dans les idées religieuses d'Israël.
Le mot « satan » est un nom commun de la langue hébraïque, signifiant « celui qui s'oppose; celui qui fait obstacle », et, par suite, « l'adversaire » ou « D'accusateur ». Dans l'histoire de Balaam, nous lisons qu'un ange de Yahvé se place sur le chemin du prophète « pour lui être un obstacle. » (en hébreu : pour lui être un « satan »). Mais le mot, ici, n'indique qu'une mission temporaire confiée au messager de Yahvé. Cet ange n'est pas Satan. Mais il faut remarquer que, quand Satan apparaît comme une personnalité bien définie, son nom reste d'abord un « nom commun », l'accusateur : « Le salait se tenait à sa droite pour l'accuser. » (Zac 3 : 1), « les fils de Dieu vinrent se présenter devant Yahvé et le satan vint aussi au milieu d'eux » (Job 1 : 6): Dans le troisième et dernier passage, le nom commun est devenu un nom propre : « Satan se leva contre Israël » (1Ch 21 : 1).
Tels sont les trois seuls passages où Satan soit mentionné dans l'Ancien Testament. Malgré leur petit nombre, ces passages nous permettent de constater que la conception du rôle de Satan n'a pas toujours été la même en Israël. La doctrine a évolué : En premier lieu, on a commencé par présenter Satan comme entièrement subordonné à Yahvé pour arriver graduellement à le considérer comme indépendant de la divinité ; en second lieu, on a commencé à lui prêter uniquement le rôle d'accusateur (pas nécessairement de calomniateur) pour arriver de plus en plus à voir en lui le tentateur et l'ennemi des hommes. Cette évolution de L'idée de Satan est définitivement acquise dans le Nouveau Testament.
1. Le premier texte, Zacharie (Zac 3), décrit la vision d'une scène de jugement : le grand-prêtre Josué revêtu de vêtements souillés, est en butte aux accusations du satan devant le tribunal de Yahvé. Celui-ci fait taire l'accusateur et donne l'ordre que Josué soit revêtu d'habits de fête. On reconnaît ici la subordination du satan à la réprimande que lui adresse Yahvé et au rejet de son accusation. Tout semblé indiquer que le satan est un des anges de Yahvé plus spécialement chargé d'accuser les coupables devant son Dieu. Josué l'accusé, n'est pas, en effet, présenté par le récit comme un innocent calomnié ; Yahvé lui dit : « Voici, j'enlève ton iniquité. »
-- Le second texte, Job 1 et 2, nous raconte, à deux reprises, comment le satan intervient auprès de Yahvé, dans l'assemblée des « fils de Dieu » (les anges), pour mettre en question l'intégrité et la piété de Job. La subordination du satan est encore ici bien visible : il n'est pas douteux qu'il soit considéré comme appartenant au cercle des « fils de Dieu ». Il suggère l'idée que Job soit mis à l'épreuve ; mais il n'a aucun pouvoir que celui que Yahvé lui confère et il n'agit qu'avec la permission de son Dieu. Déjà, cependant; un commencement d'indépendance se fait sentir dans la manière dont il est présenté et dans sa façon d'agir. On se rend compte que, quoique assimilé aux autres anges, il est distinct d'eux, et cette distinction apparaît dans l'introduction des personnages : « Les fils de Dieu vinrent un jour se présenter devant Yahvé, et le satan vint aussi au milieu d'eux. » On peut remarquer aussi que le satan ne paraît pas être purement et simplement le messager que Dieu envoie accomplir ses missions sur la terre (comme les anges de Zac 1 : 10). Dieu l'interroge sur le lieu d'où il vient, et il répond comme quelqu'un dont les actes sont relativement libres : « Je viens de parcourir la terre et de m'y promener. » Enfin, il faut noter que le satan « excite » Yahvé « à perdre » Job (Job 2 : 3) : son désir s'oppose au désir de son Maître.
-- Le troisième texte, 1Chroniques, raconte comment Satan inspire à David un acte tenu pour impie : le dénombrement du peuple. Ici, l'indépendance de Satan est considérée comme entière : il n'a plus d'autorisation à recevoir de Dieu, il agit de lui-même, contre les hommes et, semble-t-il, contre Dieu.
2. C'est, de même, par une transformation progressive que Satan passe du rôle d'accusateur au rôle de tentateur. Dans l'ancienne conception israélite, nous l'avons dit, il paraissait naturel d'attribuer la tentation à Dieu lui-même (2Sa 24 : 1). Dans le texte de Job c'est bien encore Yahvé qui est le tentateur, mais par l'entremise du satan. Dans le texte des Chroniques; la tentation est attribuée à Satan seul, qui n'a plus à accuser les hommes devant Dieu pour obtenir l'autorisation de les éprouver, mais qui les incite directement au mal. Il est devenu l'Adversaire, l'Ennemi qui combat la volonté de Dieu et cherche à perdre les hommes.
