VERMILLON

 

Ce terme vient du latin vermiculus, un vermisseau, parce que le cramoisi et l'écarlate se teignent avec de petits vermisseaux que l'on ramasse sur une espèce de chêne vert qui porte le kermès ou la graine d'écarlate. Voyez ci-devant l'article VER. Mais le vrai vermillon est tout autre chose, et il n'a aucun rapport avec le vermiculus que par la couleur. Le vermillon connu des anciens se trouvait en Espagne sur des rochers inaccessibles. C'étaient des pierres, qu'on abattait avec des flèches. Il s'en trouvait aussi dans la Colchide : l'artificiel se faisait d'un sable rouge qui se voyait auprès. d'Ephèse, après qu'on l'avait lavé plusieurs fois. Le vermillon dont on se sert présentement se fait avec le cinabre artificiel, qui a été broyé longtemps sur le porphyre et réduit en une poudre très-fine.

 

Le livre de la Sagesse (Sap 13 :14) parlait du vermillon dont on frottait anciennement les statues des dieux. Le statuaire ayant formé une statue d'un bois tortu, et plein de nœuds, le frotte avec du vermillon, le peint de rouge, lui donne une couleur, empruntée, et cache sous ce fard toutes les difformités de son bois. Les anciens faisaient grand cas du vermillon, et n'en usaient qu'avec

 beaucoup d'économie, à cause de son grand prix, et de sa rareté. Du temps de Vitruve il était déjà plus commun, et l'on voyait des murailles entières qui en étaient peintes. Verrius, cité dans Pline, assure qu'aux jours des grandes fêtes c'était une cérémonie et une espèce de somptuosité de frotter de vermillon la face de Jupiter. J'ai vu une tête de Diane, où le vermillon était encore fort sensible lorsqu'on la frottait avec un peu d'eau. Les censeurs du temps de Pline donnaient au rabais le soin de peindre avec du vermillon la statue de Jupiter. Camillus triompha fardé avec du vermillon. Tel était le goût et la délicatesse des anciens Romains. Parmi les Ethiopiens on donnait cette teinture aux statues des dieux, et les grands seigneurs s'en frottent tout le corps