Tel est le rôle partout assigné à Satan, clans le Nouveau Testament. Il est 1e premier instigateur du mal, l'auteur de la Chute (2Co 11: 3 ; Jean, 8:44; 1Jn 3 : 8,12) ; il est, encore aujourd'hui, celui qui nous induit au mal (1Th 3 : 5 ; Mt 4 : 1). Il est cause du mal physique (Mt 12 : 24 ; Luc 13 : 16) et du mal spirituel (Eph 2 : 2 ; etc.). Il n'est cependant jamais assimilé à un Dieu du mal. Il est assurément surhumain, mais il n'est pas le plus fort. Jésus a plus de puissance que lui (Mt 12: 29; Marc 3 : 27; 1Jn 3 : 8) et finira par le vaincre (Heb 2: 14 Mt 25 : 41 ; Apo 20 : 10). Le règne de Satan est déjà sur son déclin (Luc 10 : 18 ; Col 1 : 23 ; 1Jn 4 : 4 ; Jean 12: 31; 16 : 11) et sa ruine sera complète lors du retour du Seigneur (Ro 16 : 20 ; 1Co 15 : 26 ; 2Th 2 ; Apo 20.)
Dans le Nouveau Testament, Satan porte aussi les noms de Diable, Tentateur, Béelzébul, Bélial, le Malin; l'Ennemi, le Serpent, le Prince des Démons, le Prince de ce Monde, etc.
SCRIBES (ou Docteurs de la Loi)
Ces termes rie s'appliquent pas, comme ceux de Pharisiens ou de Sadducéens, a un parti ou à une opinion religieuse, mais désignent une profession, une fonction. Cette fonction paraît avoir existé de très bonne heure. Certains fonctionnaires, dès le temps de David, portent le titre de sôphér, « scribe » (traduit par le mot secrétaire dans la version Segond) : 2Sa 8 : 17 ; 20 : 25 ; 2Ro 12 : 10 ; 19 : 2 ; 22 : 3. Leur rôle, à cette époque, n'était pas limité au domaine des choses religieuses. Leurs attributions semblent les ranger parmi les ministres des rois. - Après l'exil, le même titre appartient à des hommes « versés dans la Loi de Moïse », comme Esdras (Esd 7 : 6), qui, en outre, était prêtre (Esd 7 : 11). Mais tous les prêtres ne sont pas scribes et tous les scribes ne sont pas prêtres. Il y avait des familles de scribes (2Ch 2 : 55) et des familles de prêtres (1Ch 24 : 1 à 19). Il est fort possible que ces scribes aient été d'abord surtout des écrivains publics comme on en trouve dans beaucoup de pays orientaux, venant en aide aux illettrés pour leurs transactions commerciales ou leurs contrats. Mais, peu à peu, le titre s'applique plus spécialement aux écrivains qui transcrivent sur les rouleaux sacrés le texte de la Loi mosaïque, qui étudient ce texte et qui le commentent. Ils deviennent ainsi, progressivement, les théologiens du judaïsme, les docteurs de la sainte Ecriture. On les consultait, comme experts, au Sanhédrin (voyez ce mot) ou dans les tribunaux de province. A la Synagogue (voyez ce mot), c'étaient d'ordinaire eux qui lisaient la Loi, la traduisaient en langue vulgaire et la commentaient. A la maison d'école, ils l'enseignaient aux enfants et aux jeunes gens. Leur autorité était très grande. On les appelait : Rabbi, c'est-à-dire : mon Maître (Mt 23 : 7). Ils tenaient à ce titre, comme ils tenaient à occuper partout le premier rang (Mat 23 : 6-7 ; Marc 12 : 38-39 ; Luc 11 : 43 ; 20 : 46).
Ils avaient hérité du prestige et de l'influence autrefois partagés entre le prêtre et le prophète. Leurs décisions avaient fini par devenir plus contraignantes que les textes mêmes de la Loi : et c'est contre cette tradition divinisée que s'est élevé Jésus (Mt 15 : 3); ; voyez les mots Pharisiens et Sabbat. - Aux environs de l'ère chrétienne, le Scribe avait généralement un métier qui lui permettait de vivre (Paul, rabbin avant d'être apôtre, continua à se conformer à cette règle), car la fonction de docteur de la Loi était gratuite. Son désintéressement aurait donc pu être entier ; mais il ne paraît pas que ce fût toujours le cas (Marc 12 : 40 ; Luc 16 : 14 ; 20 : 47). Son orgueil, son formalisme, son mépris inspiraient plus de crainte que d'amour. L'autorité qui vient de l'action profonde de l'âme sur l'âme n'était pas son fait (Mt 7 : 29 ; Marc 1 : 22).
Les Evangiles citent souvent ensemble « Scribes et Pharisiens ». - Les Scribes et les Pharisiens ne doivent donc pas être confondus, puisqu'on tient à les nommer les uns à côté des autres ; mais certains rapports entre eux sont sous-entendus par ce rapprochement constant. Beaucoup de Pharisiens exerçaient certainement la fonction de scribes et la plupart des scribes étaient rattachés à la tendance pharisienne. Mais il se peut fort bien qu'il y ait eu des scribes sadducéens ou des scribes n'appartenant ni à l'un ni à l'autre des deux grands partis juifs ; ainsi s'expliqueraient les expressions suivantes : « les Scribes d'entre les Pharisiens » (Marc 2 : 16 ; Actes 23 : 9), « les Pharisiens et leurs Scribes » (Luc 5 . 30).
SEIN D'ABRAHAM (LE)
Voir Géhenne et Séjour des Morts.
SEJOUR DES MORTS
C'est par ces mots (ou par le mot moins exact de « sépulcre ») que nos versions françaises de l'Ancien Testament traduisent le terme hébreu de « cheôl », qui désignait le séjour souterrain des trépassés.
Les Israélites ont toujours cru à la survie, mais cette croyance, comme beaucoup d'autres, a évolué au cours de l'histoire. Il faut distinguer deux périodes dans cette évolution.
1. -- Jusque vers l'époque de l'exil, les idées des Hébreux relatives à la survivance de la personnalité humaine après la mort se présentent à nous avec tous !les caractères de croyances animistes. D'après celles-ci, tout être vivant possède un « double », qui n'est pas précisément ce que nous appelons une « âme », car le double garde après la mort, sinon un corps, du moins la forme du corps qui a été enseveli, les traits de son visage, l'apparence exacte qu'il avait à l'époque de sa mort. Ce n'est ni un corps ni une âme : c'est une ombre. Quand le roi Saül, effrayé par la puissance de l'ennemi philistin, se décide à consulter « une femme qui évoque les morts » et va trouver celle qui habite En-Don, il lui dit: « Fais-moi monter Samuel », et Samuel apparaît à la femme comme « un vieillard qui monte, enveloppé d'un manteau ». Et Saül, d'après la description qui lui est faite du mort, reconnaît Samuel (1Sa 28: 4-25). C'est avec ses, cheveux blancs, que le vieillard, pense-t-on, descend au séjour des morts (Ge 42 : 38 ; 1Ro 2 : 6 et 9).
Il est difficile de se rendre compte du rapport que cette croyance établissait entre la sépulture proprement dite, où le mort repose dans l'isolement, et la « demeure des morts », où il rejoint l'immense communauté des trépassés. Une relation quelconque entre ces deux notions semble cependant être impliquée par le fait que les anciens Hébreux attachaient une extrême importance à la sépulture elle-même, où il paraît évident que le mort était sensé subsister de quelque façon avec sa personnalité et mener, une sorte de suite à la vie terrestre, car c'était l'usage de déposer dans la tombe tout ce qu'on croyait. nécessaire au défunt, en particulier ses armes (Eze 32 : 27). Peut-être imaginait-on une communication entre le sépulcre et le « cheôl » souterrain. Toujours est-il que le mort n'est pas éloigné du lieu de sa sépulture puisqu'il « veille encore sur sa tombe » (Job 21 : 32) et n'est pas, assez séparé des humains pour se désintéresser de leur sort (Jer 31 : 15).
Etant semblables à des ombres, les morts ne jouissent, au « cheôl », que d'une vie diminuée, mais, à leur manière, ils y vivent cependant : quoique « sans forces », ils se meuvent et parlent (Esa 14 : 9) ; ils y conservent le souvenir de leur vie passée (1Sa 28: 17) et même, en un certain sens, ils y gardent leur caractère social :les rois y sont encore des rois (Esa 14 : 9) ; les héros guerriers y sont toujours des héros (Ezékiel, 32 : 21) et y portent, comme jadis, « leurs armes de guerre » (Eze 32:2) ; Pharaon y demeure Pharaon et ses .»sujets y demeurent ses sujets (Eze 32 : 32).
Mais un caractère essentiel de la vie présente disparaît dans le séjour des morts : les trépassés y sont à toujours séparés de leur Dieu. Cette triste persuasion explique la prière d'Ezéchias malade: que Yahvé prolonge sa vie et se conserve ainsi un fidèle adorateur, car « ce n'est pas le séjour des morts qui te loue, ce n'est pas la mort qui te célèbre ; ceux qui sont descendus dans la fosse n'espèrent plus en ta fidélité. Le vivant ! le vivant ! voilà celui qui te loue, comme je le fais aujourd'hui ! » (Esa 38 : 18,19). Yahvé règne sur Israël, sur la terre des vivants, mais non pas sur la demeure des morts.
Mais comme c'est un fait que la religion ne se limite jamais aux horizons terrestres et se préoccupe toujours, et souvent essentiellement, de la vie d'outre-tombe, on comprend que l'adoration d'un Dieu des seuls vivants n'ait pas suffi aux anciens Hébreux. Ceux-ci, dès qu'ils pensaient à la mort et à leurs morts, oubliaient donc, dans une certaine mesure, ce qu'on pourrait appeler la religion officielle et revenaient tout naturellement à cet antique culte des morts que l'on retrouve à l'origine de toutes les croyances primitives et que leurs ancêtres avaient si longtemps pratiqué avant eux. Ce culte s'est ainsi perpétué à côté du culte de Yahvé. Les morts, dans le « cheôl », sont des êtres divins, en quelque manière. La magicienne d'En-Bot, après avoir évoqué l'ombre de Samuel, dit à Saül : « Je vois un dieu qui monte de la terre » (1Sa 28 : 13). Si l'on évoquait les morts, comme on l'a fait en Israël jusqu'à une époque très tardive (Le 20 : 27), c'est bien qu'on leur attribuait une connaissance surnaturelle. Les coutumes du deuil (voir ce mot) conduisent celui qui les étudie à la même conclusion : la croyance populaire divinisait les trépassés.
Les prophètes luttèrent âprement contre ces conceptions et contre les usages qu'elles perpétuaient : « Si l'on vous dit Consultez ceux qui évoquent les morts et ceux qui prédisent l'avenir, qui poussent des sifflements et des soupirs, répondez Un peuple ne consultera-t-il pas son Dieu ? S'adressera-t-il aux morts en faveur des vivants » (Esa 8 . 19 ; comparez : 2Ro 21 : 6 ; Deutéronome 18 11 ; 2Ro 23: 24 ; Le 19 : 31 ; 20 : 6 et 27) ?
II. - Les résultats de cette lutte des prophètes contre tout ce qui rappelait le culte des morts se firent sentir graduellement et apparaissent aux yeux du lecteur attentif de la Bible quand il passe des écrits qui précèdent l'exil à ceux qui le suivent.
Nous voyons d'abord, particulièrement dans le livre des Psaumes, se perpétuer l'idée que Yahvé n'a rien à faire avec la demeure des morts. Les trépassés ne sont plus ses adorateurs : « Celui qui meurt
n'a plus ton souvenir. Qui te louera dans le séjour des morts (Psaume 6 : 6) ? Ce ne sont pas les morts qui célèbrent Yahvé, ce m'est aucun de ceux qui descendent dans le lieu du silence (Psaume 115 : 17). Parle-t-on de ta bonté dans le sépulcre et de ta fidélité dans l'abîme » (Psaume 88 : 11-12) ? Et la réciproque est vraie. Dieu ne s'occupe pas plus des morts que les morts de lui : les trépassés sont « ceux dont tu n'as plus le souvenir et qui sont séparés de ta main (Psaume 88 : 6) ; est-ce pour eux que tu fais des miracles » (Ps 88: 11)?
Mais, non content de séparer la religion de Yahvé de tout ce qui rappelle le culte des morts, le prophétisme, pour rendre ce culte de plus en plus inconcevable aux esprits qu'il veut convaincre, s'attache à assimiler, autant que possible, au néant, la condition des morts dans le « cheôl ». L'anéantissement à peu près total de la conscience des trépassés nous apparaît ainsi comme une idée indiscutée dans les livres de Job et de l'Ecclésiaste. La mort est un sommeil dont on ne se réveille pas (Job 3 : 11-19 ; 14 7-12). « Un chien vivant vaut mieux qu'un lion mort, car les vivants savent qu'ils mourront, mais les morts ne savent rien et il n'y a plus, pour eux, de salaire..., il n'y a ni oeuvre, ni pensée, ni science, ni sagesse dans le séjour des morts, où tu vas » (Ecc 9 : 4, 5, 11).
C'est tout au plus si nous trouvons ici et là, dans cette période de la pensée religieuse des Israélites, quelques textes isolés où semble poindre une aspiration vers une espérance d'immortalité « Oh ! si tu voulais me cacher dans le séjour des morts, m'y tenir à couvert jusqu'à ce que ta colère fût passée et fixer un terme où tu te souviendrais de moi ! Si l'homme, une fois mort, pouvait revivre, j'aurais de l'espoir tout le temps de mes souffrances, jusqu'à ce que mon état vînt à changer » (Job 14 : 13-14). Plus affirmatif est le chantre du Psaume 73 : « Tu me conduiras par ton conseil, puis tu me recevras dans ta gloire » (Psaume 73: 24). Mais ces intuitions, extraordinairement rares, sont loin de constituer une ferme espérance de la religion prophétique elle-même : elles apparaissent chez quelques individualités seulement comme l'annonce lointaine d'une religion plus consolante.
La religion en vigueur, la religion prophétique qui lutte contre les vieilles superstitions, persiste à combattre l'instinct profond qu'elles expriment et aboutit à ce résultat surprenant d'éliminer, pour autant qu'elle le peut, toute croyance à la survivance réelle des individus. Il est difficile de dire dans quelle mesure elle a réussi à exterminer dans le peuple la vieille croyance à une « demeure des morts ». Et il nous est impossible de spécifier ce qu'il pouvait subsister de cette croyance à l'époque où, lentement, la religion prophétique faisait place au judaïsme ; mais nous constatons qu'il faudra attendre jusqu'aux environs du II° siècle avant Jésus-Christ pour voir une nouvelle conception de la vie future remplacer, en Israël, l'antique notion du « cheôl ». Mais alors, ce sera une espérance toute nouvelle qui illuminera la religion : celle de la résurrection. Certains esprits y demeureront fermés (voir : Sadducéens) ; mais le peuple l'accueillera comme une grande lumière et le christianisme la répandra dans le aronde entier avec l'Evangile.
SEMAINE
SEMAINES (fête des)
Voir Fêtes.
SÉRAPHINS
Etres surnaturels mentionnés une fois seulement dans la Bible, dans le récit bien connu de la vocation d'Esaïe (Esa 6). L'analogie avec les chérubins (voyez ce mot), qui, plus tard, leur seront étroitement associés dans la tradition juive, et le fait que leur nom, seraphim, désignait proprement une sorte de serpent fabuleux (Nombres 21 : 6 ; Deutéronome 8 : 15 ; Esa 14 : 29 ; 3, : 6), donnent à penser qu'on leur attribuait, à l'origine, un aspect moitié humain moitié animal : les êtres que voit Esaïe ont des mains et sont doués de la parole (Esa 6 : 3, 6-7) ; d'autre part, ils ont trois paires d'ailes dont une leur sert à « se couvrir les pieds » (Esa 6:2), ce qui suggère qu'ils sont nus. Chérubins et Séraphins reçurent une place particulièrement importante parmi les êtres célestes lorsque les Juifs développèrent leurs théories sur les anges (voyez ce mot). Quand la théologie chrétienne voulut, à son tour, énumérer les serviteurs célestes de Dieu, elle s'appuya sur tous les textes bibliques relatifs au sujet et n'oublia ni les séraphins, ni les chérubins, mais leur donna, comme à tous, les anges, les formes les plus jeunes, les plus belles, les plus pures et les plus aimables (voir le mot : Anges).
SICAIRES
Ce terme désigne, dans Ac 21: 38, la troupe qu'un Juif d'Egypte avait recrutée et conduite au désert, vraisemblablement en vue d'un complot contre l'autorité romaine. Ce mot grec, traduit diversement dans nos versions françaises (brigands dans celle de Segond), n'avait pas toujours une signification politique, mais il en vint à désigner les plus fanatiques et les moins scrupuleux des zélotes (voir ce mot). Le mot Sicaire est un dérivé de Sica, nom d'un petit sabre recourbé.
SYNAGOGUE
Ce mot, dérivé du terme grec employé dans le Nouveau Testament, traduit exactement le terme araméen dont se servaient les Juifs de Palestine an temps de Jésus, puisqu'il signifie comme lui (et, du reste, comme le mot église), « assemblée » ou « congrégation ».
Comme le mot d'église, encore, celui de Synagogue s'emploie dans un sens large ou dans un sens étroit.
Dans son acception la plus étendue, la Synagogue désigne une collectivité, un groupe social, une communauté civile et religieuse, correspondant, dans un petit village, à la totalité de la population ; dans une ville, aux habitants d'un quartier, d'un groupe de maisons ou même aux membres d'une corporation ; dans une cité étrangère, à l'ensemble ou à une partie de la colonie juive, selon son importance. Dans son acception la plus restreinte, la Synagogue est le lieu de réunion, le bâtiment où s'assemble la communauté. Ces édifices étaient donc plus ou moins nombreux, selon l'importance de la localité.
Il se peut que l'origine de la Synagogue doive être cherchée dans la période de l'exil. Il est difficile, en effet, de ne pas admettre que la ferveur religieuse, qui naquit en ces temps d'épreuve, n'ait pas été allumée et entretenue par des réunions de fidèles - quel que fût le nom qu'on leur donnât. Ainsi s'expliquerait la facilité avec laquelle cette institution s'implanta en Palestine, après le retour des déportés, malgré le rétablissement du culte sacrificiel à Jérusalem. L'absence de ce culte aurait provoqué, en Babylonie, la nécessité de grouper les croyants pour entretenir leur foi et cette coutume nouvelle se serait perpétuée dans la patrie retrouvée, malgré la reconstruction du Temple, à cause des bienfaits spirituels qui y étaient attachés. La tradition juive attribuait à Esdras l'institution de la Synagogue et il est fort possible qu'elle ne se trompât point, même s'il faut chercher dans l'exil l'éveil du besoin que ce réformateur voulait satisfaire. Toutefois, le premier texte qui atteste sûrement l'existence d'une synagogue ne date que de la seconde moitié du III° siècle avant notre ère.
Quand parurent les Pharisiens (voyez ce mot), en qui il faut voir les successeurs d'Esdras ils favorisèrent de toute leur influence, toujours grandissante, l'institution de la Synagogue.
La communauté qui portait ce nom de Synagogue avait des directeurs dont les attributions étaient à la fois religieuses et civiles, du moins dans toutes les bourgades et même dans toutes les villes où l'élément juif était prépondérant, la distinction entre la vie religieuse et la vie civile étant inconnue en Israël. Ailleurs, comme dans les villes de l'Empire, où les Juifs ne formaient que des colonies, la Synagogue n'exerçait évidemment qu'une influence religieuse et patriotique.
Les directeurs de la Synagogue formaient un sanhédrin (voyez ce mot) qui rendait la justice. C'est de ce tribunal local que parle Jésus dans le sermon sur la montagne (Mt 5 : 22) et ailleurs (Mt 10 : 17 ; Marc 13 : 9). Ceux qui le composaient s'appelaient soit les anciens (Luc 7 : 3 ; voir ce mot), soit les chefs (Mt 9 : 18 et 23 ; Luc 8 : 41).
Les châtiments infligés étaient:
1° la flagellation (Mt 10 : 17 ; 23 : 34 ; Marc 13 : 9 ; Ac 22 : 19), qui était administrée dans la Synagogue même. Le nombre des coups de verge était de trente-neuf (2Co 11 : 24) ;
2° l'excommunication (voir : anathème), sentence qui avait pour résultat, comme l'indique le mot, de chasser le condamné de la communauté (Jean 16 : 2). La sentence de condamnation pouvait, paraît-il, être formulée par ces simples mots: « Je ne t'ai jamais connu » (. Mt 7 : 23) ;
3° la peine capitale.
L'édifice appelé Synagogue parait avoir été d'une architecture assez simple. Quelques ruines, découvertes en Galilée, datant vraisemblablement du II° siècle après J.-C., nous apprennent que la forme en était rectangulaire, que le toit était soutenu non seulement par les murs, mais par plusieurs rangées de colonnes, et que les ornementations décelaient l'influence de l'art gréco-romain. Le mobilier se composait d'une armoire ou d'un coffre, destiné à contenir les rouleaux des Ecritures saintes, d'une estrade pour le lecteur et de bancs pour les auditeurs.
La Synagogue était le lieu de réunion de la communauté. Elle devint plus tard, après la destruction du Temple, une véritable « église ». Mais, à l'époque de Jésus, peut-on dire qu'un culte y fût célébré ? Josèphe et Philon appellent la Synagogue une « école », non pas seulement parce que, dans les bourgades, elle servait effectivement d'école aux enfants, qu'on ne pouvait rassembler ailleurs, mais parce que les adultes eux-mêmes y étaient convoqués pour écouter la lecture et l'explication de la Loi. Tous les passages des Evangiles qui nous montrent Jésus à la Synagogue nous disent qu'il y « enseignait » (Mt 4 : 23 ; Marc 1 : 21 ; 6 : 2 ; Luc 4 : 15,31 ; 6:6; 13: 10; Jean 6 : 59; 18: 20).
Néanmoins, le programme des réunions comportait une prière, à laquelle la communauté s'associait par des répons, et la bénédiction sacerdotale prononcée, si possible, par un prêtre. Le nom de proseuché (prière), donné très souvent aux Synagogues, suggère que l'édification tenait dans ces réunions une large place, à côté de l'instruction.
L'enseignement de la Synagogue, comme le montrent l'histoire de Jésus et, plus tard, celle de l'apôtre Paul (Ac. 13 : 5, 14-16, 42, 44 ; 14 : 1 ; 17 : 1-2 ; etc.), n'étant pas réservé à un « maître » officiel : il pouvait être donné par le premier venu, pourvu qu'il en fût capable. La Synagogue avait un « servant » ou « ministre » qui, entre autres fonctions, devait présenter au lecteur les rouleaux de la Loi et les replacer ensuite dans le coffre (Luc 4: 20). Il est probable que l'enseignement de la Synagogue était généralement donné par les scribes (voyez ce mot) partout où il y en avait.
L'importance historique de la Synagogue est très grande à deux points de vue :
1° elle rapprocha du peuple une religion dont le seul organe officiel était le clergé de Jérusalem, elle lui permit de vivre indépendamment du Temple et de ses sacrifices, de se répandre en tous pays et de subsister après la ruine de la nation ;
2° les premières réunions des chrétiens subirent l'influence de la Synagogue en ce sens qu'elles en imitèrent très naturellement la simplicité et, si l'on peut employer ce mot, la « laïcité ».
SYNOPTIQUES
Voir Bible, formation du Nouveau Testament.
TABERNACLE
Tous les textes relatifs au Tabernacle ou le mentionnant appartiennent au plus récent des documents dont est composé le Pentateuque (voir ce mot), le Code sacerdotal, qui date du temps d'Esdras (voir Bible, formation de l'Ancien Testament). Le Tabernacle, selon cet écrit, aurait été comme un prototype, au désert, du futur temple de Jérusalem, un temple démontable et portatif, de fort grandes dimensions cependant, et que Moïse aurait dressé suivant les directions minutieuses reçues de Yahvé au Sinaï (Ex 25: 10; 27: 19). Comme le nom l'indique, on se représentait le Tabernacle comme une vaste tente ; mais la description détaillée qui nous en est donnée, soit dans le passage ci-dessus, soit dans Ex 36 : 8; 38: 31, nous présente l'image d'une construction mi-partie bois, mi-partie toiles ou tapis. Nous ne résumerons pas cette description qui n'aurait d'ailleurs un très réel intérêt que si le Tabernacle avait existé. En fait, cette « Tente d'Assignation », comme l'appelle encore le Code sacerdotal (Exode 27 : 21, etc., etc.), n'a jamais été construite qu'en imagination, du moins sous cette forme et avec ces dimensions. Les plus anciens récits contenus dans le Pentateuque, et qui reproduisent les vieilles traditions populaires d'Israël, ne soupçonnent pas l'existence d'un tel sanctuaire. L'une d'elles (Ex 33 : 7 ss) nous parle bien d'une tente où Yahvé se révèle à Moïse, mais, bien que cette tente ne soit pas décrite, nous la devinons modeste, car, loin. d'être le lieu où officie un nombreux clergé et où sert une armée de lévites (voir Prêtres et Lévites), elle n'a qu'un seul gardien qui est Josué serviteur de Moïse (Ex 33 : 11).
TABERNACLES (fête des).
Voir Fêtes.
TALION
Voir Vengeance.
TEMPLES
Voir Sanctuaires.
TENTATEUR
Voir Satan.
TENTE D'ASSIGNATION
Voir Tabernacle.
TERAPHIM
Ce terme, comme celui d'éphod (voyez ce mot), semble avoir eu plusieurs acceptions.
Dans certains textes, il désigne incontestablement une idole domestique. Dans l'histoire de Jacob, nous voyons Rachel dérober les teraphim de son père. Quand Laban les réclame, Jacob, qui ignore le larcin, s'écrie : « Périsse celui auprès duquel tu trouveras tes dieux » (Ge 31 : 17-35). - Dans le récit de l'attentat de Saül contre la vie de David (1Sa 19 ), celui-ci est sauvé par sa femme, Mical qui le fait descendre par la fenêtre ; « ensuite, Mical prit le teraphim qu'elle plaça dans le lit », l'enveloppant d'une couverture, pour faire croire à la présence de David malade (1Sa 19:13-16). Le teraphim, ici, paraît avoir été une idole d'assez grandes dimensions. Dans l'histoire de Mica (Juges 17-18), teraphim désigne un objet servant au culte de Yahvé.
Ailleurs, les teraphim semblent avoir été des objets destinés à la divination. Le roi de Babylone les interroge (Eze 21 : 26-27) ; le prophète déclare que leur conseil est une parole de néant (Zac 10: 2).
On a supposé que le mot teraphim était un terme injurieux appliqué à divers objets du culte ancien à l'époque où les prophètes condamnaient sévèrement l'idolâtrie.
TESTAMENTS (Ancien et Nouveau)
TETRARQUE
Ce terme désignait, à l'origine, le gouverneur d'une des provinces d'un pays qui en comptait quatre, mais il fut employé plus tard pour des contrées partagées différemment. Quand mourut Hérode le Grand, son royaume fut partagé entre ses fils Archélaüs, Antipas et Philippe. Le premier portait le titre d'ethnarque, les deux autres celui de tétrarque. Antipas est appelé « Hérode le tétrarque » dans Mt 14: 1 ; Luc 3 : 1 ; 9 : 7 ; Ac 13 : 1. Il gouvernait la Galilée et la Pérée ; Philippe l'Iturée et la Trachonite (Luc 3: 1). On continuait cependant à appeler Hérode Antipas « roi » par flatterie. Les Evangiles lui donnent parfois ce titre (Mt 14 : 9 ; Marc 6 : 14). Les tétrarques pouvaient, d'ailleurs, conserver, par la faveur de l'empereur, quelques prérogatives royales.
TONSURE
Voir Deuil.
TRIBU
Voir Clans et Tribus
TRIBUN
Officier de l'armée romaine. Les tribuns étaient généralement au nombre de six par légion. Un tribun pouvait être à la tête d'une cohorte détachée de la légion, comme la cohorte de Jérusalem (Ac 21 : 31 ; 23 : 17 ; 24:7 ; voir : légion, cohorte et centurion).
URIM et THUMMIM ou OURIM et TOUMMIM
Voir Ephod.
VENGEANCE
Dans les nations de civilisation avancée, la loi ne laisse aucune place à l'exercice de la vengeance.
C'est à la justice, qui est entre les mains de l'État, qu'incombe le devoir de châtier les coupables. Chez les peuples plus arriérés, au contraire, le châtiment est infligé par celui qui a eu à souffrir de la part du criminel ; en cas d'homicide, le plus proche parent de la victime, ou sa famille entière, ou même son clan, suivant les cas, out le devoir sacré, en même temps que le droit, de tuer le meurtrier. Ce devoir est de ceux auxquels ni l'honneur ni la religion ne permettent de renoncer : il est voulu par la coutume, et la coutume est une loi divine.
Telles sont les moeurs qui régnaient en Israël et dont témoignent une foule de récits de l'Ancien Testament : vengeance de Gédéon (Juges 8 : 18-21), vengeance d'Absalom (2Sa 13 : 1-34), vengeance de Joab (2Sa 3 : 27), vengeances de David, exécutées par Salomon (1Ro 2 : 5-6, 8-9, 23-25, 28-35, 36-46), etc. Le parent chargé d'exercer les représailles était le « vengeur du sang » (2Sa 14, en particulier 2Sa 14:11).
Dans les temps les plus anciens, rien ne paraît avoir limité l'étendue que pouvait prendre la vengeance: Sous l'impulsion de la colère, dé la rancune ou de la haine, le vengeur pouvait frapper non seulement le meurtrier, mais un nombre indéterminé de ses proches : Lemek se vante de se venger soixante-dix-sept fois (Genèse 4 : 24) ; l'acte de vengeance peut être hors de proportion avec l'offense: le même Lemek tue un homme qui l'a blessé (Genèse 4 : 23) ; l'homicide accidentel, suscitait les mêmes représailles que le crime .prémédité : le sang répandu appelait toujours une nouvelle effusion de sang, si bien que la bête de somme, elle-même, devait être abattue si elle avait tué un homme (Ex 21 : 28).
Cependant, à mesure que se développait l'esprit de justice, les lois, qui codifiaient la coutume, entreprenaient aussi de la modifier. Le plus ancien des codes israélites (celui qu'on appelle « le Livre de l'Alliance », Ex 21-23), spécifie qu'un homicide entraînera la mort du meurtrier seul (Ex 21 : 12), ; il veille, en même temps, à ce que le châtiment soit proportionné au crime : on ne se vengera pas d'une blessure en tuant le coupable, « vie pour vie, oeil pour oeil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, meurtrissure pour meurtrissure » (Ex 21: 23-25), c'est ce qu'un appelle aujourd'hui, d'après les termes du droit romain, la loi du Talion. Le Livre de l'Alliance protège contre le vengeur du sang tout homme qui aura tué involontairement et lui ménage un lieu d'asile où il pourra se réfugier (Ex 21 : 13-14 ; voir le mot asile) ; enfin, il prévoit des cas où, une amende, payée devant les Juges pourra servir de compensation à certains «délits (Ex 21 : 22,30.).
Mais la justice ne parvint jamais, en Israël, à se substituer entièrement à la coutume de la vengeance en assumant à elle seule le châtiment des coupables : les lois les plus récentes, celles qui datent d'après l'exil (et qu'on appelle « le Code Sacerdotal »), continuent à légitimer le rôle du vengeur du sang. Après avoir énuméré les cas où l'homicide doit être tenu pour un meurtre, ce code déclare, après chaque cas envisagé : « Le meurtrier sera puni de mort. » Mais on se tromperait en imaginant que la justice va étendre sa main sur le criminel et exécuter la sentence ; le texte continue, en effet, par ces mots : « Le vengeur du sang fera mourir le meurtrier ; quand il le rencontrera, il le tuera » (Nombres 35 : 16-21).
Plus tard encore, lorsque la justice sera rendue par les Sanhédrins (voyez ce mot) et que la peine de mort sera le plus souvent la lapidation, la sentence du tribunal continuera à être exécutée par l'accusateur : c'est lui qui devra jeter la première pierre sur la tête du condamné afin de le tuer le plus rapidement possible (Talmud de Babylone ; voyez aussi Deutéronome 13 : 9-10 ; 17 : 7 ; Jean 8 : 7 ; Ac 7 : 58).
II ne faut pas s'étonner qu'au sein d'un peuple qui ne réussit jamais à séparer complètement le sentiment de la justice du sentiment de la vengeance, ce dernier ait toujours été, comme le premier, étroitement associé à la religion. Si quelques esprits, après l'Exil, ont su s'élever au-dessus de cette conception primitive comme le prouve, par exemple, cette prescription du Lévitique : « Tu ne te vengeras point..., tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Le 19:18), on voit partout, dans les écrits des prophètes comme dans ceux des psalmistes, qu'on fait appel indifféremment à la justice ou à la vengeance de Yahvé (Esa 34 : 8 ; 61 : 2 ; Jer 50 :15; 51 : 6 ; Eze 25 : 14 ; Psaumes 58 11 ; 79 : 10 ; etc.). La religion justifiait donc, chez le pieux Israélite, le désir des justes représailles et pouvait inspirer les sauvages accents du Psaume 137 : « Fille de Babylone, la dévastée, heureux qui te rendra la pareille..., heureux qui saisira tes enfants et les écrasera sur le roc ! »
Il faudra attendre l'Evangile pour que la justice et l'amour condamnent à tout jamais le sentiment de la vengeance et proclament la bienveillance même pour les ennemis (Mt 5 : 21-26, 38-48). Et cette condamnation sera complète et définitive, en dépit du fait que de séculaires habitudes de langage ramènent parfois sur les lèvres des mots qui ne s'accordent plus avec le Message que l'on prêche (Luc 21 : 22 ; 18 : 7 ; 1Th 4:6).
ZÉLOTE ou ZÉLATEUR
Ce terme (en grec : zèlôtès) peut avoir simplement le sens de zélé comme dans Ac 21 : 20 ou Galates 1 : 14 ; mais il apparaît deux fois dans le Nouveau Testament comme la désignation d'un parti politique. Zélote (ou zélateur) est le surnom attribué à Simon, l'un des Douze, pour le distinguer de Simon Pierre, dans Luc 6 : 15 et dans Ac 1 : 13. Dans Mt 10 : 4 et Marc 3 : 18, le même Simon est surnommé le Cananite ou Cananéen (en grec : kananaios ; voyez Cananite), terme qui a la même signification que zélote, mais qui est une transcription d'un mot araméen (la langue sémitique parlée en Palestine au temps de Jésus ; voir Araméen). - Les zélotes ou cananites étaient les plus farouches ennemis de Rome au sein du peuple juif, toujours prêts, pour tenter de rendre l'indépendance à leur patrie, à fomenter l'agitation populaire et à se jeter dans les révoltes les plus téméraires. Leur entreprise la plus audacieuse fut celle de l'an 66. Les procurateurs Albinus et Gessius Florus avaient eu une politique si odieuse à l'égard des Juifs que la révolte populaire, longtemps imminente, éclata enfin, galvanisée par la haine indomptable des zélotes. Ce fut une véritable guerre, qui dura de 66 à 70, fut caractérisée par d'effroyables répressions de la part des Romains et se termina par la prise et le sac de Jérusalem.
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